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La protection financière du patrimoine public

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par Jennifer Marchand
Université des sciences sociales Toulouse 1 - Master 2 Droit public des affaires 2006
  

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§ 2. L'inhérence de la logique de valorisation à la notion de propriété publique

« L'erreur, c'est d'admettre en principe l'assimilation de la domanialité à la propriété, quand ce sont, au contraire, deux choses en principe tout à fait différentes »30(*).

La propriété publique a pour finalité de réglementer les pouvoirs d'un propriétaire sur son bien et les relations qu'il entretient avec les tiers. L'objet de la propriété publique est beaucoup plus vaste que celui de la domanialité publique puisqu'il consiste à organiser juridiquement la gestion, au sens large du terme, d'un patrimoine public31(*).

La valorisation économique des patrimoines administratifs est un des problèmes dominants du droit des biens publics. Pour la faciliter, les pouvoirs publics entendent soumettre l'ensemble des biens publics à un régime de propriété. La concomitance d'une valorisation accrue du domaine public et du renforcement de l'idée de propriété n'est pas le fruit du hasard. Il convient de revenir succinctement sur la reconnaissance de la propriété publique (A) et sur le lien qui existe entre la propriété et la protection de la valeur financière du patrimoine public (B).

A La reconnaissance du droit de propriété des personnes publiques

Si la propriété reçoit un traitement particulier, c'est parce qu'elle est traditionnellement appréhendée comme un attribut des particuliers et, est une notion centrale des programmes de droit civil. Aujourd'hui, nul ne conteste que les personnes publiques disposent d'un droit de propriété sur leur biens. Il convient alors de revenir sur les bases de cette reconnaissance.

1. Les bases jurisprudentielles et législatives de la propriété publique

Les textes (l'article 538 du Code civil) et la doctrine du XIXème siècle niaient que le domaine public puisse être objet de propriété. Proudhon et Berthélémy faisaient valoir que les personnes publiques ne détenaient sur le domaine public ni l'usus (qui appartient au public), ni le fructus (les biens étant improductifs), ni l'abusus. Pour autant, la démonstration de Maurice Hauriou, selon laquelle il est difficile d'admettre que le droit de propriété, disparaît après l'affectation, et la jurisprudence de la Cour de cassation qui, dès un arrêt du 16 février 1836, proclamait que l'Etat est « réputé propriétaire des chemins ou routes dont l'entretien est à sa charge » incitèrent le Conseil d'Etat à adopter une position identique. Dans le célèbre arrêt sur les mutations domaniales, il estime que « la Ville de Paris a conservé les droits de propriété qu'elle pouvait avoir sur ces parcelles32(*) ».

La reconnaissance d'un droit de propriété sur le domaine public, acquise dès le début du XXème siècle pour l'Etat, puis progressivement étendue à l'ensemble des personnes morales de droit public33(*) , ne s'est jamais démentie. La plupart des commissaires du gouvernement qui ont conclu en matière domaniale se sont ralliés à la thèse propriétariste34(*) et les travaux contemporains du Conseil d'Etat se font l'écho de cette conception35(*). Quant aux sources textuelles, elles sont très nombreuses. Nous pouvons citer entre autres la loi n° 76-1285 du 31 décembre 1976 complétant l'article L. 142-1 du Code de l'urbanisme dont l'alinéa 3 précise que « les dispositions de l'article L. 130-3 sont applicables aux biens immobiliers acquis en application des précédents alinéas, qui sont incorporés au domaine public de la personne propriétaire ». Les lois intervenues en matière de décentralisation confirment également l'existence de ce droit de propriété. Les articles 19 et suivants de la loi du 7 janvier 1983 se réfèrent à la « collectivité propriétaire ». On trouve encore des allusions au droit de propriété dans les textes portant transfert de biens de l'Etat à certains établissements publics. Enfin, il résulte de la loi du 25 juillet 1994 que les installations privatives aménagées sur le domaine public, dont le maintien est accepté à l'issue du titre d'occupation, deviennent la propriété de l'Etat. Toutes ces références sont particulièrement significatives.

Enfin, la propriété publique dispose désormais d'un Code résultant de l'ordonnance du 21 avril 2006 relative à la partie législative du Code général de la propriété des personnes publiques (CGPPP)36(*). Il y lieu de relever que le plan du Code traduit l'abandon de l'approche traditionnelle fondée entre le domaine public et le domaine privé des personnes publiques. Cette approche fondée sur la domanialité rendait compte de manière impropre du régime des biens des personnes publiques. Le rapport de l'Institut de la gestion déléguée relatif à la réforme du droit des propriétés publiques37(*) l'avait mis en exergue. L'ensemble des biens appartenant à une personne publique constitue des biens publics au seul motif qu'une personne publique se les est appropriés. C'est donc une approche par la propriété que consacre le CGPPP en traitant dans les trois première partie de l'acquisition, de la gestion et de la cession des biens appartenant aux personnes publiques.

2. Les bases internationales et constitutionnelles de la propriété publique

Le droit international, parce qu'il admet l'expropriation et la nationalisation, reconnaît par-là même la propriété publique. L'article 17§2 de la Déclaration universelle des droits de l'homme dispose à cet égard que « Nul ne peut être arbitrairement privé de sa propriété ». Les principales conventions internationales comportent des formules de compromis en la matière, ménageant les conceptions opposées, des pays occidentaux et des anciens pays socialistes, de ce droit. Aussi, la propriété ne semble-t-elle pas être exclue de leur champ d'application.

Au niveau européen, le traité de Rome « ne préjuge en rien le régime de la propriété dans les Etats membres ». L'influence apparaît limitée sur les règles applicables dans la mesure où le droit communautaire ne connaît pas la distinction droit public et droit privé. Quant à la Convention européenne des droits de l'homme, l'article 1 du Protocole additionnel n° I reconnaît que « Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens ». Si la Cour européenne des droits de l'homme a donné à cette disposition une interprétation extensive, le bénéfice n'en a pas été étendu à la propriété des personnes.

Au niveau interne, la Constitution de 1958 ne contient aucune référence à la propriété des biens publics. Seuls l'alinéa 9 du Préambule de la Constitution de 1946 prévoit que « Tout bien, toute entreprise dont l'exploitation a ou acquiert les caractères d'un service public national ou d'un monopole de fait, doit devenir la propriété de la collectivité ». La décision du Conseil constitutionnel du 16 janvier 1982 avait tranché la question du caractère constitutionnel du droit de propriété. Pour autant, se posait le problème de savoir s'il s'agissait d'une reconnaissance générale indépendamment de la qualité publique ou privée du titulaire. La précision est intervenue en 1986.

Contrairement au droit communautaire, le Conseil constitutionnel a franchi le pas. Le Conseil constitutionnel a considéré dans les décisions des 25 et 26 juin 1986, du 18 septembre 198638(*) et dans celle du 21 juillet 199439(*) « que les dispositions de l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 relatives au droit de propriété et à la protection qui lui est due ne concernent pas seulement la propriété privée des particuliers, mais aussi, à titre égal, la propriété de l'Etat et des autres personnes publiques ».

* 30 Léon DUGUIT, Traité de droit constitutionnel, 1930, p. 349

* 31 P. YOLKA a montré que ces deux régimes sont autonomes : « propriété publique et domanialité publique ne sont pas synonyme mais complémentaires. Leurs relations s'organisent selon un principe d'indépendance relative », op cit.

* 32 CE, 16 juin 1909, Ville de Paris

* 33 Jusqu'à une époque récente, il était exclu que les établissements publics puissent être propriétaires de dépendances du domaine public. Ils pouvaient en être affectataires mais elles faisaient partie de leur domaine privé. Le Conseil d'Etat et le Tribunal des Conflits reconnaissent donc aux seules collectivités territoriales un droit de propriété (cf ; CE, 19/03/1965, Sté Lyonnaise des Eaux). La Cour de cassation, quant à elle, ne faisait aucune difficulté pour admettre la domanialité publique des biens appartenant à un établissement public : Cass . 1re civ., 2/04/1963, Montagne. Le revirement fut la suite d'une longue gestation de la jurisprudence administrative. Suite aux conclusions du commissaire D. LABETOULLE sur l'arrêt CE, 3/03/1978, Lecoq, de faire évoluer la jurisprudence, la Haute Juridiction admet que la domanialité publique peut s'appliquer aux biens des établissements publics (CE, 6/02/1981, Epp. La reconnaissance et la consécration du droit de propriété aux profits des établissements publics sur leurs dépendances interviennent à la suite de l'arrêt Mansuy du 21 mars 1984.

* 34 Conclusions Teissier sur CE, 16/07/1909, Ville de Paris ; conclusions Corneille sur CE, 17/01/1923, Piccioli (RDP 1923, p. 572) ; conclusions Latournerie sur CE, 28/06/1935, Marécar (RDP 1935, p. 590) ; conclusions Guldner sur CE, 20/12/1957, SNEC ( S 1958, p. 58)

* 35 « Réflexions sur l'orientation du droit des propriétés publiques », EDCE 1987, p. 13

* 36 prise en vertu de l'habilitation prévue par l'article 48 de la loi n° 2005-842 du 26 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de l'économie

* 37 « La réforme du droit des propriétés publiques », LPA 23 juillet 2004, n° 147

* 38 Décision des 25 et 26/06/1986 « Loi autorisant le gouvernement à prendre diverses mesures d'ordre économique et social » n° 86-207 DC, JO 27/06/1986, p. 7978 ; AJDA 1986, p. 575, note Rivera ; Décision du 18/09/1986 « Loi relative à la liberté de la communication » n° 86-217 DC, AJDA 1987, p. 102, note Wachsmann

* 39 Décision du 21 juillet 1994 relative à la constitution de droits réels sur le domaine public n° 94-346 DC AJDA 1994, p. 786, note G. GONDOUIN ; RFDA 1994, p. 1106, note C. LAVIALLE

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