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L'autopartage constitue-t-il une solution viable pour amorcer un changement durable des pratiques de mobilités ? L'exemple de Montpellier

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par Charly Muziotti
Université du Maine - Master Politiques Territoriales et Developpement Urbain 2018
  

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2. La genèse de l'autopartage et son essor progressif sur le territoire français

Les premières initiatives, des précurseurs à la renommée limitée (Zurich, ProcoTip)

Le premier service d'autopartage émergent à Zurich en 1948. Il s'agit de particuliers n'ayant pas les moyens de soutenir le coût d'une voiture personnelle, et qui se regroupent sous une coopérative afin d'acheter des véhicules et d'en partager l'utilisation ensemble. Sans vocation commerciale, cette coopérative a perduré jusqu'en 1998 en comptant un nombre d'adhérents restreint.

C'est au début des années 1970 que la première initiative est développée en France. Cette première tentative a été réalisée à Montpellier de 1971 à 1974 par la coopérative ProcoTip.

Focus sur la première tentative d'autopartage à Montpellier, ProcoTip

En 1971, sous l'impulsion du maire de l'époque, François Delmas, une coopérative d'autopartage a été testée à Montpellier. ProcoTip avait un parc automobile composé uniquement de Simca 1000, répartie du 18 stations et utilisables en aller-simple pour les utilisateurs ayant rejoints la coopérative.

Compte tenu du manque d'accessibilité et de fiabilité de la technologie RFID à l'époque, l'accès à la voiture se faisait via une clé standardisée que l'utilisateur récupérait au moment de l'inscription au service. Un système de caméra embarquée notait ensuite le numéro de la clé de l'abonné et relevait le compteur kilométrique avant le départ. Le paiement au kilomètre se faisait, lui, par un système de jetons en plastique que les utilisateurs se procuraient dans les bureaux de tabac. Ces jetons, une fois insérés, tournaient sur eux-mêmes en s'usant, jusqu'à ce qu'ils atteignent une taille minimale et stoppent la voiture. Il fallait alors insérer un nouveau jeton afin de pouvoir repartir (BIAU Véronique. 1991). Outre des problèmes opérationnels récurrents dus au manque de jeton, ce qui bloquait la voiture sans possibilité de redémarrer, la coopérative a fait face à des problèmes financiers multiples :

· Retard dans le paiement des subventions du Ministère des Transports

· Le manque de liquidité a obligé la coopérative à faire des choix financiers à courts termes en optant notamment pour le crédit-bail pour l'acquisition de ses véhicules

Figure 4 - Illustration d'une Simca 1000 du service d'autopartage ProcoTip

INA, 1971

A cela s'ajoute l'apparition de dysfonctionnements au niveau des véhicules qui ont contribué à ternir l'image de ProcoTip. Enfin, certains utilisateurs ont profité du vide contractuel pour conserver les voitures à leur domicile et ainsi se soustraire au principe de l'autopartage.

En mai 1973, face aux difficultés, la coopérative ProcoTip dépose le bilan, mettant fin à la première expérience d'autopartage en France.

Après ce premier essai, il faudra attendre 1998 et la création de la Caisse Commune (Aujourd'hui Communauto) à Paris, suivie l'année suivante de Auto'trement (Aujourd'hui Citiz) à Strasbourg, pour que l'autopartage commence enfin à se développer. La Rochelle développe la même année un service d'autopartage de voitures 100% électriques appelé Liselec. Nous pouvons remarquer que la création de la Caisse Commune est corrélée avec la première mesure de circulation alternée à Paris le 1er octobre 1997.

Au début des années 2000, le réseau France Autopartage (qui deviendra ensuite Citiz) est créé afin de regrouper différents acteurs nationaux au sein d'une même structure. En 2005, on assiste à la création de la charte ADEME-GART « Pour le développement de l'autopartage en France » suivie l'année suivante par une loi du Sénat pour la promotion de l'autopartage6(*). Ces deux initiatives institutionnelles vont accélérer le développement de ces services, en mettant en exergue les enjeux futurs de la mobilité urbaine et en encadrant les pratiques d'autopartage par la mise en place d'un label encadré garantissant la qualité des services.

Bien que les services soient dans une situation relativement stable, ils restent de nombreux enjeux afin de consolider leur ancrage dans l'offre actuelle de mobilité. Si nous observons que l'autopartage est en constante progression, il n'en demeure pas moins que la communication doit être amplifiée afin de capter les usagers. Il est en effet nécessaire d'expliquer le service tout en détaillant les coûts de ce dernier et les coûts de la possession d'une voiture individuelle. Beaucoup d'usagers n'ont qu'une estimation sous-évaluée du coût de leur voiture personnelle (AGUILERA, CONTI, LE NECHET, 2017) tandis que nous observons plusieurs amalgames à propos de l'offre d'autopartage : Entre l'autopartage en trace directe et en boucle, entre l'autopartage et le covoiturage. (ADEME, 2016).

Il reste tout un travail de pédagogie à effectuer auprès des usagers (KAUFMANN et al., 2010) afin qu'ils puissent faire leur choix sans idées reçus et en ayant la capacité d'utiliser l'intégralité de l'offre de mobilité d'une ville, de la voiture aux transports en commun.

Les différents types d'autopartage, leurs avantages et leurs inconvénients

L'autopartage consiste à mettre en commun une flotte de véhicules que les usagers inscrits au service peuvent emprunter pour une courte ou moyenne durée. L'autopartage peut être de particuliers à particuliers, géré par des entreprises privées, des services publics ou se constituer en coopératives (le réseau Citiz en est une).

On peut distinguer trois types de fonctionnements différents :

· Autopartage en boucle

Ce mode de fonctionnement est le plus répandu en France. Les voitures appartiennent à des stations précises sur lesquelles les usagers doivent reposer le véhicule à la fin de la réservation. Ce système fonctionne via un système de réservation (de plusieurs mois à quelques minutes à l'avance).

Avantages

· Faciliter de contrôle des voitures

· Assurance de trouver une voiture à une place précise

· Place de stationnement assurée

Inconvénients

· Moins de flexibilité

· Obligation de rendre la voiture pour ne plus être facturé

· Obligation de réserver la voiture pour un créneau horaire

· Autopartage en trace directe avec station

En trace directe avec station, il est possible de récupérer un véhicule dans une station et le reposer dans une autre (si cette dernière est libre). Le principe se rapproche de celui des vélos en libre-service. Il ne faut ni réserver ni préciser la durée de location.

Avantages

· Flexibilité pour se rendre d'un point A à un point B

· Pas besoin de payer le temps de stationnement si la voiture est reposée sur une station

· Pas besoin de réserver la voiture pour la prendre

Inconvénients

· Risque de ne pas trouver de voiture là où on la veut

· Autopartage en trace directe sans station

Ce système, aussi appelé free-floating, est le plus complexe à mettre en place. Les véhicules peuvent être déposés dans des zones géographiques prédéterminées. Les usagers prennent les voitures «à la volée» si celles-ci sont disponibles et les déposent dans les zones autorisées, sur des places de stationnement classiques.

Avantages

· Utilisation selon le besoin réel

· Possibilité de stationner la voiture facilement

· Pas de réservation, utilisation «à la volée»

Inconvénients

· Suivi des véhicules plus difficile

· Impossible de prévoir l'emplacement d'un véhicule

Nous nous attarderons dans ce mémoire sur l'autopartage en boucle. Ce système est le plus répandu en France. De plus, il s'intègre mieux dans une offre multimodale combinée avec d'autres moyens de transports (bus, tram, vélo). En effet, contrairement aux autres solutions, il permet de mieux planifier son déplacement en s'assurant de la présence d'un véhicule avant son départ. Cette réduction de l'incertitude permet d'estimer son temps de trajet plus justement et d'éviter le stress qui pourrait inciter les usagers à revenir vers la voiture individuelle.

L'autopartage présente de bonnes perspectives d'avenir. En effet, il a l'avantage de ne pas bousculer trop brutalement les habitudes des usagers tout en réduisant significativement le nombre de voitures en circulation. Il s'agit ici de posséder une voiture en fonction des besoins, puis de la déposer une fois qu'on ne s'en sert plus.

Il y a des déplacements pour lesquels le véhicule personnel reste la meilleure des solutions (trajets de nuit, trajets en zones peu denses et peu desservies, en cas de transport d'objets lourds et/ou volumineux). Les villes ont été construites autour de la voiture et cela a eu pour effet de créer une séparation spatiale entre les différents lieux utiles aux individus (logement, loisirs, travail), obligeant encore les usagers à privilégier la voiture pour certains trajets (URRY, 2000, 2007).

L'idée étant de conserver ce moyen de transport en le mutualisant afin d'en partager les coûts et bénéfices tout en se débarrassant des inconvénients liés à la propriété (SHAHEEN et al. 2009). Cela rentre dans une logique de non possession qu'affectionnent de plus en plus les citadins. Cette offre de mobilité peut être le fait d'acteurs publics ou privés, et participe à l'amélioration du bilan environnemental d'une ville car, en plus de mutualiser un certain nombre de véhicules, elle oriente les usagers vers d'autres modes de transports lorsque la voiture n'est pas nécessaire. Nous n'utilisons plus la voiture de manière systématique mais après une réflexion sur sa réelle utilité. Cela génère des externalités positives sur les autres moyens de transports, notamment les transports en commun.

Le principe est simple : Après une inscription préalable, les usagers bénéficient de la possibilité d'emprunter une voiture pour une courte durée via un site internet ou une application. L'avantage étant de pouvoir réserver la voiture à n'importe quelle heure sans être tributaire des horaires d'ouverture de l'agence de location. Cela permet de conserver toute la flexibilité qu'offre la voiture personnelle sans la posséder.

Cependant, cette offre ne peut être intéressante pour tous les usagers. Certains usages nécessitent toujours la possession d'un véhicule personnel (Déplacements lointains et fréquents). Le but ici n'est pas de gagner du temps, mais d'optimiser les coûts en les mutualisant (AGUILERA, RALLET, 2016).

De nombreux acteur privés se sont insérés sur ce marché, proposant des véhicules qui leur appartiennent. Ces services privés remplissent une fonction d`intérêt public et sont donc soutenus par les pouvoirs locaux (ASSELINEAU, CROMARIAS, 2010).

Le label Autopartage et les tentatives d'institutionnalisation du système

Focus sur le label «Autopartage»

Le label «Autopartage» a émergé dans la loi Grenelle 27(*).Il a permis d'asseoir le fondement juridique de cette pratique. La pratique se définit comme «la mise en commun au profit d'utilisateurs abonnés d'une flotte de véhicules de transports terrestres à moteur", les abonnés pouvant "accéder à un véhicule sans conducteur pour le trajet de leur choix et pour une durée limitée».

La Loi Grenelle 2 fixe des conditions strictes afin de prétendre à l'obtention de l'appellation «autopartage», il faut pour cela :

· Que le taux d'émission de dioxyde de carbone ne dépasse pas un seuil prédéfini

· Respecter la dernière norme Euro en vigueur

· Utilisation via un contrat d'abonnement

· Les autorités ont un pouvoir décisionnel concernant l'implémentation de certaines stations stratégiques

En contrepartie de l'adoption de ces pratiques, les services bénéficient de tarifs préférentiels sur des emplacements de stationnement, ainsi que d'un soutien de la Ville en termes de communication et de promotion. De plus, les services publics qui doivent intégrer des pratiques écologiques dans leur fonctionnement sont incités à se tourner vers l'autopartage.

Au-delà du label, il s'agit surtout ici d'encadrer la pratique afin d'en limiter les effets négatifs, l'orientation que donne les pouvoirs publics et les coûts supplémentaires qui en découlent sont ainsi compensés par des avantages accordés aux entreprises gestionnaires des services d'autopartage.

Cependant, la mise en service de ce label ne s'est jamais faite, les acteurs de l'autopartage étant diversifiés, un consensus a du mal à émerger sur la définition exacte d'une entreprise d'autopartage. Les désaccords se situent surtout entre des services d'autopartage en peer to peer et les services classiques qui possèdent leurs véhicules. Pour pallier à cela, des villes telles que Paris (Autopartage Paris) ou Marseille ont lancé leurs propres labels.

Cette viabilisation du système a porté ses fruits rapidement, le nombre d'utilisateurs a bondi de 428% entre 2006 et 2009, passant de 3500 abonnés à 18 500. Par ailleurs, le nombre de services d'autopartage a lui aussi fortement augmenté, passant de 2 services dans l'Hexagone en 1999 à 28 services en 2010. Cette croissance doit être associée à l'amélioration des technologies de l'information et de la communication ainsi que l'amélioration des services de transport alternatifs à la voiture. En effet, afin d'inciter les usagers à se tourner vers ces modes alternatifs, il est primordial d'assurer une information claire et en temps réel tout en garantissant la fiabilité de ces moyens de transport. L'autopartage, contrairement à la voiture personnelle, doit s'inscrire dans une gamme de transports multimodaux étendue afin de pouvoir être efficace.

* 6 Proposition de loi adoptée par le Sénat tendant à promouvoir l'autopartage 2005-2006 https://www.senat.fr/leg/tas05-089.html

* 7Décret n° 2012-280 du 28 février 2012 relatif au label « autopartage »

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand