WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La protection du droit de manifester dans l'espace public


par Charles ODIKO LOKANGAKA
Université de Kinshasa - Doctorat 2020
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

Section 3. L'exercice de la liberté de manifestation au Bénin

Le droit de manifester est un droit fondamental des citoyens au Bénin. Au-delà de sa protection juridique par les textes nationaux et internationaux, il est consolidé au Bénin par sa protection par la constitution. Ainsi, la liberté de manifestation jouit d'une large protection juridique au Bénin contrairement à d'autres États comme la France où elle n'est pas reconnue par la Constitution et c'est la jurisprudence qui s'est contentée de lui donner un caractère constitutionnel.432(*)

Depuis quelques années, on observe que les manifestations font l'objet d'un filtrage politique soit pour permettre à un groupe donné d'exprimer ses opinions et d'empêcher les groupes dissidents. Les groupes d'opposition au Bénin sont régulièrement interdits de manifester et on peut se demander s'il existe des textes juridiques réglementant l'exercice du droit de manifester au Bénin.433(*) Il en découle que même si la liberté de manifestation bénéficie d'une reconnaissance au Bénin (§1), son encadrement est quelque peu dévoyé par les pratiques politiques (§2).

§1. La reconnaissance de la liberté de manifester au Bénin

La liberté de manifestation, à l'instar d'autres libertés, jouit d'une protection juridique en droit béninois. Cependant, il existe des libertés dont l'exercice pourrait entrer en collision avec l'exercice d'autres droits. C'est en effet les droits qui constituent les libertés fondamentales qui appellent ces difficultés. Il est un fait que la liberté de manifestation pacifique ne figure pas parmi les droits faisant partie du noyau dur des droits fondamentaux. Cela induit qu'elle peut être sujette à des limitations.

Au Bénin, le droit de manifester est un droit suffisamment reconnu (1) même si sa conciliation paraît pénible (2) compte tenu des intérêts des tiers et de l'ordre public.

1. Le cadre juridique de la reconnaissance de la liberté de manifester

Le droit de manifester est aussi bien garanti par les textes internationaux reconnus par le Bénin que par les textes nationaux. Plusieurs textes internationaux ont fait de la liberté de manifestation, explicitement ou implicitement, un droit que les États doivent protéger. La plupart de ces textes ont été analysés ci-haut, ce qui rend superfétatoire leur analyse. Nous mettons cependant un accent particulier sur une réalité juridique singulière constatée dans la Constitution béninoise : la constitutionnalisation des droits et devoirs proclamés et garantis par la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples adoptée en 1981 par l'Organisation de l'Unité Africaine, et ratifiée par le Bénin le 20 janvier 1986, lesquels, sur pieds de son article 7, font partie intégrante de la Constitution et du droit béninois.434(*)

Deux constats peuvent être réalisés à partir de cette disposition : premièrement, étant une réaffirmation d'une idée force du préambule de la Constitution, cet article de référence fait mesurer le degré d'attachement du constituant à cet instrument panafricain, mis en annexe à la Constitution, dont il fait partie intégrante et ses dispositions constituent des normes supérieures à la loi interne et ce aussi conformément à l'article 147 de la Constitution. La diffusion et l'enseignement de cette Charte sont prescrits par l'article 40 de la Constitution. En second lieu, nombre de décisions de la Cour constitutionnelle435(*) se réfèrent non seulement à l'article commenté, mais aussi directement à des dispositions de la Charte.

Au niveau interne, c'est l'article 25 de la Constitution béninoise qui consacre la liberté de manifestation en ces termes : « L'État reconnaît et garantit, dans les conditions fixées par la loi, la liberté d'aller et venir, la liberté d'association, de réunion, de cortège et de manifestation ». De cette consécration constitutionnelle on peut relever les observations suivantes : différemment de la RDC où un article entier de la Constitution du 18 février 2006 est consacré à la liberté de manifestation, celle-ci fait l'objet d'une consécration vague à côté d'autres droits et de manière laconique ; comme le constituant congolais, le constituant béninois habilite le législateur à fixer les conditions d'exercice de la liberté de manifestation.

La lecture combinée et croisée de ces deux dispositions fait ainsi de ce domaine une réserve de compétence législative. Le juge constitutionnel béninois a affirmé avec force cette idée en précisant par exemple que « la liberté d'association, de réunion, de cortège et de manifestation est constitutionnellement garantie et que la loi peut en règlementer l'exercice, voire la limiter.

En revanche, elle ne saurait en aucun cas la supprimer ou l'annihiler, fût-ce même temporairement [...] que le pouvoir exécutif ou règlementaire ne peut donc s'immiscer dans ce domaine, si ce n'est seulement pour préciser les modalités d'application de la loi »436(*). Ainsi, les raisons possibles de limitation doivent se fonder sur un intérêt public légitime et les inconvénients de la limitation doivent être strictement proportionnels et absolument nécessaires pour les avantages à obtenir. Ce qui est plus important, une limitation ne doit jamais entraîner comme conséquence le fait de rendre le droit lui-même illusoire.

* 432HONVOU K. (S.), « Le droit de manifester au Bénin », Konrand Adenauer Stiftung, RLPSSA, LEJA, Vol. 17, p. 34.

* 433Idem.

* 434Information disponible sur http://www.unesco.org/education/edurights/media/docs/cd9ad07158c52d423f4fb125ea5a53999323b886.pdf, consulté le 31 juillet 2019 à 15 heures 31'.

* 435 Voir entre autres les décisions de la Cour, celles-ci : DCC 02-058 du 04 juin 2002, FAVI Adèle, Recueil, 2002, p. 243 ; DCC 05-015 / 2005-02-17.

* 436 Décision de la Cour Constitutionnelle béninoise no 18/117 du 22 mai 2018, p. 15.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon