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Le bouddhisme theravada, la violence et l'état. Principes et réalités

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par Jacques Huynen
Université de Liège - DEA Histoire des religions 2007
  

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Le Mahâvamsa

Contrastant avec l'irénisme des sutras et du Canon en général, cette chronique (Ve EC) au ton épique ne manque pas d'épisodes martiaux. On ne peut s'en étonner si l'on comprend que sa motivation principale fut sans doute la consolidation sinon la création d'une identité singhalaise, un peu plus d'un millénaire après l'arrivée sur l'île des premier Indo-Aryens--même si de son propre aveu, dès la première génération ils épousèrent des Dravidiennes du Sud de l'Inde--et un peu moins d'un millénaire après la conversion de ses princes au bouddhisme, à un moment où une pression nouvelle commence à se manifester depuis cette même Inde du Sud agitée de mouvements sivaïtes hostiles au bouddhisme et au jaïnisme (cf. TAMBIAH,1992, p. 135).

Outre le fait que la majorité des quarante-six rois dont le Mahâvamsa122(*) rapporte les exploits n'accèdent au pouvoir qu'au prix du meurtre de leur prédécesseur, la violence et sa justification dans la défense, sinon la propagation, du bouddhisme apparaît remarquablement tôt au Sri Lanka. Ainsi le roi Dutthagamani (IIe AEC) paraissant tourmenté par la culpabilité d'avoir massacré un grand nombre de Tamouls au cours de son entreprise de ré-unification de l'île, se voit répondre par huit arhats (moines parfaitement illuminés) qu'en fait il n'a tué qu'un homme et demi : un moine, et un laïc respectant les cinq préceptes, le statut des autres, en tant que mécréants et malfaiteurs, n'étant pas supérieur à celui d'animaux, ces arhats oubliant sans doute que pour le bouddhisme le meurtre d'animaux est aussi interdit. Non seulement Dutthagamani n'a tué qu'un homme et demi mais, à sa mort, en récompense des mérites qu'il s'est acquis par la défense du Dhamma, l'entretien et la protection du sangha il accédera au Tusita, un des ciels bouddhistes, où réside le futur Bouddha, Metteyya.

101. Le roi s'étant assis sur la magnifique terrasse du palais, ornée de lampes parfumées de divers parfums,rehaussée de nymphes dansant102. alors qu'il reposait sur une couche moelleuse tendue d'étoffes sans prix,

103. considérant son splendide exploit, se souvenant qu'il avait coûté d'innombrables vies, malgré sa grandeur, il n'en ressentit aucune joie.

104. Des arhats du Piyangudipa, ayant eu connaissance de ses pensées, envoyèrent huit d'entre eux pour réconforter le roi. 105. Étant arrivés au cours de la deuxième veille de la nuit, ils parvinrent à la porte du roi et lui ayant fait savoir qu'ils arrivaient d'en haut [par les airs] ils atterrirent sur la terrasse.

106. Le grand roi les ayant salués, fait asseoir et honorés de diverses manières, leur demanda la raison de leur venue.

107. -Nous sommes envoyés par le sangha de Piyangudipa pour te réconforter, Seigneur des hommes !

108. -Mais, comment pourrait-il y avoir aucun réconfort pour moi qui ai fait périr une armée innombrable ? répliqua le roi.

109. -De cet acte ne découle aucun obstacle sur ta route vers le ciel car tu n'as tué qu'un homme et demi, en quelque sorte,

110. un qui avait pris refuge123(*) et l'autre qui suivait cinq préceptes124(*), le restant, hérétiques et dépravés, pouvant être considéré comme bétail.

111. Toi, par contre, tu feras briller de plusieurs manières la doctrine du Bouddha. Chasse donc ce souci de ton esprit, Seigneur des hommes !

Plusieurs siècles plus tard (IVe-Ve EC, donc peu de temps avant la rédaction du Mahâvamsa) le conflit entre l'ordre du Mahâvihâra et celui de L'Abhayagiri où se manifestaient des tendances mahayaniques comprend aussi des épisodes violents et au moins un meurtre. Ainsi la favorite du roi Mahâsena fit exécuter le bhikkhu Sanghamitta responsable de la désaffection du roi vis-à-vis du Mahâvihâra125(*) :

26. Une épouse favorite du roi, fille de scribe, qui s'affligeait de la destruction du Mahâvihâra,

27. ayant dans sa colère donné instruction à un ouvrier de supprimer le théra qui l'avait détruit,

28. fit périr Sanghamitta, auteur de cette cruauté alors que dans sa méchanceté il venait au Thûpârâma dans l'intention de le détruire [aussi]. Ils tuèrent aussi le ministre Sona, agressif, cruel et sans retenue.

29.Ayant fait amener des outils et des matériaux Meghavannabhaya construisit dans le Mahâvihâra des cellules pour les moines.

30. Leurs craintes apaisées par ce dernier les moines, venant de ci et de là, habitèrent [de nouveau] le Mahâvihâra.

[Le roi Mahâsena étant revenu à de meilleures dispositions termina sa carrière en faisant creuser seize réservoirs et un canal s'acquérant ainsi «beaucoup de culpabilité» (car creuser signifie tuer des insectes vivant sous terre) mais aussi «beaucoup de mérite» (car ces réservoirs devaient rendre la terre plus fertile)126(*).

C'est sur cette note optimiste que se conclut l'épopée.]

* 122 Edition de W.GEIGER, publiée par Luzac & Company pour la PTS 1908-1958, 25, 101-111.

* 123 . Sans doute un moine pleinement ordonné.

* 124 . Un pieux laïc.

* 125 Mahâvamsa, 37, 26-31.

* 126 upâcini : aor. de CI « accumuler ».

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