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Microfinance et lutte contre la pauvreté au sénégal


par Nountié Conde
Université Cheikh Anta DIOP de DAKAR - Maitrise 2007
  

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SECTION 3 : LES FEMMES ET LA MICRO - FINANCE

Plus de 3.300 organismes de micro - finance ont atteint 133 millions de clients au moyen d'un micro - crédit en 2006.

Parmi eux, 93 millions faisaient partie des plus pauvres lorsqu'ils ont obtenu leur premier prêt.

85% de ces clients les plus pauvres étaient des femmes (source : Rapport sur l'état de la campagne 2007 du sommet sur le micro - crédit).

Le micro - crédit joue un rôle capital en matière d'autonomisation des femmes. Il aide à susciter un regain de respect pour les femmes et à renforcer leur indépendance et leur participation dans le cadre de la communauté et du foyer. (Source : Juan Somaria, Directeur Général de l'OIT).

I. LA MICRO - FINANCE : POURQUOI CIBLER LES FEMMES ?

70% des pauvres du monde sont des femmes. Or, traditionnellement, les femmes ont été désavantagées en matière d'accès au crédit et autres services financiers. Les banques commerciales se tournent souvent principalement vers les hommes et les entreprises formelles, négligeant les femmes qui représentent une proportion importante et croissante de l'économie informelle.

En revanche, la micro - finance cible souvent les femmes, parfois exclusivement. Les femmes représentent quatre - vingt - cinq pour cent des clients les plus pauvres bénéficiant des services de micro - finance. C'est pourquoi, du point de vue de la politique publique, il est souhaitable d'assister les femmes à la recherche d'un emprunt.

Il est parfaitement justifié, au plan commercial, de s'adresser aux femmes car les taux de recouvrement sont plus élevés en ce qui les concerne.

Elles consacrent aussi une plus grande part de leur revenu à la consommation du ménage comparé à leurs homologues masculins. Autant du point de vue commercial qu'en terme de politique publique les arguments sont solides en faveur d'une focalisation sur les femmes pour l'offre de prêts.

Les enfants des femmes qui ont recours à la micro - finance en retirent aussi les avantages car ils sont davantage susceptibles de suivre un cursus scolaire à plein temps et ils sont moins nombreux à abandonner leurs études. Des études montrent que les nouveaux revenus générés par les micros - entreprises sont souvent d'abord investis dans l'éducation des enfants et que ce sont les filles qui en bénéficient particulièrement. Les ménages des utilisateurs de la micro - finance ont apparemment aussi de meilleures pratiques sanitaires et nutritionnelles que ceux qui ne font pas appel à la micro - finance. Il est aussi possible d'obtenir un impact environnemental car les programmes de micro - finance peuvent appuyer des emplois respectueux de l'environnement et des systèmes d'énergie renouvelable.

Les conséquences non souhaitées

Bien que l'incidence positive de la micro - finance sur l'autonomisation des femmes soit évidente, les fournisseurs de services de la micro - finance doivent aussi faire preuve de prudence pour éviter d'éventuels résultats négatifs.

Des études ont montré que les femmes ont parfois peu ou pas de contrôle sur leurs emprunts, le mari ou le membre de la famille de sexe masculin étant celui qui prend toutes les décisions. En outre les différences en ce qui concerne l'aptitude à lire et à écrire, les droits de propriété et les attitudes sociales vis-à-vis des femmes peuvent limiter l'impact en dehors du ménage. Les résultats des zones rurales en particulier continuent d'éprouver des difficultés à accéder à la micro - finance.

Les femmes peuvent aussi peiner en raison de la charge de travail plus lourde qu'engendre la responsabilité de générer un revenu pour rembourser le prêt. Les changements au plan de l'accès au financement ont des conséquences sur la répartition du temps de travail entre les hommes et les femmes du même foyer et entre les activités qui génèrent des revenus différents. Les éléments d'information donnent à penser que jusqu'à un certain point, le micro crédit augmente la charge de travail des femmes et des filles, ce qui peut être compensé par une plus grande égalité dans la prise de décisions au sein du ménage.

Du point de vue des institutions, il se peut que le pourcentage des femmes parmi les clients baisse au fur et à mesure que les IMF progressent sur le marché à la recherche de meilleurs rendements, ou même qu'ils se transforment en banques commerciales. C'est pourquoi il faut mettre en valeur l'argumentation commerciale en faveur de la focalisation sur les femmes pour l'offre de prêts, tout en renforçant parallèlement les stratégies des IMF pour atteindre les femmes.

II/SOLU TION AUX FEMMES PAUVRES : LA MICRO FINANCE

Les analyses du développement connaissent des phénomènes de mode et de la micro finance en fait incontestablement partie, notamment dans le contexte de la lutte contre la pauvreté. Toutefois, ce terme recouvre en réalité une multitude de dispositifs.

L'aspect le plus répandu et le plus médiatisé de la micro finance est le micro crédit destiné aux femmes. D'après la banque mondiale, il s'agit des crédits inférieurs à 40% du PNB par habitant de chaque pays (source : Guérin 2000)

L'orientation de la micro finance, notamment du micro crédit, vers les femmes est devenue plus visible à travers l'exemple largement médiatisé de la Grameen Bank au Bangladesh. L'objectif de départ était de prêter autant aux et aux hommes ce qui, initialement, n'était pas facile à atteindre. Très rapidement il s'est pourtant avéré que les femmes étaient plus fiables et plus régulières dans leurs remboursements. Aujourd'hui, plus d'un million de personnes sont touchées par la Grameen Bank dont près de 95% sont des femmes (source : Cerise 2000). Ces derniers remboursements mieux leurs crédits que les hommes. Ce constat peut se généraliser et expliquer en partie l'orientation du micro crédit vers les femmes.

Une raison supplémentaire de cette féminisation de la micro finance réside dans son efficacité accrue en terme de lutte contre la pauvreté. La majorité des études maintient en effet que, dans un couple, dès lors que la femme possède un revenu, elle l'investit prioritairement auprès des enfants et de la famille, ce qui améliore davantage les conditions de vie familiale qu'une augmentation de revenu des hommes (source : Baden 2000)

Cibler les femmes lors des initiatives de micro finance ne vise pas leur emparement et peut se justifier également et termes de visibilités institutionnelles (compte tenu du taux de remboursement élevé) et pour favoriser l'amélioration des conditions de vie familiales (source : Johnsen 1997). En effet, l'un des paradoxes des programmes de financement réside dans les conflits entre les politiques conçues pour accroître la visibilité financière des institutions de micro crédit et les stratégies conçues pour l'emparement des femmes. Les exigences relatives à la durabilité financières des institutions conduisent à réduire au strict minimum le service de soutiens complémentaires. Or, certains volets annexes des programmes de micro finance, comme les programmes d'alphabétisation, les services de galerie, la formation en gestion des entreprises, peuvent avoir un impact significatif tant sur l' amélioration du revenu que sur l' empowerment.

Presque tous les programmes mondiaux de micro finance revendiquent que la viabilité financière de leurs activités constitue l'un des principes clés de leurs actions (et une exigence de la part de leurs bailleurs). Les banques préfèrent ainsi s'adresser aux femmes, compte tenu de leur docilité, de leur soumission à la pression du personnel des programmes et de leur rapidité à rembourser. Comme le note MAYOUX ( 1997),il semble alors probable que les programmes de micro crédit qui fonctionnent en générale selon le paradigme de la viabilité financière aient une logique qui privilégie inévitablement les moins défavorisées des femmes pauvres.

En outre, le fonctionnement en groupe est considéré comme un moyen de renforcement des capacités. On a ainsi, pu observer que les femmes qui vivent dans la misère s'adaptent mieux et plus vite que les hommes au processus d'auto assistance mis en oeuvre à travers les groupes solitaires, les self help groups(SHG) (source : http://rmk.nic.in.). Ces groupes de petites tailles (entre dix et vingt membres) et uniquement composés de femmes, apparaissent comme cohérents et homogènes car basés sur les affinités entre personnes (même type d'activité économique ou même lieu de vie). Leur fonctionnement et leurs décisions sont pris sur le mode démocratique et ils sont dirigés par les membres eux-mêmes. Ces groupes solitaires jouent alors un rôle essentiel pour l'accès au micro crédit des personnes démunies parce qu'ils permettent de remplacer des garanties collatérales par la caution du groupe pour les crédits individuels. La pression sociale joue donc le rôle d'une menace en incitant l'emprunteur à ne pas adopter un comportement opportuniste. Même si certaines études ont montré la difficulté répliquée dans tous les contextes culturels (source : Hulme 1990), force est de constater qu'il s'agit d'une formule qui ouvre pour la première fois l'accès au crédit à un grand nombre de femmes pauvres.

D'un point de vue conceptuel, le micro crédit, s'il est en particulier sur des groupes solidaires est l'exemple par excellence de la lutte contre la pauvreté intégrant l'aspect genre. YOUNG (1997) illustre ce point à l' aide d'un exemple simpliste mais pas pour autant dépourvu de pertinence : face au besoin pratique des femmes d'obtenir accès à des sources de revenus stables, on peut imaginer des solutions diverses, comme la création de travail à domicile payé à la pièce, la mise à disposition d'emplois salariés au sein d'usines, ou le micro crédit pour financer une activité indépendante. La première solution comporte l'inconvénient de l'isolement de ces travailleuses à domicile et de l'absence de pouvoir de négociation vis-à-vis de l'employeur. Dans le deuxième cas de figure, les femmes se retrouvent généralement confrontées à la domination masculine et les conditions de travail s'apparentent fréquemment à de l'exploitation. Le microcrédit, en revanche, concerne le problème des la pauvreté des femmes dans son acceptation restreinte : faiblesse des ressources familiales, et l'absence de contrôle de ces ressources. Incontestablement, le microcrédit est une solution au moins potentiellement supérieure aux autres cas de figure, parce qu'il comporte des éléments qui devraient entraîner un plus en termes d'empowerment. Ceci s'avère encore plus vrai si le microcrédit incite la femme à joindre un SHG qui crée un espace d'échange et de concertation entre femmes. L'engagement actif des individus dans un groupe correspond au caractère collectif d'un processus d'empowerment en contribuant à réussir les conditions nécessaires pour que des femmes puissent discuter et mettre en commun leurs problèmes et besoins (source : Sierra et LEGUINA : 2000).

III : LE PROGRAMME D'ACCES DES FEMMES SENEGALAISES AUX SERVICES FINANCIERS (AFSSEF) : UNE EXPERIENCE REUSSIE AU SENEGAL

Le programme AFSSEF a été mis en place par développement international Desjardins (DID) afin d'intervenir en parallèle au programme d'appui aux mutuelles d'épargne et de crédit au Sénégal (PAMECAS) pour favoriser l'accès des femmes aux services financiers. Des zones d'intervention sont les mêmes que celles du volet émergence du PAMECAS. Il a débuté ses activités au Sénégal en avril 1995 et ses actions visaient jusqu'à présent à consolider et développer les activités économiques de groupes de femmes par l'accès au crédit, la sensibilisation et la formation.

Au cours de ces derniers années, l'expertise et la connaissance affinée du secteur informel développée par AFSSEF ont été mises à profit pour favoriser un meilleur accès des femmes aux services des mutuelles et à accélérer la rentabilité de ces dernières. Pour ce faire AFSSEF avait proposé aux mutuelles de tester trois produits de micro finance définis selon les besoins de leur clientèle féminine et dont une partie des risques est couvert par un fonds de garantie. Depuis janvier 1998, le programme a été intégré au projet PAMECAS et est devenu un service à part entière pour les mutuelles.

a) objectifs :

- Favoriser l'accès progressif des femmes au crédit en couvrant une partie du risque de l'opération de crédit fait aux entrepreneurs et commerçant par les mutuelles d'épargne et crédit ;

Mettre en place des produits de microcrédit correspondant au profil et aux besoins des femmes membres des mutuelles ;

- contribuer à améliorer la rentabilité des mutuelles ;

- protéger l'épargne des membres de la mutuelle ;

- sensibiliser les femmes au crédit et à l'épargne institutionnelle ;

- favoriser et provoquer l'investissement productif dans le milieu ;

- assurer l'offre de service spécifique et continue auprès des femmes

b) Mode de fonctionnement :

Actuellement 28 mutuelles se partagent les services de 26 conseillères AFSSEF qui ont été formées à analyser et au suivi des crédits. Elles ont également pour mandat d'informer les femmes sur le fonctionnement et les services offerts par les mutuelles, les sensibiliser et les conseiller en matière d'épargne et de crédit, et les conseiller dans la gestion de leurs activités économiques.

Les conseillères AFSSEF interviennent le plus souvent sur le terrain de manière à rejoindre les femmes là où elles se trouvent et les amener à la mutuelle. Leur rôle s'apparente à celui des autres employés de la mutuelle en ce sens qu'elles procèdent au traitement et à l'analyse des dossiers de crédit qui décide d'octroyer ou non le prêt, et assurent le suivi des prêts accordés.

D'un point de vue fonctionnel, chaque conseillère assignée à une mutuelle est considérée comme une employée de celle-ci confidentialité que les autres employés de la mutuelle.

c) Critères d'admissibilité :

AFSSEF s'adresse aux femmes, individuellement ou en groupe, qui souhaitent obtenir un crédit pour renforcer leurs activités économiques mais qui n'ayant pas accès faute de remplir l'ensemble des conditions d'éligibilités fixées par la politique de crédit des mutuelles. Les autres femmes ou les groupes de femmes qui rencontrent les critères d'éligibilité de la mutuelle doivent s'y présenter directement et utiliser les services réguliers de celle-ci.

Pour obtenir la garantie AFSSEF les femmes et les groupes ciblés devront remplir les conditions suivantes :

- être une femme ou un groupe de femme ;

- être membre d'une mutuelle d'épargne et de crédit appuyé par le PAMECAS.

- Avoir une expérience de plus d'un an dans le domaine de l'activité pour laquelle le crédit est demandé

- Ne pas avoir d'antécédents de crédits négatifs

- Accepter de verser un apport personnel de départ qui sera nanti et accepter de constituer une épargne obligatoire exigible à chaque étape de remboursement des prêts

- Les crédits garantis par AFSSEF doivent servir uniquement à des fins productives et/ou commerciales. Ils doivent avoir pour but d'augmenter les revenus et la capacité des activités économiques à prendre de l'expansion

Le fonds vise essentiellement trois catégories de clients qui sont :

- les petits commerçants de marché

- les groupes de crédits

- les entrepreneurs (individuels ou GIE)

d) Résultats :

Au 31 décembre 2003, l'encours de crédit AFSSEF est de 1303379229 FCFA. Le nombre de crédit en cours est de 6825 répartis comme suit :

- petits commerçants de marché : 831 dossiers en cours pour un encours de crédit de 216207797 FCFA

- groupes de crédit : 1200 dossiers en cours pour un encours de crédits de 215830102 FCFA

- entrepreneurs (individuels ou GIE) : 4793 dossiers en cours pour un encours de crédit de 1065928331 FCFA

Le volume d'impayés de plus de 90 jours est égal à 10318445 FCFA, soit un taux d'épargne de 0,79%.

Le volume d'impayé de plus de 30 jours est égal à 23024970 FCFA soit un taux d'épargne de 1,76%.

Au courant de l'année 2003, le volume de crédit déboursé pour le programme AFSSEF est de 1651908500 FCFA pour 5570 prêts représentant 8756 bénéficières dont 3793 sont des nouveaux membres. Ce nombre est réparti comme suit :

- petits commerçants de marché : 138 dossiers

- groupes de crédit : 4384 dossiers

- entrepreneurs (individuels ou GIE) : 1048 dossiers

La production globale de crédit depuis le démarrage du programme est de 5533672679 FCFA pour un nombre total de 2100 crédits octroyés pour 53792 bénéficiaires. Le programme AFSSEF a permis de mobiliser 546372254 FCFA et de créer 20000 nouvelles adhésions.

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo