SECTION 2 : CONTRIBUTION DE LA MICRO - FINANCE
DANS LE DEVELOPPEMENT DES MICRO ENTREPRISES AU SENEGAL : LE
FINANCEMENT
Le financement des petites entreprises reste toujours le
« chaînon manquant » entre micro - finance et secteur
bancaire.
Malgré les initiatives mises en place par l'Etat du
Sénégal pour drainer des ressources financières
importantes en direction de la PME, ce secteur est encore très peu
desservi. L'évolution récente du secteur financier, avec
l'émergence et le formidable développement au cours de ces 15
dernières années de nouveaux intermédiaires financiers de
proximité (appelés SFD ou encore IMF), a déjà pris
en charge une bonne partie des besoins des Micro et petites entreprises et
commence timidement à s'intéresser à la PME. Ce sous -
secteur financier pourrait ainsi constituer, sinon une alternative, du moins un
complément de poids pour améliorer les flux financiers en
direction de la PME.
La présente étude, qui s'inscrit dans le cadre
de l'élaboration de la « lettre de politique sectorielle de la
micro - finance au Sénégal », cherche à
apprécier ce potentiel et a pour objectifs :
Ø D'analyser les besoins des PME et MPE et recenser les
créneaux porteurs
Ø De faire l'inventaire des dispositifs d'appui au
financement des PME et MPE
Ø D'analyser les résultats obtenus par les
programmes antérieurs et en cours
Ø De présenter les caractéristiques
(atouts et faiblesses) des IMF qui financent les PME et MPE et les
résultats obtenus ;
Ø De relever les contraintes majeures à
l'intervention des IMF dans le financement des PME et MPE.
I. ANALYSE DES BESOINS DES MPE ET
PME
Les principales caractéristiques du secteur de la MPE -
et, dans une moindre mesure, de la PME sont :
a Le manque de diversification vers des créneaux
porteurs et le mimétisme entraînant une saturation rapide des
créneaux explorés ;
a La faiblesse, voire l'inadéquation, des
équipements notamment dans le secteur de l'agriculture et de
l'artisanat ;
a La faible qualité des produits, avec notamment des
problèmes de finition ;
a La difficulté de trouver des marchés internes
(saturation et concurrence de produits importés) et externes.
Les besoins financiers de la MPE sont
généralement de trois ordres : le financement de fonds de
roulement ordinaire, le financement d'avances sur marché et le
financement des équipements (matériel neuf ou d'occasion).
De manière générale, le secteur de la MPE
constitue une des principales cibles du système financier de
proximité qui a développé de produits adaptés
à cette satisfacts, à l'exception toutefois de certains types de
besoins tels que le financement des investissements dont la durée et le
montant sont parfois hors de portée des institutions de micro -
finance.
La PME pour sa part rencontre des besoins
généralement similaires, à des niveaux plus
importants : un besoin de financer son implantation (investissement et
fonds de roulement de départ), un besoin de financer le
développement de l'activité, un besoin de financer le fonds de
roulement ordinaire, un besoin de financer des marchés
spécifiques (par exemple la réalisation de commandes
importantes), et un besoin d'autres services financiers tels que la caution sur
marché ; la caution d'avance de démarrage. Le niveau de ces
besoins financiers est très variable, mais ils sont
généralement de 3 types : les crédits
d'investissement, les crédits à court terme (crédit de
trésorerie), les engagements par signature (cautions).
II - CONTRAINTES INHERENTES AUX MPE ET
PME :
Trois éléments apparaissent primordiaux :
le système d'information, la structure financière, les
garanties.
Le principal élément est le manque de
transparence dans la gestion. En effet les PME et MPE ont
généralement un système d'information de gestion
défaillant qui ne permet pas aux structures de financement notamment les
banques d'obtenir une information financière exhaustive et fiable
(absence de procédures claires et d'états financiers). Cette
absence de transparence et d'informations fiables est source de risques pour
les prêteurs.
L'autre élément déterminant est le niveau
des fonds propres, donc de capitalisation. C'est un élément
important dans la mesure où il indique le degré d'engagement des
propriétaires de l'entreprise. De manière générale
la PME sénégalaise est faiblement capitalisée. Compte tenu
de l'intérêt que les structures de financement attachent au niveau
des fonds propres, leur faiblesse limite leur volonté d'apporter leur
concours.
Face à l'insuffisance de fonds propres et au manque de
transparence financière, certaines structures de financement
« ferment le yeux », mais exigent d'importantes garanties
notamment physiques dont la plupart des PME ne disposent pas.
III - ANALYSE DES DISPOSITIFS D'APPUI ET
RESULTATS OBTENUS :
La recherche de la satisfaction des besoins financiers des MPE
et PME a conduit à la mise en place d'un important dispositif d'appui
comprenant :
Ø des lignes de crédit domiciliées
auprès des banques et de certaines IMF
Ø des fonds de garanties qui sont des mesures
incitatives en direction des intermédiaires financiers pour prendre en
charge une part plus ou moins importante des impayés sur les
crédits octroyés.
Ces mesures comportent des forces et des faiblesse et, de
manière générale, elles n'ont pas entraîné
une rencontre durable et efficiente de l'offre de financement et de la demande
des entreprises (MPE, et PME).
IV - CARACTERISTIQUES DES IMF QUI FINANCENT LES
MPE ET PME ET RESULTATS OBTENUS.
Les IMF répondent aujourd'hui de manière
adapté au besoin de financement de la MPE, que ce soit les mutuelles
d'épargnes et de crédit (MEC) isolées ou en réseau,
les groupements d'épargne et de crédit (GEC) ; ou simplement
les systèmes financiers décentralisés conventionnés
(convention cadre). En effet, ces IMF octroient des volumes de prêts, des
durées et des taux d'intérêt qui prennent
généralement en compte : le souci de faire accéder
les MPE au crédit, le souci de les amener à accroître leurs
activités au fur et à mesure qu'elles obtiennent de nouveaux
crédits, le souci de prendre en compte toutes leurs catégories de
besoins tant social qu'économique et leur propre souci de
viabilité et de pérennité financière.
Par contre, les IMF sont peu présentes dans le
financement des besoins de la PME0. A ce jour, seule l'ACEP a commencé
à adresser les besoins de ce segment de marché, mais ceci repose
moins sur une volonté de financer systématiquement les PME - du
moins à ce jour - que d'éviter la perte d'une partie de sa
clientèle la plus dynamique et la plus solvable et qu'elle a
accompagné tout au long de son évolution de l'état de
micro entreprise vers la PME. Les autres réseaux tels que l'UM - PAMECAS
et la FCCMS l'ont inclus dans leur plan de développement et envisagent
d'y intervenir à court terme.
V. CONTRAINTES MAJEURES A L'INTERVENTION DES
IMF
La faible intervention des IMF dans le financement de la PME
trouve son exploitation notamment :
Ø dans la structure des ressources des IMF qui sont
généralement constituées par des dépôts
à vue des membres / clients, ce qui limite leur capacité de
transformation ;
Ø dans le faible niveau de capitalisation des
IMF : en dehors de l'ACEP, les IMF ne disposent que d'un faible capital
social (généralement constitué par les parts sociales des
membres), il faut dire que la loi Parmec constitue à ce titre un facteur
limitant dans la mesure où le système mutualiste ne favorise pas
la prise de participation importante au capital des IMF par des personnes
physiques ou morales ;
Ø dans le manque de relations commerciales entre le
secteur bancaire et le secteur de la micro - finance, le premier ignorant
généralement le second à quelques exceptions prés -
et l'assimilant à un secteur peu viable, trop risqué, et
porté par des iodées plus sociales qu'économiques, cette
mentalité connaît cependant une évolution favorable,
notamment du fait de la concurrence entre banques sur un marché de plus
en plus étroit.
V. PROPOSITION DE MECANISMES ADAPTES AU
FINANCEMENT DES PME
Le « chaînon manquant » du
financement des PME ne devrait pas être perçu comme une structure
qui viendrait s'ajouter au paysage financier et bancaire actuel, mais
plutôt une triptyque Banques - IMF - Mécanisme Innovants
intervenant à différents niveaux. Les PME étant à
des niveaux de développement et d'autres différents, leurs
besoins devront être pris en charge de façon
différenciée. Dans le schéma que nous proposons, les PME
sont classées en trois catégories :
v Catégorie 1 : celles qui sont en création
dans des créneaux porteurs, mais dont les promoteurs n'ont pas à
proprement parler d'expérience antérieure
v Catégorie 2 : celles qui existent mais sont de
plus petite taille et qui reposent sur un savoir - faire de leurs promoteurs,
mais dont le potentiel de croissance est relativement limité ;
v Catégorie 3 : Celles qui sont en
développement et qui ont déjà atteint un niveau
d'activités plus important, avec des perspectives de
développement, une vision claire des dirigeants, etc...
Les PME susceptibles de trouver des appuis financiers
auprès des banques sont celles en développement (catégorie
3) et il y en a peu dans ce cas. Ces PME peuvent également trouver des
financements auprès de certaines IMF (notamment ACEP, PAMECAS, CMS)
ainsi que de la part des mécanismes innovants (capital - risque et / ou
crédit - bail).
Les PME de la catégorie 2 n'intéressent
généralement pas les banques et ne sont pas attrayantes pour les
investisseurs en capital - risque. Elles pourraient trouver des appuis
auprès de certaines IMF notamment les principaux réseaux, sous
réserve que ceux - ci bénéficient de ressources longues
sous la forme de prêts auprès des banques ou des fonds
d'investissement tels que AFRICAP.
Les PME en création (catégorie 1) sont plus
risqués par les banques et par les IMF .Elles ne peuvent trouver un
financement qu'à travers des mécanismes innovants du type de
capital - risque. Et même dans ce cas, il s'agira seulement de celles
ayant le plus grand potentiel de croissance.
Mais le capital - risque n'est intéressant pour les
investisseurs que :
i) si l'activité est hautement rentable à moyen
terme ;
ii) si la fiscalité est incitative et
iii) s'il existe une porte de sortie en cas de besoin.
A cet égard, la mise en place d'un comportement de PME
au sein de la BRVM pourrait être intéressante car les
investisseurs en capital - risque pourraient revendre plus facilement leurs
titres en cas de besoin et se désengager.
La mise en oeuvre du financement durable de la PME
nécessite un certain nombre de préalables et de mesures
d'accompagnement :
i) de la part des pouvoirs publics ;
ii) de la part des structures de financement ; et
iii) de la part de la BRVM (source : BIM - 19 avril 2005
Issa BARRO)
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