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Techniques de droit commun applicables à la rupture du concubinage et du PACS

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par Audrey MELLAC
Université Robert Schuman Strasbourg - Master II recherche droit privé fondamental 2007
  

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B: INTERPRÉTATION STRICTE DE SES CONDITIONS PAR LES JUG ES

La Cour de cassation n'a de cesse de rappeler que l'action de in rem verso ne peut servir à pallier l'absence de textes règlementant la liquidation des rapports patrimoniaux entre concubins. Ainsi, elle répète régulièrement que les dépenses quotidiennes effectuées en contribution à la vie commune sont définitivement à la charge de celui qui les a exposées.184

Une partie de la doctrine a souligné que le raisonnement appliqué par les juges est dérogatoire au droit commun quand l'enrichissement sans cause est invoqué par un concubin à l'encontre de l'autre.185

En effet, la cause de l'enrichissement est traditionnellement définie comme le titre juridique, conventionnel ou légal, susceptible d'expliquer et de justifier l'enrichissement.186

Néanmoins, pour écarter l'application de l'enrichissement sans cause aux espèces qui leur sont soumises, les juges estiment en général que l'appauvrissement a trouvé sa cause dans la contrepartie dont le concubin a bénéficié durant la vie commune, qui est généralement l'hébergement gratuit.187

Ainsi, la cause n'est pas recherchée dans l'opération même constitutive de l'appauvrissement

179 La rupture des unions libres, collection encyclopédie Lamy droit civil- droit des personnes et de la famille, étude n° 380, 2006.

180 Cass. 1e civ, 8 décembre 1987, Bull. Civ. I, n° 335.

181 Cass. 1e civ, 15 octobre 1996, Bull. Civ I, n° 357.

182 Paris, 29 novembre 2002, D. 2003, Obs. J.J. Lemouland, p 1939.

183 P. VOIRIN, G. GOUBEAUX, Op. Cit. p 450.

184 Cass 1e civ, 28 novembre 2006, revue Lamy droit civil février 2007, n° 2406,

185 G. KESSLER, « Concubinage et enrichissement sans cause », Gaz. Pal. Octobre 2004, p 11; H. LÉCUYER, « Une conception élastique de la condition d'absence de cause », Dr. fam. janvier 2001, obs. n° 3 p 18.

186 G. KESSLER, art. préc., Gaz. Pal. octobre 2004, p 11

187 H. LÉCUYER, art. préc., Dr. fam. janvier 2001, obs. n° 3 p 18.

et de l'enrichissement, elle est trouvée hors d'elle.

Par conséquent, les travaux effectués dans le logement de l'autre, et le prêt effectué pour améliorer ce logement, remboursé par le non propriétaire, ne sont pas appréciés en eux- même, pour relever l'appauvrissement de l'auteur de l'opération et l'enrichissement corrélatif du propriétaire du logement.188

Ces opérations sont appréciées au regard d'éléments extrinsèques, que sont l'ensemble des relations patrimoniales existant entre les concubins.

Cette méthode d'appréciation adoptée par les juges leur permet alors, par équité, de refuser l'indemnisation de celui qui a logé gratuitement dans l'immeuble de l'autre et y a effectué des travaux.

La cour d'appel de Paris, dans un arrêt rendu le 2 avril 1999, distingue d'ailleurs les simples dépenses d'agrément des travaux de ravalement189.

Les premières sont destinées à améliorer le cadre de vie de celui qui les a engagées, et ne justifient pas un remboursement en raison de l'hébergement gratuit, qui constitue la contrepartie190.

De plus, l'aléa que comporte le concubinage, union précaire, ne permet pas au concubin auteur des dépenses d'en réclamer le remboursement191.

Les secondes, en revanche, qui n'apportent aucune amélioration aux locaux et pèsent sur le propriétaire, font exception à la règle.

En effet, les dépenses de remise en état excèdent la contribution normale à la vie commune, et ce sont ces dépenses exceptionnelles qui ont vocation à ouvrir droit à une indemnisation sur le fondement de l'enrichissement sans cause192.

Bien que les concubins n'aient aucune obligation de contribuer aux charges de la vie commune, la jurisprudence distingue donc deux types de dépenses.

Les premières, dépenses d'agrément faisant partie de la contribution du non propriétaire à la vie commune, n'ouvrent pas droit à remboursement lorsqu'elles ont trouvé une contrepartie, tel que l'hébergement gratuit.

En revanche, la Cour d'appel de Paris, dans un arrêt rendu le 23 octobre 2003, a jugé que les travaux réalisés par le concubin non propriétaire étaient sans cause dans la mesure où il n'a bénéficié d'aucune contrepartie193.

En effet, il versait un loyer mensuel conséquent à sa concubine, et n'était pas animé d'une intention libérale en accomplissant ces travaux, comme en témoignent les factures qu'il a gardées. De plus, par leur ampleur, les travaux dépassaient une simple contribution aux charges de la vie commune.

Par conséquent, l'absence de cause a permis à l'auteur d'être dédommagé, une partie de la doctrine soulignant cependant qu'une fois de plus, la règle du double plafond n'a pas été

188 H. LÉCUYER, art. préc., Dr. fam. janvier 2001, obs. n° 3 p 18.

189 Paris, 2 avril 1999, D. 1999, jurisp. p 379.

190 Paris, 13 mars 1997, Dr. fam. 1997, obs. n° 171

191 Paris, 2 avril 1999, D. 1999, jurisp. p 379.

192 Grenoble, 24 octobre 1990, Juris-Data n° 051656.

193 G. KESSLER, art. préc., Gaz. Pal. octobre 2004, p 11; Pau, 17 décembre 2001, Juris-Data n° 2001-175603

appliquée194.

L'indemnisation a été calculée, en effet, en tenant compte de l'appauvrissement du concubin.

Les secondes, dépenses exceptionnelles, dépassant la simple contribution à la vie commune, sont prises en compte au titre de l'enrichissement sans cause du propriétaire, qui en a bénéficié.

En poursuivant ce raisonnement, l'on peut admettre qu'un partenaire se fondant sur l'enrichissement sans cause pour obtenir remboursement du premier type de dépense ne pourra voir sa demande aboutir, la contribution aux charges de la vie commune entre partenaires étant prévue par l'article 515-4 du code civil.

Ainsi, c'est sur ce fondement que le partenaire qui ne veut pas supporter définitivement la charge des travaux devra en demander remboursement.

En revanche, en cas de travaux de ravalement, qui dépassent la contribution aux charges de la vie commune, il pourra intenter une action sur le fondement de l'enrichissement sans cause.

L'utilisation par les juges de la cause contrepartie leur permet de rejeter des actions en se fondant sur l'équité, ce qui peut conduire cependant à une jurisprudence peu lisible. En effet, dans un arrêt rendu le 16 juin 1998, la première chambre de la Cour de cassation a affirmé que l'hébergement gratuit d'une personne par son concubin, dans le cadre de leur vie commune, ne peut donner lieu au versement d'une indemnité d'occupation195.

Le propriétaire de l'immeuble ne peut donc demander une telle indemnité sur le fondement de l'enrichissement sans cause, le concubinage faisant présumer son intention libérale en l'absence de convention particulière.

Pourtant, force est de constater que les juges refusent d'indemniser sur le fondement de l'enrichissement sans cause des travaux effectués dans le domicile du concubin, si celui-ci a hébergé gratuitement l'auteur des travaux.

L'hébergement gratuit sert ici de cause, contrepartie aux travaux, empêchant le jeu de l'enrichissement sans cause, mais peut aussi être considéré comme une intention libérale, comme dans l'arrêt précédent, et empêcher également la mise en oeuvre de l'enrichissement sans cause.

Un auteur a émis l'hypothèse que la prise en compte de l'hébergement gratuit comme contrepartie pour faire échec au remboursement de travaux d'agrément sous entendait un raisonnement plus cohérent196.

Les travaux d'agrément effectués par le concubin non propriétaire dans le logement de l'autre l'ont été pour améliorer son propre cadre de vie. Il a donc agit dans son intérêt personnel, tout en améliorant le logement du propriétaire.

Or, l'enrichissement sans cause ne peut être invoqué par la personne qui a effectué une dépense, ou des travaux, dans son intérêt, car l'enrichissement de l'autre a alors une cause, qui est l'intérêt de l'appauvri197.

Cette interprétation permet de justifier que le concubin qui a été hébergé gratuitement par

194 G. KESSLER, art. préc., Gaz. Pal. octobre 2004, p 11; Pau 17 décembre 2001, Juris-Data n° 2001-175603

195 A. BÉNABENT, « principe de l'hébergement gratuit entre concubins », Dr. patr. octobre 1998, jurisp. p 84.

196 G. KESSLER, art. préc., Gaz. Pal. octobre 2004, p 11

197 G. KESSLER, art. préc., Gaz. Pal. octobre 2004, p 11

l'autre ne lui doit aucune indemnité d'occupation, tandis que celui qui a effectué des dépenses d'agrément dans le logement de l'autre ne peut être dédommagé car il les a effectuées dans son intérêt.

En outre, une demande fondée sur l'enrichissement sans cause ne peut être accueillie si l'enrichissement ou l'appauvrissement ont disparu au jour de l'action, leur caractère définitif étant essentiel pour que l'action prospère.198

Ainsi, l'achat d'un véhicule par l'un des concubins avec des deniers issus d'un plan épargne logement commun aux deux concubins ne peut fonder l'action en enrichissement sans cause de la concubine

.

En effet, le véhicule est un bien qui se déprécie rapidement, l'enrichissement du concubin étant à la date de l'action inexistant, l'action de in rem verso ne peut prospérer.

Ainsi, seules les dépenses exceptionnelles peuvent justifier l'application de la théorie de l'enrichissement sans cause

.

La collaboration bénévole de l'un des concubins ou partenaires à l'activité de l'autre peut aussi justifier l'exercice de l'action de in rem verso, quand cette collaboration s'apparente à un travail à plein temps ayant empêché ce concubin de poursuivre une autre activité.199 C'est donc le critère de l'excès à la contribution aux charges de la vie commune qui justifie qu'une collaboration ou des travaux soient indemnisés200.

De ce fait, la technique de l'enrichissement sans cause ne permet au concubin ou partenaire qui l'invoque que d'obtenir une indemnisation pour les actes dépassant le cadre normal de la

vie commune

.

 

Au delà de la demande d'indemnisation que peut effectuer un concubin ou un partenaire, à la rupture, pour obtenir un rééquilibrage des patrimoines, celui-ci peut aussi demander

réparation en raison de la rupture elle-même et de ses conséquences à son égard

.

 

198 Bourges, 3 juin 2002, Dr. fam. décembre 2003, com. n° 140 p 18.

199 Cass. 1e civ, 15 octobre 1996, Bull. Civ I, n° 357.

200 Aix en Provence, 30 mai 2006, Juris-Data n° 2006-311475.

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