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L'application par les juridictions répressives internationales de l'article 3 commun aux conventions de Genève et du protocole additionnel II auxdites conventions: cas du tribunal pénal international pour le Rwanda

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par Jean Baptiste UWIHOREYE MUKARAGE
Universite Nationale du Rwanda - Licence en Droit 2006
  

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B. La connaissance ou les informations permettant le supérieur de conclure qu'un crime était ou allait être commis

A ce niveau, il s'agit d'analyser l'intention ou la mens rea qui animait le supérieur hiérarchique lors de la prise de sa décision face aux circonstances du moment. Il n' y a pas de problème si le supérieur savait ou si la preuve peut être apportée qu'une infraction était commise ou allait être commise par exemple parce qu'il y a eu connaissance d'actes préparatoires ou des violations antérieures.

Comme le constatent les juges du TPIR dans l'affaire Akayesu66(*), les interprétations relatives à la mens rea exigée pour constituer la responsabilité pénale du supérieur hiérarchique divergent. Certains soutiennent qu'elle découle d'une norme de responsabilité objective ou vicariale, c'est-à-dire que le supérieur hiérarchique est responsable des actes commis par son subordonné, sans qu'il soit nécessaire de prouver que le supérieur était animé d'une quelconque intention délictueuse. D'autres, par contre, considèrent qu'une négligence patente, au point qu'elle s'assimile à un consentement ou à une intention délictueuse, est au moins à prouver. La question de savoir la nature de la responsabilité pénale du supérieur hiérarchique semble être résolue par les tribunaux internationaux (TPIR et TPIY) en faveur de la seconde thèse.

Il n'est pas exigé que le supérieur ait su qu'une infraction était commise ou allait être commise pour que sa responsabilité pénale soit engagée; il suffit seulement qu'il ait eu des raisons de savoir67(*) que ses subordonnés étaient sur le point de commettre un crime ou l'avaient commis et qu'il n'ait pas pris les mesures nécessaires ou raisonnables pour empêcher que ledit acte ne soit commis ou pour en punir les auteurs. C'est une sorte de responsabilité par omission ou abstention. Il convient, comme le précise le jugement Akayesu, de s'assurer d'une intention délictueuse, ou, pour le moins, d'une négligence si flagrante qu'elle s'assimile à un consentement ou même à une intention délictueuse68(*).

D'une manière ou d'une autre, on remarque que la responsabilité pénale du supérieur hiérarchique n'est pas fondée sur une responsabilité objective. Nous sommes de l'avis du TPIR dans l'affaire Semanza, où les juges de la Chambre de première instance ont renoncé à imposer à l'accusé une responsabilité pénale objective69(*). Dans cette affaire la Chambre de première instance a donné son avis en ces termes :

« La responsabilité pénale du supérieur hiérarchique n'est pas une responsabilité objective. Ainsi une personne qui appartient à la chaîne de commandement ne voit pas sa responsabilité engagée en tant que supérieur hiérarchique du seul fait qu'il avait autorité sur un tel ou tel territoire. Encore que la position de commandement puisse constituer un indice sérieux permettant de penser que le supérieur hiérarchique était au courant des agissements de ses subordonnés ou qu'il avait des raisons d'être au courant, elle ne serait à elle seule fonder une présomption de connaissance ».

 

A la lecture de ce passage, force est de constater que la connaissance ne saurait être présumée. Cependant, comme l'affirme la jurisprudence du TPIY en la matière, cette connaissance peut être établie sur la base des moyens de preuves directs ou conjecturaux70(*). Il est à noter que ce n'est pas à la défense de prouver l'absence de la connaissance mais il appartient à l'accusation de prouver que les informations concrètes sont portées à la connaissance du supérieur hiérarchique indiquant que ses subordonnés vont commettre ou ont commis des infractions. Chaque cas doit être appréciée en fonction de la situation où se trouvait le supérieur hiérarchique intéressé et des circonstances qui l'entourent.

Par ailleurs, si un commandant a exercé la diligence due dans l'accomplissement de ses devoirs mais ignore pourtant que les crimes sont sur le point d'être commis ou l'ayant été, cette ignorance ne peut être retenue contre lui. Par contre, si l'ignorance résulte d'une négligence dans l'accomplissement de ses devoirs, elle ne serait constituer un moyen de défense car ce commandant avait des raisons de savoir71(*).

* 66 Le Procureur c. Akayesu, jugement, cité à la note 21, §. 488.

* 67 Le supérieur hiérarchique a « des raisons de savoir » s'il est en possession d'informations suffisantes le mettant en garde contre un risque de perpétration d'actes illicites par ses subordonnés, en d'autres termes si les éléments dont il dispose suffisent à justifier la demande d'un complément d'information. Voy. Jugement Kordic et Cerkez, op. cit., §. 437.

* 68 Id., §. 488.

* 69 Le Procureur c. Semanza, jugement, cité à la note 16, §. 404. Voy. aussi Le Procureur c. Bagilishema, jugement, cité à la note 53, §§. 44-46.

* 70 On peut citer entre autre le nombre d'actes illégaux, leur type et leur portée, la période durant laquelle les actes illégaux se sont produits, le nombre et le type de soldats qui y ont participé, les moyens logistiques éventuellement mis en oeuvre, le lieu des crimes, la multiplicité des actes, la rapidité des opérations, les officiers et les personnels impliqués et le lieu où se trouvait le commandant quand les actes ont été accomplis. Le Procureur c. Mucic et al. (Affaire Celebici), arrêt, cité à la note 62, §. 386. Voy. aussi le Procureur c. Kordic et Cerkez, jugement, cité à la note 58, §§. 427-428 ; Le Procureur c. Blaskic, jugement, cité à la note 58, §§. 307-308.

* 71 Le Procureur c. Blaskic, jugement, cité à la note 58, § 332.

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