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Géostratégie des ressources naturelles et les conflits de la République du Congo 1990-2002 : rivalité de puissance et contrôle de l'énergie

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par Sédard-Roméo NGAKOSSO-OKO
Institut des Relations Internationales du Cameroun - Diplôme d'Etudes Supérieures Spécialisées en relations internationales, option diplomatie 2005
  

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2. Les entités sub-étatiques : la logique des appuis réciproques et la logique des affaires

L'intervention de ces entités obéit à deux grandes trajectoires. Ces entités sont là, soit pour épauler les belligérants dans l'aboutissement de leur cause tout en entretenant l'espoir que ceux-ci les aideront par la suite à imposer la leur, soit pour vendre leur savoir-faire guerrier aux protagonistes. Dans l'une comme dans l'autre trajectoire, les hydrocarbones liquides et gazeux occupent une fois de plus une place centrale. L'examen de chacune de ces trajectoires s'impose.

a. La logique des appuis réciproques

Cette logique correspond à un système de troc. En s'alliant chacun sert les autres et réalise en même temps ses propres buts. Elle est manifeste avec les acteurs qui contestent le pouvoir en place en Angola, à savoir le FLEC et l'UNITA. Par exemple, l'UNITA avaient dépêché auprès du camp gouvernemental congolais quelques-uns des ses Antonovs. En contrepartie, le pouvoir de Brazzaville lui garantissait des possibilités d'approvisionnement par les infrastructures congolaises de communication. Avec l'effondrement du régime du Président MOBUTU au Zaïre, la survie de ces deux mouvements était liée à ces infrastructures. Pour l'UNITA et pour le FLEC, intervenir au Congo apparaît d'abord comme une nécessité de rééquilibrer les bases de la distribution de la puissance dans la nouvelle configuration du rapport de force qui les oppose au gouvernement de Luanda après l'effondrement du régime du Président MOBUTU. Ces interventions s'expliquent ensuite par le poids de l'histoire conjuguée à des intérêts pétroliers.

Historiquement, il faut y voir l'empreinte de l'ancien royaume Kongo qui comportait au XVIème siècle des régions situées dans le Congo actuel, l'ex-Zaïre et le Nord de l'Angola. Dans certaines régions de l'Angola à l'instar de Cabinda, la population est majoritairement Kongo. Celle-ci a fui la colonisation portugaise et s'est installée dans les deux Congos dans les années 1960, avant de tenter un retour sans succès en 1975, surtout celle qui était installée en RDC, avec le FNLA battu devant Luanda. Cette dernière vague a été réactivée à la fin des années soixante dix par le Zaïre. Pour cela l'Angola avait réactivé les sécessionnistes katangais.

Or, une crainte analogue a de nouveau effleuré la conscience du gouvernement angolais avec le régime du Président LISSOUBA au Congo. Car, il voyait en lui un partenaire important de ce mouvement, qui de plus est lui aussi d'origine Kongo. Autrement dit, l'Angola craint toujours une sécession de cette région qui inclut en partie le Cabinda, c'est-à-dire plus de 50 % de ses réserves pétrolières. Il ressort que intervenir au Congo pour l'UNITA et le FLEC apparaît également comme une façon de rester solidaires aux leurs, malmenés par des usurpateurs venus du Nord (du Congo), qui, depuis près de quarante ans profitent énormément des hydrocarbones liquides et gazeux du Sud au détriment des autochtones. Dans cette optique, les épauler à conserver le contrôle des sources des hydrocarbones de l'empire des «étrangers» venus du Nord s'impose comme un devoir naturel. Cette même logique prévaut également en Angola où une oligarchie métisse, s'est érigée depuis l'indépendance en gestionnaire des richesses pétrolières du Nord au détriment des autochtones. Ce constat de P. NGANDU NKASHAMA est illustrateur de cet état de faits :

« Chez les messianistes, aussi dominent, cette idée de la propriété de la terre et des richesses qui doivent revenir aux populations héritières des anciens royaumes et qui transcendent les frontières. Lorsque l'on découvre le pétrole au Nigeria, le groupe sur le sol duquel il est trouvé dit : ``il est à nous en tant que membre de l'ancien royaume». Et si le filon traverse les frontières de l'Etat, ceux de l'autre côté répondent : ``Nous sommes frères, ça nous appartient aussi, donc associons-nous. Cette donnée économique crée une idée nationale en contradiction avec le pouvoir en place. D'où les guerres. Même raisonnement pour le pétrole off shore de l'ancien royaume du Kongo (Angola, Zaïre, Congo). D'où le conflit entre SASSOUNGUESSO et LISSOUBA, en fonction du principe que ceux qui n'appartiennent pas

à ce royaume n'ont aucun droit sur le pétrole. Et c'est pour cela que le Congo et

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l'Angola s'entendent quand il s'agit de ce problème-là ».

Vu sous ce prisme, il y a plusieurs dimensions qui justifient ces intrusions réciproques de l'UNITA et du FLEC dans le conflit congolais et vice-versa. Mais, ce qui est important et qui mérite d'être signalé ici reste la maîtrise de la richesse nationale matérialisée par les hydrocarbones liquides et gazeux. Mais, le paradigme des appuis réciproques, seul, ne suffit pas pour capter le sens de cet autre modèle d'alliance qui n'obéit plus à la logique du troc. C'est pour cela que nous convoquons la logique des affaires.

b. La logique des affaires

Elle correspond à la mise en place d'une nouvelle économie désignée officiellement par le vocable économie parallèle ou de guerre. Les entités qui interviennent dans cette catégorie sont, soit des intermédiaires des grandes multinationales de l'armement originaires des pays de l'ancien bloc de l'Est et sont basées en Afrique du Sud, soit encore des agences locales spécialisées dans le savoir-faire guerrier. En effet, hors de tout cadre institutionnel, cette logique permet aux belligérants, aidés par ces officines spécialisées, de privatiser les ressources de l'économie officielle. Elle consacre l'apparition d'intervenants nouveaux qui opèrent sur sollicitation et suppléent les insuffisances des forces légitimes ou de celles qui contestent l'Etat.

La particularité sur la scène congolaise c'est que ces entités se comportent comme des entreprises ordinaires. Elles proposent des offres, localisent les marchés sur lesquels on peut trouver les produits demandés et ont des cahiers de charges (infra, Annexes, série 3 : quelques documents administratifs, documents n°S 01 et 02, pp. 124-125). Elles proposent un ensemble de prestations : logistique, encadrement et fourniture d'armes. Selon les mots de J.-F. BAYART, l'expression «mercenaire»

82P. NGANDU NKASHAMA, «Le Pouvoir en Afrique », entretien, in GARAUD, Marie-France, (dir.), Afrique : acteur ou enjeu ? Géopolitique, n°63, Paris, PUF, octobre 1998, p. 36. On retrouve aussi un même argumentaire chez J. SAVOYE, « Pétrole et la guerre d'Angola », in BONIFACE, Pascal, (dir.), Energie et relations internationales : Revue Internationale et Stratégique, n°29, Paris, Arlea, Printemps 1998, pp : 176-177 ; 181 (le gras est de nous).

est proscrite ; dorénavant on parle de «prestataires de services»83. Incontestablement, c'est avec des sommes d'argents obtenues avec la privatisation des ressources nationales que les belligérants se paient de tels services qui reviennent excessivement onéreux (infra, Annexes, série 3 : quelques documents administratifs, documents n°S 01 et 02, pp. 124-125). C'est toujours avec ces sommes d'argents que les protagonistes ont pu se procurer des armes de guerres ultramodernes (infra, Annexes, série 01 : les arsenaux des protagonistes, photos n°s 01 à17, pp : 116-122). Ces ressources permettent à tout mouvement qui le souhaite de s'équiper à bon compte.

En effet, ce jeu des alliances dans la distribution de la puissance, était-il valable uniquement à l'échelle sous-régionale ou encore impliquait-il d'avantage d'autres entités, fondamentalement celles qui ne relèvent plus forcément de cet espace ? Sommes-nous autorisés à penser que certaines grandes nations industrialisées, au travers de leurs firmes multinationales, étaient-elles également engagées dans ce jeu ?

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery