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Le Discours fondateur des droits de l'homme dans l'anthropologie politique de John LOCKE : essai de compréhension de l'apport lockien dans la Déclaration universelle des droits de l'homme

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par Sédard-Roméo NGAKOSSO-OKO
Université de Yaoundé I - Maîtrise en Philosophie 2001
  

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I.2. Les fondements philosophiques

I.2.1. L'anthropologie des doctrines du contrat social

L'idée de « contrat social » s'oppose à la thèse naturaliste de l'origine des sociétés civiles et de l'autorité politique. Elle est la pierre angulaire de la réflexion philosophico-politique. Son origine est très controversée13. Certains la situent dans la Bible, qui a considérablement influencé J. LOCKE14. Ils y trouvent une relation scellée par un engagement indissoluble dans la distinction des partenaires qu'elle relie : Dieu et l'homme. D'abord avec NOE après le Déluge15, ensuite avec ABRAHAM16 et enfin avec MOÏSE et le peuple rassemblé au pied du mont Sinaï17. D'autres dans l'illustre civilisation égypto-mésopotamienne avec le très célèbre Code d'HAMOURABI (XVIIIème siècle av. J.-C.)18. D'autres encore dans l'antiquité grecque. Essayons de remonter aux sources de cette intuition. Nous allons voir ce qu'il en est chez les païens grecs, ensuite la métamorphose dans l'Occident chrétien médiéval, et enfin, son paroxysme dans la renaissance et la modernité occidentales avec des possibilités d'en évoquer les persistances de nos jours.

I.2.2. La pensée grecque païenne

Au Vème siècle avant JESUS-Christ les Grecs19 s'interrogeaient déjà sur le fondement du fait politique et juridique : l'existence des lois et des constitutions, la jurisprudence et les tribunaux, etc. Avec le mouvement philosophique initié par SOCRATE (vers 470-3 99 av. J.-C.) et celui des sophistes, pareille réflexion connue son

13Sur cette controverse, voir l'excellent ouvrage de S. GOYARD-FABRE, L'Interminable querelle du contrat social, Edition de l'Université d'Ottawa, 1983.

14Rappelons de mémoire que, LOCKE a été destiné par ses parents à la cléricature. A Christ Church, il a suivi une formation à cet effet, avant de se réorienter en médecine. Dans ses traités politiques de 1690, il cite abondamment les Saintes Ecritures.

15E.B.J., Genèse IX, Cerf/Verbum Bible, 1988.

16Idem, Genèse, XV, 17.

17 Idem, Exode, XXIV.

18Nous renvoyons à F. DUMAS, La Civilisation de l'Egypte pharaonique, Arthaud, 1965, p. 190. Egalement S. GOYARD-FABRE, Op. Cit., Introduction, p. 22.

19SOPHOCLE dans ces tragédies, Antigone par exemple, s'interroge sur la nature des lois. Lorsque par exemple CREON condamne ANTIGONE pour avoir inhumé son frère en dehors des prescriptions édictées par la loi, celle-ci lui répond qu'elle a agit conformément aux lois immuables qui émanent du Ciel.

 

12

20ARISTOTE, La Politique, T I, Livre I, 1253a 2, Vrin, 1962, pp. 28-29.

21Idem, Livre I, 1253a 2p. 30.

22PLATON, La République, Livre II, 359a, GF-Flammarion, 1966, pp. 108-109.

23PLATON, Protagoras, 337a-338b in Protagoras, Euthydème, Gorgias, Menexène, Menon, Cratyle, GFFlammarion, 1990, pp. 68-69.

apogée et, certainement aussi, son plus haut point de systématisation. Deux écoles s'affrontent : les tenants du naturalisme et ceux du conventionnalisme.

Selon les promoteurs de la première école, HESIODE (vers la fin du VIIIème siècle av. J.-C.) et HERACLITE (vers le VIème siècle av. J.-C.) par exemple, les lois ont une origine divine. ZEUS en est l'auteur tout comme la société. Dans cette même optique, la constitution que donna LYCURGUE (entre le XIème et le IXème siècle av. J.- C.) à Sparte lui fut dictée par Dieu. ARISTOTE (3 84-322 av. J.-C.) d'ailleurs ne s'en démarquera pas, selon la tonalité de ce passage de La Politique20 où, reprenant l'intuition présocratique, il s'oppose aux sophistes, partisans du conventionnalisme. La famille, les normes et la cité estime-t-il, sont au nombre des réalités qui existent naturellement. Voilà pourquoi « l'homme est un animal raisonnable » par nature. Ainsi, l'homme sans cité est soit un apatride, soit un être dégénéré, soit encore au- dessus de l'humanité. La cité ne résulte pas d'une convention qui s'opposerait à la nature. Les citoyens ne sont pas, comme le pensait GORGIAS (vers 487-vers 380 av. J.-C.), fabriqués en séries par l'Etat comme les artisans fabriquent les vases21.

Les sophistes, en lesquels nous avons reconnu le courant opposé, avaient établi une antithèse entre la nature et la loi. Celle-ci signifie clairement que tout ce qui est coutume, loi ou convention, ne fait pas partie de l'ordre naturel des choses, et n'existe qu'en vertu de l'opinion convenue entre les hommes, dont il n'y a pas de traces dans les choses naturelles22. A cet artifice de la loi, se joint une explication génétique de la société civile. D'où, vivre selon la nature est une hérésie. La nature est violente, désordonnée et imparfaite, il faut corriger ses imperfections afin de bien vivre23. L'existence et l'ordre dans la cité reposent sur une opposition à cette dernière. De façon génétique, structurelle et institutionnelle, la cité est le résultat d'un pacte. Les institutions ne s'imposent qu'en vertu d'un commun accord passé entre les hommes. Nous voici ici sur une piste qui nous amène à assimiler les sophistes aux pionniers de l'idée de « contrat social ».

24PLATON, OEuvres, T I, Criton, 51 a, b, c & e, les Belles Lettres, 1920, pp. 227-229. Le citoyen (SOCRATE) est lié à la cité par un pacte tacite, le pacte civil. Il s'est mis en accord avec les lois pour faire ce qu'elles ordonnent. D'où la tentative d'évasion de prison proposée par CRITON est rejetée par celui-ci, parce que considérée comme un acte incivique.

25S. GOYARD-FABRE, L'Interminable querelle du contrat social, Edition de l'Université d'Ottawa, 1983, p. 39. 26TITE-LIVE, Histoire romaine, cité par PUFENDORF, Droit de la nature et des gens, « B.P.P.J. » du Centre de philosophie politique et juridique de l'Université de Caen, 1987, Livre VII, Chapitre III, § 01.

Certes, ce sont les sophistes qui ont le plus marqué le conventionnalisme antique. Mais il n'en demeure pas moins que l'on retrouve également cette même idée dans certains dialogues de PLATON24 (428-348 av. J.-C), chez les Epicuriens25 et même chez certains auteurs romains de l'époque impériale comme l'atteste ce passage : « L'autorité ne tire son origine que du consentement de ceux qui s'y soumettent »26.

Comme nous pouvons le constater, s'il est possible de parler des origines grecques de l'idée de « contrat social », il faut le dire, c'est une attitude qu'il faudra adopter avec beaucoup de circonspection. Car, il y a encore des écueils dans cette conception. Elle n'échappe pas à l'antithèse nature/loi et à l'ontologie que ces concepts supposent. Aussi, est-elle davantage développée comme une éthique politique que comme une science du politique. Enfin, il manque encore la thématique qui pose l'individu et l'Etat comme deux extrêmes, entre lesquels il faut établir un lien. Ce qui n'empêche pas que les deux thèmes de conventionnalisme et d'individualisme qui domineront la doctrine du contrat social à l'époque moderne puissent se réclamer d'un lointain enracinement dans la philosophie grecque.

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