1.1.2 L'approche participative comme fondement
d'intégration des populations locales
Connue depuis longtemps pour son efficacité dans des
projets de développement à caractère rural, cette approche
a eu des succès suite à l'échec cuisant de la
démarche classique de développement par « transfert de
technologie » et « planification centralisée
» dans les
pays du Sud. Au départ, comme l'affirme F. Busson
(1999), les ONG, plus proches des populations cibles et travaillant sur de
petits espaces, furent les premières à essayer de mettre au
profit des méthodes plus réalistes, basées sur un meilleur
contact avec le monde rural et les besoins des populations locales. Dans la
suite, ce sont les grands organismes (Banque Mondiale, FAO, etc.) qui
empruntèrent ce chemin. Mais après quelques années de
travail, ces derniers constatèrent que leurs projets eurent peu de
réussites. La principale raison avancée était que les
concernés, les populations locales notamment, n'avaient pas
été considérés comme des acteurs capables de faire
quelque chose, mais comme de « simples bénéficiaires
passifs. » Ce qui constitue selon les spécialistes du
développement, la marque d'une approche « de haut en bas
» et non participative comme on pouvait le croire.
Face à ces échecs, les agents de
développement ont pris conscience que la prise en compte des
savoirs-faire des acteurs locaux est un atout majeur pour réussir son
projet en milieu rural. Ceci leur a conduit à l'élaboration des
méthodes d'évaluation plus efficaces où les populations
locales participent non seulement aux actions de développement mais
aussi aux travaux de conception, d'instruction et d'exécution de leurs
projets. Parmi les nouvelles méthodes d'évaluation
adoptées, on peut citer le « Rapid Rural Appraisal: RRA
» (ou le « Diagnostic Rural Rapide ») issu de deux
constatations importantes selon lesquelles « les études
exhaustives sont trop longues et comportent trop d'informations sans
valeur » d'une part, et que « les études
préalables classiques sont souvent faites trop rapidement et de
façon trop sectorielle » d'autre part (Busson F., op. cit.).
Par contre, la RRA est une méthode conduite dans un temps limité,
mais par des équipes pluridisciplinaires (géographes,
économistes, anthropologues, historiens, etc.) avec une large
possibilité d'échanger les idées.
Par ailleurs, le même auteur précise que
l'intérêt d'impliquer plus directement les populations locales aux
actions de développement est apparu au début des années
1980, année où est alors développée la
méthode de « Participatory Rural Appraisal: PRA
» (ou le «Diagnostic Rural Participatif. »)
Cette méthode consiste d'une part à informer les populations
bénéficiaires du démarrage des projets, des objectifs
qu'ils poursuivent et de la manière dont elles doivent intervenir,
d'autre part à connaître les populations, le milieu, le contexte
de leur organisation et l'évolution socio-économique en vue de
rechercher les solutions appropriées (Bationo B., 1998). La
différence entre les deux méthodes d'évaluation repose sur
l'attitude de l'enquêteur, qui cherche plus à «
identifier les capacités des populations locales que d'en tirer de
simples informations. » Il faut noter que ces méthodes sont
souvent utilisées par des organisations de protection de la nature dans
des enquêtes qui précèdent la création d'un projet
intégré de conservation et de développement comme c'est le
cas du WWF avant le financement du projet d'intégration des populations
Dayak en Indonésie au début des années 1990 (Chartier D.;
Sellato B., 1998).
L'autre méthode qui s'appuie sur les capacités
des paysans avant de créer un projet dans la région est la «
Méthode Accélérée de Recherche Participative:
MARP. » Plus récente dans les projets de développement
à caractère rural, cette méthode crée une sorte de
convivialité entre les initiateurs du projet et les
bénéficiaires. Elle permet ainsi à tous les acteurs de se
rencontrer, de se connaître les uns les autres afin d'identifier ensemble
des objectifs où chacun a son rôle à jouer. Son objectif
est donc d'assurer une étude presque complète de l'environnement
dans lequel va s'insérer le projet, puis de relever les
différents problèmes existants et leurs probables solutions.
Chaque séance est clôturée par un repas d'ensemble
là où le monde d'en haut (les initiateurs du projet) et celui
d'en bas (les populations locales) profitent de cette grosse occasion (ce
repas) pour discuter en long et en large sur les thèmes non
évoqués lors de la séance de travail. Cette méthode
est aujourd'hui
préférée par les organisations non
gouvernementales américaines dans le cadre des programmes de lutte
contre la pauvreté dans les pays de l'Afrique de l'Est comme le Rwanda
et l'Ouganda.
Cependant, il faut reconnaître que ces nouvelles
méthodes se heurtent, elles aussi, à certains obstacles au niveau
de leur mise en pratique. Le premier obstacle est dû au fait que les
souhaits des paysans sont souvent variés selon les besoins de chacun, ce
qui est difficile (pour les bailleurs de fonds) de satisfaire à leurs
besoins ou de les combiner par thèmes selon les objectifs du projet.
L'autre obstacle est enfin lié aux initiateurs du projet qui orientent
de leurs manières les souhaits des populations tout en
considérant les consignes d'une vision mondialiste
prédéterminée des problèmes du développement
et de la gestion des milieux ainsi que les moyens d'y répondre (Rossi
G., 2000), ce qui compromet ainsi les objectifs principaux de ces
méthodes.
De toutes les façons, l'approche participative, parfois
qualifiée de néo-populiste, est aujourd'hui la seule
méthode qui est efficace pour étudier les relations entre les
populations et les aires protégées dans un contexte actuel de
« développement durable. »
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