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Problématique d'administration de la preuve de l'infraction de viol en droit pénal burundais

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par Axelle Nzitonda
Université Lumière de Bujumbura - Licence en droit 2007
  

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§3. Objets matériels et traces corporelles

Durant le viol, l'auteur peut laisser quelques traces sur le corps de la victime. Il peut s'agir des traces de sang, des empreintes, des marques des coups et blessures, etc. L'enquêteur qui se rend sur les lieux ou les agents de santé qui accueillent la victime, peuvent également prélever quelques preuves comme des vêtements ou taches de sang, de boue ou de sperme.

Les éléments de preuves seront collectés au plus vite après le viol (de préférence avant 72 heures à partir du moment de l'agression). Il est préférable que les éléments de preuve recueillis soient soigneusement conservés par la personne qui a examiné la victime en premier lieu (l'infirmier ou le médecin). L'agent de santé doit transcrire toutes les informations et les constatations de manière complète, précise et sans porter aucun jugement sur la fiche de prise en charge d'une victime de violence sexuelle ou un dossier médical.99(*)

Toutes ces traces quoi qu'elles n'indiquent pas directement le coupable, elles font tout de même présumer qu'il s'est passé quelque chose et constitue un élément dans la recherche de la vérité.

§4. Expertise médico-légale

L'expertise médico-légale est très importante. Elle est une première constatation de l'infraction de viol.

Le but de cette expertise médicale est de:

« - confirmer un contact sexuel récent ;

- constater par des preuves visuelles qu'il y a eu emploi de la force ou de moyens de coercition ;

- confirmer le récit de la victime ;

- récolter si possible, les informations qui pourraient contribuer à identifier l'agresseur. » 100(*)

Tout médecin agréé est apte à être expert et peut établir un certificat médico-légal sous serment selon le Ministère de la Santé. Mais il appartient au juge et au ministère public de désigner l'expert. Il est donc important que la victime se fasse examiner par un médecin expert qui aura été désigné par le ministère public.101(*)

Dans certaines situations, l'état de santé d'une victime de violences sexuelles peut se détériorer en raison des complications médicales après qu'une première expertise médicale a été réalisée. Dans ce cas, une seconde expertise est possible et souhaitable sur demande de l'OPJ ou du ministère public. Cette seconde expertise est obligatoirement réalisée par le même médecin expert. Il est également possible que la première expertise ne soit pas satisfaisante pour la victime qui peut alors demander à l'OPJ en charge de son dossier de lui désigner un autre médecin expert pour une seconde expertise.102(*)

En effet, dès que la police judiciaire est saisie d'une plainte relative au viol, l'OPJ chargé du dossier écoute la victime et rédige un procès-verbal d'audition qui constitue le dépôt de la plainte. L'OPJ s'empresse donc à rédiger une réquisition à expert intitulé « réquisition à expert et prestation de serment » (voir annexe I) qui constitue une demande de constat de l'agression par un médecin expert. La victime est donc envoyée dans les plus bref délais chez le médecin expert désigné qui a l'obligation de rédiger le certificat médico-légal (voir annexe II) et de collecter les preuves légales conformément aux instructions nationales. C'est le seul document qui peut aider à l'établissement de l'infraction.

Durant l'examen physique, la victime sera examinée de la tête aux pieds en insistant sur les zones vulnérables (les oreilles, la bouche, le cou, les seins, les avant-bras, éventuellement les marques de tentative de parade, les poignets, la fasse interne des cuisses et les chevilles (preuves d'immobilisation). On examine aussi les parties génitales de la victime pour évaluer l'étendue des lésions.103(*)

Le constat de l'examen physique est mis en rapport avec les données recueillies lors de l'entretien. Par exemple, les tympans perforés, probablement suite à des coups, le cuir chevelu arraché,...

La confection du dossier médical se fait à l'aide de tous les éléments relevés lors de l'examen clinique (interrogatoire, examen physique) et les examens complémentaires si nécessaire.

Lors de l'entretien avec le médecin du centre SERUKA, elle nous a suggéré que les résultats sont souvent libellés comme suit :

- Signe d'un traumatisme au sexe ;

- Rougeur de la muqueuse vulvaire ;

- Oedème des petites lèvres (gonflement) ;

- Déchirure de l'hymen partiel ou total (les berges peuvent saignoter) ;

- Plaie périnéale superficielle ou profonde ;

- Euchymose ;

- etc.

Différentes conclusions :

- Il n'y a pas de signe d'un traumatisme du sexe. A confronter avec l'interrogatoire ;

- Il y a des signes d'un traumatisme récent au sexe avec défloration récente ou ancienne ;

- etc.

Selon toujours ce médecin du Centre SERUKA, l'absence de signes physiques ne justifie pas l'absence de viol.

L'expertise, bien qu'elle ne désigne point l'auteur de la relation sexuelle, permet d'établir au moins la matérialité de l'acte commis sur la victime. Et même si elle ne lie pas le juge dans ces décisions, il est très difficile de trancher qu'il y a eu viol en l'absence de signes cliniques de viol.

Il faudra également et surtout savoir qu'aucun agent de santé ni médecin expert n'a la responsabilité de conclure en qualifiant lui-même l'infraction et en désignant l'auteur ; ceci relève de l'autorité judiciaire.

A titre illustratif, en date du 09/01/1991, la Cour d'appel de Ngozi a condamné Monsieur Léon K. pour un double viol sur la personne de deux fillettes de 10 ans et 11 ans. Celui-ci étant leur instituteur, il les a enfermés dans une classe avec lui sous prétexte qu'elles avaient eu un échec en calcul. Il leur a ordonné de faire des exercices physiques toutes nues sur des pupitres, lesquels consistaient à élever les jambes jusqu'à ce que lui aussi se déshabille et les viole. L'expertise médicale faite sur l'ordre de l'officiel de police judiciaire à l'endroit des deux fillettes a été très déterminante parce qu'elle prouvait que les fillettes avaient réellement été violées et que même l'une d'elle avait développé une maladie et que ses organes avaient été sérieusement endommagés.104(*)

§5. Précarité des moyens de preuve de viol disponibles au Burundi

Si le principe de liberté de preuve est retenu en matière pénale, les divers modes de preuve sont employés par l'enquêteur pour charger ou décharger la personne soupçonnée d'être l'auteur de l'infraction concernée. Nous venons donc de décrire les modes probatoires les plus utilisés tels que l'aveux, le témoignage, les présomptions et l'expertise médico-légale et la conclusion qui se tire est que le chemin est encore long dans notre pays au niveau de la recherche de la preuve inculpant de façon incontestable le présumé coupable de viol. De telles possibilités de la recherche de la véracité des faits ne suffisent pas à elles-mêmes à prouver de façon incontestable le crime commis. Elles méritent d'être corroborées par d'autres voies plus sûres faisant souvent intervenir la technologie moderne. C'est l'objet même du troisième chapitre où nous aurons à décrire les difficultés que subit l'enquêteur pour établir la responsabilité de l'auteur et suggérer des évolutions.

* 99 Ministère de la Santé publique, Manuel de formation pour la prise en charge de victimes des violences sexuelles à l'attention du personnel de santé, Bujumbura, inédit, 2002, p.103.

* 100 Ministère de la Santé publique, Manuel de formation pour la prise en charge de victimes des violences sexuelles à l'attention du personnel de santé, Bujumbura,inédit, 2002, p.106.

* 101 Ministère de la Santé publique, Manuel de formation pour la prise en charge de victimes des violences sexuelles à l'attention du personnel de santé, Bujumbura,inédit, 2002, p.107

* 102 Ministère de la Santé publique, Manuel de formation pour la prise en charge de victimes des violences sexuelles à l'attention du personnel de santé, p.108.

* 103 DELMORE, C., Les victimes des violences sexuelles, saint Etienne, imprimerie raynaud-42000, 1992, p.82

* 104 RPA 1959, RP685, RNP 1060/NA, Recueil de décisions judiciaires burundaises, Contentieux des violences sexuelles, Bujumbura, inédit, 2003, p.167.

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