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Le centre de détention de CASABIANDA, emblématique prison de paradoxes

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par Paul-Roger GONTARD
Université Aix-Marseille III - Master 2 de droit, spécialité lutte contre l'insécurité 2008
  

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Chapitre 3 : Des conséquences d'une situation originale.

La situation géographique, la population pénale, le mode de gestion de la détention. Tous ces éléments originaux et concomitants du centre de détention de CASABIANDA entraînent nécessairement des conséquences majeures pour le quotidien et l'organisation du centre. Deux de ces conséquences sont à mettre plus particulièrement en avant. Les rapports sociaux entre les différents acteurs du centre de détention sont tout d'abord notablement différents des autres prisons (section 1). Que ce soit pour les détenus comme pour les personnels, CASABIANDA change le mode de vie carcéral, ce qui influence nécessairement les rapports de coexistence à l'intérieur de l'établissement.

De la même manière, les coûts de fonctionnement du lieu se trouvent grandement affectés par les originalités de CASABIANDA (section 2). Ils pâtissent de la situation d'isolement du centre, mais profitent du mode d'encadrement des détenus.

Section 1 : Les rapports sociaux dans la microsociété de CASABIANDA.

Outre les premières impressions d'espace que vous ressentez lorsque vous arrivez sur le domaine de CASABIANDA, ce qui étonne plus encore c'est l'apaisement qui semble bercer le lieu. Une impression renforcée dès que vous observez interagir les détenus et les personnels du centre de détention. Les rapports humains qui règlent cette micro société sont notablement différents, à plusieurs titres, des autres prisons françaises. En laissant régulièrement la parole aux membres de l'établissement, nous observerons ces originalités au travers des comportements réciproques des détenus (§1) et des personnels (§2).

§ 1 : Comportements sociaux des détenus

Dans un de mes entretiens, un détenu me confiait : « arrivé en prison, on perd son statut d'humain, sans pour autant devenir un animal. ». Arriver à CASABIANDA, c'est un peu redevenir un Homme. Redevenir un individu sociable, dont les rapports avec ses semblables se normalisent.

Dans les autres lieux de détention, l'atmosphère m'était qualifiée d'à « couteaux tirés ». Pour expliquer cela, l'un de mes interlocuteur me faisait cette subtile remarque : « déjà en couple, au quotidien, c'est pas toujours facile. Alors avec 3 ou 4 gars qu'on a pas choisi 23h00 sur 24h00, et en plus leurs manies ... ». L'absence de fin à sa phrase laissait aisément comprendre l'implicite pénibilité du quotidien. Nous pouvons donc, à partir de ce constat, aisément comprendre, que, si ces conditions participent à l'animosité entre les détenus des prisons française, être, comme à CASBIANDA, seul dans sa cellule le soir, et avoir 1.500 ha pour éviter les individus que vous ne souhaitez pas côtoyer, changent notablement les rapports de coexistence.

La qualité des rapports sociaux se signale aussi par les sujets de conversation qui occupent les détenus. Alors qu'en maison d'arrêt, revient comme une lancinante question un « T'es là pourquoi ? », à CASABIANDA, le lieu commun serait plutôt de débattre de son travail de la journée. Les détenus me confiaient qu'ils se sentaient ici moins jugés que dans tout autre établissement pénitentiaire. Que l'objet de l'infraction ne focalisait presque plus l'attention ni les rapports de détention.

Les activités de loisirs qui succèdent aux journées de travail permettent aussi de créer des espaces de socialisation et de convivialité. Les parties de pétanque organisées entre les bâtiments de détention en témoigne116(*).

Les repas, pris dans des locaux comparables à un réfectoire d'entreprise, redeviennent des moments d'échanges qui se déroulent dans des conditions proches de la normalité extérieure.

Le dialogue est en outre un facteur de socialisation primordial à CASABIANDA. Il permet aux nouveaux arrivants d'apprendre des anciens les limites de leur liberté relative. Une transmission des savoirs qui permet à l'identité du lieu de perdurer, et, parfois, de museler quelques velléités de nouveaux détenus qui auraient la volonté d'abuser de ces nouveaux droits. La plupart des anciens ont compris que le prix de ces conditions exceptionnelles de détention était avant tout la quiétude et la discrétion de ce lieu. Dans leur propre intérêt, ils s'attachent donc, de manière informelle le plus souvent, à faire respecter cet objectif.

Il nous faut bien sûr nuancer cette description grandement positive par quelques difficultés relationnelles qui font parfois surface entre groupes de détenus. Mais tout cela reste, pour l'instant, dans des proportions anecdotiques.

En ce qui concerne les rapports entretenus avec les personnels, ils sont là aussi étonnements sereins. Ce qui souligne le plus cette ambiance ce sont ces poignées de mains que s'échangent surveillants et détenus lorsque les premiers sont en observation.

Les traditionnelles injonctions mono verbales qui rythment parfois le quotidien des rapports de détention d'autres établissements (« Détenu X, Parloir / Infirmerie / Promenade ...), laissent à CASABIANDA la place au respect de l'interlocuteur, voire à sa considération. Il n'y a pas, de la part des personnels de surveillance, de trace de perversion ou d'humiliation inutile des détenus pour réaffirmer leur autorité.

Le détenu est à CASABIANDA reconsidéré, c'est du moins le sentiment de la plupart de ceux que j'ai rencontré.

* 116 Vous noterez ici le paradoxe de sécurité qui peut découler de l'utilisation de boule de métal dans une enceinte carcérale.

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