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Se vouer à l'autre - L'aventure éthique avec Emmanuel Levinas

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par Grégoire Jalenques
Institut Catholique de Paris - Master 1 2006
  

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III L'héritage hébraïque: le Tout-Autre

« La Bible est le Livre des livres ou se disent les choses premières, celles qui devaient être dites pour que la vie humaine est un sens. »45(*)

Cette phrase de Levinas trouve un écho concret dans toute son oeuvre particulièrement =ses travaux sur le Talmud. Mais même ses oeuvres philosophiques sont emplis de versets bibliques et de commentaires de ses versets. Levinas ne bascule jamais en théologie mais il philosophe avec toute l'expérience et la pensée juive qui soutient sa vie et qui est pour lui comme un héritage. Louis Fevre dit que Levinas fait référence à la Bible et cite des passages bibliques au même titre que d'autres « citent des poèmes, des romans, ou les symboles de la mythologie gréco-latine. »46(*)

Levinas se défend de construire une philosophie biblique et de chercher à prouver philosophiquement la Bible. Il n'y a pas de claire d'utiliser la bible pour philosopher ou d'utiliser la philosophie dans un sens apologétique. C'est bien plutôt que le Bible et l'héritage hébreu fait partie de l'expérience de Levinas. Si Levinas doit à la Bible une grande partie de sa pensée de la transcendance et de l'éthique, c'est parce qu'il trouve dans la Bible une « extraordinaire présence de ses personnages, une plénitude éthique et des mystérieuses possibilités de l'exégèse »47(*)

Pour Levinas, « les versets bibliques n'ont pas ici pour fonction de faire preuve mais ils témoignent d'une tradition et d'une expérience »48(*) mais la philosophie levinassienne est profondément nourrie de ce rapport à l'expérience hébraïque et la lecture de la Bible.

C'est tout d'abord une tradition qui soutient Levinas dans sa pensée du rapport à l'autre. Les exemples de soubassements bibliques dans sa philosophie sont nombreuses. La conception du besoin par exemple et, de la, l'absence de besoin Dieu sont des pensée bibliques. Le besoin qui fonde la séparation est pour Levinas le fondement d'un athéisme. Le besoin pousse la vie à se satisfaire du monde et de s'en contenter. « L'homme ne dépend pas de Dieu comme il dépend du pain dont il se nourrit. »49(*)

C'est tout le paradoxe biblique du peuple d'Israël qui se met en colère contre Dieu, le défiant de lui donner son pain. Le besoin coupe de Dieu parce qu'il dénature le sens de la relation avec autrui (psaume 78, 19-22). Cette lecture du Talmud et ses incidences sur la philosophie de Levinas dont on vient de donner un exemple ne se limitent pas chez Levinas à la philosophie de la religion. Elle soutient l'éthique humaine de Levinas et la conception du rapport avec l'autre humain aussi bien qu'avec le Tout-Autre.

De même que l'asymétrie de la relation entre le Même et l`Autre, le Dire, la responsabilité jusqu'à la culpabilité ou encore la trace de l'infini dans le visage d'autrui sont des thèmes à résonance biblique.

C'est aussi une expérience que le rapport à la Bible chez Levinas. Il voit dans la Bible, il y découvre très tôt une « plénitude », un sens pour la vie humaine et le rapport à autrui qui éclaire sa propre pensée. Si Levinas a « expérimenté » la Shoah, comme forme la plus extrême du totalitarisme du Même, il a en contrepoints l'expérience immémoriale de la hauteur de Dieu et de l'autre dans la Bible. Et l'on peut dire, comme le montre Fred Poché, qu'il y a même un rapport profond entre ces deux expériences; « celui qui a éprouvé concrètement la souffrance propre de la condition d'étranger et d'esclave - ce à quoi ouvre l'héritage hébreu dans ce qu'il a de plus profond mais qui est aussi une marque de la Shoah -, porte en lui une vérité sur l'humain qui le bouleverse et l'inquiète face à la faiblesse du prochain »50(*)

Parce que la source biblique n'est pas d'abord un discours théorique, un dit mais également un dire, dans le sens d'une apparition du sens profond de l'éthique. « La Bible nous enseigne que l'homme est celui qui aime son prochain, (ce qui constitue) une modalité de la vie sensée ou pensée, plus fondamentale que la connaissance d'objets. »51(*)

On peut penser que Levinas se situe dans cette ligne. La philosophie éthique n'est pas juste un éclairage intellectuel à des question concrètes mais elle porte elle-même un appel éthique. Tout du moins essaye-t-elle de permettre qu'il soit entendu. C'est en ce sens qu'elle peut se nourrir et s'inspirer de la tradition biblique qui ouvre l'homme et l'appelle à la conscience du prochain et à la responsabilité. L'héritage biblique soutient cet effort, cet appel éthique. Il pousse Levinas à privilégier le Dire au Dit.

* 45 EI, p.13

* 46 Fevre, op.cit. p.36

* 47 EI, p.13

* 48 Levinas, L'humanisme d'un autre homme, Le Livre de poche, 1987, p.107

* 49 Fevre, op.cit. p.181

* 50 Poché, op.cit., p.155 à 160

* 51 Poirié, op.cit., p.112

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault