UNIVERSITE PIERRE MENDES FRANCE
UFR SCIENCES DE L' HOMME ET DE LA SOCIETE (SHS)
QUELQUES ELEMENTS THEORIQUES ET EMPIRIQUES
SUR LA VISION DES TECHNIQUES ET DES SCIENCES
D' ETUDIANTS DE L3 EN CURSUS SCOLAIRE
SCIENTIFIQUE ET NON SCIENTIFIQUE
Mémoire de Master 1ère année
Mention Sciences de l'éducation
Présenté par Yannick Rivera
Sous la direction de Christian Depret
Année universitaire 2006/2007
Se sentir étranger à tout, voilà
l'excès de la solitude.
André Suarès
Table des matièresI
ntroduction 7
P
ARTIE 1: DES VISIONS DE LA TECHNIQUE
10
La technique chez les Grecs 10
Tekhnè et poïésis 10
La technique volée aux dieux 10
La grandeur de l'homme: acquérir de multiples techniques
11
La technique et l'outil 12
L'outil, libérateur de la parole et créateur de
l'homo faber 12
Machines et outils techniques 13
L'imposition d'un rythme autonome 14
De l'organisation sociale 14
Technique et culture 15
Des savoirs faire traditionnels 16
Gérer efficacement la politique 17
Religion et progrès technique 18
Un système décisionnel technique 20
Rationalisation scientifique 20
Une société technico-scientifique 22
P
ARTIE 2: UNE AUTONOMIE SCIENCES-TECHNIQUES EN
QUESTION 24
Du lien entre science et technique 24
Contraction de sens entre science et technique 24
Les origines de la science 25
Le néologisme « techno-science » 26
Une séparation bien réelle à conserver 27
Une opposition partielle entre sciences et technique 28
Glisser vers l'appel à l'autorité 28
Du savoir universel à l'effet local 29
P
ARTIE 3: L' UTILISATION DE L' ARTEFACT
31
De l'artefact à l'instrument 31
La notion de représentations pour l'action 31
La notion de genèse instrumentale 33
Le rapport de l'individu à l'instrument 34
L'artefact: une boite noire pour l'utilisateur 34
L' oubli des techniques 37
Problématique 38
P
ARTIE 4: RECUEIL DES DONNEES ET DISCUSSION
40
Méthodologie et matériel 41
Objectifs généraux 41
Le questionnaire 41
Détail et construction des variables 44
Type d'étude universitaire (VI) 45
Type de bac (VI) 46
Parcours scolaire (VI) 47
L'échantillon étudié 47
Tableaux de données 48
Tri à plat 48
Tableaux croisés 49
Discussion 49
En résumé 58
Profils des étudiants en fonction du parcours scolaire
60
C
onclusions et ouvertures 61
B
ibliographie 64
A
NNEXES 1
Annexe1: Questionnaire 1
Annexe 2: Tri à plat 6
Annexe 3: Tableaux croisés 9
Annexe 4: Présentation et comparaisons des graphiques
12
Annexe 5 : Khi deux 16
Introduction
Deux grands types d'approches peuvent être
décrit pour parler de la technique. Une première approche
ontologique, liée à l'évolution, qui fournit le concept
clé d'une technologie rationaliste et étudie ses
propriétés générales. Conçue comme concept
transcendantal, elle trace le cadre de la connaissance possible de l'objet
technique. Pour elle, c'est à l'intérieur des limites d'une
essence technique qu'il est possible de parler de progrès (Guchet,
2005). Nous nous attarderons à dresser un panorama large de certaines
approches anthropologiques de la technique au travers d'auteurs comme,
Heidegger, Arendt, Stiegler, Simondon, Leroi-gourhan ou encore Habermas. La
multiplication des artefacts alentours est constitutif de notre culture et
implique un projet. Mais la technique ne s'arrête pas aux artefacts
physiques, elle peut être corporelle ou intellectuelle et engendre une
organisation sociale en faisant évoluer nos routines et nos
manières de vivre.
Une seconde approche descriptive des systèmes
techniques est présente dans la littérature, regroupant les
théories de l'innovation et les efforts pour montrer des lois objectives
d'organisation et de transformation des systèmes techniques. Cette
approche, très déterministe, invite à s'adapter à
l'inéluctable avancée technique, à accompagner sa
progression, elle ne sera pas développer dans ce mémoire.
Comment est perçue la technique, et quels rapports les
étudiants entretiennent ils avec elle? Si il existe un croisement entre
leurs perceptions des techniques et des sciences et leurs manières de
concevoir l'organisation sociale, qu'est ce qui participe à forger leurs
différents points de vue?
Quelques visions de la technique et de son implication dans
la société seront approchées dans la première
partie de ce mémoire. Pour Heidegger (1954), la technique constitue, en
son essence, un mode de dévoilement de l'état dans lequel l'homme
est immergé dès sa naissance. L'auteur allemand identifie deux
sortes de technique. La technè antique qui laisse venir tranquillement
ce qui apparaît, comme la coupe d'argent qui est conduite de la
non-présence à la présence par le travail de l'artisan, et
la technique moderne qui provoque la nature, qui en extrait et accumule
l'énergie disponible. Marcuse oppose à cette vision de la
technique l'expression d'un projet de rationalité historiquement
daté, c'est à dire comme quelque chose qui peut être
dépassé historiquement. Nous nous arrêterons ici à
définir la technique comme étant l'ensemble des
procédés et des moyens jugés efficaces pour obtenir un
résultat désiré.
Depuis l'avènement du progrès technique, les
croyances théologiques sont remplacées par les croyances sociales
et politiques (Stiegler 2004). Aujourd'hui sciences et techniques peuvent
être analysées comme des instruments de légitimation
utilisées par le pouvoir afin de générer des règles
et des habitudes de vie. Cette relation entre science et société
est développée par Habermas (1963) qui critique sa tournure
technocratique. L'avenir se dessine alors avec, à l'horizon, un monde
rationnel scientifique et une maîtrise technique totale.
Sciences techniques et société entretiennent une
relation confuse qui provient de leur histoire respective. Les premières
sciences contemplatives furent dénuées de l'apport de la
technique. Le lien qui les unies l'une à l'autre aujourd'hui n'est
apparu que tardivement (Séris, 2000), lors de la révolution
scientifique du XVIIème sciecle. A partir de ce moment
là, la mathématisation des phénomènes impliquera
des mesures et donc une approche technique. Nous discuterons des troubles
engendrés par un tel recouvrement dans la deuxième partie du
mémoire tentera de positionner techniques et sciences l'une par rapport
à l'autre et donc de différencier leurs champs d'applications.
Les théories anthropologiques de la technique
méritent d'être alimentées par des paradigmes annexes comme
celui de l'utilisation de l'artefact. Dans la troisième partie nous nous
appuierons sur les travaux de Rabardel (1995) afin de détailler
plusieurs notions. Les représentations pour l'action que possède
le sujet lors de l'utilisation d'un instrument le guide et l'oriente lors de
l'activité. En parallèle, certaines représentations et
utilisations d'artefacts montrent une part de superstition et de
méconnaissance des systèmes employés, selon Norman (1983).
Dès lors l'artefact peut être vu comme une boite noire pour
l'utilisateur, créant une interface entre le savoir universel,
crée scientifiquement, et l'effet local recherché par la
technique. Cette approche du rapport entre l'individu et l'objet technique
engage une genèse instrumentale transformatrice du sujet et de
l'artefact.
Stiegler (2004) montre dans une dynamique différente
comment les phénomènes d'instrumentation, transformateurs du
sujet, génèrent une désindividuation lorsqu'ils sont
reproduits à l'échelle planétaire. Dans cette perspective,
une étude de certaines représentations des techniques et des
sciences chez les étudiants pourrait nous renseigner sur certains de
leurs jugements déclarés ainsi que sur leur rapport aux
techniques. La dernière partie propose une étude quantitative
tentant de mettre en avant trois dimensions de leurs représentations.
Nous mesurerons les différences de choix individuels exprimés en
fonction des techniques qui sont disponibles dans les situations
proposées. Ensuite nous comparerons les prises de position des
étudiants, par rapport aux sciences, lors de décisions à
caractère social. Et enfin nous tenterons de voir les connaissances
qu'ils déclarent avoir autour de la méthode scientifique et de
l'autonomie des champs scientifiques et techniques. Nous étudierons la
corrélation entre les réponses des étudiants et leur
parcours scolaire où nous différencierons des profils
scientifiques et des profils non scientifiques.
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