Chapitre II :
Impact des Innovations
Financières sur Les Canaux de Transmission de la Politique
Monétaire en Tunisie
Introduction
Plusieurs auteurs sont d'accord sur le fait que les
mécanismes de transmission de la politique monétaire changent en
fonction de la structure financière d'un pays. La Tunisie qui a
désamorcé un processus de déréglementation de son
processus financier modifiant d'emblée la structure financière de
l'économie, offre un cadre d'analyse intéressant. En effet, il
serait important de savoir si cette transformation a changé les
mécanismes de transmission de la politique monétaire en
Tunisie.
La politique économique Tunisienne se basait sur
le rôle dominateur de l'Etat qui intervient directement dans tous les
domaines et sur tous les marchés.
Ainsi, l'environnement monétaire était
largement contrôlé par la Banque Centrale de la Tunisie qui
adoptait une politique monétaire interventionniste axée sur
l'administration des taux d'intérêt, l'encadrement des
crédits et la fixation du taux de change. La conséquence se
manifestait à travers une répression financière
entraînant l'aggravation des déséquilibres financiers, la
montée vertigineuse de l'inflation et la détérioration de
l'équilibre extérieur.
La Tunisie ne pourrait ainsi répondre aux
impératifs de son financement dans un contexte où l'endettement
extérieur commence à devenir une source de préoccupation
ni affronter les échanges mondiaux qui l'attende, à savoir les
épreuves de la mondialisation et l'entrée récemment dans
une zone de libre change avec l'union européenne.
Il fallait alors opérer une refont du paysage
financier tunisien et procéder à la mise en place d'un
système financier impliquant une dynamisation du marché financier
et une modification dans la conduite de la politique monétaire.
La banque centrale se trouve contrainte de définir
clairement les objectifs et d'utiliser optimalement les canaux de transmission
de la politique monétaire qui se déforment au fur et à
mesure que l'innovation financière se développe.
L'ancien et ce nouvel environnement et son impact sur les
mécanismes de transmission de la politique monétaire sera
analysé le long de ce chapitre une première section traitera
l'évolution du système financier tunisien et une seconde section
sera consacrée à la l'étude de l'impact des mutations
financières sur les mécanismes de transmission de la politique
monétaire.
Evolution du système financier
Tunisien
Jusqu'à 1987, le système monétaire
et financier a été marqué par un certain nombre de
caractéristiques qui constituent des contraintes de son
ralentissement.
Le système financier Tunisien avant
1989
La physionomie bancaire
Les caractéristiques structurelles
Jusqu'à 1989, le système bancaire national
se trouve confronté à trois rigidités - - La
première est liée au cloisonnement entre les différentes
catégories qui résulte entre la pluralité de l'argument.
La législation bancaire tunisienne consacre l'existence de cinq
catégories de banques : les banques de dépôts, les
banques d'investissement, les banques de développement mixtes, les
banques non-résidents et les banques d'affaires. Leur cloisonnement se
manifeste au niveau de la mobilisation des ressources ; certaines banques
de dépôts ont le monopole dans la collecte de certaines ressources
spéciales (cas de la banque d'habitat). Ce cloisonnement est aussi
patent au niveau du financement du fait que les banques de développement
sont spécialisées dans les crédits à long terme, et
les banques off-shore dans le financement des entreprises non
résidentes.
- La deuxième tient compte au dualisme juridique qui
gouverne les banques publiques. Ces dernières sont régies par la
loi de la profession bancaire n° 86-42 du 1er décembre
1986, paradoxalement elles sont soumises au régime juridique applicable
l'ensemble des entreprises publiques. Un tel dualisme peut instituer une
contrainte et une entrave quant à la quant à la
flexibilité de la gestion pour réaliser une allocation optimale
des ressources de financement.
- La troisième rigidité concerne les banques de
développement mixtes pour lesquelles toute politique de
développement exige l'agrément des partenaires étrangers,
ce qui peut retarder leur intégration dans une dynamique
d'assainissement et d'innovation
Les caractéristiques fonctionnelles
Les caractéristiques fonctionnelles fondamentales
s'articulent sur deux catégories de contraintes.
- La forte spécialisation des banques. Les banques
(I'investissement ne peuvent recevoir, selon la loi bancaire, que des
dépôts à plus d'un an ou les dépôts vue
provenant de leur personnel propre ou des entreprises dont elles
détiennent la majorité du capital. La structure des ressources
d'emprunt de ces banques est constituée majoritairement par les emprunts
extérieurs, d'où les coûts élevés des
crédits.
Quant aux banques de développement, elles ne
peuvent collecter de dépôts des résidents quelles
qu'en soient la durée et la forme. Il en
résulté une perte des ressources extérieures dans la
structure des ressources d'emprunt et donc un coût élevé de
crédits accordés aux entreprises.
- La part des commissions dans le produit net bancaire est
encore faible du fait du caractère limité de la relation banque-
entreprise à une relation entre prêteur et emprunteur alors que
les opérations financières en terme de conseil en
ingénierie financière, de montages financiers et de garantie de
certaines opérations sont très peu développées.
Le marché monétaire
Le marché monétaire rassemblait d'avantage
à un guichet de la Banque Centrale. Il y avait un marché
monétaire interbancaire.
Toutes les institutions financières non bancaires
et le trésor en étaient exclus. Ce marché est guidé
principalement par la Banque Centrale par certain outils, tels que le taux
d'intérêt, les réserves obligatoires et le
réescompte.
Le fonctionnement de ce marché s'inscrivait dans
une gestion dirigiste centralisée et administrative répondant aux
objectives de la politique monétaire et économique où la
motivation commerciale a été interdite de séjour (E.
Saidenne, 1988).
Les banques n'étaient guère motivées
pour évaluer leurs décisions de crédit en dehors des
critères fixés par la Banque Centrale en matière de
refinancement. Les banques se trouvaient ainsi totalement couvertes.
L'initiative privée et la concurrence sont donc
défavorisées.
Le marché financier
Les principales caractéristiques du marché
financier sont traduites par leur rôle marginale dans le financement de
l'économie dominée par l'intermédiation bancaire et
ça en raison de :
- L'Etroitesse du marché : un nombre très
limité de produits qui s'échangerait sur un marché qui
n'était ouvert que deux jours par semaine et n'était
fréquenté que par les titres détenus par l'Etat (80%
environ de l'ensemble des titres) (rapport du fonds monétaire arabe sur
le marché financier, février 1984). Cette étroitesse peut
s'apprécier à travers, la faiblesse de la capitalisation de la
bourse des valeurs mobiliers de Tunis (BVMT) (volume des transactions boursiers
et rotation des titres demeurent faibles).
- L'encouragement de l'épargne bancaire qui a
été bien rémunérée et faiblement
imposée alors que les prises de participation en capital étaient
désavantagées du point de vue fiscal. De ce fait, on assiste
à une bancarisation de l'épargne en Tunisie renforcée
par l'insuffisance de protection de l'épargnant en valeurs
mobilières contre le risque amplifié par le manque d'information
relative aux sociétés cotées en bourse.
- Une inadéquation du cadre institutionnel. La loi de
1969 régissant la création et le fonctionnement de la bourse en
Tunisie, a révélé un certain nombre de lacunes. Il s'agit
de l'absence de sanctions légales prévues pour les contrevenants
et de la structure ambiguë de la bourse. Une étude
réalisée en 1980, a démontré que très peu de
personnes sauraient exactement dire ce qui s'y fait au juste et à quoi
sert cette institution.
De ce fait, l'économie tunisienne reflète
les caractéristiques d'une économie d'endettement. La
répression financière a conduit à travers l'administration
des taux d'intérêt, l'encouragement de l'endettement auprès
du système bancaire à un système financier
réglementé et cloisonné.
De telles caractéristiques ont résulté
une absence de concurrence entre les différentes institutions
financières et donc une entrave à la motivation des innovations
financières.
L'économie tunisienne ne pourrait continuer
à fonctionner durablement avec de tels dysfonctionnements sans se
confronter à des crises qui se sont produites durant les années
1985 et 1986 induisant le plan d'ajustement structurel.
Les réformes financières après
1989
Politique de crédit et taux
d'intérêt
Dans le cadre de la réforme globale de la
politique monétaire et du crédit, la banque centrale a
modifié les modalités d'octroi, de contrôle et de
refinancement des crédits à partir de décembre 1987
(Circulaire aux banques N° 87-47 DU 23/12/1987).
La libération progressive des taux
d'intérêt débiteurs donne aux banques plus de
liberté dans la décision d'octroi de crédits. En effet,
tout en respectant des cotes théoriques, les banques fixent librement
leurs marges26 à l'exception des secteurs prioritaires dont le taux est
resté fixé par la banque centrale jusqu'à novembre
1996.
Les taux d'intérêt sur les dépôts
ont été libérés sauf ceux des comptes en dinars
convertibles (taux moyen du marché monétaire moins deux
points).
Le réescompte, en tant que technique de
refinancement, a été supprimé en novembre 1996, avec
l'élimination de la bonification du taux d'intérêt
réservé, jusque-là aux activités prioritaires.
Le taux mensuel moyen du marché monétaire
(TMM) a remplacé le taux d'intérêt du réescompte
comme taux directeur.
Les échanges de liquidités entre banques se font
exclusivement sur le marché monétaire où le taux,
théoriquement variable, est maintenu stable par la banque centrale,
grâce à ses interventions sur ce marché.
Réformes du secteur bancaire
Le secteur bancaire tunisien a fait l'objet d'une
succession de réformes notamment durant les années 90.
La réforme de 1992
Les autorités monétaires ont
procédé au renforcement du contrôle prudentielle, à
la révision des régimes relatifs aux activités
prioritaires et aux crédits préférentiels, à
l'harmonisation de l'imposition des placements financiers et à
l'aménagement du régime fiscal des provisions
constituées par les banques. Les principales mesures prises à cet
effet sont :
- la baisse du taux des prises en pension par la banque
centrale indexé sur le taux d'appel d'offre majoré d'un point et
demi de pourcentage d'un demi point en novembre 1992,
- la déduction totale de l'assiette imposable des
banques des intérêts et commissions dont le recouvrement est non
garantie,
- la limitation à 3 fois des fonds propres nets des
risques encourus par la banque sur ses dirigeants, ses administrateurs et ses
actionnaires qui participent à hauteur de 10%,
- la distinction d'une nouvelle catégorie de banque,
la banque d'affaires, qui sont destinée à assurer des services de
conseil et d'assistance aux entreprises,
- la confirmation du rôle de la BCT dans la supervision
des banques et l'institution de nouvelles relations entre la BCT et les
commissaires aux comptes des banques.
La réforme de 1994
Elle s'intègre dans le cadre d'adaptation aux
nouvelles exigences de l'économie en introduisant plus de concurrence et
en réduisant la marge d'intermédiation, et ce, à travers
le développement d'une politique de décloisonnement entre les
diverses institutions bancaires. Le principal apport de cette réforme
est l'institution de la loi n°94 -25 du 7 février 1994.
Cette loi autorise les banques de dépôts
à accorder certains crédits à moyen et longs termes. Quant
aux banques de développement, elle leur donne le droit d'octroyer des
crédits à court terme aux entreprises au capital desquelles elles
participent.
Les allocations de crédit sont régies par le
principe d'octroi selon la périodicité de remboursement des
emprunteurs et le degré des risques encourus. En limitant le
surendettement non productif, une telle pratique se veut une responsabilisation
des entreprises emprunteuses et une incitation à investir dans des
activités plus productives.
La loi de finance 1999
Cette loi a marqué une étape
déterminante dans le processus de réforme et de dynamisation de
l'activité bancaire en Tunisie. L'ensemble des dispositions
initiées s'emploie à soutenir une dynamique au sein de la
profession, Les autorités monétaires cherchent à
développer les activités de conseil et d'assistance dans la
gestion des patrimoines, l'ingénierie financière et la
création, et à favoriser, par voie de conséquence, la
diversification des services offerts. Il s'agit fondamentalement de:
- La déduction par les banques des créances
abandonnées au profit des entreprises en difficultés.
- La suppression des créances
irrécouvrables.
- Le relèvement de déductibilité des
provisions.
- L'exonération des dépôts et des titres
en devises et en dinars convertibles de l'impôt sur les
sociétés.
La loi de 2001
Dans une perspective d'ouverture du système
bancaire aux capitaux étrangers une nouvelle loi a été
introduite pour définir la notion d'établissements de
crédits.
Cette loi réforme totalement le système
bancaire tunisien en introduisant la notion de banque universelle. Les banques
de développement n'existent plus en Tunisie à la suite
d'opérations de fusion absorption et de transformation.
La réorganisation du marché
monétaire
La réforme de ce marché en vigueur depuis
19-1-1988, s'articule sur trois circulaires. La première est relative
à sa nouvelle organisation n°87-49, la seconde a trait à la
division des risques, à leur couverture et au suivi des engagements. La
troisième n°87-47 quant à elle porte sur les
modalités de contrôle et de refinancement des crédits. La
réorganisation a trait aux mécanismes et formes d'intervention
de la Banque Centrale sur le marché monétaire, elle
s'opère à travers :
- L'appel d'offre. Cette procédure vise à
combler la différence entre l'offre et la demande de liquidité
des banques dans un contexte d'abandon des facilités de
réescompte. Il s'agit ici, de satisfaire d'abord les demandes offrant
les taux les plus élevés.
- Les prises en pension. Elles sont accordées par la 1a
BCT pour une durée de 7 jours aux banques qui n'arrivent pas à
satisfaire leurs besoins en liquidité dans le cadre de la
procédure d'appel d'offre. Par son caractère pénalisant
(taux des prises en pension se trouve supérieur à celui des
appels d'offre), cette procédure d'intervention incite les banques
à mieux gérer leur liquidité.
- Les opérations ponctuelles. La forte
variabilité des taux pousse la BCT à intervenir en injectant ou
en épongeant des liquidités afin de maîtriser le taux du
marché interbancaire.
- L'ouverture du marché monétaire pour de
nouveaux intervenants. Une telle disposition a pour objectif d'étendre
ce marché aux Sociétés d'assurance, aux caisses de
sécurité sociale et aux grandes entreprises. Elles peuvent ainsi
procéder à des arbitrages entre les différentes formes
d'actifs à court terme en fonction de l'évolution des taux de ce
marché. Ce faisant, cette procédure permettra au taux
d'intérêt d'assurer son rôle.
La disposition de septembre 1989 est venue
renforcer l'ensemble de ces dispositions. L'Etat est tenu, en vertu de cette
mesure, de recourir au marché monétaire pour financer son
déficit budgétaire aux mêmes conditions que les autres
agents économiques, afin de dynamiser le marché et limiter le
recours excessif de l'Etat aux bons d'équipements qui a pesé sur
la liquidité des banques.
Cette réorganisation introduit aussi de nouveaux
titres de créance négociables sur le marché
monétaire (certificats de dépôts, billets de
trésoreries, bons de trésor).
La politique monétaire a été
renforcée par une nouvelle organisation du marché
monétaire en 2005 qui permet à la banque centrale d'utiliser plus
efficacement la technique de l'open market en ayant à sa disposition une
panoplie de titres publics et de titres sur les entreprises et les
particuliers. Aussi, à travers la réforme du système
financier, il y a un changement dans la politique monétaire dans le but
d'une régulation par les jeux des forces du marché.
La régulation monétaire est donc assurée
au moyen d'une action par les taux d'intérêt à la place des
mécanismes administratifs de plafonnement de crédit et de
contrôle quantitatif.
La restructuration du marché
financier
Plusieurs réformes ont été
introduites dans le but de réactiver le marché financier. Elles
visent le renforcement des fonds propres et de la structure financière
des entreprises en les orientant vers le financement direct, la stimulation de
la concurrence au sein du système financier et la diversification de
l'offre d'instruments financiers.
Les premières réformes datent de
l'année 1989 et concernent principalement l'organisation de
l'émission des emprunts obligataires et la promulgation d'un cadre
juridique pour les sociétés d'investissement à
capacité fixe et variable (SICAF et SICAV) loi n° 88-92 du 2-8-1988
(JORT du 2-8-1988). Suite à ces réformes, une vingtaine
d'entreprises ont été introduites à la côte
permanente en 1994.
La volonté de dynamisation du marché
financier et d'incitation à l'innovation en terme de mode de financement
s'est traduite sur le plan juridique par la mise en place d'un nouveau cadre
institutionnel technique et fiscale. Le conseil du marché financier
(CMF), la création de la société tunisienne
interprofessionnelle de compensation dépôt de valeurs
mobilières (SITCODEVAM) afin de dynamiser le marché financier et
de mieux orienter l'épargne vers la souscription en bourse et la
transformation importante des méthodes de négociation
favorisé par le développement de la cotation assisté en
continu (CAC).
Le renforcement des fonds propres des entreprises, exige au
préalable que la bourse soit transparente, sécurisée mais
aussi liquide et rentable. A cette fin, les pouvoirs publics se doivent
d'instaurer des incitations fiscales. C'est dans ces conditions, qu'une
série de réformes fut entreprise depuis 1987, portant sur des
encouragements fiscaux aux sociétés qui ouvriraient leur capital
au public. Ceci dans le but d'encourager un actionnariat populaire qui
prendrait le relais de l'Etat dans le capital des entreprises à
privatiser.
Les normes prudentielles
La BCT a réglementé les engagements des
banques en raison des risques subis par leur activité de crédit.
Ceci est dû à certaines défaillances bancaires liées
à une mauvaise division des risques et aussi dans le cadre de la
nouvelle politique de crédit, basée sur un contrôle a
posteriori.
Ainsi la banque centrale édicte les règles de
gestion comptable et les normes prudentielles applicables aux banques et aux
établissements financiers. (Circulaire n°91-24 du 17-12-1991).
Ces normes concernent : l'usage des fonds propres, les ratios
entre les fonds propres et les engagements, les ratios entre les fonds propres
et les concours accordés à chaque débiteur, les ratios de
liquidité, les risques en général.
Le tableau ci- dessous synthétise les mutations
financières avant et après la libéralisation
financière en prenant 1989 comme date de référence.
La typologie de celle adaptée aux pays en voie de
développement, qui permet de distinguer entre un système
financier réglementé et une système financier
libéraliser.
Tableau 1 : Caractérisation du
système financier Tunisien
1976-1988
1989-2004
|
Place des mécanismes de
marché
|
· taux d'intérêt réels
négatifs ou faibles et quasi fixes.
· Taux d'intérêt administrés.
· marché monétaire quasi-inexistant et
marché financier embryonnaire.
· Accès au marché financier par
l'intermédiaire des banques.
|
· Taux d'intérêt réels positifs
variables.
· Taux d'intérêt
« libres » déterminés dans le cadre d'un
marché monétaire plus ou moins contrôlé par les
autorités gouvernementales.*
|
|
· Politique sectorielle du crédit (taux
bonifiés)
· Principale source de financement externe :
crédits bancaires
|
· Activité de crédit
libéralisée
· Financement externe indirect
prépondérant avec une augmentation relative du financement
direct
|
|
* contrôle de change et contrôle des mouvements de
capitaux
|
*contrôle de change et liberté partielle des
mouvements de capitaux
|
Aspect institutionnel
|
· pas de concurrence au sein du secteur bancaire
· Existence d'institutions financières
spécialisées
|
· Concurrence bancaire
· Banques universelles depuis 2001 dont la structure
du bilan indique la persistance du métier de la banque de
dépôt.
|
· importance des nationalisations
|
· privatisation de certaines banques et ouverture au
capital étranger
|
· rôle prédominant du trésor
(éviction financière et enveloppe de crédit à taux
bonifiés)
|
· désengagement du trésor
|
· BC dépendante du gouvernement
· Politique monétaire discrétionnaire afin
de stimuler la croissance
· Rôle de la banque centrale : allocation des
ressources
· Intervention de la banque centrale :
refinancement
|
· BC dépendante du gouvernement
· Politique monétaire restrictive afin de
stabiliser les prix et de maintenir les taux réels positifs
· Rôle de la banque centrale : contrôle
des agrégats
· Intervention de la banque centrale :
refinancement puis open market*
|
|
Source : adapté de JF Goux (1994) d'après
J. Zysman (1983) et D. Germidis, D. Kessler et R. Meghir (1991).
* Les paragraphes écrits en italique marquent le fait
que ces critères ne cadrent avec ceux d'un système financier
libéralisé.
Grâce à ces critères ; nous
pouvons avancer l'hypothèse que l'évolution du système
financier tunisien constitue un passage d'un système financier
fondé sur la banque et administré à un système
financier fondé sur la banque « en voie de
libéralisation » avec domination des institutions
financières.
Section -I- Impact de l'innovation financière
sur le canal du taux d'intérêt
La politique des taux d'intérêt pratiquait
en Tunisie jusqu'à la fin des années quatre vingt consistait
à fixer purement et simplement les taux d'intérêt à
un niveau jugé encourageant pour l'investissement et la croissance
économique. Pour atteindre cet objectif, les taux débiteurs et
créditeurs étaient maintenus à des niveaux assez faible et
négatif.
Cette politique a entraîné des grandes
pertes pour l'économie Tunisienne en terme de découragement de
l'épargne, d'érosion incontrôlé de crédit et
d'anéantissement de la concurrence bancaire dont les effets persistent
avec l'accumulation des créances irrécouvrables et surtout la
propagation de l'inflation qui n'a cessé de s'accroître entre 1960
et 1986.
Le secteur bancaire se trouvait obliger de suivre les
instructions de la Banque Centrale de Tunisie à propos du niveau des
taux d'intérêt pour pouvoir se refinancer.
Ce paysage ne pouvait plus être
toléré avec le programme d'ajustement structurel et
l'arrivée de l'innovation financière en Tunisie. Ceci a
entraîné l'élargissement du marché financier et la
libéralisation des taux d'intérêt appelés à
devenir le principal instrument utilisé par la BCT pour transmettre les
impulsions de la politique monétaire (Lahouel, 1995).
La réforme de la politique monétaire a
nécessité une réhabilitation des taux
d'intérêt par une libéralisation partielle dès 1987
et totale en juin 1994, à l'exception de certains taux appliqués
aux activités prioritaires.
En fait, le taux du marché monétaire se
détermine par l'équilibre entre l'offre et la demande de
liquidité sur le marché monétaire, les taux
d'intérêt débiteurs et créditeurs de moyen et de
long termes sont détermines par les banques et les taux d
intérêt de court terme sont libérés partiellement
En effet, l'innovation financière a
entraîné la création de plusieurs nouveaux produits
financiers rémunérés selon des taux appropriés tels
que les certificats d'investissement, les billets de trésoreries, etc.
Par conséquent, la Banque Centrale ne peut plus contrôler
l'évolution de chacun des taux. On assiste alors à la
libéralisation des taux d'intérêt qui se fixent
désormais par la confrontation de l'offre à la demande. Ainsi, en
est- il des taux débiteurs et créditeurs bancaires qui deviennent
indépendants et peuvent varier d'une banque à l'autre, des taux
des certificats de dépôt, des certificats d'investissement
etc.(Hergli,1999).
Dans ce contexte et afin d'atteindre les objectifs de la
politique monétaire, la Banque Centrale intervient sur le marché
financier et la conséquence d'une telle intervention se manifeste
à travers la modification de la liquidité du marché qui se
répercute directement sur les niveaux des différents taux
d'intérêt.
Il y a lieu de signaler que l'objectif de la politique
monétaire en Tunisie ces dernières années semble se
recentrer davantage autour du contrôle de l'inflation , ce qui exige
la stabilité des taux d'intérêt (Alaya, 1999).
Cet objectif a incité la BCT à
contrôler l'évolution du TMM de façon à le rendre
stable dans le temps, un tel fait qui est appuyé par les chiffres
puisqu'il est resté constant de 1997 à 1999 autour de 6.875% puis
a baissé d'un point en janvier 1999 et s'est pointé à
5.875% valeur gardée jusqu'en Mars 2003 avec la nouvelle baisse de
0.375% venue consolider l'économie tunisienne dans un contexte
économique difficile (guerre de l'Irak).
Ce faisant, la BCT parvient à maîtriser
l'évolution des variables macroéconomiques globales telles que la
production, l'investissement et la consommation.
D'ailleurs, l'analyse de la progression des fondamentaux
en Tunisie prouve bien ce constat avec un taux d'inflation de 2.8% pour un taux
de croissance de 1.7% en 2002. De tels chiffres sont satisfaisant surtout en
période marquée par la grande instabilité
économique (Rapport annuel de la BCT, 2001).
A ce niveau, il parvient de remarquer que l'innovation
financière contribue à ces résultats du fait qu'elle
permet à l'Etat de se financer via les bons de trésor sans le
recours à la création monétaire et à
l'accroissement de la masse monétaire qui en découle.
Il s'avère que l'innovation financière a
réactivé le canal du taux d'intérêt en poussant la
BCT à s'orienter vers les activités d'achat et de vente sur le
marché financier pour modifier le TMM et à abandonner
l'administration des taux. Celui-ci est censé transmettre les impulsions
de la politique monétaire et l'on passe alors d'un mode de
contrôle des taux direct à un mode de contrôle indirect dont
les résultats dépendent du degré de diffusion des
mutations financières.
Ceci laisse envisager que la BCT trouvera plus de
difficultés à influencer le TMM au fur et à mesure que les
mutations financières se progressent risquant de rendre ce canal
complètement indépendant de sa maîtrise.
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