III.1.3. Le pouvoir fédératif
D'après J. LOCKE, le pouvoir fédératif
(federative power)81est le troisième pouvoir de la
communauté politique. Ce pouvoir gère ce que dans le langage
moderne nous nommons « les relations extérieures ».
Sa compétence est de déclarer la guerre, de conclure des ligues
ou alliances, de signer des traités de paix, d'adopter des conventions
à usage inter étatique en matière de monnaie, de
communication ou de commerce, etc. J. LOCKE estime que ce pouvoir est «
naturel », parce qu'il ne s'exerce pas comme les deux
précédents, c'est-à-dire, dans le cadre des lois positives
du Commonwealth. Car, le droit public du Commonwealth est
exclusivement interne. Ainsi, le corps de la république demeure t-il
toujours « dans l'état de nature par rapport à tous les
autres Etats »82 ou par rapport à toutes les autres
personnes qui lui sont extérieures.
Il n'existe pas de règles positives de droit
international, public ou privé, aptes à régir les
relations des différentes républiques entre elles ou les rapports
de leurs ressortissants avec le Commonwealth. Lorsque surgissent des
différends, il faut qu'interviennent les pouvoirs publics pour les
trancher pour que le juste ne soit pas méconnu et bafoué. Ces
pouvoirs publics interviennent par l'entremise du pouvoir
fédératif. L'originalité de ce « pouvoir
est d'être une fonction », plutôt que la puissance
(power) d'un organe spécifique. Cette fonction ne s'explique pas
par rapport à une disposition législative positive, mais
relativement par l'obligation à la loi de nature. Elle est la traduction
du devoir de la droite raison.
Quelques observations s'imposent. Chez J. LOCKE il est
question d'une distinction et d'une hiérarchisation des pouvoirs qui
sont la condition juridique de l'anti-absolutisme et l'axiome principal de son
libéralisme politique. Ceci, pour deux raisons fondamentales. D'une
part, la conception que J. LOCKE se fait de ces différents pouvoirs,
à savoir : les pouvoirs législatif, exécutif et
fédératif est plus fonctionnelle qu'organique. Et l'office qu'il
leur assigne est aux confins du juridique et de l'éthique. Ainsi,
l'obligation à la loi de nature s'impose en chacun d'eux au point de les
situer toujours dans l'orbe de la raison droite et raisonnable. D'autre part,
et du point de vue de la technique juridique, ces pouvoirs ne sont point
séparés les uns des autres. L'exécutif et le
législatif sont liés nécessairement, l'un à l'autre
parce que l'un veille à l'application des règles
édictées par l'autre. Et si le pouvoir exécutif et le
pouvoir législatif diffèrent entre eux par leur vocation qui les
voue aux affaires internes et externes de l'Etat, ils se retrouvent en fait
confiés aux même magistrats. Car, soumettre à des
commandements différents la force publique dont ces magistrats font
usage, est synonyme d'exposer la république au désordre et
à la ruine83. Donc au lieu de « séparation
des pouvoirs », il y a dans l'organisation du Commonwealth
chez J. LOCKE, « distinction », mais liaison des
différents pouvoirs. Cette liaison se traduit par leur convergence vers
la sauvegarde du bien de la communauté.
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