WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Le Discours fondateur des droits de l'homme dans l'anthropologie politique de John LOCKE : essai de compréhension de l'apport lockien dans la Déclaration universelle des droits de l'homme

( Télécharger le fichier original )
par Sédard-Roméo NGAKOSSO-OKO
Université de Yaoundé I - Maîtrise en Philosophie 2001
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

Chapitre VI. L'intuition lockienne d'une théorie des droits de l'homme

VI.1. La mutation des obligations naturelles en droits fondamentaux

Selon J. LOCKE, nous l'avons vu, l'exégèse biblique et la loi naturelle appuient les deux propositions suivantes. Premièrement, Dieu a fait don aux hommes du monde et de tout ce qu'il renferme en qualité de propriété commune à tous. Deuxièmement, la raison naturelle que ce dernier ait placée en eux, leur fait connaître leurs droits d'user des biens du monde en vue de leur subsistance et de leur confort. Ces propositions signifient, d'une part, que le monde et ses biens appartiennent sous le même rapport à tous les hommes. D'autre part, que chaque homme, en vertu du devoir naturel à se conserver en vie et en bonne santé, est fondé à garantir sa subsistance, en accédant aux moyens nécessaires à cet effet. Dans l'esprit de J. LOCKE, ce droit inclusif n'a d'autre finalité que la conservation du genre humain. La propriété commune originelle est ainsi finalisée. C'est cette finalité que nous retrouvons dans la lettre même du livre de la Genèse cité par J. LOCKE pour conférer une caution à sa thèse (cf. page 62, note 121 où nous avons déjà cité ce passage).

L'auto-conservation et la conservation de l'humanité dans son ensemble visent la réalisation du décret divin. Autrement dit, elles visent la liberté de l'homme par rapport à tout pouvoir terrestre. Cette liberté conditionne tout. J. LOCKE y trouve l'essence même de la vie. Ainsi, celui qui s'attaque à la liberté d'autrui, est capable de s'attaquer à la vie de ce dernier127. A cet égard, la liberté et la vie sont des attributs inaliénables. Aucun homme n'a le droit de se faire esclave, moins encore de se donner la mort. La vie et la liberté doivent être défendues contre toutes sortes d'agressions. Voilà pourquoi dans l'état de nature, en l'absence d'un pouvoir supérieur commis à cette tâche, chacun peut se faire le garant de l'orthodoxie naturelle128. Dans l'état civil, ce pouvoir de défendre la légalité naturelle, jadis détenu par tous en commun est confié à un magistrat public. J. LOCKE nous apprend que, l'on est en droit de se défendre contre toutes sortes d'agressions. Même contre

celles venant d'un gouvernement que les hommes ont eux-mêmes institué. L'obligation naturelle des hommes à l'auto-conservation et l'obligation à la conservation du genre humain se mutent en droits naturels à la conservation. Ainsi se justifient le droit naturel à la vie, le droit naturel à la liberté, le droit naturel à lutter contre toutes les formes d'oppression : l'esclavage, l'exploitation, la torture, etc. Les hommes sont donc fondés naturellement, et c'est aussi un devoir positif de se conserver, de conserver l'humanité et enfin de protéger la liberté de l'humanité dans son ensemble.

La conservation de la vie et la protection de la liberté qui sont des droits naturels, passent selon J. LOCKE par la subsistance. Donc par la propriété. Ce problème est étudié dans le cinquième chapitre du T.G.C. Nous souscrivons ici à l'interprétation de J. TULLY129 qui respecte la lettre même du texte de J. LOCKE. Car, sensible à l'ensemble hétéroclite couvert par le terme « propriété » sous la plume de J. LOCKE, laquelle n'annule pas la définition que nous avons déjà donnée à cette notion (page 30, note 58, et page 62, note 121), et que nous réitérons ici : « les actions, les possessions, et la personne ». Autrement dit, ce qui appartient en propre à un individu et auquel nul autre que lui-même n'a accès. C'est un droit que l'on possède sur quelque chose et sur soi même qu'on ne peut vous enlever sans votre consentement.

C'est ainsi que les actions d'un agent libre sur l'« indivis originaire » lui appartiennent et constituent sa propriété. Parmi ces actions, le travail. C'est par lui que se réalise le devoir de conservation dans ce sens qu'il produit les biens nécessaires à la subsistance. C'est lui également qui introduit la différence entre cet « indivis originaire », et ce qui n'est plus commun à tous :

« Tout ce qu'il (l'homme) a tiré de l'état de nature, par sa peine et son industrie, appartient à lui seul : car cette peine et cette industrie étant sa peine et son industrie propre et seule, personne ne saurait avoir droit sur ce qui a été acquis par cette peine et cette industrie, surtout, s'il reste assez de semblables et d'aussi bonnes choses communes f...] Je demande donc quand est-ce ces choses qu'il mange commencent à lui appartenir en propre

? [...] Le travail qui est mien mettant ces choses hors de l'état commun où

elles étaient, les a fixées et me les a appropriées »130.

L'appropriation privée de cet « indivis » par le travail commence dès l'état de nature. L'entrée en communauté politique ne l'annule pas. Au contraire, en son sein, elle se complexifie avec l'invention et l'adoption de la monnaie. Avec l'usage de la monnaie qui lève la limitation à toute appropriation privée des biens de la nature, certains y ont vu la montée de l'individualisme possessif. En d'autres termes, les débuts et l'apologie du capitalisme. C'est méconnaître la signification de la pensée politique profonde de J. LOCKE. Car notons-le, à cette appropriation privée illimitée, LOCKE a toujours assigné des limites de deux ordres131. Primo, il faut qu'il y ait des biens en quantité suffisante et de bonne qualité pour les autres qui sont restés en dehors du processus d'accumulation. Pour que celle-ci ne crée pas de situation de pénurie. Et secundo, il faut que chacun soit en mesure de consommer toute sa production et que rien ne se corrompt. Car ce sera enfreindre à la loi de nature. Ce qui n'est pas sans sanctions naturelles et positives. Le créateur n'a pas fait don du monde à l'homme pour que celui-ci le détruise inutilement.

On reconnaît ici le droit de chaque homme à accéder aux moyens indispensables à sa survie. Et pour ceux qui sont dépourvus, de réclamer à la société leur part de biens pour leur survie et l'épanouissement de leur personnalité. A travers cette théorie de la propriété, il est question pour J. LOCKE de déterminer les droits de l'individu en matière de possession. Il est également question de définir les rapports entre propriété commune originelle du monde et appropriation privée des biens du monde d'une part, et de déterminer le droit individuel en matière d'autodétermination de chacun sur sa propre personne d'autre part. Au-delà, c'est une spécification du statut des biens des citoyens et du citoyen face au magistrat civil.

A partir des simples obligations naturelles au départ, nous voici arrivé aux droits naturels qui sont également valables dans la communauté politique. L'entrée des hommes en communauté politique ne contredit pas les droits naturels.

Bien au contraire, c'est pour permettre qu'ils soient davantage respectés. Ils y acquièrent en dernier ressort, le statut de droits. Dorénavant, il est possible de les défendre et de les réclamer quand on en est privé. Pour J. LOCKE, ils représentent les droits fondamentaux, dont l'absence ou la privation font que l'homme vive en deçà de l'humanité. Mais comment se faire reconnaître et attribuer ces droits ?

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld