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La "class action"

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par Didier Ndoubayo
Université de Nancy II - Master de Droit privé général 0000
  

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Section 2: Les obstacles liés à l'existence de certains principes directeurs du procès dans

Le système judiciaire français.

Dans les systèmes connus de la «Class action», notamment québécois et américain, l'introduction de l'action et sa certification par le juge créent le groupe et valent représentation de tous sur l'initiative de quelques-unes des victimes : le préjudice dit de masse légitime une dérogation au droit d'action individuel, au droit de ne pas agir. La «Class action» apparaît ainsi en totale contradiction avec les règles essentielles qui commande le déroulement du procès en France : ce sont les principes directeurs de l'instance auxquels sont consacrés les 24 premiers articles du Code de procédure civile. En réalité, sur un plan général, rien n'indique que les règles habituelles de la procédure devraient être modifiées33(*). Néanmoins, l'on ne peut que mesurer combien notre droit est éloigné de ce système, nonobstant l'accroissement des pouvoirs du juge de la mise en état et des recours à des expertises, les principes directeurs du procès que sont : la règle du «nul ne plaide par procureur», le principe du contradictoire et du droit de la défense ainsi que le principe de l'autorité relative de la chose jugée demeurent des obstacles de taille.

Paragraphe 1 - La règle du «nul ne plaide par procureur».

La règle «nul ne plaide par procureur» constitue a priori le premier obstacle à l'introduction de la «Class action» dans notre système judiciaire. On peut ainsi abolir la maxime «nul ne plaide par procureur» pour apporter secours à une classe, ou des classes, de la société, et l'instrument principal de la justice commutative - la magistrature - peut s'adapter aux exigences de la justice distributive. La magistrature peut-elle en tant que telle, venir au secours des classes, non pas par l'exercice d'un simple pouvoir judiciaire législatif, comme il est souvent présumé, mais en apportant une aide immédiate et concrète aux membres de chaque classe, en visant leurs caractéristiques génériques et en forgeant des remèdes communs qui portent bénéfice à tous?34(*)

«Nul ne plaide par procureur», et ainsi il faut indiquer les noms de ceux pour lesquels l'action est intentée, faute de quoi l'action doit être rejetée35(*). La jurisprudence refuse de présumer la violation des droits individuels. Dans ce sens, la loi Royer du 27 décembre 1973 autorise dans son article 46 les associations à «exercer devant toutes les juridictions l'action civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif des consommateurs». La cour de cassation, interprétant ce texte ambiguë limite le recours à l'exercice de «l'action civile» proprement dite (impliquant nécessairement un infraction à la loi pénale). La chambre criminelle de la cour de cassation) refuse que l'action associationnelle donne lieu à la compensation du préjudice subi personnellement par les victimes directes de l'infraction, seules capables d'en demander réparation36(*). Par cette interprétation de la loi Royer, la jurisprudence rejette la «Class action».

La maxime «Nul ne plaide par procureur» a joué un rôle très large, bien qu'implicite en interdisant l'appui des tierces personnes et en pénalisant l'absence physique des parties. La représentation en justice est devenue de rigueur à cet effet.

Cependant, cet obstacle n'est pas totalement insurmontable. Bien entendu, le contexte a largement évolué depuis l'époque révolutionnaire, où la crainte des corps intermédiaires avait conduit au rejet de toute forme d'action collective. La maxime «nul ne plaide par procureur» (qualifiée d'archaïsme procédural37(*)) n'interdit pas la représentation à l'action (ad agendum) ; toute personne peut donner mandat à une autre d'agir à sa place, par un contrat, parfois c'est la loi qui désigne le représentant, ainsi en est-il du représentant des créanciers dans le droit des procédures collectives. Parfois, c'est le juge, pour un mineur ou un majeur incapable. Mais, pour cela, il faut une autorisation expresse. Or cette autorisation n'existe pas dans la procédure en «Class action»; du moins dans le système de l'opt out «Class action». La maxime renvoi surtout aujourd'hui à une exigence de transparence du procès, dont il faut se demander s'il convient de la faire céder devant l'impératif d'efficacité. Dans ce sens, le Professeur S. GUINCHARD a affirmé qu'il s'agit d'une dérogation au principe en faveur de la «Class action». Quoiqu'il en soit, les atteintes portées par la «Class action» au droit français ne se limite au principe «nul ne plaide par procureur», en effet, elles heurtent par ailleurs le respect du principe du contradictoire et du droit de la défense.

Paragraphe 2 - La violation du respect du principe du contradictoire et du droit la défense.

Le constat de la violation du respect du droit de la défense résulte de la violation d'une série de règles liée au déroulement de l'instance.

En premier rang vient le principe de l'égalité des armes, garantie essentielle du procès équitable prévue par la Convention européenne des droits de l'homme. La Cour européenne des droits de l'homme rappelle constamment qu'une procédure n'est pas contradictoire si «le président n'a pas entendu le requérant et ne l'a pas invité à présenter ses observations»38(*). Le juge devra vérifier que tous les protagonistes ont été à même de bénéficier du droit d'être entendus. Mais cette exigence, à bien des égards condamnerait l'opt out. La rupture d'égalité paraît bel et bien attestée par le fait que le défendeur ne connaîtra pas tous ces adversaires39(*). Cette rupture d'égalité est inhérente au système de l'opt out, alors que le représentant de la «Class action» l'identifiera quant à lui parfaitement. Le fait que la multitude des membres du groupe s'éclipse derrière un représentant favorise en outre un risque de mensonge ou d'abus. Cette procédure offre aux requérants la possibilité d'attaquer leur adversaire de façon «invisible».

C'est par ailleurs au regard du principe du contradictoire et des droits de la défense que l'action de groupe ne manque pas de soulever la difficulté la plus sérieuse. De fait, il ne faut pas oublier que dans l'opting out, toutes les victimes ne sont pas identifiées précisément : il est évidemment impossible que chacune présente des observations, et que le défendeur puisse faire valoir contre chacune d'entre elles ses arguments, notamment dans l'appréciation du préjudice de chacun, en opposant par exemple le comportement fautif de certaines victimes ; ce qui heurterait les droits de la défense. Pour contourner cette difficulté, la doctrine a proposé que la «Class action» soit, au mois dans un premier temps, limitée, en droit français, aux hypothèses de contentieux objectifs (celles relatives aux contrats et de la sécurité des biens mis en circulation), à l'exclusion de contentieux de la responsabilité civile qui, lui, est un contentieux subjectif. Cette proposition réduit à néant l'intérêt d'introduire en France une «Class action» avec le système de l'opt out, car ces actions sont d'abord faites pour obtenir des dommages et intérêts, manifestation concrète de l'indemnisation d'un préjudice de masse. Pour les stipulations contractuelles, le droit français connaît déjà des actions spécifiques en suppression de clause abusives.

Un dernier principe essentiel du procès français renforce par son incompatibilité, l'inadaptation du droit procédural français à la «Class action» : le principe de l'autorité relative de la chose jugée.

* 33 S. GUINCHARD, L'action de groupe à la française, RIDC 2, 1990, p. 599 et s.

* 34 H. PATRICK GLENN, A propos de la maxime «nul ne plaide par procureur». RTD Civ. 87 (1) janv.-mars 1988.

* 35 Soc. 3 nov. 1972, Bull. civ. V, n° 595, p. 541, Lexis n° 1298, 1299 et 1230.

* 36 Crim 20 mars 1985, J.C.P. 1985. IV. 272.

* 37 V. CABALLERO, «Plaidons par procureur! De l'archaïsme procédural à l'action de groupe», cette Revue 1985. 247.

* 38 CEDH 9 mai 1986, Feldbrugge c/ Pays-Bas. www.dhcour.coe.fr.

* 39 Comm. EDH 16 juill. 1968; 27 oct. 1993, Dombo Beheer.

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