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Le baccalauréat: Un rite de passage dans une société moderne occidentale comme la France ?

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par Abdou Khadre LO
Université de Caen Basse-Normandie - Maîtrise de Sociologie 2000
  

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Conclusion

Les ethnologues se servaient de leurs connaissances théoriques et conceptuelles pour étudier avec le plus d'objectivité possible, des sociétés traditionnelles et « lointaines » qui n'étaient pas les leurs ; nous avons voulu, pour notre part, essayer de mettre en exergue un fait social de la société dans laquelle nous évoluons depuis notre passage du baccalauréat.

Nous ne prétendons aucunement, nous rapprocher de ces ethnologues, ni même faire de l'ethnologie à l'envers. D'ailleurs le voudrions-nous, cela ferait-il sens ? Parce que d'une part, dans le monde moderne, ce qui était autrefois du domaine de l'extérieur, du lointain et du distant peut aussi relever de l'immédiat, du proche et du familier. Malgré les écarts pouvant encore exister entre les sociétés traditionnelles et les sociétés modernes, il y a néanmoins un métissage et un rapprochement des cultures via les mondialisations. D'autre part, l'élargissement du champ ethnologique aux sociétés modernes et / ou le développement de l'anthropo-sociologie rendrait caduque une telle entreprise.

Dans notre démarche de lire le passage du baccalauréat avec les lunettes de l'anthropo-sociologie, nous avons voulu saisir en quoi le baccalauréat, avec toute la symbolique qu'elle revêt en France, marque de façon significative l'entrée du lycéen dans un monde autre. En d'autres termes, il s'agissait de voir si le baccalauréat, à l'instar de la circoncision ou d'autres cérémonies dans les sociétés traditionnelles, ne marque pas dans une société moderne occidentale comme la France un rite de passage : un passage à l'âge adulte.

Dans la première partie de notre étude, nous avons fait l'état des lieux des rites de passage en France, après avoir tenté de cerner la notion de rite. La ritualité y est apparue très difficile à définir à cause notamment de la plasticité de la notion. Les auteurs en définissant le rite ont d'ailleurs irrésistiblement glissé vers sa fonction. Ils se sont appliqués à trouver le sens des rituels dans leur efficacité. Par contre, les rites de passage semblent être plus commodes à saisir dans la mesure où ils ont été formalisés dans un schéma par Arnold Van Gennep. Au-delà de leur efficacité, on doit toujours observer dan les rites de passage les trois séquences que constituent la séparation, la marge et l'agrégation.

A la question de savoir si la société française est déritualisée, nous avons rappelé les deux positions qui s'opposent. Certains auteurs soutiennent que les rites déclinent logiquement dans les sociétés modernes occidentales du fait notamment de la sécularisation qui y a cours. D'autres, au contraire, considèrent qu'il s'agit plus d'une transformation que d'une disparition des rites.

En effet, l'argument décisif avancé est qu'il ne peut pas y avoir de rapports sociaux sans actes symboliques or les rites ne sont rien d'autres que la formalisation et la répétition de ses actes. Toute société humaine, quelle qu'elle soit, est tissée dans une toile de sens.

A la lecture de cette divergence, nous n'avons voulu éviter dans notre démarche les écueils que sont le « rien rituel » et le « tout rituel ».

Dans la seconde partie, nous nous sommes bornés à retracer l'historiographie de l'examen. Ainsi nous avons vu que le baccalauréat, en France, trouve ses origines dans le moyen âge et dans l'aristocratie ancienne avant d'être institué définitivement par l'empereur Napoléon Bonaparte comme le premier diplôme universitaire. Il n'a dès lors cessé d'être traversé par les réformes et les vagues de polémiques qui les accompagnent.

Des réformes telles que celles de Victor Duruy, de 1890 ou encore de 1902 ont apporté au baccalauréat une assise définitive qui lui a permis de subsister malgré les innombrables tentatives d'abolition. Plus récemment, les gouvernements ont essayé d'apporter leur pierre à l'édifice soit par la modification de certains aspects de l'examen (introduction ou suppression de matières) soit par l'émission de simples projets. Aucune manoeuvre ministérielle n'a laissé l'opinion indifférente. En effet l'attachement au baccalauréat et / ou à ce qu'il représente semble être d'autant plus forte qu'il s'inscrit dans le temps. Le baccalauréat, dans sa forme « moderne », est aujourd'hui bicentenaire. Certains ministres de l'Education Nationale, en voulant trop bousculer l'édifice monumental du baccalauréat ont appris à leur dépend son efficacité symbolique et sociale.

Il ressort de la troisième partie de notre analyse que le baccalauréat est le grand baromètre de l'enseignement secondaire. Tout dans le second cycle semble s'organisait autour de l'examen. Cette consécration du baccalauréat s'expliquerait donc, d'une part, par son rôle d'édifice deux fois séculaires soutenant une construction complexe, d'autre part par une efficacité à la fois sociale et symbolique.

Le baccalauréat reste malgré les controverses qui l'accompagnent depuis sa création une référence dans la société française. L'impératif d'organiser l'examen quoi qu'il arrive (exemple de la seconde guerre mondiale ou des événements de mai 1968) traduit la volonté de conserver ce repère fixe dans une société mouvementée. En cela, le baccalauréat est un rite qui dans cette société à forte mobilité permet, comme tous les rites de maîtriser le temps. Il constitue, dans le mouvement, une fixité ou un repère stable qui permet à la société de se rassurer sur une maîtrise des événements qui adviennent bon gré malgré.

Le baccalauréat représente le gage de l'existence de l'éducation et de son sérieux. Il est, pour les politiques à la fois la preuve tangible du bon fonctionnement du système et du socle à partir duquel les jeunes construiront leur avenir et celui du pays. C'est un examen et / ou un diplôme qui a une efficacité toute sociale ; en cela aussi le baccalauréat constitue un rite.

Les élèves intègrent le baccalauréat comme une nécessité dans la société dans laquelle ils vivent. Il constitue pour eux le moyen d'acquérir « une plus grande culture », « plus de liberté » ou encore «de trouver un emploi ».

Par tous ces parchemins qu'il est sensé offrir, le baccalauréat concentre en lui une forte charge tout aussi sociale que symbolique. En effet, par son existence, il agit sur les élèves en reproduisant un consensus autour des valeurs partagées par la société (les valeurs de travail et de réussite), mais il leur offre aussi la possibilité de montrer qu'ils peuvent s'adapter au mode de fonctionnement de la société. Le baccalauréat a donc une efficacité toute symbolique. En cela également, il est un rite.

Enfin le baccalauréat est le passage d'un monde à un autre d'un statut déterminé à un autre statut tout aussi déterminé. Le passage étant marqué par le formalisme, la solennité, le cérémonial, et par l'observance de normes et de pratiques prescrites : préparation, inscription, lieu et horaire des examens, annonce des résultats, inscription à l'université. Ce passage respecte aussi, de façon précise, les moments de séparation, de marge et d'agrégation. En cela, le baccalauréat est un rite de passage.

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"Il existe une chose plus puissante que toutes les armées du monde, c'est une idée dont l'heure est venue"   Victor Hugo