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Les réfugiés politiques et les demandeurs d'asile à Dijon

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par Nassiri ATTAR, Thomas ROBERT et Rémi SANTIARD
Faculté de Médecine, université de Bourgogne - D.U Action Humanitaire 2008
  

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TROISIEME PARTIE

Etre réfugié politique

Pour beaucoup de demandeurs d'asile, la France reste un objectif à atteindre, une sorte de havre de paix. Pour d'autres, c'est l'Angleterre et une naturalisation directe pour quiconque foule le sol britannique. Cette population ne demande qu'une seule chose : vivre mieux et pouvoir trouver une place au sein de la société française. Alors se met en place la machine administrative, un quadrillage systématique, une sorte de filtre ne laissant que les « méritants » (de ce fait, c'est déjà une sorte « d'immigration choisie »). C'est en fait la distinction entre les immigrés (ceux qui partent de leur pays pour trouver une meilleure condition de travail), et les réfugiés politiques.

« Le terme réfugié s'appliquera à toute personne :

[...]

qui, par suite d'événements survenus avant le 1er janvier 1951 et craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut, ou du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n'a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut, ou en raison de ladite crainte, ne veut y retourner. »

(Convention de Genève du 28 juillet 1951, Chapitre 1er, Article 1er, paragraphe A)

L'Office Français de Protection des Réfugiés et des Apatrides (OFPRA) qualifie le réfugié, dans son Code d'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile (CESEDA), en ces termes :

« La qualité de réfugié est reconnue à toute personne persécutée en raison de son action en faveur de la liberté ainsi qu'à toute personne sur laquelle le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés exerce son mandat aux termes des articles 6 et 7 de son statut tel qu'adopté par l'Assemblée générale des Nations Unies le 14 décembre 1950 ou qui répond aux définitions de l'article 1er de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés. Ces personnes sont régies par les dispositions applicables aux réfugiés en vertu de la Convention susmentionnée. »

(CESEDA., Livre VII, Chapitre 1er, Article L. 711-1, code relatif à l'Asile)

Toujours selon l'OFPRA, le statut de réfugié politique se distingue de l'Asile territorial, et du statut de l'Apatride, les deux autres formes de demandes d'entrée, de séjour et de droits d'asile. L'Asile territorial est délivré par le Ministère de l'Intérieur, en consultation du Ministère des Affaires Etrangères ; il est alors délivrée une carte de séjour d'une année, pour le demandeur et son conjoint, si « sa vie ou sa liberté est menacée dans son pays ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention Européenne de sauvegarde des droits de l'homme ». La notion d'apatride, quant à elle, s'applique aux personnes ne possédant plus de

nationalité, sans aucunes autres considérations ; ce statut passe par l'OFPRA pour être examiné et entériné.

Lorsque le statut du demandeur est reconnu (celui du statut de réfugié), il obtient de ce fait une carte de résident de 10 ans, l'autorisant à séjourner dans son pays d'accueil ; son conjoint ainsi que ses enfants mineurs bénéficient des mêmes conditions. Un titre de voyage est aussi délivré. Par son principe de protection, l'OFPRA a le devoir de fournir tout document officiel indispensable à la vie quotidienne (article 9 du décret n°2004-814 du 14 août 2004).

La carte de résident en poche, le possesseur rentre alors dans le droit commun, c'est-à-dire qu'il aura les mêmes droits et les mêmes devoirs qu'un citoyen français. Une proposition de loi en 2000, visait à accorder le droit de vote et d'éligibilité aux étrangers non ressortissants de l'Union Européenne aux élections municipales. Mais pour l'instant ce projet n'a toujours pas été entériné par une décision de l'Assemblée Nationale. Ces droits s'apparentent à l'accès à la formation professionnelle, au travail, au logement, aux droits sociaux, aux soins médicaux, à la sécurité sociale (CMU) ou à tous autres droits correspondant au traitement le plus favorable accordé dans les mêmes circonstances aux ressortissants d'un pays étranger en situation régulière ou aux nationaux. Cette carte de séjour permet aussi la libre circulation dans n'importe quel pays européen ou non européen.

« Tout étranger résidant en France, quelle que soit la nature de son titre de séjour a le droit de quitter librement le territoire français ».

Article L 321-1 du CESEDA

L'accès au même droit qu'un citoyen implique aussi le même respect envers les lois du pays, et les devoirs qui en découlent. En plus de cela, le réfugié ne doit pas rester en contact, ou être en contact avec les autorités de son pays d'origine car il a été reconnu officiellement que ce pays est une menace à sa personne, et de ce fait pourrait contredire et rendre caduque toutes les démarches entreprises lors de la demande d'asile. Toute démarche considérée par l'OFPRA comme acte d'allégeance aux autorités du pays d'origine peut entraîner le retrait du statut. Cependant, en cas d'un voyage exploratoire ou d'un désir de se réinstaller dans son pays d'origine, les autorités françaises peuvent laisser la possibilité au réfugié de se déplacer dans ce pays, soit sous couvert d'une durée limitée avec un visa de retour, soit si la situation géopolitique est stabilisée et permet une réinstallation définitive ; ce fut le cas pour certains réfugiés kosovars en 2000.

« ... avoir le statut c'est vraiment le début d'une nouvelle vie mais alors il faut tout reconstruire ... tout recommencer... »

Commentaire de Haïat AIT MOUHOU, Assistante Sociale du Centre d'Hébergement Provisoire de la Croix-Rouge à Quetigny

Et après ?

Après une arrivée en France, souvent très éprouvante psychologiquement et physiquement, due aux conditions difficiles d'un voyage, et due aussi à la cause même de la fuite, après des jours passés dans la rue, dans les squats, dans les foyers ou les centres de nuit, après une attente de 2 ou 3 ans d'un examen puis d'un réexamen de leurs dossiers, et enfin un titre de séjour délivré, quel peut-être l'avenir du réfugié ?

L'ensemble des bénéficiaires d'un titre de séjour de plus d'un an (pour l'année 2006), représente 120 000 personnes. Il se compose de conjoints de français, de regroupement familial (liens personnels et familiaux), de résidents de plus de 10 ans et de réfugiés. Ceux-ci représentent 8%, soit 9600 individus. Les conditions d'arrivée sont différentes selon la nature du titre, les personnes réfugiées sont le plus souvent jeunes (29% ont entre 18 et 24 ans, 64% ont moins de 34 ans), et sont rarement en couple (19% sont seules, 26% vivent avec d'autres personnes). Leur réseau relationnel est très faible, la maîtrise de la langue est souvent partielle (42% parle peu le français). De plus, l'accès à l'emploi est fortement lié aux relations, à la pratique de la langue et à l'expérience professionnelle. Parmi les réfugiés français, 47% des hommes et 12% des femmes travaillent (Chiffres basés sur les personnes ayant un 1er titre de séjour permanent en 2006, DREES).

1) EXISTER ou la condition du réfugié

« exister : è-gzi-sté ; du latin existere : sortir de, du préfixe ex :hors de, et de sistere :être établi, posé ; avoir la vie, vivre, en parlant d'être vivant ; être en réalité, représenté dans le temps et l'espace ; avoir une réalité ; exister auprès de quelqu'un de quelque chose, avoir de l'importance, de la valeur ; exister, s'affirmer, se faire reconnaître comme personne aux yeux de la société. »

Grand Larousse Universel, Tome 6, Edition Larousse 1997, page 4058

« Croyez-moi... quand les gens sont dans l'action et qu'il leurs faut un logement, un travail, qu'il faut subvenir à ses besoins, qu'il faut avoir un statut, qu'il faut exister... c'est énormément de pression.... »

Commentaire de Haïat AIT MOUHOU, Assistante Sociale du Centre d'Hébergement Provisoire de la Croix-Rouge à Quetigny

Lorsqu'elle parle des structures administratives et des papiers à remplir qui n'en finissent pas, Hélène évoque l'idée d'une prison dans la mesure ou elle doit, en tant que demandeur d'asile rendre des comptes à l'Etat sur ses actes, faits et gestes. La comparaison n'est pas anodine, bien au contraire. Exister dans un système culturellement différent, sans cesse avec l'obligation de se justifier, de prouver que l'on ne dit que l'entière vérité lorsqu'on raconte ce que l'on a vécu est difficile. Pour Hélène, le fait d'avoir obtenu son statut de refugié lui a facilité la vie. Lorsqu'elle put bénéficier d'un logement à Quetigny, un F3, par le biais du C.P.H., qui la suivait lors de l'acquisition de son statut, cette sensation de prison s'est effacée peu à peu. Elle y habite maintenant depuis 5 années. Agée de 70 ans, elle vit avec une petite retraite de 600 euros, cultive un jardin loué à la mairie. Toujours habillée en noir, sans bagues, anxieuse, diabétique, ayant beaucoup de mal à parler en français, malgré les cours suivie. Elle nous confie qu'elle vit mieux. Sa vie s'est stabilisée. Avant sa naturalisation, effectuée en avril 2008, lors de son entretien, elle avouait que sa condition de vie en tant que réfugié politique, s'améliorait avec le temps surtout avec un logement décent. Maintenant Hélène semble plus posée et reposée. Elle parle de calme en parlant de sa situation actuelle.

Comme tout français ou ressortissant européen, le réfugié peut ainsi bénéficier d'aides financières (APL), ou obtenir un logement social. C'est une véritable étape dans l'intégration. Sortir du Centre Provisoire d'Hébergement, ou d'un foyer, avoir une vraie adresse, ne pas dépendre d'un organisme, c'est exister par rapport aux autres, c'est exister socialement, et comme elle l'exprime « trouver le calme » ; c'est une progression sociale. C'est aussi avoir une vision d'avenir positive, se sentir plus libre psychologiquement. C'est la représentation sociale de son existence. Il y a là, la notion d'établissement dans la durée, la possibilité d'un projet de vie social et familial.

La vie active est le deuxième lien solide avec la société. Logement et travail sont l'un des fondements principaux de la construction d'une citoyenneté à part entière. Sous l'officialisation du statut de réfugié, concrétisée par la carte de séjour, l'individu bénéficiaire a le droit de travailler et, par conséquent d'entrer dans les dispositifs d'insertion par le travail (ANPE, AFPA), d'obtenir le revenu minimum (RMI) ou de bénéficier d'autres aides financières via des organismes concernés comme la CAF. Omar, réfugié politique d'origine soudanaise, possédait une solide expérience de soudure, en Libye et au Soudan. L'accès à une formation de complément

lui a été possible dans le cadre d'une évaluation et d'un bilan de compétence proposé par l'ANPE. Ainsi, de 2005 à 2007, en Côte d'Or, il put travailler dans le secteur du BTP. En ce qui concerne l'apprentissage de la langue, il passa par l'association CESAM, organisme dijonnais lié au Centre Académique pour la Scolarisation des Nouveaux Arrivants et des Enfants du Voyage (CASNAV)1, directement dépendant du Ministère de l'Education Nationale, favorisant l'éducation des mineurs venus de l'immigration. Pendant la période de la demande d'asile, l'interdiction de travailler est de rigueur.

« on n'a pas le choix... ici, sans travail... cela devient très dur... »

Paroles de Dico

D'origine arménienne, Dico l'un des premiers arméniens arrivés au C.P.H. de Quetigny, fut contraint de s'adapter aux exigences de son pays d'accueil avec toutes ses spécificités. Femme et enfant, dès son statut officialisé, Dico savait qu'il devrait tout mettre en oeuvre pour vivre dans les meilleures conditions possibles. Motivé par sa stabilité familiale (Sa femme est intégrée et sa fille inscrite à l'école) et son jeune âge (30 ans), il a pu bénéficier d'un suivi efficace. Son assistante sociale du C.P.H., a mis en place une réactualisation de ses compétences, elle lui a fait repenser la façon de rechercher un travail, et surtout comment démontrer ses capacités face à un éventuel employeur. Des contacts ont été pris avec l'A.N.P.E., pour l'élaboration de son dossier. Dico a donc envoyé des centaines de C.V., et a persévéré pendant la durée de sa recherche. Après un 1er contrat de 3 mois en C.D.D. dans le BTP, il trouve un C.D.I. (assez rare pour un statut réfugié), dans une chocolaterie locale. La situation peut être difficile lors de l'entretien lorsque le réfugié doit mentionner son statut ou lorsqu'il doit expliquer pourquoi il a passé des années sans travailler. Il se retrouve aux yeux des employeurs dans la même situation qu'un chômeur ou qu'un bénéficiaire du RMI qui n'a pas fait ses preuves dans la vie active. Il faut noter qu'il n'existe pas de type de contrat spécifique pour les réfugiés politiques : ils sont des demandeurs d'emploi comme les autres et rentrent dans le cadre général du régime commun. Dico s'est adapté à la vie française, établissant un réseau de contact et d'amitié (collègues français, algériens, réfugiés arméniens), il possède une voiture et un logement décent. Cependant, cela n'a pas été facile au départ, car il a été fragilisé par la rupture avec sa culture d'origine.

« Paradoxalement le statut ... c'est une délivrance mais c'est aussi une pression... par où je commence le travail... la maison... »

Paroles de Dico

1 Anciennement CEFISEM, crée en 1975, devenu CASNAV en 2002.

Si le fait pour les demandeurs d'asile d'obtenir leur statut les délivre d'un poids considérable, il n'empêche que de nombreuses responsabilités leur tombent dessus au même moment : l'avenir est alors à construire car il devient possible. Force est de constater que le réfugié ne s'est pas du tout préparé au but de son voyage ; ses actions ne sont établies que pour des finalités à court terme. Il ne pense pas généralement à la durabilité de sa vie dans son pays d'accueil. Il peut donc y'avoir un choc psychologique qui fait suite à la joie d'avoir le statut de refugié. Heureusement, les refugiés trouvent à leur disposition de nombreux organismes qui peuvent les orienter et les appuyer pour qu'ils puissent s'insérer au mieux dans la société française.

Dans le cadre officiel, et selon la Convention de Genève, les réfugiés politiques ont les mêmes droits que les nationaux. Ainsi l'accès au travail, aux soins, aux aides sociales, sont inscrits dans le Contrat d'Accueil et d'Intégration (CAI voire en annexe). C'est un dispositif national d'insertion par l'apprentissage de la langue, des droits et des devoirs dirigé par un organisme, l'Agence Nationale d'Accueil des Etrangers et des Migrations (ANAEM), créé lors de la loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005. Ce contrat en place s'est étendu à l'ensemble des départements français à partir de 2006. Au 31 décembre 2006, il représente 207 805 contrats. Ce contrat stipule deux engagements, celui de l'Etat qui met en oeuvre une visite médicale, un bilan linguistique, une formation linguistique, civique et sociale, et celui du signataire, respectant ce contrat par sa présence et son assiduité.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery