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Techniques de droit commun applicables à la rupture du concubinage et du PACS

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par Audrey MELLAC
Université Robert Schuman Strasbourg - Master II recherche droit privé fondamental 2007
  

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I: LA DIFFICILE RÉUNION DE SES CONDITIONS D'EXISTENCE

La Cour de cassation affirme de manière constante que la cohabitation même prolongée de personnes qui ont vécu en époux, ont confondu leurs biens, ont participé aux dépenses de la vie commune, ne suffit pas à donner naissance entre elles à une société.140

Pour qu'un société créée de fait existe entre concubins ou partenaires, ils doivent démontrer l'existence d'apports, quelle qu'en soit la forme, l'intention de participer aux bénéfices et aux pertes, et l'affectio societatis, qui est la volonté de s'associer141.

De plus, ces éléments cumulatifs doivent être établis séparément et ne peuvent se déduire les uns des autres.142

Les juges du fond apprécient souverainement la réunion des conditions d'existence d'une société créée de fait, d'où une jurisprudence variant entre rigueur et bienveillance. Ces fluctuations de la jurisprudence s'expliquent par la volonté de concilier deux intérêts

distincts

.

 

En effet, admettre l'existence d'une société créée de fait revient à accorder aux concubins une sorte de régime matrimonial de fait, résultant d'une mise en commun volontaire de leurs

pat ri moines

.

 

Cependant, la reconnaissance de cette société créée de fait ne peut se faire au détriment de l'application exacte des règles de droit commun.143

Celles-ci imposent de ne reconnaître l'existence d'une société créée de fait qu'en présence de ses éléments constitutifs

.

Le raisonnement des juges du fond est rétrospectif, ils doivent déterminer a posteriori si les

conditions d'existence d'une société créée de fait sont réunies

.

 

137 Ph. MALAURIE, H. FULCHIRON, Op. Cit., p 168.

138 C. PERNEL, art. préc., Dr. patr. juin 2001, pratique p 44.

139 Cass. Com, 25 juillet 1949, JCP G 1950, II, 5798, note Bastian

140 Cass. Com, 9 octobre 2001, AJ famille décembre 2001, jurisp. p 95.

141 H. LÉCUYER, « Société créée de fait: souvent appelée, rarement élue », Dr. fam. février 2002.

142 F. BICHERON, « Un projet immobilier commun ne caractérise pas obligatoirement l'affectio societatis », AJ famille 2004, jurisp. p 324.

143 A. BOLZE, art. préc., Dr. fam. mars 2001, chron. p 9.

Plusieurs arrêts récents témoignent d'une évolution de la jurisprudence vers plus de rigueur quant à la reconnaissance d'une société créée de fait.144

L'on constate que la première chambre civile, traditionnellement plus souple à l'égard des sociétés créées de fait entre concubins, opère un durcissement de sa position. Se rapprochant de la sévérité de la chambre commerciale, elle exige désormais une démonstration de l'affectio societatis distincte de la mise en commun d'intérêts inhérents à la vie maritale.145

Par cet arrêt rendu le 12 mai 2004, la première chambre de la Cour de cassation opère un revirement de jurisprudence, en cessant de déduire la volonté de s'associer de la mise en commun des ressources des concubins pour la réalisation d'un projet commun146.

Par deux arrêts rendus le 23 juin 2004147, la chambre commerciale de la Cour de cassation réaffirme fermement que l'existence d'une société créée de fait découle de la réunion des éléments constitutifs du contrat de société

.

De plus, ceux-ci doivent être constatés séparément et non déduits les uns des autres, pour que soit admise une société créée de fait

.

En outre, elle confirme la position de la première chambre civile en affirmant que l'intention de s'associer ne peut se déduire de la participation financière à la réalisation d'un projet

commun

.

Ainsi, en définissant l'affectio societatis comme l'intention de collaborer sur un pied d'égalité à la réalisation d'un projet commun148, la chambre commerciale de la Cour de cassation exige des juges du fond une appréciation subjective des éléments qui lui sont soumis par les

parties

.

 

La rigueur retrouvée de la Cour de cassation traduit sa volonté de n'appliquer les techniques de droit commun à la liquidation des intérêts patrimoniaux des concubins et partenaires que si leurs conditions d'existence sont réunies

.

Ainsi, elle refuse la « concubinarisation du droit commun »149 amorcée par certaines juridiction de fond, reconnaissant l'existence d'une société créée de fait sans en rechercher tous les éléments constitutifs

.

Notamment, la Cour de cassation a mis l'accent sur la nécessité de caractériser l'affectio societatis à travers le comportement qu'ont eu les concubins ou les partenaires, et non objectivement, au regard de la participation au financement d'un projet commun150. Ainsi, l'invocation de la société créée de fait par un concubin ou partenaire qui a participé au financement du logement commun a désormais peu de chances d'aboutir.

En effet, seule la participation financière au projet immobilier commun pouvait permettre de déduire l'intention de collaborer sur un pied d'égalité à la réalisation d'un projet commun

.

La jurisprudence antérieure se montrait déjà pointilleuse sur la qualification de l'intention de

144 Cass. com, 9 octobre 2001, Juris-Data n° 2001-011213; cass. 1e civ, 12 mai 2004, Juris-Data n° 2004-023609; cass. com, 23 juin 2004, Juris-Data n°2004-024314 et n° 2004-0243 15

.

145 V. LARRIBAU-TERNEYRE, « une société de fait de moins en moins élastique et le retour de la rigueur », Dr. fam. octobre 2004, com. N° 168 p 27.

146 Cass. 1e civ, 26 juin 2001, Juris-Data n° 2001- 013178.

147 V. LARRIBAU-TERNEYRE, art. préc., Dr. fam. octobre 2004, com. n° 168 p 27.

148 Cass. com, 23 juin 2004, Juris-Data n°2004-024315

149 H. LÉCUYER, « Concubinarisation du droit commun », Dr. fam. juin 2001, com. n° 54 p 13.

150 Cass. com, 23 juin 2004, Juris-Data n°2004-024315

participer aux bénéfices et aux pertes et sur la qualification d'apports.

La Cour d'appel de Paris, dans un arrêt du 12 septembre 2002, a affirmé que l'intention de participer aux bénéfices et aux pertes ne peut se déduire d'un engagement de caution. Celle-ci dispose en effet d'un recours contre l'emprunteur défaillant, ce qui empêche de caractériser une volonté de contribuer aux pertes151.

De même, ne constitue pas un apport le prêt ou le don d'une somme d'argent effectué par l'un des concubins ou partenaires à l'autre.152

En effet, un prêt a vocation à être remboursé, tandis qu'un don relève d'une intention libérale, ce qui ne peut être qualifié d'apport.

Dans l'hypothèse de la construction d'un immeuble par un concubin ou un partenaire sur le terrain de l'autre, si l'affectio societatis ne peut être démontré, le constructeur aura intérêt à fonder son action sur l'article 555 du Code civil.

En effet, celle-ci aura plus de chances d'aboutir, seule la preuve de la construction sur le terrain d'autrui permettant sa mise en oeuvre.

L'existence d'une société créée de fait entre concubins ou partenaires participant à une exploitation commune peut être plus aisément démontrée. En effet, l'intention de collaborer sur un pied d'égalité à la réalisation d'un projet commun, de participer aux bénéfices et aux pertes et la présence d'apports sont plus facilement caractérisables qu'en cas de construction d'un immeuble commun.

Ainsi, la chambre commerciale de la Cour de cassation a admis l'existence d'une société créée de fait entre concubins exploitant diverses activités commerciales sur un terrain où ils ont de plus fait construire un immeuble.153

En revanche, la cour d'appel de Grenoble a retenu que si l'un des concubins est salarié du fonds de commerce de l'autre, il ne peut se prétendre également associé.154

Suite à l'arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation rendu le 9 octobre 2001, certains auteurs ont souligné la dénaturation de la société créée de fait opérée par la définition qu'en fait la Cour de cassation155.

Étant révélée a posteriori, par l'analyse des comportements des concubins ou partenaires, elle n'est pas un contrat.

Si les concubins ou partenaires se sont conduits comme des associés, ils n'en ont le plus souvent pas eu conscience avant que la rupture n'intervienne et que l'un d'eux invoque l'existence d'une société créée de fait entre eux pour liquider leurs intérêts patrimoniaux. Ainsi que le souligne M. Lécuyer, l'intention de s'associer, et l'intention de participer aux bénéfices et aux profits, est délicate à déduire d'une situation de fait, alors que les associés de fait n'avaient même pas conscience de l'être.156

Cependant, la société créée de fait est soumise au régime de la société en participation.

Cette dernière emprunte le régime des sociétés civiles si elle a un caractère civil, et des

151 F.BICHERON,« La difficile preuve d'une société créée de fait entre concubins », AJ famille 2003, jurisp. p 27.

152 Grenoble, 1e septembre 1998, D. 1999, jurisp., S.C. p 378

153 F.CHÉNÉDÉ, « La preuve d'une société créée de fait est délicate mais possible », AJ famille janvier 2005

154 Grenoble, 1e septembre 1998, D. 1999, jurisp., S.C. p 378

155 H. LÉCUYER, « La société créée de fait à la dérive », Dr. fam. mai 2002, com. n° 55 p 17.

156 H. LÉCUYER, art. préc., Dr. fam. mai 2002, com. n° 55 p 17.

sociétés en nom collectif si elle a un caractère commercial.157

Ainsi, d'autres auteurs considèrent que le retour à la rigueur effectué par la Cour de cassation manifeste, au contraire, le triomphe de la théorie classique face au dévoiement de la notion de société.158

Les arrêts du 23 juin 2004, rendus par la chambre commerciale de la Cour de cassation, confirment cette tendance à plus de sévérité

.

Ils traduisent le refus que le concubinage puisse, par lui même, induire une sorte de présomption de société existant entre les concubins159.

La preuve de l'existence d'une société créée de fait devient donc plus ardue à fournir pour celui qui s'en prévaut

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En revanche, en cas d'admission, la liquidation de celle ci permet un partage des profits entre concubins très avantageuse, en comparaison à l'indivision.

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille