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La protection du droit de manifester dans l'espace public


par Charles ODIKO LOKANGAKA
Université de Kinshasa - Doctorat 2020
  

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Section 3. L'exigence d'un service public de la justice de qualité

Pierre angulaire de l'État de droit, le juge, eu égard à son indépendance, son impartialité et, surtout, sa capacité à prononcer l'annulation des actes portant atteinte aux droits fondamentaux, est classiquement appréhendé comme « le mode de contrôle le plus abouti et le plus efficace »843(*). Parce que, sans sa présence, les droits et libertés sont menacés de rester platoniques, le juge est ainsi érigé au rang de pièce maîtresse du système institutionnel de garantie. Loin de demeurer purement théorique, cette conception du juge gardien privilégié des libertés fondamentales est largement corroborée par le droit positif congolais, du moins en théorie.

La réalité se dessine autrement en RDC. Victimes des exactions de toutes sortes de la part tant des détenteurs du pouvoir politique que du pouvoir économique pour ne citer que ceux-ci, la plupart des congolais ne peuvent malheureusement pas compter sur la justice officielle pour être rétablis dans leurs droits. Le nombre insuffisant des institutions judiciaires, leur mauvaise répartition sur le territoire national et le dysfonctionnement des audiences foraines, ... font de cette justice un luxe réservé à quelques citadins. Encore faut-il que ceux-ci non seulement aient une bonne connaissance du droit, qu'ils disposent des moyens conséquents pour satisfaire les appétits insatiables du personnel judiciaire et qu'ils n'aient pas à faire à des procédures complexes ou qui trainent indéfiniment en longueur. Tout cela ne garantit pas cependant l'exécution des décisions judiciaires qui pourraient être prononcées en leur faveur. Il y a là autant de raisons à la base de la persistance des juridictions de droit coutumier et de l'exploration des modes alternatifs des règlements des conflits.

Pourtant, dans un système administratif comme celui de la RDC où l'exigence de la démocratie à la base requiert également le recours constant aux pratiques démocratiques, l'exercice de la liberté de manifestation devrait être regardée comme l'affaire de tous et à tous les niveaux.

Si la justice est rendue en RDC au nom du peuple par des organes étatiques institués à cet effet, la qualité du service qu'ils rendent en cette matière n'est pas à l'abri des critiques les plus virulentes (§2) ; et pourtant, c'est par le droit fondamental au juge que se mesure l'effectivité d'un droit ou d'une norme qui la consacre (§1), ainsi que le démontrent les sursauts réalisés dans les droits positifs des autres pays. Cette modalité de protection a fait l'objet de développements constants, traduction d'une recherche d'effectivité toujours plus grande des droits de la personne humaine, par la mise en oeuvre des recours spéciaux devant le juge (§3) ; nous allons explorer tant les recours spéciaux prévus dans les pays de la comparaison que celui consacré récemment en droit positif congolais. En outre, le juge, à travers son oeuvre, est appelé à intervenir efficacement dans l'exercice de la liberté de manifestation (§4).

§1. La recherche d'effectivité de la garantie juridictionnelle par le prisme du droit fondamental au juge

Classiquement appréhendé comme le « Corollaire indispensable de l'État de droit »844(*), le « droit des droits »845(*) ou, encore, le « bouclier des autres droits fondamentaux »846(*), le droit au juge847(*) constitue la pierre angulaire de l'édifice des droits fondamentaux848(*). Parce que sans son affirmation les droits et libertés courent le risque de se retrouver orphelins de toute protection, celui-ci « devient le premier des droits fondamentaux dont l'effectivité doit être à son tour assurée »849(*).

Certes, le droit au juge, de par sa vocation à structurer l'ensemble de l'ordonnancement juridique850(*), ne se limite pas au seul domaine des droits de la personne humaine851(*). Il demeure néanmoins incontestable que son apport en la matière se veut particulièrement prononcé dans la mesure où l'existence des droits fondamentaux est conditionnée par la présence d'un juge susceptible de sanctionner les atteintes qui leur sont portées. C'est pourquoi la consécration du droit à un recours juridictionnel effectif, en même temps qu'elle confirme le rôle décisif du juge au sein du système institutionnel de protection des droits et libertés, constitue un élément à part entière du processus de développement de la garantie juridictionnelle des droits fondamentaux.

Cette thèse n'entend pas épuiser la problématique du droit au juge. Il s'agit seulement de démontrer que ce droit, de par sa reconnaissance unanime (a) et son contenu particulièrement extensif (b), traduit une volonté évidente d'effectivité de la protection juridictionnelle des droits fondamentaux.

* 843 WEBER (A.), Les mécanismes de contrôle non contentieux du respect des droits de l'homme, These dactylographiée, Université Robert Schuman, Strasbourg, 2006, p. 37.

* 844 FAVOREU (L.) (Dir.) et alii, Droit des libertés fondamentales,Op. cit., p. 377.

* 845 MOLFESSIS (N.), Le Conseil constitutionnel et le droit privé, Paris, L.G.D.J., 1997, p. 238.

* 846 RENOUX (T.-S.), « Le droit au recours juridictionnel », J.C.P. G., 1993, I, 3675.

* 847 Si parmi les différentes expressions de nature à rendre compte de cette prérogative juridique celle de « droit au juge » se révèle probablement la plus opportune, car « [...] la plus extensive et donc la plus apte à réunir l'ensemble des aspects du sujet » (VANDERMEEREN (R.), « Permanence et actualité du droit au juge », A.J.D.A., 2005, p. 1102), seront indistinctement utilisées les expressions de « droit au juge » ou de « droit à un recours juridictionnel effectif ».

* 848 DOMÍNGUEZ MARTÍN (S.), Ejercicio racional de los derechos y garantías fundamentales », in Introducción a los derechos fundamentales, tome II, Ministerio de Justicia, 1998, p. 1498.

* 849 CORBION (L.), Devoir juridictionnel et droit à la protection juridictionnelle, jurisclasseur civil code, Publication, effets et application des lois, art. 4, à jour au 1er décembre 2007, p. 4.

* 850 LEGER (P.), Le droit à un recours juridictionnel effectif, in SUDRE (F.) et LABAYLE (H.), Réalité et perspectives du droit communautaire des droits fondamentaux, Bruylant-Nemesis, 2000, pp. 199-212 ; REDOR (M.-J.), Garantie juridictionnelle et droits fondamentaux, Op. cit., p. 100.

* 851 Le Tribunal constitutionnel portugais considère en ce sens que si le droit à un recours juridictionnel effectif est « inséré au sein du chapitre relatif aux droits fondamentaux et se réfère expressément à ces droits, il ne saurait pour autant se limiter à la défense des seuls droits fondamentaux. La protection juridictionnelle s'étend à tous les droits et intérêts légitimes, c'est-à-dire à toutes les situations juridiquement protégées » (Acórdão 24/1988 du 20 janvier 1988, D.R. série II du 13 avril 1988).

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"Il existe une chose plus puissante que toutes les armées du monde, c'est une idée dont l'heure est venue"   Victor Hugo