Les besoins de diversité et d'abondance apparus dans les
années 1960 ont obligé les entreprises à revoir leur mode
d'organisation afin de répondre à la demande.
Les théories du taylorisme relatives à la
division du travail, ne permettaient plus d'apporter une réponse
satisfaisante à l'économie alors en place. L'application des
principes du taylorisme dans le nouveau contexte économique ne contribua
qu'à accentuer les files d'attente entre sections de production,
accroître les stocks intermédiaires et finaux et allonger les
délais de production.
Les industries européennes, pour répondre
à l'accroissement des demandes, se sont rapidement inspirées des
modèles américains en s'équipant de machines toujours plus
productives et en accroissant leurs effectifs considérant l'importance
de leurs ressources comme un avantage concurrentiel. Mais ces industries se
sont ainsi constitué un système de production important et rigide
impliquant d'accroître les stocks pour répondre aux besoins de
diversité en demande croissante dans les années 60. Les
entreprises se sont alors vu confrontées à une inflation
importante mais nécessaire des stocks représentant rapidement une
part importante des coûts de production de l'entreprise.
De la conjoncture des années 1960 sont nés un
ensemble de fonctions de gestion nouvelles, notamment le contrôle de
gestion, système d'ingénierie comptable permettant principalement
de mieux maîtriser les différents coûts de l'entreprise
ainsi que le mode de gestion des stocks. Le contrôle de la qualité
est également apparu durant cette période dans l'objectif de
minimiser les rebuts et d'identifier les causes de défauts ou de non
qualité afin d'accroître le rendement de l'entreprise. Afin de
répondre aux besoins de diversification, et grâce principalement
au développement des moyens informatiques notamment en terme de
conception (CAO), les années 60 furent également des
années de développement des ateliers pilotes dont l'objectif
étaient le développement de nouveaux processus ou produits.
Enfin, ce fut également l'apparition de fonctions de planification de
production ainsi que de gestion des approvisionnements et des stocks.
Cependant, avec l'amélioration du niveau
général d'éducation, les principes du taylorisme
réduisant à de simples tâches d'exécutants les
opérateurs ne pouvaient plus satisfaire les besoins des salariés
ce qui fut une des raisons des manifestations de 1968. Les entreprises ont
alors recherché de la main d'oeuvre peu qualifiée principalement
issue de l'immigration et ont parallèlement renforcé leurs
effectifs de personnels plus qualifiés peu enclin à la
réalisation de tâches d'exécutants. Cela a induit une
augmentation importante des frais indirects de l'entreprise.
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De plus, la généralisation de l'usage de
l'informatique comme outil de centralisation des informations a permis
l'identification des contraintes de l'entreprise ce qui a permis à
l'entreprise de les prendre en compte dans sa gestion de production mais aussi
à les accepter sans rechercher les moyens de les réduire.
Les revendications des années 68 et la croissance des
effectifs ont conduit les entreprises à prendre en compte les
revendications de leurs salariés et d'instaurer un dialogue social via
l'émergence de représentants du personnel, ce fut l'apparition
des syndicats.
Durant les années 70, les structures grandissantes ont
du opter pour une décentralisation des décisions mais
l'application des principes de Taylor n'ont contribué qu'à
renforcer les dettes des entreprises. Le choc pétrolier de 1973 ne fit
pas remettre en question les principes du Taylorisme ni en Europe ni aux Etats
Unis. Seul le Japon réagit à la situation.
Ce fut un ingénieur japonais Taiichi Ohno qui remis en
cause les principes du Taylorisme pour proposer un nouveau mode d'organisation
des entreprises, principe qu'il expérimenta en premier lieu dans le
secteur automobile chez Toyota. Le modèle mis en place devait être
le moyen de rattraper l'industrie des Etats Unis en trois ans afin de maintenir
la place de l'industrie automobile japonaise sur le marché mondial.
Le modèle fut expérimenté dès 1960
dans l'entreprise Toyota qui restait alors une exception d'organisation. Alors
que les modèles d'organisation en place reposaient alors sur le fait que
ce qu'une entreprise était capable de produire, elle serait capable de
le vendre, le nouveau modèle d'organisation consistait au principe
inverse de définir ce qu'elle devait produire en fonction de ce que
l'entreprise était capable de vendre.
Le choc pétrolier de 1973, renforca l'idée de
Taiichi Ohno d'abandonner le concept de production de masse devenu
inadapté et source de gaspillage pour opter sur une production en phase
avec la demande.
Au Japon, ce concept nouveau, dans le contexte du choc
pétrolier de 1973 fut rapidement adopté par un grand nombre
d'entreprises particulièrement réceptives aux changements de mode
d'organisation de leurs ateliers.
Aux Etats Unis comme en Europe, les entreprises dont la
gestion reposait essentiellement sur des notions administratives,
financières et juridiques eurent plus de mal à accepter l'enjeu
de l'application de méthodes de gestion d'atelier comme outil de
performance de l'entreprise.
Les résultats de la mise en oeuvre des méthodes
de gestion en flux tendus proposées par Toyota à d'autres
entreprises de secteurs d'activités totalement différents au
Japon, notamment d'entreprises au bord de la faillite au moment du choc
pétrolier de 1973 participèrent à convaincre les
entreprises de se lancer dans ce mode d'organisation.
Ce ne fut finalement que dans les années 1980, que les
méthodes japonaises s'étendent aux industries américaines
puis françaises et européennes entrainant des gains de
productivité, des réductions de stocks intermédiaires, et
de rebuts considérables.
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