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Le prosélytisme et la liberté religieuse à  travers le droit franco grec et la CEDH

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par Hatem Hsaini
Université Panthéon Sorbonne (Paris 1) - Master Droit public comparé 2002
  

Disponible en mode multipage

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Je tiens à remercier Monsieur le Professeur Mathieu et Monsieur Chaouche pour l'aide qu'ils m'ont apporté pour la rédaction de ce mémoire.

Je dédie ce mémoire à ma mère, à mon père, à Antonia et Katerina XouXoulidaki.

Principales abréviations

I- Juridictions.

CAA : Arrêt de cour administrative d'appel

CC : Décision du Conseil constitutionnel

CE : Arrêt du Conseil d'État (sous section)

CE Ass. : Arrêt du Conseil d'État (assemblée du contentieux)

CE sect. : Arrêt du Conseil d'État (section du contentieux)

Concl. : Conclusions

ComEDH : Commission européenne des droits de l'homme

CourEDH : Arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme

TA : Jugement du tribunal administratif

II- Textes

CEDH : Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme

DUDH : Déclaration Universelle des droits de l'homme

DADH : Déclaration Américaine des droits de l'homme

Comm. : Commission européenne

III- Périodiques

AJDA : L'Actualité Juridique. Droit administratif

D. : Recueil Dalloz

DA: Droit administratif

Gaz. Pal.: Gazette du Palais

JCl. Adm : Juris-Classeur droit administratif

JCP : La Semaine juridique

JDI : Journal de droit international

JO : Journal Officiel de la République française

JT : Journal des tribunaux

JTDE : Journal des tribunaux européens

LPA : Les Petites affiches

Mél. : Mélanges

PUF : Presses Universitaires de France

Quot. Jur. : Le Quotidien juridique

Rev. adm. : La Revue administrative

RDL : Revue de droit local

RDP : Revue de droit public et de science politique

Rec. : Recueil Lebon

RFDA : Revue Française de droit administratif

RFDC : Revue française de droit constitutionnel

RFSP : Revue française du Service Public

RIDC : Revue internationale de droit comparé

RTDH : Revue trimestrielle des droits de l'homme

RUDH : Revue universelle des droits de l'homme

RSMP : Revue des sciences morales et politiques

IV- Divers

p. : page

Éd. : édition

Comm. : commentaire

Requ. : requête

c/ : contre

Sommaire

Introduction 11

PARTIE I- Le prosélytisme comme manifestation extérieure de

la liberté religieuse 20

Titre I- Le fondement juridique du prosélytisme 21

Chapitre I- La liberté religieuse comme fondement juridique 22

du prosélytisme

Section I- Une reconnaissance par voie interprétative du prosélytisme religieux 22

§ I- Le prosélytisme à travers les droits nationaux : une approche divergente 22

A- Le cas du droit français 22

B- Le cas du droit grec 24

§ II- Le prosélytisme et la Convention européenne des droits de l'homme 26

A- Les articles garantissant la liberté religieuse 27

B- La jurisprudence de la CEDH en matière de prosélytisme 28

Section II - Les bénéficiaires de cette garantie juridique 31

§ I -Un droit de tous les hommes ? 31

A- La situation des mineurs au regard du bénéfice 32

du droit à la liberté de religion

B- Prise en compte des seules activités 33

religieuses des groupements religieux

C- Le cas des personnes en détention 33

§ II- La situation des groupements religieux 34

A- Recevabilité des requêtes formulées par 35

les seuls groupements religieux

B- Prise en compte des seules activités 35

religieuses des groupements religieux

Chapitre II- La Commission et la Cour européenne des droits de l'homme 37

rempart quant aux ingérences étatiques en matière de liberté religieuse.

Section I- L'abus de droit et le contrôle de légalité 37

§ I- L'abus de droit 37

A- La notion d'abus de droit 38

B- L'abus de droit dans la Convention européenne 39

des droits de l'homme

§ II- Le principe de légalité 39

A- Existence de la loi 39

B- La qualité de la loi 40

Section II- Le contrôle du caractère raisonnable des 40

mesures portant atteinte à la liberté religieuse

§ I- Application automatique de la Cour européenne des droit 41

de l'homme de la proportionnalité aux interventions étatiques

en matière de liberté religieuse.

§ II- Evaluation de la protection de la liberté religieuse 42

Titre II- Les implications du prosélytisme « religieux  45

Chapitre I- Le prosélytisme en tant que droit de manifester sa religion 46

Section I- Le culte et les rites 46

§ I- Des manifestations a priori paisibles 47

A- La Commission évite de se prononcer clairement 47

sur la nature de la manifestation

B- Des manifestations sous contrôle 48

§ II- Controverse quant au cadre de ces manifestations 49

A- L'exercice de la liberté de religion 49

individuellement ou collectivement

B- Réticence du droit grec quant à la liberté cultuelle 50

Section II- Les manifestations plus ambiguës 51

§ I- L'enseignement 51

A- La forme de l'enseignement 52

B- L'enseignement en vue de la conversion : composante du prosélytisme

§ II- Le prosélytisme, manifestation complexe des convictions religieuses 54

A- Le silence de la Cour quant à la nature de la prédication 54

B- La prédication : une manifestation de la religion 55

garantie au même titre que le culte ou les rites ?

Chapitre II- Le prosélytisme comme support au principe du libre choix de 57

sa religion

Section I- Le principe du libre choix de sa religion 57

§ I- Prédétermination de la religion originaire de chaque homme 57

A- Affirmation de ce droit par la Convention 58

B- Le contenu de ce droit 58

§ II- Le droit de se convertir 59

A- Un doit implicite 59

B- Une réticence du droit grec quant à l'effectivité de ce droit 60

Section II- L'exercice du droit de changer de religion 60

§ I- Liberté de tout homme d'accéder aux informations lui permettant 61

de changer de religion.

§ II- La neutralité de l'Etat 62

PARTIE II- Le prosélytisme comme menace 64

à la liberté religieuse

Titre I- Les limites classiques du prosélytisme 65

Chapitre I- Prohibition unanime d'un prosélytisme abusif 66

Section I- Le prosélytisme ne peut porter atteinte aux exigences 66

de la stabilité de la vie sociale

§ I- Le maintien de l'ordre 67

§ II-- L'hygiène et la santé publique 67

Section II- Le prosélytisme doit respecter l'harmonie des rapports sociaux 68

§ I- Le respect des droits et libertés d'autrui 69

A- Le respect des droits et libertés d'autrui 69

dans les rapports familiaux

B- Le respect des convictions d'autrui 71

§ II- Le prosélytisme abusif : une atteinte aux droits de l'homme 73

A- L'endoctrinement et la manipulation mentale 73

B- Le prosélytisme abusif support de la haine et 74

de la provocation religieuse

Chapitre II- Les sanctions pénales d'un prosélytisme abusif 76

Section I- Le prosélytisme abusif, non exclusif de responsabilité pénale 76

§ I- L'imputabilité du prosélytisme abusif 76

A- La religion, non privative de lucidité 77

B- La religion, non privative de liberté 77

§ II- la criminalité du prosélytisme abusif 78

A- L'ordre religieux, non justificatif 78

B- La nécessité religieuse, exclusive de justification 79

Section II- Le prosélytisme abusif, non exclusif de sanction pénale 80

§ I- La qualification pénale du prosélytisme abusif 80

§ II- La répression pénale du prosélytisme abusif 81

A- L'inaction des victimes de faits religieux 81

B- La peine du fait religieux délictueux 82

Titre II- Les nouveaux défis de l'Europe en matière religieuse 84

Chapitre I- La problématique de l'expression de la liberté 85

religieuse par le biais de signes religieux

Section I- L'interdiction du port de signes religieux par les élèves 85

§ I- La notion de signe religieux. 85

§ II- Interdiction du signe religieux. 89

Section II- Le contrôle juridictionnel 90

§ I- Les mesures d'ordre intérieur, support de la prohibition 90

§ II- L'appréciation des situations au cas par cas et ses limites 92

Chapitre II- Les sectes : un phénomène transnational

95

Section I- Nécessité d'adopter une législation relative aux sectes 95

§ I- Les mouvements dits sectaires : mouvements religieux 95

§ II- Les mesures législatives luttant contre les sectes 96

Section II- La position de la Commission et de la Cour face à ces nouveaux 97

mouvements religieux.

§ I- Absence de distinction entre religion traditionnelle et 97

nouveaux groupements religieux

§ II- Conformité des législations nationales spécifiques aux 99

nouveaux groupement au regard de la Commission et de

la jurisprudence de la Cour.

Conclusion 101

Annexes 102

INTRODUCTION

L'Homme a toujours eu besoin de croire, d'accomplir des rituels et d'exprimer de la manière la plus libérale ses convictions religieuses. La religion n'est-elle pas finalement inhérente à la nature humaine ?

Cependant, la liberté de religion dérange. Personne n'y trouve son compte, surtout pas les croyants eux-mêmes, ni les Eglises. En effet, l'expression renvoie inévitablement à une pluralité des religions, affirmant, chacune détenir la vérité absolue avec plus ou moins de bonne foi et de tolérance1(*).

Cela est d'autant vrai que dans certaines parties du monde le message religieux est récupéré à des fins politiques ou bien par l'Etat lui-même ou encore par des entités non-étatiques. L'école est mobilisée ainsi  « en vue d'assurer la prévalence de la religion, au besoin en dispensant une formation militaire ou paramilitaire. Les lieux de culte peuvent servir de lieux d'orientation, de mobilisation et d'encadrement des fidèles, afin que rien dans la vie sociale et politique n'échappe à l'emprise de la religion »2(*)

Avant même de rentrer dans le coeur de cette étude, il est fondamental de délimiter le champ de notre analyse. En effet, il faut d'emblée définir les termes du sujet.

Pour cerner ce que recouvre la liberté religieuse, encore faut-il savoir ce que signifie le mot religion.

La religion n'est pas définie par la loi française, puisque la loi du 9 décembre 1905 se borne à décrire les associations cultuelles comme « des associations formées pour subvenir aux frais, à l'entretien et à l'exercice public d'un culte » (article 18) sans pour autant indiquer ce que recouvre le terme de culte. A défaut du législateur, il revient aux juridictions administratives et judiciaires, chargées de mettre en oeuvre le principe de laïcité, de définir la religion. On peut citer, un arrêt de la Cour d'appel de Lyon qui donne une définition de la religion ; cette dernière déclare je cite : «dans la mesure où une religion peut se définir par la coïncidence de deux éléments, un élément objectif, l'existence d'une communauté même réduite et un élément subjectif, une foi commune (...) »3(*), la religion suppose alors une communauté et une foi commune.

Pour la Grèce, c'est la doctrine qui a définit la religion, comme étant la conception de la personne en ce qui concerne Dieu et il s'agit d'une conception métaphysique4(*),

Enfin on peut également définir la religion comme étant le fait d'unir et de relier (religare), de former et de structurer une communauté. On sait d'ailleurs que, pour E. Durkheim, le fait religieux ne consiste en rien d'autre qu'en un mouvement d'hypostase ou de sacralisation du corps social lui-même, tendant à lui permettre de fonctionner et de croître en plaçant sous une autorité sacrées les lois mêmes de la vie commune5(*).

D'un point de vue subjectif, c'est un hommage intérieur d'adoration, de soumission ou encore d'amour à l'égard de Dieu ou du divin. Et objectivement, le terme évoque une institution particulière, une organisation sociale hiérarchisée, avec son code, ses traditions, dont l'objet est de rendre à Dieu l'honneur qu'il lui est du.

Enfin, on peut également définir le terme de conviction religieuse, pour la Commission le mot conviction n'est pas synonyme des termes opinions et idées, il s'applique à des vues atteignant un certain degré de force, de sérieux, de cohérence et d'importance.

La liberté religieuse serait alors ce droit à la liberté du choix de sa religion, le droit de choisir et d'exprimer librement ce choix religieux ou ces convictions religieuses.

Mais cette liberté religieuse implique également le droit de manifester en public ou en privé sa religion et négativement le droit de changer ou de n'adhérer à aucune religion ou conviction religieuse et cela dans le dessein de plaire à Dieu ou à une Puissance supérieure à l'homme.

Quant au prosélytisme, historiquement, il se réfère aux païens convertis au Judaïsme et s'assimile à la transmission du savoir religieux en vue de la conversion d'autrui.

Concernant cette notion, seul le droit grec la définit. Il s' agit certes, d' une définition pénale, aussi aux termes de l' article 4 de la loi 1363/ 1938, modifiée par l' article 2 de la loi 1672/1939, on peut capter certains éléments du prosélytisme, ainsi, « le prosélytisme, est toute tentative directe ou indirecte de pénétrer dans la conscience religieuse d'une personne de confession différente dans le but d'en modifier le contenu, soit par toute sorte de prestations ou promesse de prestation ou de secours moral ou matériel, soit par des moyens frauduleux , soit en abusant de son inexpérience ou de sa confiance, soit en profitant de son besoin, sa faiblesse intellectuelle ou sa naïveté»6(*).

En réalité, le prosélytisme peut prendre deux formes : il peut s'agir de la prédication, de l'évangélisation ou du catéchisme, mais négativement il peut être tromperie, propagande ou encore provocation marketing. Ainsi, se caractérise sa nature ambivalente.

Les degrés de tolérance d'une pratique religieuse et sa place au sein d'une société sont intimement liées aux types de relations qu'on pu entretenir l'Église et l'État. En effet, il s'agit d'un constat territorialement universel : les rapports institués entre l'État et une religion déterminée tenue comme traditionnelle ne sont pas sans exercer quelques actions sur la situation faite à la liberté religieuse et à ses manifestations.

En France, il faut se référer à la déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen du 26 août 1789 proclamait la liberté de conscience (art.10) et à la constitution de 1791 (titre 1) garantissant le libre exercice des cultes. Pourtant les constituants n'entendaient pas rompre avec un système dans lequel l'Église dépendait du pouvoir civil. Le décret du 2 novembre 1789 décidait de la nationalisation des biens du clergé et en contre partie l'État prenait en charge les frais du clergé et de ses ministres. Progressivement, le régime de la Convention surtout sous la terreur (mai 1793-juillet 1794) mena une politique de déchristianisation systématique. Le décret du 21 février 1795 établissait un régime de séparation des églises et de l'État tout en affirmant le principe du libre exercice des cultes. La république n'en salariait aucun, ne fournissait aucun local, reconnaissait aucun ministre du culte.

Cependant, Bonaparte rétablit une certaine paix religieuse en négociant avec Pie VII un concordat, signé le 15 juillet 1801(26 Messidor an IX). Ce texte prévoit d'une part,

le rapport entre Église et État et ils permettent d'autre part aux autorités civiles d'exercer un étroit contrôle policier sur les ministres des cultes et sur le déroulement de la vie religieuse.

Il faut noter que cette législation concordataire s'appliqua dans des contextes politiques très divers. Gouvernement favorable ou défavorable à l'Église catholique ou à tout autre religion, se succédaient à un rythme rapide. On peut dire que l'Église joua un rôle fondamental dans la vie politique.

A partir de la monarchie de juillet (1830), deux groupes vont s'affronter et donner lieu à deux courants : d'une part, les partisans de l'ordre traditionnel, d'une société renouant avec l'ancien régime et par conséquent défenseurs des cléricales et d'autre part, ceux qui soutenaient un ordre nouveau notamment certaines valeurs dégagées par la révolution de 1789 (comme l'opposition a l'Église catholique et a son clergé).

Lorsque à partir de 1879/1880 les républicains ont pris le pouvoir, ils estimèrent que le régime républicain était incompatible avec le maintien d'une Église forte d'où la mise en place de lois répondant à ce principe d'incompatibilité. Cela a évidemment entraîné la rupture des relations diplomatiques avec le Saint-Siège en 1904.

Dans cette logique d'affrontement entre l'Église et l'État fut voter la loi du 9 décembre 1905, instaurant en France le régime de Séparation des Églises et de l'État qui d'ailleurs constitue le régime actuel. Ainsi, la Loi de 1905 pose les principes de base. De fait, la constitution de 1958 ne fixe pas le régime constitutionnel des églises, et ne contient que deux dispositions concernant directement ou non, le statut des églises.7(*) Ces sources constitutionnelles sont fondamentales car elles fondent le régime de neutralité de l'État, qualifié aussi d'État laïque.

Finalement, si on veut résumer la situation de la France on peut se référer à Monsieur Jacques Robert. Ce dernier a retracé la typologie entre État et églises en distinguant trois systèmes de relations entre l'autorité étatique et puissance religieuse8(*).

D'abord, la confusion entre religion et état, dans lequel autorité politique et autorité religieuse se fondent entre les mains d'un même chef.

Ensuite, on trouve l'union entre l'État et la religion qui se manifeste par une collaboration entre les deux autorités, orchestrée par un partage de compétence.

Enfin, la séparation traduite par la non-intervention de l'État dans les questions religieuses compensée par l'effacement de l'autorité religieuse du domaine politique.

Pour la Grèce la situation est différente, les rapports Etat-Eglise est appelé, dans la littérature grecque moderne, système « de la prépondérance de l'État conformément à la loi »9(*). L'Etat dispose du droit, accordé par la constitution, de régler au moyen d'une loi toutes les matières administratives de l'église, même celles présentant une nature interne. Après la prise de Constantinople (1453), le cadre institutionnel a changé. Le sultan Mehmet II va octroyer des pouvoirs politiques à l'église, de sorte que le patriarche était le responsable devant l'autorité ottomane des actes des chrétiens orthodoxes envers le pouvoir de l'État.

Durant l'insurrection de 1821, un système différent de relations a été établi. Les constitutions insurgées établissaient la religion de l'Église orthodoxe orientale comme « dominante » ou « religion d'État »10(*) et assuraient aux membres des autres confessions et tendances religieuses la libre pratique de leur religion. Les constitutions du temps de l'insurrection ne contenaient aucune disposition relative au droit de l'État de légiférer en matière ecclésiastique. En 1821, les grandes puissances ont imposé le régime de la monarchie absolue en Grèce, et le prince de Bavière comme roi du pays.

En 1833, une ordonnance va être publiée, en vertu de laquelle fut établi le système « de la prépondérance de l'État conformément à la loi » et portant indépendance de l'Église grecque, l'État devenait l'autorité législative exclusive pour tout ce qui concernait l'Église. Cette dernière était alors directement soumise au souverain, instance suprême des questions administratives de l'Église.

Du point de vue constitutionnel, on rencontre ce système pour la première fois dans la constitution de 1844, dont l'article 105 contenait une disposition relative aux administratives de l'Église que l'État pouvait régler au moyen d'une loi.

L'introduction de ce nouveau cadre de rapport en 1833 est due à Georg Ludwing von Mauer, membre de la régence et éminent juriste. La Grèce moderne doit à Mauer une oeuvre de codification particulièrement importante.

Les dispositions de la constitution de 1844 concernant la « prépondérance de l'État conformément à la loi » n'ont pas été reprises dans la constitution de 1864, 1911, 1927 et 1952. Cette absence de reprise ne signifie pas pour autant que le système en question n'était plus en vigueur.

Une disposition relative au sujet existait dans les Chartes statutaires correspondantes de l'Église, qui était des lois de l'État. Cette disposition est seulement réapparue dans le texte constitutionnel (1968) au cours de la dictature militaire. L'article 1 paragraphe 5 prévoyait que nul projet ou proposition de loi, concernant l'organisation et l'administration de l'Église, ne serait discuté sans consultation du Saint-synode, sauf après expiration d'un délai de vingt jours sans que cette consultation soit présentée. L'article 72 paragraphe 1 de la constitution de 1975, actuellement en vigueur, comprend également une disposition similaire : les projets et propositions de loi portant sur les matières visées à l'article 3 (position juridique de l'Église orthodoxe) et 13 (liberté de culte) sont uniquement discutés en assemblée plénière du Parlement et non pas dans ses sections d'été11(*).

Finalement nous pouvons synthétiser cette relation Église-État, on nous référons à Alban Doudelet qui écrivait :«les constituants grecs du 19e siècle ont pensé rétablir l'idéal byzantin de coopération entre l'Église et l'État, mais les modèles russes et bavarois, qui ont effectivement prévalu, ont instauré une subordination de l'Église à l'État, il a fallu attendre la Constitution de 1975 et la loi organique de 1977 pour voir l'administration de l'Église libérée de l'État : la situation actuelle conjugue une indépendance mutuelle et une collaboration traditionnelle(....), malgré les situations de conflit ou de concurrence entre les deux institutions »12(*).

On peut d'ores et déjà relever une différence entre la France et la Grèce et qui a toute son importance. En France, c'est un système ou l'État ignore l'Église alors que pour l'État hellénique il y a une sorte de coopération voire une protection de l'Église orthodoxe. La religion orthodoxe est non seulement la religion dominante mais elle prédomine sur toute les autres, en d'autres termes elle est privilégiée. Cette différence démontre que la république grecque et française bien qu'elles proclament toutes deux la liberté religieuse (article 13 de la Constitution hellénique et les articles 1 et 2 d'une loi de 1905 à valeur constitutionnelle en France), elles n'abordent pas de la même manière le phénomène religieux.

La liberté religieuse et le prosélytisme à travers le droit franco-hellénique et la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH) présente plusieurs intérêts :

Concernant tout d'abord le choix de la comparaison entre la France, la Grèce et la CEDH, cela tient à plusieurs raisons.

En effet, la France est un Etat laïque et la Grèce un Etat « confessionnel », où il existe une religion d'Etat. Par conséquent, il est intéressant d'analyser la position de l'Etat face à la liberté religieuse mais aussi à l'égard du prosélytisme.

Quant à la Convention européenne des droits de l'homme, cette dernière constitue le modèle le plus accompli en matière de protection des droits de l'homme et de ce fait il est nécessaire d'étudier la position de la convention européenne et de la cour européenne des droits de l'homme en matière de garantie des droits fondamentaux.

Par ailleurs, depuis quelques décennies, nous assistant à une évolution de la religion. De même que le prosélytisme religieux connaît aujourd'hui des développements qui dépassent l'analyse juridique. En réalité, il traduit une crise de légitimité des mécanismes traditionnels de transmission des croyances religieuses.

Actuellement, l'exercice de la liberté religieuse ne se limite plus au catéchisme ou la cérémonie dominicale, mais plutôt par des actions religieuses dont l'objet est de rencontrer les personnes afin de leur prêcher la parole évangélique et cela par tous les moyens de communications. Les mouvements religieux minoritaires bousculent les monopoles institutionnels des églises dominantes et de ce fait ils portent directement atteinte à la vision hégémonique et ethnocentrique des groupements religieux majoritaires13(*).Ainsi, il intéressant d'examiner comment le droit franco-hellénique et le droit européen a travers la CEDH appréhende ce phénomène.

D'autre part, il est fondamental de préciser et d'analyser le prosélytisme qui repose sur une vision infantilisée du public destinée souvent a dévalorisé l'action d'autrui. Or, en dépit des apparences, il n'est pas prouvé que le récepteur du message religieux soit passif et insensible en raison du caractère interactif et réciproque de la communication de tout message. Il serait extrêmement réducteur de supposer bénéfique la transmission des croyances spirituelles par les groupes religieux majoritaires et dangereuses l'action des mouvements minoritaires. D'autant plus que tout mécanisme de communication est intrinsèquement manipulatoire en ce sens qu il implique une réaction souhaitée conforme par l'auteur du message. Si le droit hellénique à l'instar du droit français, affirme la liberté religieuse, concernant l'exercice de la liberté d'expression religieuse, on ne peut pas dire que l'État grec facilite cette dernière, d'ailleurs la Grèce est le seul pays européen qui prévoit le délit de prosélytisme.

Enfin, par l'étude du prosélytisme, c'est la question de la tolérance religieuse qui est en jeu. En effet, nous pouvons dire que l'espace européen est une zone de liberté et de droit. Mais qu'on est-il du degré de cette liberté religieuse, cette dernière n'est-elle pas sujette à la manière dont l'État organise sa relation avec l'Église ? La France a opté pour un modèle laïc ou l'Etat ne s'émisse pas dans les affaires de l'Église, il ignore cette dernière. En Grèce, la situation est tout autre, la religion orthodoxe est omniprésente et surtout elle exerce une pression extraordinaire sur le pouvoir politique, au point que le Patriarche devient une figure non plus seulement religieuse mais également politique. Mais par le biais notamment des exigences de la Convention européenne en matière de liberté religieuse et l'appartenance de la Grèce a l'Union européenne, une évolution a été amorcée dans le traitement des questions relatives à la religion et des opinions se font de plus en plus insistantes sur la nécessité d'exclure l'Église de la sphère politique. Peut-on dire alors que le modèle de la « laïcité a la française » tend a influencer le droit hellénique ?

La problématique du prosélytisme tient à son articulation avec la liberté religieuse ainsi garantie par les législations franco-grecque et la convention européenne des droits de l'homme.

En d'autres termes, doit-on voir dans le prosélytisme, la manifestation extérieure de la liberté religieuse en tant que liberté fondamentale ou alors considérer que le prosélytisme est intentatoire à la liberté religieuse et de ce fait il doit être réprimé afin de préserver l'effectivité de la liberté religieuse ?

Pour répondre à cette question, il est intéressant de confronter l'approche du droit grec avec celle du droit français afin de savoir s'il existe une convergence ou une divergence de position. Mais aussi examiner la position de la CEDH en tant qu'instrument de protection de la liberté religieuse.

On peut d'ores et déjà dire, que la liberté d'exprimer ses convictions en matière religieuse est étroitement contrôlée en Grèce, ce qui n'est pas le cas en France. De plus en matière de liberté de culte, l'État grec la restreint ouvertement, par le biais d'une disposition constitutionnelle (article 13§2) : en effet cette liberté n'est accordée qu'à la religion dominante et aux culte connus, ce qui traduit une discrimination à l'égard des cultes non connus. Néanmoins à partir du moment où les religions sont dominantes ou connues en Grèce, on peu considérer que l'organisation de leur culte connaît une réglementation similaire à la législation française : les manifestations du culte se déroule librement, sous la condition expresse de ne pas contrarier l'ordre public, dont l'État et les autorités publiques sont garants.

Ces remarques préliminaires étant faites nous aborderons notre étude à travers deux parties : le prosélytisme comme manifestation extérieure de la liberté religieuse d'une part (1er Partie), le prosélytisme comme menace à la liberté religieuse d'autre part ( 2e Partie).

1er Partie : Le prosélytisme comme manifestation extérieure de la liberté religieuse.

2e Partie : Le prosélytisme comme menace à la liberté religieuse

PARTIE I- Le prosélytisme comme manifestation extérieure de la liberté religieuse.

Le prosélytisme et la liberté religieuse forme un couple, une sorte de complémentarité. En effet, l'exercice effectif de la liberté religieuse impose que cette dernière puisse se manifester dans toutes ces formes.

On a vu, qu'à la différence du droit hellénique, la France ainsi que la CEDH sont silencieuses quant au prosélytisme, ce dernier n'est guère définit et pourtant il conditionne l'exercice de la liberté religieuse.

Cependant, il faut rechercher le fondement juridique du prosélytisme afin que ce dernier puisse être garanti en tant que partie intégrante de la liberté religieuse.

En effet, on peut affirmer, que c'est dans le cadre plus général de la liberté religieuse qu'on pris forme les différents instruments garantissant la faculté de communiquer à autrui sa foi ou le message divin que l'on considère universelle et devant être transmis aux hommes. Sur ce point on se rencontre que le droit français et le droit hellénique sont convergents et tout deux garantissent la liberté religieuse, mais dans la pratique cette liberté de croire et de l'exprimer publiquement est loin d'être satisfaisante.

L'action positive du recrutement religieux présuppose le pluralisme spirituel ou institutionnel14(*)mais aussi la liberté de conscience. On sait que le droit international défend le droit de l'individu de penser librement par lui-même, à avoir des principes qui soient en accord avec ses convictions profondes et à agir en conséquence, sous réserve exclusivement de ne pas porter atteinte aux droits d'autrui 15(*)

En général, les grands textes juridiques relatifs à la liberté de changer ou pas de religion ont une portée et un intérêt variable. Dans les Etats de droit tel que la France et la Grèce, les citoyens disposent de garanties juridictionnelles effectives, dans ce cadre les textes constitutionnels ont une autorité réelle. Dans d'autres pays, leur portée est plus symbolique ou politique, c'est d'ailleurs le cas des Etats dont le régime politique est fondé sur une dictature, empêchant les citoyens de croire à d'autres principes que ceux imposés par le régime.

Aussi, dans cette première nous allons rechercher le fondement juridique du prosélytisme (Titre I) et ensuite examiner les implications du prosélytisme religieux (titre II).

Titre I- Le fondement juridique du prosélytisme

Titre II- Les implications du prosélytisme religieux

Titre I- Le fondement juridique du prosélytisme.

Comme nous l'avons vu précédemment le prosélytisme ne fait pas l'objet d'une définition juridique, exception faite du droit grec, qui ce dernier le définit négativement par une loi spéciale.

Habituellement, pour le public, le prosélytisme est synonyme de propagande, d'endoctrinement ou de manipulation mentale mais il recouvre également le droit de diffuser ses convictions religieuse a autrui en vue de sa conversion. Il faut noter, que la Convention américaine des droits de l'homme garantie cette liberté, ce qui n'est pas le cas par exemple de la CEDH

Cependant, à travers l'interprétation des droits nationaux , notamment le droit français et le droit grec et la CEDH, on s'aperçoit que le prosélytisme est effectivement garantie en tant qu'aspect ou conséquence logique d'une autres liberté, elle, reconnue expressis verbis, la liberté religieuse (Chapitre I).

Par ailleurs, à travers donc cette liberté religieuse, le prosélytisme va être garanti non seulement par les droits nationaux mais aussi par le droit européen. La Cour européenne des droits de l'homme ainsi que la commission vont constituer une sorte de rempart afin d'assurer un niveau minimum de protection de la liberté religieuse et par conséquent du prosélytisme (Chapitre II).

Chapitre I- La liberté religieuse comme fondement juridique du prosélytisme.

Chapitre II- La Commission et la Cour européenne des droits de l'homme: rempart aux ingérences étatiques en matière de liberté religieuse.

Chapitre I- La liberté religieuse comme fondement juridique du prosélytisme.

Une remarque doit être apportée, le droit de diffuser des convictions religieuses relève certes de la liberté de manifester sa religion ou sa conviction mais aussi de la liberté d'expression. Mais dans le cadre de notre étude, nous traiterons simplement la liberté religieuse en tant que support juridique du prosélytisme.

Le droit français et le droit grec vont reconnaître par voie interprétative le prosélytisme comme étant l'expression extérieure de la liberté religieuse (Section I), par ailleurs il faudra identifier d'une manière précise quels sont les bénéficiaires de cette garantie juridique (Section II).

Section I- Une reconnaissance par voie interprétative du prosélytisme religieux.

Le droit franco-hellénique ainsi que la CEDH consacre le principe de la liberté religieuse. La Cour européenne des droits des droits de l'homme ainsi que les tribunaux nationaux veillent au respect de cette liberté.

Cependant, la Grèce se distingue de la France, du fait qu'elle prévoit également l'interdiction du prosélytisme (article 13 de la Constitution), mais dans ce cas précis, il s'agit du prosélytisme dit abusif, celui qui porte atteinte aux droits d'autrui notamment.

Ainsi, nous allons examiner quelles sont, à travers les droits nationaux et la CEDH, les références qui sont faite à la liberté religieuse et par voie de conséquence au prosélytisme.

Nous verrons dans un premier paragraphe la position des droits nationaux quant à cette reconnaissance implicite du prosélytisme (§I) et ensuite nous analyserons la position de la CEDH et de la cour européenne des droits de l'homme (§II).

§ I- Le prosélytisme à travers les droits nationaux : une approche divergente.

En France, à la différence de la Grèce, il n'existe pas de religion prédominante, l'Etat français ignore l'Eglise. En Grèce la situation est totalement différente, la constitution hellénique privilégie une religion sur les autres : c'est le religion orthodoxe d'orient. De ce fait, il est intéressant de présenter dans un premier temps, comment le droit français appréhende et réglemente la liberté religieuse (A) et ensuite examiner le droit grec (B).

A- Le cas du droit français.

L'article 10 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 garantit la liberté des opinions « même religieuses ». La question n'est abordée qu'à l'article 1er de la Constitution de 1958 sous l'angle de la non discrimination.

Par ailleurs la loi de 1905 dont certaines dispositions ont valeur constitutionnelle16(*), notamment son article premier qui prévoit que « la République assure la liberté de conscience » et qu'elle « garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions ci-après dans l'intérêt de l'ordre public ».

De plus, tout en posant le principe de la séparation des Eglises et de l'Etat, la loi du 9 décembre a cependant institué une protection de la liberté religieuse ou la liberté de culte. Laïque, l'Etat n'en demeurait pas moins garant de la liberté de culte ainsi que le justifiait le Professeur Garraud : « Si donc la loi n'a pas à s'immiscer dans le domaine du religieux, elle doit garantir à tous le droit qui appartient à chacun de suivre ou de ne pas suivre le culte conforme à ses croyances »17(*).

Les articles 31 et 32 de la loi du 9 décembre 1905 ont remplacé les articles 260 et 261 du Code pénal de 181018(*), lesquels protégeaient le libre exercice des cultes autorisés sous le régime du Concordat19(*). Les similitudes rédactionnelles existant entre les dispositions anciennes et nouvelles ainsi que la faible application des articles 31 et 32 de la loi de 1905 rendent utile le recours à la jurisprudence dégagée avant 190520(*).

Le droit français par le biais des dispositions de la loi du 9 décembre 1905 institue une protection générale de l'exercice cultuel en incriminant toutes les atteintes dont elle pourrait faire l'objet.

Cette liberté religieuse implique non seulement le libre choix d'exercer tout acte de culte conformément à sa croyance mais aussi l'exercice paisible du culte choisi. Si le libre choix doit être garanti, l'exercice paisible du culte doit l'être également. La loi de 1905 protége ces deux aspects de la liberté de culte.

Les articles 31 et 32 de la loi de Séparation mettent en effet l'exercice du culte à l'abri tant des contraintes que des troubles.

Plus précisément l'article 31 de Séparation dispose : « Seront punis d'une amende de seize francs à deux cents francs et d'un emprisonnement de six jours à deux mois ou de l'une de ces deux peines seulement ceux qui, par voie de fait, violences ou menaces contre un individu, soit en lui faisant craindre de perdre son emploi ou d'exposer à un dommage sa personne, sa famille ou sa fortune, l'auront déterminé à exercer ou à s'abstenir d'exercer un culte, à faire partie ou à cesser de faire partie d'une association cultuelle, à contribuer ou à s'abstenir de contribuer aux frais d'un culte. »

L'article 31 énumère trois procédés matériels de contraintes. A défaut de l'un de ces trois moyens, l'infraction ainsi définie ne sera pas constituée. A titre d'exemple, la persuasion exclusive de toute violence physique ou morale, telle que l'ordre, la défense ou le conseil, n'est pas incriminée21(*). Les contraintes incriminées par l'article 31 de la loi de 1905 résultent soit de la violences et voie de fait soit des menaces.

Concernant les violences et les voies de fait, il convient, pour leur définition, de se référer aux articles 222-7 et suivants du Code pénal relatifs aux violences. La jurisprudence sous l'empire de l'ancien Code pénal sur le fondement des articles 309 et suivants relatifs aux coups et blessures permet de cerner ces notions.

Les violences et voies de fait exigent un acte positif et ne peuvent résulter d'une abstention22(*) Par ailleurs, la jurisprudence n'exige pas que les comportements constitutifs de violences et de voies de fait entraînent une atteinte physique. Ainsi selon la formule de la cour de cassation, « en visant dans les articles 309 et 311 du Code pénal les violences et les voies de fait, le législateur a entendu réprimer celles qui, sans atteindre la personne matériellement, sont cependant de nature a provoquer une sérieuse émotion »23(*).

En somme les termes de violences et de voies de fait recouvrent donc une multitude de comportements positifs atteignant la personne soit dans son intégrité physique, soit dans son intégrité psychique.

Enfin, le troisième procédé matériel contrainte énoncé par l'article 31 réside dans les menaces. Celles-ci résultent de la crainte d'un mal que leur auteur fait peser sur sa victime.

Les menaces au sens de l'article 31, comme celle incriminées aux articles 222-17 et 222-18 du Code pénal peuvent être physiques, verbales ou écrites.

On remarque, que le droit français affirme la liberté religieuse et sa libre pratique et il prévoit par le biais du droit pénal des mesures assurant l'exercice effectif de cette liberté.

Le prosélytisme en tant que manifestation de cette liberté religieuse n'est certes pas mentionné expressis verbis, mais par extension de la garantie juridique octroyer à la liberté de culte, le prosélytisme se voit alors couvert par ce régime juridique.

Le droit hellénique quant à lui, est moins ambigu que le droit français quant à l'affirmation de la liberté religieuse mais il n'est pas plus libéral concernant l'exercice pratique de la religion.

B- Le cas du droit grec.

On peut noter au préalable, que la majeure partie du peuple grec appartient à l'Eglise orthodoxe orientale. Ce pourcentage est estimé à 96% de la population totale, suivent ensuite les musulmans, les catholiques, les protestants, les Témoins de Jéhovah, les Arméniens et les Juifs.

Ce qu il faut retenir, c'est qu'à la différence de la France, en Grèce il existe une religion d'Etat : c'est la religion orthodoxe (article 3 alinéa 1 de la constitution de 1975), et cette dernière est privilégiée par rapport aux autres religions ou confessions existantes sur le territoire grec.

Concernant la liberté religieuse et le prosélytisme, la situation est assez atypique en Grèce.

La liberté religieuse est intégrée dans les articles 13 de la Constitution. Selon ces dispositions, elle inclue la liberté de conscience et la liberté de culte.

La conscience religieuse et les convictions religieuses, irréligieuse ou athées ainsi que les déviations dogmatiques ou administratives de toute religion (hérésie, schisme) de tout homme en général (Grec et étranger), sont protégées dans le cadre de l'égalité (article 4 et 13, § 1 Constitution). Des violations au principe d'égalité avaient été constatées par le passé dans le domaine du travail, surtout en ce qui concernait la nomination d'instituteurs et de maîtres d'écoles maternelles.

Le contenu de l'instruction religieuse dans les écoles est conforme aux idées de la religion dominante, instruction qui est dispensée par des instituteurs de religions orthodoxe.

Le conseil d'Etat (arrêt 1417/1949) avait décidé que seul un orthodoxe pouvait être nommé instituteur, puisqu'il est inconcevable qu'un non orthodoxe puisse enseigner conformément au dogme de l'Eglise orientale. En réalité, cette cause de récusation avait fini par concerner également les maîtres des écoles maternelles. Ce régime resta en vigueur jusqu en 1988, époque à laquelle cette disposition fut abolie (loi 177/1988). Désormais, un non orthodoxe peut être nommé instituteur dans des écoles de deux classes au moins ; la religion est ainsi enseignée par son collègue orthodoxe.

On s'aperçoit, que la condition c'est deux classes au moins, a défaut, que se passera t-il ? Bien que la loi ait assoupli cette disposition tout à fait discriminatoire, puisque l'accès à cet emploi est conditionné par l'appartenance religieuse de l'individu.

Dans le même ordre d'idée, le serment du Président de la République doit uniquement être envisagé de manière chrétienne. Il n'existe pas dans la Constitution (article 33) de disposition similaire à celle de l'article 59 qui concerne le serment des députés non orthodoxe. En d'autres termes, l'article 33 ne permet que l'élection d'un chrétien orthodoxe comme Président de la République. Ceci est pourtant contraire au principe d'égalité posé par l'article 4 de la constitution.

IL est évident que la liberté de conscience en Grèce, quand il s'agit de certains emplois ou postes de grande importance, l'appartenance religieuse de l'individu prend toute son importance pour l'obtention de l'emploi.

On peut dire, qu'il s'agit d'un prosélytisme d'Etat en faveur d'une religion prédéterminé et de ce fait le citoyen hellénique est conditionné de sorte qu'il connaît seulement l'orthodoxie

Egalement, la liberté de changer de religion contrairement en France n'est pas aisée.

Quant à la liberté de culte, cette dernière est soumise à l'observation de certaines conditions. Selon l'article 13, paragraphe 2 de la Constitution, la religion en question doit être « connue », c'est-à-dire qu'elle ne doit pas avoir de dogmes secrets et que son culte ne doit pas être clandestin. De plus, la pratique du culte ne doit pas porter atteinte à l'ordre public et aux bonnes moeurs (article 13, §2), à savoir, à l'ensemble des conceptions et principes fondamentaux de caractère étatique, ethnique, social et financier, qui dominent dans la société grecque à un moment donné.

L'administration publique et, en cas de recours, les tribunaux jugent si toutes ces conditions sont remplies. La doctrine et la jurisprudence imposent une condition supplémentaire à celle précitée : les adeptes de la religion en question ne doivent pas faire du prosélytisme à l'encontre des croyants d'une autre religion.

En effet, en Grèce, le prosélytisme est un délit prévu par une loi spéciale. Il a été institué comme tel par la loi forcée 1363/19H38, à laquelle ont été substituées les dispositions de la loi forcée 1672/1939 ; toutes les deux étaient des lois de la dictature de Metaxas. En tant que délit pénal, le prosélytisme est la tentative systématique et intense, allant jusqu'à l'importunité directe ou indirecte, usant de moyens légitimes et illégitimes, de pénétrer la conscience religieuse d'un individu appartenant à une autre religion que celle de l'auteur, dans le but de changer ses convictions religieuses.

La pratique du prosélytisme est sévèrement punie : emprisonnement, amende, surveillance policière, expulsion pour les étrangers. Notons, que le prosélytisme n'était considéré comme délit par la constitution de 1952 que lorsque la « victime »de cette pratique était orthodoxe. La constitution actuellement en vigueur (article 13§2) protége toutes les religions de telles actions.

Cette définition du prosélytisme correspond au prosélytisme dit « abusif », théoriquement, le fait de parler de sa religion à une personne d'une autre confession religieuse ne devrait pas entrer dans cette interdiction. Par ailleurs, toute personne est libre de croire ou de ne pas croire, et surtout de changer de religion, ainsi le prosélytisme est un moyen (lorsqu'il respecte les droits d'autrui), de répondre à la volonté d'un individu de changé de religion.*

Il est clair, que la situation en Grèce par rapport à la France, est assez ambiguë. En droit français, toute personne est libre de professer sa religion en vue de convertir les futurs fidèles, à la condition que l'on n'abuse pas de la personne. En Grèce, l'Eglise orthodoxe joue un rôle extraordinaire au niveau politique et au niveau social et finalement la répression du prosélytisme et son inscription dans la constitution est une sorte de protection de la religion dominante.

Enfin, concernant la mise en place de lieux de culte des différentes religions (églises, maisons de prière, synagogues et mosquées), cela est conditionné par l'approbation du ministère de l'Education nationale et des Cultes.

Les conditions nécessaires à l'obtention de cette autorisation comprennent, pourtant, l'autorisation du métropolite orthodoxe local (loi forcée 1369/1938, article 41§1).

Le Conseil d'Etat a rendu nécessaire cette autorisation pour l'établissement, également, des maisons de prière, malgré le fait que la loi qui les concerne n'exige rien de tel. D e plus, le Conseil d'Etat a décidé que l'autorisation du métropolite ne constitue qu'un simple avis, qui ne lie pas le ministère. Si ce dernier approuve l'institution du lieu de culte en question, malgré l'opinion contraire du métropolite, il doit motiver spécialement sa décision.

En réalité, les requêtes sont rejetées par les évêques orthodoxes et le ministère ne s'y oppose habituellement pas. Les intéressés ont, ainsi, recours au Conseil d'Etat qui, en règle générale, leur rend justice.

Peut-on continuer à affirmer pour la Grèce, que le prosélytisme non abusif est un aspect de la liberté religieuse et qu'en tant que tel devrait être protégé par la loi ?

La réponse n'est pas simple, il est certain que le degré de liberté en matière de religion est inférieur à celui de la France.

Nous verrons, dans le prochain paragraphe, que la Cour européenne des droits de l'homme a souvent condamné l'Etat grec en matière de religiosité.

§ II- Le prosélytisme et la Convention européenne des droits de l'homme.

La convention européenne des droits de l'homme est : « le modèle le plus accompli de protection internationale des droits de l'homme, un modèle au surplus révolutionnaire par rapport aux conceptions classiques du droit international puisque, dans les limites des droits définis, elle tend à instaurer un contrôle supranational des actes et organes étatiques le plus souvent à l'initiative d'individus érigés de la sorte en véritable sujets de droit international »24(*)

Ainsi, il est intéressant de rechercher les articles de la CEDH qui traitent expressément de la liberté religieuse (A) mais examiner la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme en matière de prosélytisme (B).

A- Les articles garantissant la liberté religieuse.

L'article 9 de la CEDH dispose : « 1.Toute personne à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques et l'accomplissement des rites.

2. La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l'ordre, de la santé ou de la moralité publiques, ou à la protection des droits d'autrui »

Ainsi est énoncé le principe de la liberté notamment religieuse par l'article 9 de la Convention. Notons que lors de la préparation de ce texte, la Suède où la religion luthérienne jouit d'un statut de religion d'Etat et la Turquie adepte d'une laïcité dure, demandèrent l'insertion dans l'article relatif à la liberté de religion (alors l'article 7 du projet) d'un paragraphe dérogatoire autorisant le maintien des législations nationales déjà existantes qui comportaient des règles restrictives pour certaines institutions et fondations religieuses ou l'appartenance à ces confession. Cependant cet ajout sera finalement supprimé.

De plus, la transcription dans la Convention de la liberté religieuse, a révélé les difficultés que peut poser l'appréciation de cette liberté et surtout des restrictions qui peuvent valablement lui être apportées25(*).

Hormis ces quelques soucis, le consensus sur l'énonciation de la liberté religieuse fut très large et seules quelques modifications techniques furent apportées au premier paragraphe de l'article 9 à partir du libellé de l'article 18 de la Déclaration universelle qui servit de base et de référence.

La convention européenne assure avant tout la protection de l'individu contre l'ingérence de l'Etat, sauf nécessités légitimes et impérieuses d'interventions considérées et évaluées dans le cadre d'une société démocratique26(*)

L'article 9-1 de la Convention dispose donc que le droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion implique « la liberté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques et l'accomplissements des rites ». Certains de ses aspects se trouvent protégés en outre par l'article 10 de la Convention qui assure le droit à la liberté d'expression, lequel « comprend la liberté d'opinion et la liberté et la liberté de recevoir ou pas de communiquer des informations ou des idées ».

Si la liberté de religion s'exerce avant tout, dans l'intimité de l'individu , elle revêt également un aspect externe qui se traduit par des actes extérieurs, comme par exemple faire du prosélytisme en vue de convertit des futurs croyants. Il ne faut pas perdre de l'esprit, que toute religion recherche des nouveaux adeptes et de ce fait, elle va recourir au prosélytisme pour faire connaître ses principes et son message divin. En conséquence, le prosélytisme dispose d'une garantie juridique européenne, car ne pas le reconnaître et le protéger juridiquement, viderai de son sens la liberté religieuse.

Enfin, le droit à l'expression religieuse n'a pas donné lieu à une jurisprudence fournie devant la Cour européenne des droits de l'homme27(*). A cet égard, l'arrêt Kokkinakis c/ la Grèce rendu le 25 mai 1993 par la cour européenne, est le premier concernant la liberté religieuse et le prosélytisme.

B- La jurisprudence de la CEDH en matière de prosélytisme.

On peut citer à titre d'illustration jurisprudentielle, deux arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme, où il était question du prosélytisme et de la liberté religieuse.

Le premier arrêt, concerne l'affaire Kokkinakis c/ Grèce du 25 Mai 1993. A propos des faits, un homme de soixante-sept accompagné de son épouse, obtient paisiblement accès au domicile d'une habitante de Sitia (Crète) et quand la mari de celle-ci, chantre d'une église orthodoxe de la ville, entend que les visiteurs sont des témoins de Jéhovah présentant leur doctrine de leur confession, il avertit la police. Après avoir passé la nuit au commissariat, les deux contrevenants sont remis en liberté et poursuivis devant le tribunal correctionnel pour infraction à l'article 4 de la loi n 1363/1938, modifié par l'article 2 de la loi n 1672/1939, ayant institué et défini le délit de prosélytisme. Alors qu'ils sont tout deux condamnés par le premier juge, la cour d'appel de Crète acquitte l'épouse et condamne le mari a trois mois de prisons. Par un arrêt du 22 avril 1988, la cour de cassation rejette le pourvoi introduit par le condamné.

Devant la commission et ensuite devant la Cour européenne des droits de l'homme les deux principaux griefs dirigés contre la condamnation sont titrés de l'article 9 et de l'article 7 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le premier garantit la liberté de religion et notamment « la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement » ; l'interprétation donnée au second inclut le principe de la légalité des incriminations et des peines.

En ce qui concerne la violation alléguée de l'article 9, la Cour vérifie selon sa jurisprudence si l'ingérence dans la liberté garantie par le premier alinéa est justifiée en raison de l'exception portée l'alinéa 2, c'est-à-dire si elle satisfait à l'application cumulative des trois critères qui sont contenus : l'exigence de la légalité, la légitimité de l'objectif poursuivi et le respect du principe de proportionnalité.

Sur le premier point il y a lieu de distinguer trois aspects. Il n'est pas douteux que les juridictions grecques ont appliqué au requérant une disposition législative au sens formel. C'est toutefois un second point qui semble avoirs fait l'objet principal du débat devant la Cour : la qualification de prosélytisme n'est-elle pas trop vague et trop indéterminée pour satisfaire à l'exigence de légalité. Cette partie du grief aurait pu se conjuguer avec l'allégation de violation de l'article 7, toutefois, dans sa réponse à ce second grief la Cour renvoie à une partie de la motivation relative à l'article 9 (arrêt, §§ 40-41), et elle s'y borne à constater l'application constante que font les tribunaux grecs de la dispositions réprimant le délit de prosélytisme.

Si l'on remonte plus en avant dans la motivation de l'arrêt rapporté, là où la Cour européenne analyse la jurisprudence grecque en la matière (§§ 18-21), on s'aperçoit que l'incrimination du prosélytisme n'a jamais été appliquée que contre ceux qui s'efforçaient de convertir à leur foi des membres de l'Eglise orthodoxe grecque. Dés lors, le grief tiré de l'application conjuguée des articles 9 et 14 de la convention est écarté par le Cour d'une manière expéditive.

Le troisième aspect rencontré par la Cour à propos de la légalité de l'incrimination du prosélytisme a pour objet sa conformité à la constitution de l'Etat. Se référant sur ce point à un arrêt également relatif à la Grèce (arrêt du 16 décembre 1992, affaire Hadjianastassiou c/ la Grèce, § 42), la Cour se borne à constater qu'il appartient aux cours et tribunaux nationaux d'interpréter et d'appliquer le droit interne et, par conséquent, de se prononcer sur la constitutionnalité de la loi. Or, comme les juridictions grecques ont systématiquement rejeté l'exception d'inconstitutionnalité dirigée contre la loi sur le prosélytisme, la Cour estime devoir se rallier à cette évaluation.

Par ailleurs, la Cour concernant la violation du principe de proportionnalité, distingue « le témoignage chrétien du prosélytisme abusif », et elle ajoute que le premier « correspond à la vraie évangélisation » (§48). La question que l'on peut se poser quels sont les critères qui permettent de distinguer la vraie évangélisation par rapport à al fausse et appartient-il au juge laïc de se prononcer sur la « vérité » d'une évangélisation ? Et quelle est la confession, même dominante, qui ne recourt jamais à aucun des moyens ensuite dénoncés comme les caractères « du prosélytisme abusif », tels l'offre d'avantage matériels ou sociaux ou l'exercice d'une pression abusive sur des personnes en situation de détresse ou de besoin (§ 48)28(*)?

Bien que la Cour a condamné la Grèce, c'est évidemment la loi même réprimant le prosélytisme qui aurait dû être jugée contraire à l'article 9 de la Convention, ainsi que l'ont proposé le juge Pettiti dans son opinion partiellement concordante, le juge De Meyer dans son opinion partiellement concurrente et le juge Martens dans son opinion partiellement dissidente. Il y avait trois raisons pour ce faire : l'illégitimité de l'objectif poursuivi, liée au caractère discriminatoire de l'application que la loi avait, de manière très cohérente, reçue des tribunaux, ce but étant la protection de la seule église dominante, et le caractère à ce point vague de la qualification légale que, pour condamner le Grèce, la Cour en est réduite à relever « que les juridictions grecques établirent la responsabilité du requérant par des motifs qui se contentaient de reproduire les termes de l'article 4, sans préciser suffisamment en quoi le prévenu aurait essayer de convaincre son prochain par les moyens abusif » (§ 49). La définition énumérative du délit que contient l'article 4, alinéa 2, de la loi grecque indique clairement qu'il s'agit d'un délit d'opinion, comme tel incompatible avec l'article 9 de la Convention.

Enfin, l'incrimination pénale du prosélytisme porte atteinte à la liberté d'expression en matière religieuse. Elle se distingue nettement, et du pouvoir de l'Etat de reconnaître certains cultes ou leur réserver les avantages prévus par la loi, matière dans laquelle la jurisprudence du Conseil d'Etat en France a évolué dans un sens plus libéral.

Le second arrêt, traite du prosélytisme dans le cadre de l'armée.

En effet, dans cette affaire qui opposait monsieur Larissis et autres contre la Grèce, on peut noter deux differences essentielles avec l'affaire Kokkinakis : d'une part concernant Kokkinakis l'acte de prosélytisme émanait d'une personne civile, Témoin de Jéhovah, à l'encontre d'une personne civile, alors que dans l'affaire Larissis les actes de prosélytisme émanaient d'officiers de l'armée de l'air adeptes de l'Eglise pentecôtiste à l'égard de soldats et de civils. La Cour a pris d'ailleurs un grand soin pour présenter avec précision les faits tels qu'ils résultaient des décisions des tribunaux grecs29(*).

La question de la liberté de religion dans un milieu militaire avait été abordée dans l'affaire Kalaç c/ Turquie en 1997 sous l'angle de la discipline militaire (Journal de Droit International, 1998, page 204 et suivant). Elle se posait différemment dans l'affaire Larissis puisqu'il s'agissait de prosélytisme exercé par des militaires à l'égard d'autres militaires ou de civils. La cour a suivi en tous points la jurisprudence Kokkinakis en ce qui concerne l'existence d'une ingérence, prévue par la loi et poursuivant un but légitime, mais elle a introduit une distinction en ce qui concerne la nécessité de la mesure dans une société démocratique en prenant en compte la qualité des victimes du prosélytisme, selon qu'elles appartenaient ou n'appartenaient pas à l'armée. Sur ce point la Cour a affiné les analyses de la Commission.

En revanche, contrairement à la Commission, la Cour n'a pas tenu compte des impératifs de la discipline militaire pour juger de la légitimité du but poursuivi (maintien de la sécurité publique et protection de l'ordre).

La Cour rappelle que la Convention s'applique aussi bien aux militaires qu'aux civils, mais elle doit tenir compte des particularités de la condition militaire et notamment de la structure hiérarchique qui la caractérise. D'ailleurs, la Cour dit que « les discussions entre individus de grades inégaux sur la religion ou d'autres questions délicates ne tomberont pas toutes dans cette catégorie. Il reste que, si les circonstances l'exigent, les Etats peuvent être fondés à prendre des mesures particulières pour protéger les droits et libertés des subordonnées dans les forces armées » (arrêt, §51). La Cour se montre relativement sévère à l'encontre des militaires : bien qu'elle constate que rien n'indique que les requérants aient recouru à la menace, elle s'en remet essentiellement à l'appréciation des juridictions internes, ce que le juge Van Dijk lui reproche dans son opinion partiellement dissidente.

La Cour note également que « les mesures en question n'étaient pas particulièrement sévères et revêtaient un caractère plus préventif que répressif » (arrêt, §54) et elle en conclut qu'il n'y a pas eu violation en ce qui concerne le prosélytisme envers les soldats.

En revanche, la Cour constate une violation de l'article 9 en ce qui concerne le prosélytisme envers les civils car les requérants n'ont pas cherché à exercer des pressions sur eux. Le juge Valticos, considère pourtant que les sanctions prises à l'encontre des officiers étaient justifiées « car le prestige de l'uniforme a pu avoir un effet même à l'égard des civils ». Ce juge tient compte essentiellement de la qualité de l'auteur de l'acte de prosélytisme (militaire en l'espèce) alors que la Commission, et surtout la Cour, prennent en considération la qualité du destinataire (ou da la victime) de cet acte et font une claire distinction entre les deux30(*).

L'arrêt Larissis se situe ainsi dans la ligne de Kokkinakis et apporte d'utiles précisions en ce qui concerne la liberté de religion dans la société militaire, les officiers devant s'abstenir d'abuser de leur position pour faire du prosélytisme.

On peut toute fois se demander si la Cour n'aurait pas dû aller plus loin et s'interroger sur la compatibilité de la législation grecque en matière de prosélytisme avec la Convention. Le juge De Meyer, dans son opinion concordante, admet que les requérants ont abusé de leur position et de leur rang, mais il affirme que « la loi dont il s'agit en l'espèce est illégitime en son principe même, puisqu'elle porte directement atteinte à l'essence même de la liberté que doit avoir toute personne de manifester sa religion »31(*).

Finalement, à travers ces deux arrêts, deux conceptions s'affrontent, ceux qui sont pour le maintien de la loi grecque en matière de prosélytisme et les autres, qui veulent une abrogation de cette loi, car elle porte atteinte à la liberté religieuse.

En comparaison avec le droit français, il est évident, que le droit hellénique est atypique dans cette matière

La CEDH assure un standard minimum de protection, ensuite les Etats signataires ne doivent pas descendre en dessus de ce seuil minimum, mais le degrés de protection de la liberté religieuse en Grèce est très inférieure a celui de la France (nous développerons se point dans le chapitre II de notre première partie).

Quoi qu'il en soit, la liberté religieuse reste protégée, de ce fait il est intéressant de rechercher quels sont les bénéficiaires de cette protection.

Section II - Les bénéficiaires de cette garantie juridique.

Comme nous avons pu constater, le prosélytisme à travers la liberté religieuse, est garantie non seulement par les droits nationaux mais également par la Convention européenne des droits de l'homme. Il est évident, que la Grèce assure finalement le minimum de garantie permettant de caractériser une société démocratique, mais même dans ce cas le prosélytisme jouit de cette garantie, car à défaut, la liberté religieuse et surtout le droit de manifester sa religion n'aurait aucun sens.

A présent, il faut examiner, les destinataires de cette protection juridique. Ainsi, nous traiterons de la question relative à l'étendue de cette protection vis-à-vis des personnes physiques (§ I), pour s'intéresser ensuite aux groupements religieux (§ II)

§ I -Un droit de tous les hommes ?32(*) .

La plupart des articles de la convention proclamant un droit s'ouvre par une formule générale positive ou négative (toute personne a droit ou nul ne peut se voir refuser) qui commande l'octroi d'une protection aussi large que possible.

Pour l'homme libre ce droit doit tendre vers l'absolu et ne recevoir de limites que celles justifiées par les contraintes inhérentes à toute vie en société33(*).

Mais l'homme est lié par des liens familiaux, et ces derniers posent le problème des droits de l'enfant à bénéficier de la protection de la liberté de religion (A). Les liens contractuels peuvent aussi être un obstacle, au moins provisoirement, à certaines prétentions (B) comme pourraient l'être les chaînes qui privent le prisonnier de certaines de ses prérogatives (C)34(*).

A- La situation des mineurs au regard du bénéfice du droit à la liberté de religion.

Par les liens familiaux, il est surtout question des droits de l'enfant à l'égard de cette protection juridique en matière de liberté religieuse.

On peut dire, dans un premier temps, que la liberté de religion ne peut être refusée à l'enfant. Cependant, le filtre de l'autorité parentale joue un rôle important et la difficulté de concilier l'exigence de liberté et le droit de regard, voire de direction, des parents trouve ici son parfait accomplissement

L'article 14-1 de la Convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant affirme son droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion mais son paragraphe 2 reconnaît aux parents le droit et le devoir de guider l'enfant dans l'exercice de ces libertés « d'une manière qui corresponde au développement de ses capacités ». L'émancipation du mineur en matière de choix et d'exercice religieux est donc loin d'être acquise.

L'article 2 du premier protocole de la Convention européenne des droits de l'homme entretient le même doute puisqu'il fait uniquement référence au respect « du droit des parents » d'assurer une éducation et un enseignement conformes à leurs convictions religieuses.

Par ailleurs, la Commission a eu l'occasion de souligner que l'article 9-1 garanti au mineur son droit à la liberté de religion. De même, la Commission a considéré recevable la requête d'une élève de 14 ans renvoyée de son école pour une journée suite à son refus de participer au défilé de la fête nationale en raison de ses convictions religieuses (Requête 17187/90, rapport du 6 juillet 1995, Elias Maria et Valsamis c/ Grèce). D'une façon générale les parents peuvent intervenir seuls à l'instance. La Commission estime qu'en tant que représentant légaux de leurs enfants ils peuvent effectivement se prétendre victimes d'une décision qui affecte directement leurs enfants ou qui influe sur leur éducation.

La difficulté réelle apparaîtrait en cas de conflit ouvert entre le mineur et ses parents ou l'un des deux. Le droit à l'éducation des enfants peut jouer contre ses parents mais jusqu'ici c'est l'Etat qui fait usage de cette garantie au bénéfice d'enfants en bas âge.

Qu'adviendrait-il en cas d'opposition entre le mineur souhaitant exercer sa liberté de choix en matière religieuse et ses parents désirant lui voir poursuivre la voie sur laquelle ils l'ont engagé originellement. Dans ce cas, le mineur dont le choix est réfléchi et libre ne peut-il bénéficier des garanties que lui accorde l'article 9 de la Convention dés lors qu'il ne se met pas en danger. En réalité, dans cette hypothèse, l'âge est déterminant et de ce fait les droits nationaux pourraient mettre en place une majorité religieuse autre que la majorité civique qui est de 18 ans, que ce soit en Grèce ou en France.

Tout les textes dictent au moins implicitement que l'enfant ne doit plus être enfermé artificiellement dans des croyances qui lui ont été imposées dés sa prime jeunesse. Comment ne pas l'admettre alors que, muette sur ce point, la Convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant affirme en son article 38-3 que « les Etats parties s'abstiennent d'enrôler dans leurs forces armées toute personne n'ayant pas atteint l'âge de quinze ans (....), lorsqu'ils incorporent des personnes de plus de quinze ans mais moins de dix-huit ans, les Etats parties s'efforcent d'enrôler en priorité les plus âgées ». Quinze ans serait-ce assez pour endosser l'habit guerrier, pour tuer et mourir peut-être, mais insuffisant pour témoigner ouvertement son attachement au Dieu de son choix35(*)?

La même solution devrait prévaloir sur le terrain de l'article 2 du protocole au cas où, contre l'avis ou « les convictions religieuse et philosophiques » de ses parents, l'enfant souhaiterait assister à un cours facultatif d'instruction religieuse ou en être exempté.

IL est claire, que l'enfant jouit de cette liberté religieuse et peut l'exprimer librement sous réserve de son âge.

Par ailleurs, l'éducation religieuse de l'enfant par les parents rentre dans le prosélytisme religieux qui est tout à fait naturel, du moins tant que l'enfant n'est pas en conflit avec ses parents sur le contenu religieux qui lui proposé.

On le sait, il faut que l'enfant dispose d'un discernement suffisamment précis du bien et du mal, pour qu'il puisse jouir de sa liberté religieuse et la manifester de la manière la plus libre possible. En France, cela est tout à fait possible, le législateur est assez libéral mais la Grèce n'a pas la même position, surtout si le mineur veut exprimer publiquement une croyance autre que orthodoxe.

B- Les liens contractuels.

Le droit français ainsi que le droit grec convergent sur ce point, le lien contractuel peut limiter l'individu dans l'exercice de sa liberté religieuse, notamment la manifestation extérieure de ses convictions religieuses.

Outre une jurisprudence abondante de la cour de cassation française en la matière, on peut citer la décision de la Commission du 12 mars 1981, X c/ Royaume-Uni, concernant un instituteur musulman empêché de se rendre à la mosquée pour la prière du vendredi après-midi du fait de ses obligations professionnelles. Selon la Commission à aucun moment lors de son entretien pour obtenir son poste d'enseignant ni durant les six premières années de son emploi, le requérrant n'avait indiqué qu'il pourrait demander à s'abstenir pendant les heures de classe pour s'associer aux prières à la mosquée.

Toutefois, dans le cadre du contrat de travail des aménagements sont souvent possibles.

Par conséquent, le lien contractuel réduit les droits et libertés de celui qui s'engage. Mais, cette limite est préservée par la faculté de rompre le contrat en démissionnant si le conflit avec les devoirs religieux devient trop insupportable pour la personne concernée. Un équilibre existe alors entre l'autorité particulière attribuée à la liberté de religion et la liberté de contracter, il s'agit de cette faculté de se désengager ou de rompre le contrat par la démission.

En résumé, la protection juridique aussi bien nationale qu'européenne trouve pour limite le lien contractuel.

C- Le cas des personnes en détention.

La question est la suivante : un prisonnier est-il limité dans l'exercice de sa liberté de religion ?

L'incarcération s'accompagne d'une réduction de certaines des libertés protégées par la Convention. La Commission et la Cour ne s'en montrent pas moins très soucieuses de fixer des limites à ces ingérences comme par exemple pour le droit au respect de sa correspondance au titre de l'article 8 de la Convention. Mais en ce qui concerne la liberté de religion, il ressort de la jurisprudence de la Commission que le prisonnier continu non seulement d'en conserver le bénéfice mais, qu'en plus, pèsent sur les administrations pénitentiaires des Etats concernés un certains nombres d'obligations positives.

Le prisonnier au même titre que l'homme libre peut donc se prétendre victime d'une ingérence dans sa liberté de religion.

De plus, les prisonniers sont nombreux à prétendre à un accès à un lieu de culte qui leur permette de communiquer avec ceux qui, incarcérés comme eux, partagent leur foi.

Le plus souvent, les centres pénitenciers ne sont dotés que d'un simple lieu de culte représentatif de la religion dominante dans le pays concerné. Ne pourrait-on pas considérer qu'il y a une discrimination ? La réponse est négative, l'Etat ne peut se voir imposer la charge de doter chaque prison d'autant de lieux de culte qu'il y a de religions susceptibles d'être pratiquées par leurs prisonniers.

Enfin, il faut noter, que le milieu carcéral autorise des restrictions à l'accès aux lieux de culte dans l'enceinte pénitentiaire. Il ne peut s'agir que d'une limitation temporaire justifiée par exemple par des travaux d'amélioration e la sécurité d'un lieu de culte.

En cas de délits ou de crimes au sein de l'établissement pénitencier par un détenu, cela aura pour conséquence d'aggraver les conditions de sa détention et de ce fait il peut se voir refuser l'accès au lieu de culte, en d'autres termes une suspension de son droit.

§ II- La situation des groupements religieux.

Il faut noter, que tout les groupements religieux et leurs adeptes bénéficient d'une égale garantie au regard aussi bien des droits nations (grec et français) qu'au regard de la Convention.

Par contre, si un groupement religieux bascule dans la malice, l'escroquerie, la fraude ou pire encore la manipulation mentale. Dans ce cas, le groupement religieux doit être mis hors la loi et poursuivi pour le dissoudre.

Ainsi, nous allons traiter de la recevabilité des requêtes formulées par les seuls groupements religieux (A) et ensuite voir que seul l'activité religieuse est pris en compte (B).

A- Recevabilité des requêtes formulées par les seuls groupements religieux.

IL est connu, que les associations et sociétés privées ne peuvent prétendre à la garantie européenne et même nationale de la liberté de conscience et de la liberté religieuse.

La question qui se pose est la suivante : peuvent-elles alors même que leur objet principal n'est pas religieux, invoquer devant les organes de Strasbourg une violation de la liberté de religion dont elles pourraient se prétendre victimes au même titre que les groupements religieux ?

Selon la Commission dans sa décision du 27 février 1979, « à supposer même que la prétention de la requérante puisse entrer dans le domaine d'application de l'article 9 de la Convention (.....) une société anonyme, étant donné qu'il s'agit d'une personne morale à but lucratif ne peut ni jouir ni se prévaloir des droits mentionnés à l'article 9 paragraphe 2 de la Convention » (affaire X c/ Suisse).

En d'autres termes, les groupements non religieux se voient donc refuser le bénéfice de la protection de l'article 9 de la Convention.

La Commission a mis en lumière l'incompatibilité flagrante entre la poursuite d'un but lucratif qui est l'objet d'une société anonyme et la liberté religieuse.

B- Prise en compte des seules activités religieuses des groupements religieux.

La constatation de l'absence d'ingérence, d'un comportement qui, pour être motivé par une religion ou une conviction ne constitue pas une manifestation protégée au sens de l'article, conduisant plutôt la Commission à déclarer la requête irrecevable comme étant mal fondé. Mais lorsqu'elle décèle des moyens qui n'ont, selon elle, aucun rapport avec la liberté de religion elle les déclare incompatible avec les dispositions de la Convention au sens de l'article 27§2. Le grief est totalement en dehors du champ d'application de l'article 9, il s'agit d'une incompétence ratione materiae.Ce motif d'irrecevabilité a été retenu par la Commission à l'encontre d'un requérant qui s'estimait atteint dans sa liberté religieuse parce que la loi britannique ne punit pas le blasphème et qu'il ne pouvais en conséquence entamer de procédure criminelle contre l'auteur des « versets sataniques » (Requête 17439/90, décision de la Commission du 5 mars 1991, Choudhury c/ Royaume-Unie). L'article 9 ne peut en effet mettre à la charge de l'Etat de pénaliser certaines atteintes privées aux convictions religieuses.

La Commission, en même temps qu'elle recevait pour la première fois la requête d'un groupement religieux sur la base de l'article 9, a très clairement écarté toute prétention dont le lien avec l'objet principal du groupement n'apparaîtrait pas avec suffisamment d'évidence.

La jurisprudence de la Commission est sur ce point d'une grande cohérence : au-delà de la nature même de l'organisme privé requérant, c'est la nature lucrative de ses activités qui apparaît totalement incompatible avec l'objet de l'article 9 de la Convention. Une activité lucrative d'un groupement religieux échappe à la garantie de l'article 9 tout comme ne peut l'invoquer une société à but lucratif.

Cette position de la Commission et de la Cour a été confirmée dans une affaire concernant les monastères grecs36(*). Cette affaire concernait les monastères grecs, entité légale de droit public, institutions religieuses dont les membres vivent selon les principes monastiques. Par une loi 1700/1987 l'Etat grec modifia les règles de gestion, d'administration et de représentation de biens monastiques relevant de l'Organisation pour l'administration des biens de l'Eglise dont le contrôle passe du Saint Synode de l'Eglise grec à l'Etat. De plus la loi prévoit que l'Etat devient propriétaire de tous les biens monastiques à moins que le monastère ne démontre l'existence d'un droit de propriété résultant d'un titre légal dûment enregistré ou d'une décision de justice irrévocable à l'encontre de l'Etat.

L'essentiel du contrôle de la Commission te de la Cour a bien entendu porté sur la compatibilité des mesures adoptées par la Grèce avec les dispositions de l'article 1 du protocole relatives au respect des biens.

Mais, l'article 9 de la Convention était aussi invoqué par les requérants qui soutenaient que les dispositions de la loi grecque « les ont privés des moyens nécessaires à la subsistance des communautés monastiques et constituent une entrave à l'exercice de leurs convictions religieuses d'ascétisme »37(*). Face à cette argumentation la Commission oppose que « les dispositions incriminées se référent au patrimoine monastique et ne concerne nullement la pratique religieuse de l'ascétisme »38(*). Par ailleurs, les requérants « n'ont pas démontré que d'autres objets ou avoir nécessaires à la pratique religieuse et au culte religieux étaient affecté par les dispositions incriminées »39(*).

Cependant, l'intérêt de cet arrêt, réside dans le fait que la Cour n'est pas insensible au fait, que certains biens d'une église ou d'un lieu de culte quelconque, peuvent revêtir une importance considérable, de sorte que la privation de ces biens peut avoir une conséquence néfaste sur la manifestation de la religion. De ce fait, on peut supposer, que si l'église, par exemple, démontre que certains biens sont fondamentaux au regard de la manifestation de la religion, ces derniers devraient bénéficier de la protection de l'article 9 de la Convention.

Chapitre II- La Commission et la Cour européenne des droits de l'homme:

rempart quant aux ingérences étatiques en matière de liberté religieuse.

La liberté religieuse de la personne ne doit faire l'objet d'aucunes limitations. Le droit français ainsi que le droit grec ne peuvent en aucun cas limiter cette liberté. Ceci est vrai, concernant les convictions intimes de la personne et le droit de changer de religion. Quant au prosélytisme, comme aspect extérieur ou manifestation de la liberté religieuse, l'inviolabilité de ce droit par l'Etat n'est pas aussi sûre.

L'article 9 de la Convention énonce, le droit et ses implications parmi lesquelles le droit de manifester sa religion au premier paragraphe, les ingérences autorisées dans les seules manifestations de la liberté de religion au second. Dés lors, la violation de l'article 9-1 ne pourrait résulter, exception faite du droit de changer de religion, que d'une atteinte particulièrement grave au for interne de l'individu.

La Commission et la Cour européenne des droits de l'homme, vont disposer d'un certains nombres d'instruments juridiques, afin d'assurer le respect des dispositions de l'article 9 de la Convention.

Ainsi, ces moyens juridiques peuvent être regroupés en deux catégories : d'une part, l'abus de droit et le contrôle de légalité (Section I) et d'autre part le contrôle du caractère da la mesure portant atteinte à l'exercice de la liberté religieuse de l'individu (Section II).

Section I- L'abus de droit et le contrôle de légalité.

Dans le cadre de l'abus de droit, on va apprécier l'intervention contestée par rapport à une norme de référence qui impose avec plus ou moins de force et de rigueur, un cadre indépassable (§ I).

Quant au principe de légalité, ce dernier joue un rôle important dans la Convention comme d'ailleurs dans la plupart des droits de l'homme. La loi est présente partout. C'est elle qui prévoit et fixe l'encadrement des libertés garanties et qui fixe les peines, dans le cas d'un abus d'une liberté (§ II).

§ I- L'abus de droit.

L'abus de droit en tant qu'instrument de contrôle, est connu aussi bien en droit interne qu'en droit international.

De ce fait, il est intéressant, d'envisager la notion d'abus de droit dans un premier temps (A), et examiner ensuite l'abus de droit dans la Convention (B).

A- La notion d'abus de droit.

Le droit international reçoit l'abus de droit comme un principe général.40(*) L'abus de droit serait un acte commis de mauvaise foi, c'est-à-dire avec une intention malveillante, de nuire.

Cette conception subjective, largement influencée par la théorie générale de l'abus de droit élaborée en droit privé français, conserve tout de même un rôle marginal en droit international41(*).

Dans un régime conventionnel, les compétences de l'Etat sont définies par l'objet et le but du Traité. L'abus de droit n'est pas révélé par l'intention malveillante mais par un exercice de la compétence non conforme au but du Traité ou dans un but différent.

Pourtant, la conception du détournement de pouvoir en droit administratif français est essentiellement subjective. Le contrôle objectif dans le cadre du recours pour excès de pouvoir porte sur les motifs dans le cadre de l'ouverture de la « violation de la loi ». Au contraire, le détournement de pouvoir « fait pénétrer dans la subjectivité de l'auteur de l'acte »42(*), il s'attache au but poursuivi par l'auteur. Mais c'est là sans doute ce qui explique l'insuccès de la théorie de l'abus droit en droit public français mais également en droit public grec, qui se dernier a calqué en partie son droit administratif sur celui de la France.

L'abus de droit est consacré par les juridictions judiciaires avec une prédominance du critère subjectif et plus particulièrement de l'intention de nuire. Elles s'y référent même pour qualifier le détournement des pouvoirs exercés dans les institutions régies par le droit privé sans commettre d'erreurs car, pour elles, l'abus de droit englobe le détournement de pouvoir. En droit public, la situation est exactement contraire, l'abus de droit est absorbé par le détournement de pouvoir dés lors qu'il a incorrection des mobiles, au-delà même de la seule malveillance. Dans le cadre du contrôle objectif, l'abus de droit s'efface au profit de catégories autonomes au sein de l'illégalité comme le vice des motifs de l'acte.43(*).

En d'autres termes, le juge administratif utilise le terme « abus » ou « abusif », il s'agit simplement d'une variation de vocabulaire que d'un mode spécifique de contrôle.

Le droit communautaire a aussi préféré consacrer le détournement de pouvoir comme moyen de contrôle des institutions européennes. Mais M. Schockweiller relève que la version anglaise des Traités traduit la notion de détournement de pouvoir par « misuse of powers ». L'auteur suppose que cette notion recouvre celle de « abuse of powers » utilisée en jurisprudence pour sanctionner l'utilisation, par l'autorité administrative, d'un pouvoir à des fins autres que celles voulues par la loi44(*).

Ainsi, on peut penser que finalement l'abus de droit a un rôle marginal en droit international public car il paraît peu adapté au règlement des conflits entre Etats souverains. En droit franco-grec, l'abus de droit a simplement pour fonction de régler certains litiges entre les particuliers

Il faut noter, que l'abus de droit n'est certes pas populaire en droit international du fait qu'il est trop contraignant pour la souveraineté des Etats. La situation est totalement différente pour la Commission et la Cour européenne des droits de l'homme.

B- L'abus de droit dans la Convention européenne des droits de l'homme.

Les Etats signataires de la Convention son liés par l'objet et le but du Traité auquel ils ont adhéré. Par ailleurs, ils ont aussi tous acceptés, que des individus puissent engager contre eux une procédure contentieuse qui peut aboutir à un arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme proclamant une violation dans l'hypothèse où un Etat partie à la Convention ne respecterait pas ces engagements. La Cour a « pour fonction primordiale de statuer en droit sur la violation alléguée de la Convention : une décision ou une mesure émanant d'un Etat contractant a-t-elle ou non méconnu la Convention »45(*).

Pour M. Flauss, la notion de droit est présente dans la CEDH sous couvert de la théorie dite des abus de limitations aux droits garantis, consacrée par l'article 17. En effet, cet article déclare « Aucune dispositions de la présente Convention ne peut être interprétée comme impliquant pour un Etat, un groupement ou un individu, un droit quelconque de se livrer à une activité ou d'accomplir un acte visant à la destruction des droits ou libertés reconnues dans la présente Convention ou à des limitations plus amples de ces droits et libertés que celles prévues à ladite Convention »46(*).

De plus, l'article 17 doit aussi être mentionné car il complète le dispositif de l'article 17 en prévoyant que les restrictions qui sont apportées auxdits droits et libertés ne peuvent être appliquées que dans le but pour lequel elles ont été prévues.

§ II- Le principe de légalité.

Concernant le principe de légalité, il suppose pour que le contrôle puisse être opéré, l'existence d'une loi (A) mais aussi la loi doit répondre à certaines exigences (B).

A- Existence de la loi.

La détermination de la base légale qui fonde l'ingérence est un préalable nécessaire dans le cadre de l'examen des conditions énoncées par le paragraphe deux des articles 8 à 11 de la Convention.

Le contrôle de la Commission et de la Cour est minimum et relève plus, à ce stade, du simple constat.

Il n'y a pas ici d'abus du droit d'ingérence car ce droit tel qu'il a été mis en oeuvre n'existait pas. Il s'agit d'une violation de la Convention dont on ne devrait pas se rendre coupable un Etat démocratique qui est avant tout un Etat de droit.

La cour européenne des droits de l'homme, dans un arrêt du 24 avril 1990, adopte une conception compréhensive de la loi. Comme elle le souligne, elle « a toujours entendu le terme de loi dans son acceptation matérielle et non formelle incluant à la fois des textes de rang infra législatif et le droit non écrit47(*). Les textes de rang supra législatif ou constitutionnel sont également inclues dans le terme de loi au sens de la Convention ».

La cour s'en remet à ce stade à l'appréciation des juridictions nationales. Dés lors que celles-ci ont admis et identifié la base légale de l'intervention contestée.

Dans l'affaire Huving par exemple, elle rappelle qu'il incombe au premier chef aux autorités nationales et particulièrement aux cours et tribunaux d'interpréter le droit interne.

Enfin, la Commission et la Cour vont également contrôler la qualité de la base légale avec que cette dernière réponde à l'exigence da la sécurité du droit.

B- La qualité de la loi.

Dans son arrêt Sunday Times48(*), la Cour a clairement énoncé que la loi doit être suffisamment accessible et répondre à l'exigence de prévisibilité.

La première de ces conditions ne pose pas de problèmes majeurs s'agissants de textes publics. Cette formalité suffit à en assurer l'accessibilité et il en va de même des décisions des tribunaux.

Dans son arrêt Kokkinakis elle relève qu'il existe une jurisprudence constante des juridictions grecques « publiées et accessible »49(*).

Ce la signifie alors, que la Cour se réserve la possibilité de décider que, en certaines circonstances, une loi bien que publiée est insuffisamment accessible, ce qui laisse entendre d'ailleurs l'expression « publiée et accessible ». Déjà dans l'arrêt Sunday Times la Cour avait mentionné que « le citoyen doit pouvoir disposer de renseignements suffisants, dans les circonstances de la cause, sur les normes juridiques applicable à un cas donné ».

Cette possibilité de contrôle offert à la Cour est formidable. Mais, dans l'affaire Kokkinakis il est tout à fait regrettable que la Cour n'a pas sanctionné la loi grec qui institue le délit de prosélytisme, car cette dernière est loin d'être précise, on pourrai même dire qu'elle est floue.

Section II- Le contrôle du caractère raisonnable des mesures portant atteinte à la

liberté religieuse.

Avant même de rentrer dans l'étude du caractère raisonnable, on doit l'exigence selon laquelle, il faut une identité du ou des buts poursuivis par l'Etat avec l'un des buts prévus par l'article 9-2 de la Convention.

Concernant, le caractère raisonnable, la norme européenne de garantie des droits de l'homme, par son article 18, érige la proportionnalité en un véritable principe général, en établissant un rapport entre les restrictions aux droits et le but légitime poursuivi par l'Etat qui les édicte.

Le contrôle de proportionnalité est le standard de la Convention européennes des droits de l'homme.

La référence au concept de proportionnalité y est systématique notamment par rapport à l'ensemble des interventions étatiques concernant la liberté de religion (§ I). Par ailleurs, on pourra analyser les résultats obtenus quant à la valeur attribuée à la liberté religieuse mise en balance avec d'autres intérêts (§ II).

§ I- Application automatique de la Cour européenne des droits de l'homme de la

proportionnalité aux interventions étatiques en matière de liberté religieuse.

L'article 14 de la Convention est le premier dans lequel la Cour a utilisé le mot « proportionnalité » à l'occasion de l'affaire linguistique belge50(*). Désormais, l'exigence d'un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé est le critère d'appréciation du caractère raisonnable de la différence de traitement constatée, même lorsque la décision ne reflète pas vraiment un tel contrôle.

En rapport avec les convictions religieuses, l'obligation de participer aux cours de formation morale et sociale pour les enfants qui, ne se réclamant d'aucune conviction religieuse, ne peuvent obtenir de dispense (moyen) n'est pas, compte tenu du contenu de cet enseignement (moyen), disproportionnée pour parvenir à transmettre au plus grand nombre possible de jeunes une instruction morale (but)51(*). En revanche, comme ce fut le cas, dans le célèbre arrêt Hoffmann, le refus de confier la garde des enfants à une mère Témoin de Jéhovah (moyen) est disproportionné pour garantir la santé et les intérêts de ses enfants (but).

Pour être nécessaire dans une société démocratique, une restriction à un droit garanti doit être proportionnée au but légitime poursuivi. La Cour, dans ses arrêts Kokkinakis et Manoussakis, relève une violation de l'article 9 de la Convention car les faits n'ont pas démontré que la condamnation pénale des requérants était justifiée par un besoin social impérieux. « La mesure incriminée n'apparaît donc pas proportionnée au but légitime poursuivi, ni, nécessaire dans une société démocratique à la protection des droits et libertés d'autrui' » conclut la Cour dans l'affaire Kokkinakis52(*). Quant aux déboires de M. Manoussakis et ses coreligionnaires, la Cour estime « que la condamnation litigieuse affecte si directement la liberté religieuse des requérants qu'elle ne peut passer pour proportionnée au but légitime poursuivi, ni , nécessaire dans une société démocratique »53(*).

Lorsque la question de la nécessité de la restriction de certaines manifestations de la religion se pose dans un contexte particulier, notamment celui des centres pénitenciers, le contrôle est limité à une disproportion manifeste. Le terme de proportionnalité n'apparaît d'ailleurs même pas dans la décision qui ne relève « aucune apparence de violation »54(*). Il en va de même face à des règles de sécurité notamment routière 55(*) ou de santé publique 56(*) pour l'édiction desquelles les Etats contractants ont une très large marge d'appréciation et auxquelles les requérants peuvent échapper en recourant à d'autres moyens de transport par exemple ou dont le caractère attentatoire aux convictions n'apparaît pas incontestable.

Enfin le contrôle de proportionnalité n'est pas absent de l'appréciation dont l'Etat s'acquitte de son obligation de garantir a chacun le droit à l'instruction et du respect des convictions des parents au sens de l'article 2 du protocole. Dans l'arrêt Kjeldsen, la Cour arrive à la conclusion que la législation danoise sur l'éducation sexuelle à l'école « ne blesse point en soi les convictions religieuses et philosophiques des requérants dans la mesure prohibées par le seconde phrase de l'article 2 du protocole »57(*). Placés en situation concurrente, le droit de l'éducation des enfants l'emporte sur les convictions des parents prônant un enseignement à domicile fondé notamment sur les idéaux de la communauté chrétienne mais dont les capacités pour mener à bien cette tâche sont sujettes au doute. Dans ce cas les droits des enfants à l'éducation doivent prévaloir sur le droit des parents au respect de leurs convictions religieuse et philosophiques et « les moyens pour essayer de forcer les requérants à se soumettre aux décisions administratives n'ont pas été disproportionnés au but poursuivi »58(*).

Encore faut il que la conception d'éducation privilégiée par l'autorité concernée sont acceptable par tous. Le principe de la menace de châtiments corporels dans les écoles publiques est incompatible avec les convictions de parents hostiles à ce genre de punitions et il ne saurait être question ici de proportionnalité. Mais l'exclusion temporaire de l'enfant dont les parents refusaient ces pratiques ne saurait passer pour raisonnable et elle va au-delà du pouvoir de réglementation que l'article 2 laisse à l'Etat.

Le décalage paraissait tout aussi net s'agissant de la participation obligatoire des élèves d'une école à une manifestation publique commémorative à laquelle il ne peut être dérogé sans sanction59(*) Peu importe dans ce cas l'élève ayant refusé sa participation à cause de ses convictions de témoin de Jéhovah ait été exclue pour une journée seulement.

Normalement, le principe même d'une telle exclusion, qui ne s'appuie sur aucune des missions que l'on reconnaît aujourd'hui au système scolaire dans les Etats démocratiques, est inacceptable tout comme l'est la menace des châtiments corporels à l'égard des enfants dont les parents n'approuvent ces méthodes. La Cour pourtant a pris prétexte du caractère limité da la sanction qu'elle a souligné de façon insistante pour valider l'intervention de l'Etat censeur.

§ II- Evaluation de la protection de la liberté religieuse.

En quelques décisions de la Cour européenne des droits de l'homme, la liberté de religion, a été consacrée comme l'une des assises de toute société démocratique60(*).

Quatre affaires ont suffit à la Cour pour imposer les libertés de la Convention.

Les arrêts Kokkinakis et Manoussakis tout d'abord qui affirment clairement le caractère fondamental des droits garantis par l'article 9 de la Convention, l'arrêt Hoffmann qui affirme le caractère discriminatoire de toute différence de traitement dont il apparaît qu'elle est dictée par des considérations négatives tenant à la religion, l'arrêt Otto-Preminger-Institut enfin qui, citant largement l'arrêt Kokkinakis, donne à la protection du sentiment religieux la priorité sur certaines manifestations du droit à la liberté artistique.

Dans ces affaires, les convictions religieuses l'ont emporté sue les arguments qui, dans le cadre de l'examen de la proportionnalité, leur étaient opposés. Dans les trois premiers cas, l'atteinte à la liberté religieuse est jugée disproportionnée, dans le quatrième, les mesures prises par l'Etat pour protéger au détriment de la manifestation d'un autre des droits garantis par la Convention ne sont pas disproportionnées.

Par ses arrêts Valsamis et Efstratiou, du 18 décembre 1996, la Cour vient de relativiser la portée de la liberté de religion et de la place faite, dans nos sociétés, aux convictions religieuses. Il est regrettable que cette mise au point utile soit faite dans le cadre des arrêts contestables, dont la portée paraît plus politique que juridique. La Cour, pour justifier sa conclusion d'absence d'ingérence dans la liberté de religion des élèves et son refus de garantir les droits des parent de faire prévaloir leurs convictions religieuses et pacifistes, se rattache derrière la caractère limité des sanctions et l'obtention de dispense des cours de religion et de messe orthodoxe.

Certaines décisions négatives de la Commission sont également instructives en ce qu'elles soulignent le poids important qu'il convient d'accorder à la liberté de religion dans l'appréciation de la conventionalité des restrictions que les Etats apportent à la liberté religieuse.

L'importance reconnue à la liberté religieuse transparaît aussi dans l'application de l'article 50 par la Cour. Dans l'affaire Kokkinakis, la Cour a alloué au requérant une satisfaction presque totale de ses sollicitations financière. La totalité des frais et dépens afférentes aux instances suivies en Grèce et devant les organes de la Convention pourtant contestés par le gouvernement grec, les quatre cinquième de sa demande pour tort moral nié par le gouvernement. Or, le plus souvent la Cour considère que la réparation du dommage moral est assurée par la seule demande de la violation. Cela démontre, la gravité de la disproportion de la mesure adoptée par le gouvernement grec. Peut être est-ce aussi un moyen pour la Cour de souligner indirectement le caractère inacceptable de toute sanction pénale injustifiée appliquée à la manifestation d'un droit garanti et d'occulter son refus d'en condamner le principe.

Car le recours au contrôle de la proportionnalité est bien l'ultime recours lorsque les autres moyens se révèlent infructueux ou que la Cour juge opportun d'y recourir.

Dans les affaires concernant directement la mise en cause de la liberté religieuse (Kokkinakis, Manoussakis et Hoffmann), la Cour aurait pu faire mieux, aller plus loin, sanctionner une violation dans son principe dans les deux premiers cas sans avoir à recourir à la proportionnalité, être plus claire dans le second quant aux appréciations portées en ne se prononçant pas seulement sue la question de la discrimination.

Mais en privilégiant ce qui peut passer pour un contrôle de l'opportunité là où d'autres moyens pourraient être relevés, ce qui était le cas au moins dans l'affaire Kokkinakis et Manoussakis, la Cour semble peu convaincante. Elle satisfait l'Etat par un arrêt de portée limitée à l'espèce et dont les principes ne seront exportables que dans leur généralité. Elle satisfait aussi le requérant concerné qui a l'impression que justice lui a été rendue.

Mais elle ne fait pas beaucoup avancer le droit qui s'accommode mal d'une grande souplesse, laquelle nuit à la prévisibilité de la jurisprudence des organes de la Convention qu'eux même exigent à l'encontre de la loi nation

Titre II- Les implications du prosélytisme « religieux ».

L'article 9 de la Convention européenne des droits de l'homme précise que le droit à la liberté de religion « implique la liberté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques et l'accomplissement des rites ».

Il faut noter, qu'au niveau de la Convention, seuls les articles 9 et 10 comprennent une énumération des divers aspects du ou des droits garantis.

Le prosélytisme correspond à la liberté de manifester sa religion ou sa conviction, individuellement ou collectivement, en public mais également il répond au droit de toute individu de changer religion ou de conviction.

Concernant l'extériorisation de la religion, celle-ci pose de grande difficulté en Grèce, il existe une sorte de protectionnisme religieux selon lequel nul ne peut porter atteinte à la religion orthodoxe et nul n'a le droit de présenter aux citoyens grecs de confession religieuse orthodoxe, une autre voie religieuse que celle que l'Etat leur a inculqué (d'où l'existence du délit de prosélytisme).

En France, en règle générale, la liberté religieuse semble s'exercer sans problème, sauf quand cette dernière est en conflit avec le principe du laïcisme, on peut citer sans rentrer dans le détaille (cela sera traité dans la seconde partie), le problème que suscite le voile ou hijab (traduction en arabe du mot voile) des jeunes filles musulmanes qui souhaitent le porter au collège ou au lycée et cela n application des prescriptions coranique.

Outre le fait, que le prosélytisme entre dans le cadre de la liberté d'expression garantie par l'article 10 de la Convention, il correspond également au droit de manifester sa religion (Chapitre I) mais aussi il sert de support quant à l'affectivité du droit de choisir sa religion (Chapitre II).

Chapitre I- Le prosélytisme en tant que droit de manifester sa religion

Chapitre II- Le prosélytisme comme support au droit de changer de religion

Chapitre I- Le prosélytisme en tant que droit de manifester sa religion.

Les croyances religieuses doivent pouvoir se manifester en public, et toute personne devrait être libre de vivre selon ces concepts religieux, à la condition que ceux-ci ne portent pas atteinte à l'ordre public ou à la liberté d'autrui.

Toute religion ne peut pas s'exercer sans une partie de prosélytisme, chacune estimant détenir la vérité absolue et le chemin qu mènera vers le paradis, ainsi elle se doit de divulguer le message à l'humanité

En d'autres termes le prosélytisme est inhérent à la religion et donc à la liberté religieuse.

Les textes internationaux, estiment que les actes religieux garantissent au croyant un exercice effectif de sa liberté de religion.

L'article 18 de la Déclaration universelle des droits de l'homme et l'article 9 de la Convention le font en des termes identiques. L'énumération est brève puisque seulement quatre manifestations sont mentionnées. D'autres textes optent pour une liste plus détaillée sans pour autant prétendre à l'exhaustivité. Ainsi, l'article 6 de la Déclaration des Nations-Unies sur l'élimination de toutes les formes d'intolérance et de discrimination fondées sur la religion ou la conviction n'évoque pas moins neuf implications dont la liberté de religion.

La grande force de la Convention européenne est de disposer d'organes juridictionnels qui, par leurs jurisprudences, interprètent le texte de base et le font vivre61(*).

Ainsi, le droit de manifester sa religion, couvre tout d'abord le culte et les rites (Section I) mais aussi des manifestations plus ambiguës (Section II).

Section I- Le culte et les rites.

Le formalisme d'une religion, l'apparat dont s'accompagne certains actes d'adoration, la solennité des lieux qui leur servent de cadre, le nombre et le rôle des ministres des cultes, le maintien de rites complexes entourant l'exercice de la fonction cérémonielle ont pour but à la fois de magnifier le Dieu auquel est rendu hommage, d'accompagner la doctrine d'une religion afin d'en renforcer l'autorité et de témoigner de l'unité de tous ceux qui accomplissent scrupuleusement les mêmes gestes, prennent des postures identiques, prononcent des paroles semblables par delà les frontières62(*).

De prime abord ces manifestations sont parmi les plus paisible (§ I), toutefois leur exercice nécessite souvent des actions dont les Etats ne son pas toujours prêts à consentir la libre disposition ce qui fait du cadre de ces manifestations l'objet principal des controverses dont la Commission et la Cour ont eu à connaître (§ II).

§ I- Des manifestations a priori paisibles.

Le choix des termes employés à l'article 9 de la Convention pour désigner les manifestations garanties de la liberté de religion découle de la simple transcription de l'article 18 de la Déclaration universelle avec cette seule modification dans l'ordre des termes qui fait passer le culte de l'avant dernière à la première place, les rites clôturant toujours leur énonciation. Pourtant les deux manifestations sont très proches.

Quoiqu'il en soit, la Commission, qui seule a eu à se prononcer sur cette question, évite de nommer clairement l'une ou l'autre de ces manifestations invoquées devant elle (A), peut être parce que bien encadrées, fortement structurées, elles sont placées sous l'autorité des organes ecclésiaux chargés de veiller à leur stricte observance (B).

A- La Commission évite de se prononcer clairement sur la nature de la manifestation.

Le culte, comme culture vient du latin cultus, dérivatif du verbe colere qui signifie cultiver, entourer, honorer63(*). Le dictionnaire Robert en donne deux acceptations : la première évoque l'hommage religieux rendu à la divinité ou ç un saint personnage, la seconde, plus droite, désigne l'ensemble des « pratiques réglées par une religion » pur rendre cet hommage. Concernant le rite, c'est « l'ensemble de cérémonies du culte en usage dans une communauté religieuse, l'organisation traditionnelle de ces cérémonies »64(*).

La plupart des religions modernes comportent des rites fortement institutionnalisés.

Les quelques décisions de la Commission démontrent, que cette dernière, ne se prononce pas clairement sur la nature de la manifestation.

On peut prendre pour exemple, l'affaire Chappel65(*), relative à l'accès au site de Stonchenge la Commission, dans son résumé des faits, parle « du rituel ou de cérémonie druidique ». Dans la décision proprement dite il n'est plus question de la « cérémonie du solstice d'été » alors qu'ayant présumé que le druidisme était une religion elle aurait pu aussi bien parler de culte druidique.

L'absence de qualification précise par la Commission de la manifestation évoquée s'explique le plus souvent par le caractère négatif de la décision qui se trouve ainsi renforcée. Elle constate par exemple que le refus du requérant, de religion israélite, de remettre à son épouse le Guett, ou lettre de répudiation, ne correspond pas « à l'accomplissement d'un rite ou d'une pratique »66(*) sans qu'il soit nécessaire de se prononcer sur la nature exacte de la remise effective d'un tel document.

Son attitude est identique face à un requérant qui se plaint de ne pouvoir accomplir en qualité de chrétien orthodoxe « ses devoirs religieux et les rites relatifs aux défunts et aux tombes » étant donné que la circulation sur la nouvelle route à proximité immédiate de la tombe familiale l'empêche de l'entretenir et d'y poser une croix. La Commission dans sa décision préfère négliger les rites pour ne se référer qu'aux « devoirs » du requérant. Il n'a pas montré en quoi ce déplacement l'empêcherait « d'accomplir les devoirs prescrits par ses convictions, ou en quoi l'accomplissement de ces devoirs est subordonnées au maintien de la tombe à son emplacement primitif »67(*) d'autant que ses coreligionnaire avaient accepté le déplacement de leur tombe familiale.

En d'autres occasions, les manifestations prétendument entravées restent innommées. La Commission ne les rattache à aucune des catégories énoncées par la deuxième phrase de l'article 9 alors qu'il paraît bien s'agir d'une forme de culte ou d'un rite. Tel est le cas des prescriptions diététiques68(*). Le jeûne, le carême ou encore le ramadan pourraient être assimilés à un rite négatif. Mais l'observance quotidienne d'un régime alimentaire particulier, l'abstention complète d'absorber certains mets sont plus proches d'une pratique cultuelle que l'on peut ainsi qualifier de négative. Les exercices de yoga, le port de la barbiche ou la possession d'un chapelet qu'un requérant rattache à l'exercice de sa religion bouddhique 69(*)ne sont pas non plus identifiés comme rite ou élément d'un culte.

Pourtant le port du foulard islamique donne l'occasion à la Commission de souligner que « dans les pays où la grande majorité de la population adhère à une religion précise, la manifestation des rites et des symboles de cette religion, sans restriction de lieu et de forme, peut constituer une pression sur les étudiants qui ne pratiquent pas ladite religion ou sur ceux adhérant à une autre religion »70(*). Ainsi à partir de cette décision, on pourrait penser le tenue vestimentaire serait considérer par la Commission comme étant un rite.

Cette imprécision de la Commission se justifie d'abord par le teneur des requêtes qui lui sont adressées et dont elle se contente souvent de reprendre les termes.

Elle s'explique aussi, par le caractère généralement négatif de ses décisions qui la conduisent à écarter en bloc toutes les qualifications qui pourraient laisser penser à une manifestation garantie par la Convention

B- Des manifestations sous contrôle.

Culte et rites ne sont jamais laissés au hasard des volontés ou des aspirations individuelles sauf pour les plus intimes de leurs formulations comme la prière personnelle, mais il s'agit là du for intérieur du croyant.

En même temps que ces manifestations fondent une église et l'identifient dans ce qu'elle a de plus spécifique quant à la dévotion pratiquée, elles unissent aussi ses membres dans une extériorisation de leur foi uniforme.

Dans ce domaine, le droit à la liberté de religion de l'Eglise est substitué à celui de ses membres. Selon la Commission, elle « bénéficie d'une protection de sa liberté de manifester sa religion, d'organiser et de célébrer son culte, d'enseigner les pratiques et les rites, et elle peut assurer et imposer l'uniformité en ces matières » et surtout « les églises ne sont pas tenues d'assurer la liberté de religion de leurs prêtres et de leurs fidèles »71(*).

Ainsi la liberté de religion ne confère pas « à un ministre du culte le droit de défendre des conceptions religieuses particulières dans le cadre d'une église où il exerce »72(*).

En d'autres termes, le ministre du culte ne peut décider du culte et de son organisation.

Cette autonomie des églises en ce qui concerne l'organisation du culte et la célébration des rites transparaît également dans le souci de la Commission de vérifier systématiquement auprès des autorités ecclésiastiques compétentes, le bien fondé des allégations de certains requérants. Par exemple, le requérant, chrétien orthodoxe, opposé au déplacement de la tombe familiale se trouve isolé puisque d'autres personnes partageant ses croyances « ont déplacé volontairement leurs tombes familiales à l'intérieur du cimetière et (....) les autorités ecclésiastiques grecques orthodoxes auxquelles le requérant s'est adressé ont refusé d'agir en sa faveur »73(*).

§ II- Controverse quant au cadre de ces manifestations.

L'article 9 de la Convention couvre la liberté de manifester sa religion « individuellement ou collectivement, en public et en privé ». Le cadre de ces manifestations de la liberté de religion paraît si large et son acceptation si unanime que la Commission et la Cour ne précisent pas toujours si la requête concerne une manifestation individuelle ou collective, privée ou publique.

S'agissant des cultes et des rites qui réclament un lieu spécifique d'exercice, nous nous intéresserons à l'exercice de la liberté religieuse individuellement ou collectivement (A) pour démonter que la liberté cultuelle en droit grec est loin de satisfaire les exigences posées par la Convention européenne des droits de l'homme (B).

A- L'exercice de la liberté de religion individuellement ou collectivement.

La deuxième phrase de l'article 9-1 énonce la liberté de manifester sa religion « individuellement ou collectivement, en public ou en privé ».

L'emploi de la conjonction de coordination « ou » semble indiquer une alternative. Dés lors pourrait-il se faire que les Etats aient le choix entre la garantie de l'un ou l'autre seulement des termes de celle-ci ? Le gouvernement du Royaume-Uni soutenait cette thèse pour justifier sa position à l'égard d'un instituteur musulman qui se plaignait de ne pouvoir s'absenter, tous les vendredis après-midi pendant quarante-cinq minutes, de classe afin de se rendre à la mosquée pour la prière collective. L'Etat défendeur soutenait qu'il serait suffisant pour satisfaire aux exigences de l'article 9-1 que soit accordé le droit de manifester sa religion en privé seulement74(*).

La Commission a écarté cette interprétation après avoir examiné « le sens ordinaire de la protection de la liberté de religion assurée par le paragraphe 1, dans le double contexte de l'article 9 et de la Convention dans son ensemble, eu égard à l'objet et au but de celle-ci ». Elle relève que « le droit de manifester sa religion en public a toujours été considéré comme une composante de la liberté de religion ». Selon elle, l'on « ne saurait considérer les deux volets de l'alternative, en privé ou en public, comme s'excluant mutuellement ou comme laissant un choix aux pouvoirs publics, mais comme reconnaissant simplement que la religion peut se pratiquer sous l'une ou l'autre forme »75(*) dans les limites fixées au paragraphe second.

Le raisonnement suivi par la Commission vaut évidemment pour la manière individuelle ou collective de manifester sa religion qui doit être combinée librement avec le lieu de la manifestation. Il en résulte que chacun peut manifester sa religion individuellement en privé, avec ses coreligionnaires en privé, seul en public mais aussi avec d'autres et au vu de tous.

Enfin, un cas particulier doit être souligné, en effet les adhérents au dogme de l'église évangélique libre avaient sollicité du Ministre grec de l'Education Nationale et des Religions la permission d'établir un local réservé à leur culte dans la ville d'Argos. Le ministre le leur refusa au motif que le nombre était très limité. Le Conseil d'Etat grec annula cette décision précisant qu'un refus de permission ne saurait être opposé que si le nombre des membres de la communauté religieuse demanderesse est « totalement insignifiant ». Après la saisine de la Commission les requérants obtinrent satisfaction et retirèrent leur requête, la Commission estimant de son côté « qu'il existe aucun motif d'intérêt général qui pourrait justifier la poursuite de l'examen de celle-ci »76(*).

Dans ce cas d'espèce, le problème était relatif à la manifestation collective en public de la religion des requérants par le culte. Or, la réponse apportée par le Conseil d'Etat, si elle donne satisfaction aux membres de l'église évangélique libre, laisse entendre que cette liberté pourrait ne pas être accordée aux membres d'une communauté religieuse insignifiante. Cela n'est pas raisonnable de limiter ainsi la manifestation religieuse d'un groupe aussi peu nombreux qu'il soit, cela constitue purement et simplement une atteinte au droit de manifester sa religion, par ailleurs, il est tout à fait regrettable que la Commission ne s'est pas prononcée sur cette question, son avis aurait été d'un grand secours concernant ce problème.

B- Réticence du droit grec quant à la liberté cultuelle.

Le culte s'exerce le plus souvent collectivement et en public.

La Commission et la Cour viennent une nouvelle de condamner la Grèce pour violation de l'article 9 de la Convention et cela dans le cadre d'une requête de quatre Témoin de Jéhovah condamnés pour avoir utilisé, sans autorisation, un lieu privé pour des réunions, la prière et d'autres manifestations religieuses 77(*). Les faits montrent que malgré plusieurs demandes formulées auprès de l'autorité compétente ils n'obtinrent pas de réponse. Poursuivis sur le fondement d'une infraction à l'article 1 de la loi d'exception 1363/1938 ils furent acquittés par le tribunal correctionnel de première instance mais sanctionnés en appel. Leur pourvoi en cassation fut rejeté au motif notamment que selon la loi, pour bénéficier de la liberté d'exercice du culte, « il faut qu'il s'agisse d'une religion connue et non d'une religion occulte....qu'aucune atteinte ne soit porté à l'ordre public et à la morale...qu'il n'y ait pas d'acte de prosélytisme ». La question n'est pas nouvelle, dans l'énoncé des circonstances de l'espèce Kokkinakis la Cour relève parmi les nombreuses sanctions imposées au requérant une peine de six mois d'emprisonnement prononcée en 1952 pour « une réunion religieuse dans une maison privé »78(*). Les conclusions de l'affaire Kokkinakis sont très présentes dans le rapport de la Commission qui paraît sensible aux opinions partiellement dissidentes des juges Pettiti et Martens reprochant à la Cour de ne pas avoir sanctionné le principe même de la sanction pénale pour fait de prosélytisme. Selon la Commission « le fait d'ériger en infraction pénale l'utilisation d'un lieu de culte sans autorisation préalable des autorités compétentes peut paraître disproportionné au but poursuivi », c'est-à-dire l'ordre public. Elle souligne l'évidence du détournement de pouvoir dans l'affaire Manoussakis où « c'est en réalité l'attitude dilatoire manifestée par les autorités saisies de la demande d'autorisation qui est à l'origine de la condamnation des requérants »79(*).

La Cour relève que l'intervention selon l'article 1 de la loi grec, d'une « autorité ecclésiastique reconnue, à savoir l'église orthodoxe dans la procédure d'octroi de l'autorisation permet « une ingérence profonde des autorités politiques, administratives et ecclésiastiques dans l'exercice de la liberté de religion » (§ 45). Elle rappelle que « le droit à la liberté de religion tel que l'entend la Convention exclut toute appréciation de la part de l'Etat sur la légitimité des croyances ou sur les modalités d'expression de celle-ci » (§ 47). Dans ce cas précis, l'Etat « tend à se servir des potentialités des dispositions (de la loi) de manière à imposer des conditions rigides ou même prohibitives à l'exercice de certains cultes non orthodoxes, notamment celui des témoins de Jéhovah » (§ 48). Face à de telles obstructions illégitimes la Cour invoque pour la première fois, le droit, sinon le devoir, de désobéissance : « Dans ces conditions, la Cour estime que le Gouvernement ne saurait exciper de l'insubordination des requérants à une formalité de la loi pour justifier la condamnation infligée à ceux-ci. Le taux de la peine importe peu » (§ 52).

Elle conclut à une violation de l'article 9, à l'unanimité, mais sous l'angle seulement de la disproportion et sans sanctionner la loi en cause.

Section II- Les manifestations plus ambiguës.

L'article 9 de la Convention européenne des doits de l'homme énonce d'autres manifestations qui semblent plus conflictuelles surtout au regard du droit hellénique.

L'enseignement parce qu'il évoque au moins pour partie et surtout depuis l'arrêt Kokkinakis, un rapport plus immédiat antre l'adepte d'une église qui « sait » et celui qui ne sait pas encore mais qui prête une oreille attentive et qui pense peut être à exercer son droit de changer de religion (§ I) mais également la prédication qui va permettre de rencontrer les gens dans le but de leur faire part du message universel (§ II).

§ I- L'enseignement.

Dans le cadre de l'article 9 de la Convention il s'agit d'un moyen pour le croyant de manifester sa religion. Mais la question qui se pose, c'est quel type d'enseignement peut être dispensé et à qui ? (A). La Cour a mis en lumière et, dans une certaine mesure validé, une forme d'enseignement qui apparaît comme une composante du prosélytisme et dons de la liberté religieuse (B).

A- La forme de l'enseignement.

En tout cas pas celui auquel le juge Valticos fait référence dans son opinion dissidente jointe à l'arrêt Kokkinakis. Selon lui « le terme d'enseignement qui figure dans l'article 9 vise sans aucun doute l'enseignement religieux dans les programmes scolaires ou les institutions religieuses, mais non le démarchage individuel »80(*). Seraient donc les seules croyants à pouvoir manifester leur religion, l'Etat par l'intermédiaire des programmes scolaires et les membres du corps enseignant des institutions religieuse ! C'est oublier que l'Etat n'a pas sa place dans cette phrase de l'article 9 et qu'il est tenu par les dispositions de l'article 2 du protocole ; c'est aussi négliger le libellé de l'article 9 qui couvre le droit de manifester sa religion individuellement par une démarche individuelle et non pas comme le dit le juge Valticos « un démarchage individuel »81(*).

Dans l'affaire Hoffmann, le juge Valticos avait également formulé une opinion dissidente dans laquelle il relevait que « comme la mère faisait des visites hebdomadaires en vue de répandre sa foi (certes, sans être accompagnée de ses enfants), on devrait s'attendre à ce que ce souci de prosélytisme se manifestât également envers ses enfants dont il était normal qu'elle voulût en assurer ce qu'elle considérait comme leur statut ». Ceci suffirait, selon lui, à justifier le refus d'accorder à la mère divorcée la garde de ses enfants. Suivant un tel raisonnement, il faudrait refuser aux Témoins de Jéhovah une large part du bénéfice de l'article 9 de la Convention, celui aussi de la deuxième phrase de l'article 2 du protocole et peut être le bénéfice de l'article 14 de la Convention.

Pour les juges Foighel et Loizou « le terme d'enseignement implique franchise et probité, et exclut le recours à des moyens détournés ou irréguliers, ou à de faux prétextes (....) pour pouvoir pénétrer au domicile de quelqu'un et, une fois introduit, en abusant de la courtoisie et de l'hospitalité témoignées, tirer avantage de l'ignorance ou de l'inexpérience en matière de dogme d'une personne n'ayant pas de formation dans ce domaine, et à chercher à l'amener à changer de religion. Il en est d'autant plus ainsi, que le terme d'enseignement doit s'interpréter dans le contexte de l'article tout entier et en combinaison avec les limitations prévues au paragraphe 2, en particulier celles de la protection des droits et libertés d'autrui, qui englobe sans aucun doute, pour ceux qui enseignent leur religion, le devoir de respecter celle d'autrui. La tolérance religieuse implique le respect des croyances religieuses des autres »82(*).

L'argumentation des juges Pettiti et Martens dans leurs opinions jointes rend plus exactement compte des implications des dispositions de l'article 9 de la Convention dont la Cour elle-même, malgré les quelques faiblesses de son arrêt dénoncées par ces deux juges, a su tirer la substance. La Cour en effet a, au § 31 de son arrêt relatif aux « principes généraux » et dans lequel nous voyons son apport fondamental, affirme « le droit de convaincre son prochain, par exemple au moyen d'un enseignement ». Nous retiendrons deux implications qui découlent de cette partie de la phrase. Tout d'abord l'enseignement peut avoir pour objectif légitime de convertir l'enseigné au sens de l'article 9 de la Convention. Ensuite, l'enseignement n'est qu'un moyen parmi d'autres de convaincre son prochain83(*).

On peut distinguer deux catégories d'enseignement. D'une part, celui qui a pour objectif d'élever la conscience du disciple néophyte déjà tout acquis aux principes fondamentaux du groupement auquel il a adhéré. D'autre part celui qui est donné à un intéressé auquel sont présentés les principes fondamentaux qui devront lui permettre, en toute liberté, d'exercer son choix en faisant siennes ou non les croyances de son enseignement.

Le prosélytisme non abusif englobe la deuxième de ces formes d'enseignement qui semble également prohibé dans le droit grec contrairement au droit français qui en la matière est bien plus libérale et respectueux de la liberté de religion.

En réalité, il me semble que le droit grec refuse tout enseignement qui fait pas la promotion de la religion orthodoxe, sous couvert de prosélytisme ou d'un enseignement de la religion que par les institutions habilitées, il est plus question de protéger la religion d'Etat que celui de la transmission d'un savoir. On peut pas considérer a cet effet, que la position du droit hellénique soit conforme aux exigences de la Convention notamment concernant ce droit de manifester sa religion par le biais également, de l'enseignement combien même ce dernier est destiné a convertir la personne. La seule exigence est le respect de la liberté d'autrui et le consentement de l'auditeur.

B- L'enseignement en vue de la conversion : composante du prosélytisme.

En distinguant le témoignage chrétien du prosélytisme abusif, la Cour reconnaît implicitement la nécessité du prosélytisme comme support du droit de changer de religion.

Les témoins de Jéhovah se livrent-il au prosélytisme ? Une réponse a été apportée par les intéressés eux-mêmes dans une rubrique « questions des lecteurs » figurant dans une brochure du groupement dès 196584(*). L'origine du terme et sa signification dans les temps bibliques y sont rappelés : en résumé, le prosélytisme, c'est « faire des prosélytes, recruter des adeptes » selon le dictionnaire alphabétique et analogique de Robert. Le texte biblique de référence utilisé par les jéhovistes en la matière est celui de Mathieu 28 : 19 et 20 dans lequel sont apportées les paroles de Jésus ordonnant à ses disciples : « Allez donc auprès des hommes de toutes les nations et faites d'eux mes disciples (....) et enseignez leur à obéir à tout ce que je vous ai commandé » (Bible en français courant).

D'une façon générale le terme de prosélytisme lorsqu'il est aujourd'hui employé évoque une pratique abusive. Le texte de l'Apocalypse 3 : 20 dit : « Ecoute, je me tiens à la porte et je frappe : si quelqu'un entend ma voix et ouvre la porte, j'entrerai chez lui, je mangerai avec lui et il mangera avec moi » (Bible en français courant). Du prosélytisme on a pu dire qu'il ne se tient pas à la porte et frappe mais qu'il « fait brutalement irruption dans la maison »85(*). En réalité le prosélytisme agrée par la Cour européenne des droits de l'homme se tient à la porte, frappe et entre dans la maison quand il y est invité pour débattre plus en avant, voire enseigner. Pour les Témoins de Jéhovah, s'agit-il pour eux de recruter en un temps record des adeptes qui seront, dès les premiers contacts, considérés comme membres du groupement et astreints aux obligations que toute église est en droit d'imposer à ses prêtres et fidèles.

L'extrait du périodique de 1965 déjà cité laisse entendre que non. Certains écrits plus récents du groupement le confirment. Ainsi lit-on dans un ouvrage intitulé les Témoins de Jéhovah : prédicateurs du Royaume de Dieu : « Des millions de gens ont étudié la Bible avec les Témoins de Jéhovah, mais tous ne sont pas devenu Témoins. Quand ils prennent connaissance des principes élevés à appliquer, certains décident que ce n'est pas le genre de vie qu'ils souhaitent. Tous ceux qui se font baptiser commencent par apprendre en détail les enseignements bibliques fondamentaux et ensuite (....) les anciens de la congrégation passent en revue ces enseignements avec chaque candidat au baptême. Tout est fait pour s'assurer que ceux qui se font baptiser comprennent non seulement les doctrines, mais aussi ce qu'implique une conduite chrétienne »86(*). Plus loin, après l'évocation d'un grand rassemblement en Afrique où de nombreux nouveaux adeptes ont été baptisés, il est mentionné que « l'objectif, toutefois, n'est pas de baptiser les masses »87(*)

La Commission elle-même a pu relever que « les témoins de Jéhovah adhèrent à tout un ensemble de règles de comportements couvrant bon nombre d'aspects de la vie quotidienne. Le respect de ces règles, ajoute la Commission, fait l'objet d'une surveillance sociale rigoureuse mais informelle »88(*)

Ainsi les Témoins de Jéhovah agissent par la publication, l'enseignement et la discussion, et cela rentre dans le cadre de l'article 9 de la Convention, il ne s'agit en aucun cas d'un prosélytisme abusif comme l'avançaient les tribunaux grecs.

Finalement, en Grèce est-il tout simplement possible de parler d'un autre dogme que celui de l'Eglise orthodoxe ? Peut-on au nom de la simple liberté d'expression débattre sur des questions religieuses, en dehors du cadre des seules institutions autorisées ? Et enfin, que signifie pour le droit hellénique le droit de manifester sa liberté religieuse ou le droit de changer de religion, d'autant plus que le prosélytisme non abusif est le support de ce droit ?

Toutes ces questions démontrent l'intolérance d'un Etat signataire d'une Convention et la pression que l'Eglise orthodoxe exerce sur le législateur grec. Il est évident, que la liberté religieuse en France est plus effective et bien mieux garantie qu'en la Grèce.

§ II- Le prosélytisme, manifestation complexe des convictions religieuses89(*).

Pour revenir aux témoins de Jéhovah, certes la Cour dans l'arrêt Kokkinakis condamne la Grèce pour entrave à l'article 9 de la Convention, mais concernant l'activité incriminée par les tribunaux grec, la Cour ne se prononce pas sur la nature de ladite activité (A), par ailleurs la prédication ne doit-elle pas être garantie au même que le culte ou les rites (B) ?

A- Le silence de la Cour quant à la nature de la prédication.

Il semble que dans l'arrêt Kokkinakis, ce n'était pas l'enseignement qui était mis en cause.

Le prosélytisme, tel que l'ont validé la Commission et la Cour, est une expression complexe des convictions qui englobe un certain enseignement mais aussi des pratiques au sens de l'article 9 de la Convention. Le requérant faisait d'ailleurs valoir que le droit de manifester sa religion « engloberait tout enseignement, toute publication et toute prédication entre personnes90(*). De son côté la Cour relève que « le témoignage, en parole et en actes, se trouve lié à l'existence de convictions religieuses »91(*). Mais si elle conclut bien à une ingérence dans le droit du requérant de manifester sa religion92(*), elle ne donne aucune précision quant à la nature de la manifestation entravée au sens de l'article 9 de la Convention.

En d'autres termes, la Cour ne veut pas dire clairement que la prédication est une composante fondamentale du prosélytisme non abusif et que ce dernier en tant que élément de la liberté religieuse est garanti par l'article 9 de la Convention.

B- La prédication : une manifestation de la religion garantie au même titre que le culte ou les rites ?

Les Témoins de Jéhovah déclarent s'efforcer de suivre le modèle laissé par Jésus et ses disciples du premier siècle. Ils pensent obéir à l'ordre prophétique donné par le Christ selon lequel « cette bonne nouvelle sera prêchée par toute le terre habitée, en témoignage. Et alors viendra la fin »93(*). Les Témoins expliquent que Jésus ne voulait pas dire que « ses disciples devaient bâtir des églises, sonner une cloche et attendre qu'une assemblée de fidèles se réunisse une fois par semaine pour les écouter prononcer un sermont »94(*). Ils montrent que le verbe grec traduit par prêcher (kerusso) a pour sens premier « faire une proclamation en qualité de héraut »95(*). En d'autres termes, ce mot signifie donc pas prononcer des sermons devant un petit groupe de disciples, mais plutôt faire une déclaration publique.

Aux Etats-Unis, statuant sur la constitutionnalité d'une patente imposée aux Témoins de Jéhovah comme condition préalable à l'exercice de la liberté de religion par la diffusion de publications, la Cour Suprême a déclaré notamment « la diffusion de traités religieux est une forme très anciennes d'évangélisation missionnaire, aussi ancienne que l'imprimerie (...). Cette forme d'évangélisation est abondamment pratiquée aujourd'hui par diverses organisations religieuses dont les colporteurs font pénétrer l'Evangile dans des milliers et des milliers de foyers et cherchent en rendant visite aux gens, à les rallier à leur foi. C'est plus que la prédication : c'est plus que la diffusion de publications religieuses. C'est les deux à la fois. Le but est aussi évangélique qu'une réunion pour le renouveau de la foi. Au regard du Premier Amendement, cette forme d'activité religieuse s'élève au même rang que le culte pratiqué dans les églises et que la prédication en chaire. Elle mérite la même protection que les exercices plus orthodoxes et plus conventionnels de la religion »96(*)

On ne saurait mieux dire que cette manifestation de la religion doit être garantie au même titre que le culte ou les rites dont elle se rapproche par la motivation de plaire à Dieu et de le glorifier.

Chapitre II- Le prosélytisme comme support au principe du libre choix de sa

religion.

L'imbrication très étroite entre le for interne et le for externe du croyant rend très difficile l'appréciation objective des manifestations de la liberté de religion par une tierce personne.

La jurisprudence de la Commission et celle de la Cour européenne des droits de l'homme ne sont ni totalement satisfaisantes, ni parfaitement éclairantes sur ce point. Pourtant avec l'affaire Valsamis quelques interrogations sont apparues.

On a pu remarqué à plusieurs reprises, l'insuffisante précisions des analyses auxquelles se livrent la Commission et la Cour dés qu'elles se trouvent confrontées aux phénomène religieux, leur propension à ne pas aller au fond des choses de façon à tracer plus précisément le contour des manifestations protégées, notamment le prosélytisme non abusif qui se manifeste dans plusieurs aspects de la liberté religieuse.

Il convient de souligner, que la Cour dans l'affaire Kokkinakis, lie un droit qui ne saurait connaître de limitations, celui de changer de religion, avec un droit relatif, qui peut être restreint au sens de l'article 9-2, celui de manifester sa religion.

Le texte de l'article 9 de la Convention européenne des droits de l'homme, comme celui de la Déclaration Universelle, n'évoque que le droit de changer de religion.

Le prosélytisme non abusif constitue un support formidable pour arriver à cet objectif.

En droit français, il semble que toute personne peut faire du prosélytisme en vue de la conversion d'une personne et ceci dans le cadre du libre choix de la religion, que tout citoyen peut prétendre, avec pour limite `école. Ce n'est pas le cas du grec comme nous l'avant vu précédemment. Ainsi il intéressant d'examiner le principe du libre choix de sa religion (Section I), pour s'intéresser au droit de changer de religion (Section II).

Section I- Le principe du libre choix de sa religion.

L'homme est rarement en mesure de choisir en toute liberté sa religion originaire. Son engagement est prédéterminé, c'est-à-dire qu'il est défini par l'entrée en jeu d'instances supérieures, en général ses parents, ce qui va conditionner son choix religieux97(*).

En réalité, le choix de l'homme d'appartenir à une religion est prédéterminé (§ I), et ainsi le prosélytisme non abusif va être un formidable moyen à la conversion de toute personne désirant changer de religion (§ II).

§ I- Prédétermination de la religion originaire de chaque homme.

Le lieu géographique de naissance et la religion des parents vont influer considérablement sur le choix religieux de l'enfant.

Cependant, le texte de la Convention contrairement aux autres textes internationaux (qui n'affirment pas directement le droit de changer de religion) consacre ce droit de changer de religion (A), mais il faut également voir ce que recouvre ce droit (B)

A- Affirmation de ce droit par la Convention.

La deuxième phrase de l'article 18 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques énonce que le droit à la liberté de religion implique « la liberté d'avoir ou d'adopter une religion ». L'article premier de la Déclaration sur l'élimination de toutes formes d'intolérance et de discrimination fondées sur la religion ou la conviction prévoit que le droit à la liberté de religion implique « la liberté d'avoir une religion ou n'importe quelle conviction de son choix ». Dans aucun de ces textes il n'est fait mention de la liberté de changer de religion. Cette formulation nouvelle par rapport au texte de la Déclaration Universelle, repris par l'article 9 de la Convention européenne, résulte de la volonté de contourner les réticences et oppositions de certains Etats dont la religion dominante, parfois institutionnalisé comme la Grèce par exemple, ne s'accommode pas d'abondons, ou de reniements constitutifs du délit d'apostasie98(*). Grâce à cette rédaction la Pacte a été adopté à l'unanimité et la déclaration par consensus.

Toutefois le rapporteur de la sous-commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et la protection des minorités considère que ces dispositions tendent vers le même objectif, à savoir que toute personne a « le droit d'abandonner une religion ou une conviction et d'en adopter une autre ou de n'en professer aucune »99(*), le débat qui a suivi l'exposé du rapport montre que tous les Etats ne partagent pas ce point de vue.

Quant au libellé de l'article 18-1 du Pacte, il est parfois présenté comme reflétant une approche positive de la liberté de religion « car le droit d'avoir ou d'adopter une religion n'est soumis à aucune limitation »100(*), mais tous les Etats n'ont pas encore ratifié ce texte.

N'étant pas soumis aux mêmes contraintes diplomatiques ni aux mêmes susceptibilités d'un rattachement à des valeurs d'inspiration chrétienne que ne vient pas troubler la Turquie laïque, le texte de la Convention peut proclamer le droit de changer de religion.

B- Le contenu de ce droit.

Le seul droit de changer de religion doit bien sûr être interprété comme garantissant le droit de l'athée de se convertir à la croyance religieuse de son choix.

Le droit de changer de religion ou de conviction couvre ainsi le passage de la liberté de pensée à celle de religion et, bien évidemment, le cheminement inverse doit bénéficier de la même garantie.

En vérité le choix originaire de la religion n'est jamais libre car il s'effectue dès la prime enfance et relève de la seule responsabilité des parents ou du responsable légal.

C'est en fait l'article 2 du premier protocole qui complète indirectement sur ce point l'article 9 de la Convention en mettent l'accent semble t-il sur ce droit fondamental des parents qui s'efface avant la majorité civile du mineur.

Il est évident, que ce droit de changer de religion est une réponse à la prédétermination de la religion de l'individu, mais si on prend le cas de la Grèce, il est assez rare de voir des personnes quittant la religion orthodoxe vers une autre religion. Il existe une pression sociale très forte sur la conscience des individus et surtout une pression des institutions orthodoxe. IL ne faut pas perdre d'esprit, que la religion était inscrit sur la carte d'identité, cela démontre bien que la Grèce reste tout de même peu tolérante avec les autres religions. En France, la situation est tout autre, toute personne est libre de suivre la religion de son choix et peut si il le souhaite changer de religion ou abandonner sa croyance initiale, en aucun cas il existe cette pression sociale qui fait de l'individu un prisonnier des croyances ou da la religion de la société dans laquelle il vit.

§ II- Le droit de se convertir.

Un Etat signataire de la Convention se doit de favoriser le pluralisme religieux ou, à tout le moins, de ne pas lui porter d'atteintes injustifiées. Il ne peut, sous couvert de l'ordre public, poursuivre en réalité l'objectif de « supprimer la source d'une croyance non désirée et de démanteler le groupe des fidèles »101(*) . Il faut noter que ce droit n'est pas affirmé d'une manière expresse (A) et que certains Etats sont réticent en pratique quant à l'effectivité de ce droit (B).

A- Un droit implicite.

Bien que la Commission ne le dise pas expressément la faculté d'exercer ce libre choix, et donc de se convertir, doit être laissée aux croyants eux-mêmes sauf à protéger les fidèles actuels et potentiels d'une exploitation manifestement contraire à l'ordre public.

Les prisonniers conservent également le droit de changer de religion à l'image de ce requérant orthodoxe russe au moment de son incarcération, puis converti à la religion sikh et enfin au bouddhisme Tao au moment de l'introduction de son recours102(*) . De même Mme Hoffmann pouvait pâtir des conséquences de sa conversion à la religion des Témoins de Jéhovah après son mariage dans le règlement de son divorce et l'attribution de la garde des enfants103(*). Tel serait bien le cas si les juridictions nationales traitaient défavorablement les adeptes de certaines religions du fait de leur seule appartenance à ces églises.

Le droit de changer de religion serait indirectement entravé par le traitement discriminatoire de ces groupements, les difficultés rencontrées par certains de leurs adeptes face à certaines situations de la vie courante pouvant jouer comme un frein à de nouvelles conversions.

B- Une réticence du droit grec quant à l'effectivité de ce droit.

Le phénomène de conversion ne crée plus, en principe, de difficulté dans nos sociétés occidentales si ce n'est le procédé de recrutement de certains nouveaux groupements religieux.

Néanmoins, le droit de changer de religion ou le droit de se convertir, mériterait de bénéficier d'une plus grande protection lorsqu'il se heurte à des sociétés moins libérales. Par exemple, l'examen de la situation d'un musulman converti au catholicisme en passe d'être expulsé vers son pays d'origine, Etat musulman, fasse l'objet d'une plus grande attention de la part de la Commission sous l'angle de l'article 9-1 de la Convention et non du seul article 3, tout en sachant que le droit islamique prévoit que toute personne quittant la religion islamique encourt la peine de mort.

Le droit grec, il est vrai qu'en théorie respecte ce droit, mais il ne faut pas oublier qu'il la Grèce est un Etat confessionnel contrairement à la France qui est un Etat laïque, ainsi le patriarche d'Athènes, Christodoulos, veille à ce que la religion orthodoxe ne soit pas menacé par d'autres religion.

La population grecque n'est pas ouverte quant à la possibilité de changer de religion, pour eux, changer de religion, c'est quitter la vérité absolue pour le faux ou l'hérésie (Erezia). Il faut noter, par ailleurs, que l'Eglise orthodoxe refuse tout mariage qui porte sur des couples non orthodoxe. De plus, lorsqu'une personne ait amené a se présenté à un concours administratif, la religion de la personne est demandé, cela du point du vue du droit français, c'est inadmissible.

Tous ces éléments rendent en pratique très difficile l'exercice du droit de changer de religion et par voie de conséquence le droit de se convertir.

Certes les instruments internationaux tendent à garantir ce droit, mais la pression de l'Eglise orthodoxe est telle qu'il est très difficile pour un grec de quitter la religion orthodoxe pour une autre religion combien même il serait convaincu de sa non croyance aux dogmes inculqué par la religion orthodoxe.

Section II- L'exercice du droit de changer de religion.

Le changement de religion est l'étape finale d'un processus plus complexe de maturation d'idées neuves, d'interrogations résolues, de remise en question, en d'autres termes c'est le résultat d'une quête individuelle de l'homme insatisfait des réponses qui lui ont été apportées ou inculquées.

L'aide d'un tiers est souvent nécessaire, objet de la quête ou en quête lui-même d'oreilles attentives au message qu'il souhaite partager104(*).

De ce fait, toute personne doit être libre d'accéder aux informations lui permettant de changer de religion (§ I), mais cela entraîne comme conséquence une neutralité de l'Etat (§ II).

§ I- Liberté de tout homme d'accéder aux informations lui permettant de changer de religion.

Si le chercheur de vérité ou d'une autre vérité est libre de ses mouvements pour aller trouver de nouvelles informations, plus difficile est le problème posé par la démarche inverse qui pousse celui qui a trouvé la vérité de la partager avec autrui.

Dans la déclaration sur la liberté religieuse adoptée en 1961 à New Delhi par la troisième Assemblée du Conseil oecuménique des églises, le point 7 prévoit que la liberté de pensée, de conscience et de croyance, même considérée comme une liberté intérieure, exige la liberté d'accès à une information digne de confiance. Selon le point 8, la liberté de témoigner de sa religion ou de sa croyance implique notamment « la liberté d'enseigner (...) par le prédication dans l'intention de répandre sa propre foi en persuadant autrui de l'adopter »105(*).

L'origine de ce texte laisse donc entrevoir un consensus sur l'instauration d'une concurrence réelle et loyale entre les tenants de diverses professions de foi. Pourtant, il semble s'agir d'une liberté à double vitesse. Profitant pleinement aux grands groupes religieux qui aujourd'hui en usent fort peu, elle est refusée ou contestée aux nouveaux groupements religieux.

Ainsi l'affaire Kokkinakis a donné l'occasion à la Commission et à la Cour de se prononcer sur cette importante question.

En effet, M. Kokkinakis né en 1919 dans l'île de Crète est devenu Témoin de Jéhovah en 1936 et a été, depuis, arrêté plus de soixante fois pour prosélytisme. En 1986, sa femme et lui furent une nouvelle fois arrêtés alors qu'ils étaient en discussion au domicile de l'épouse d'un chantre de l'église orthodoxe. Poursuivis pour infraction à l'article 4 d'une loi de 1936 réprimant le prosélytisme, ils furent condamnés par le tribunal correctionnel de Lassithi, décision confirmée pour partie par la Cour d'appel de Crète à l'encontre de M. Kokkinakis seul, puis par la Cour de Cassation.

Dans son arrêt, la Cour européenne des droits de l'homme fait un rapprochement intéressant entre certaines manifestations de la liberté de religion et le droit de changer de religion. Selon elle, « le témoignage en paroles et en actes se trouve lié à l'existence de convictions religieuses » et la liberté de manifester sa religion « comporte en principe le droit d'essayer de convaincre son prochain, par exemple au moyen d'un enseignement, sans quoi du reste la liberté de changer de religion ou de conviction, consacrée par l'article 9, risqueraient de demeurer lettre morte »106(*).

La Cour prend donc nettement parti pour la liberté d'action du prédicateur dont l'objectif est de faire des disciples. Mais pourquoi alors n'a-t-elle pas sanctionnée le fondement même de la sanction pénale ? Peut-être s sont des considérations politiques qui peuvent répondre à cette question.

§ II- La neutralité de l'Etat.

L'Etat ne peut user des prérogatives qu'il détient notamment en matière d'enseignement public pour propager des convictions religieuses ou philosophiques ainsi privilégiées au détriment de convictions concurrentes ne bénéficiant pas de la même publicité institutionnalisée. La Cour l'a très nettement exposé dans son arrêt Kjeldsen et autres107(*). Selon la seconde phrase de l'article 2 du premier protocole implique que l'Etat « en s'acquittant des fonctions des fonctions assumées par lui en matière d'éducation et d'enseignement, veille à ce que les informations ou connaissances figurant ou programme soient diffusées de manière objective, critique et pluraliste. Elle lui interdit de poursuivre un but d'endoctrinement qui puisse être considéré comme ne respectant pas les convictions religieuses et philosophiques des parents »108(*). De ce point de vue l'enseignement de l'éducation sexuelle tel qu'organisé par la loi danoise « ne constitue pas une tentative d'endoctrinement visant à préconiser un comportement sexuel déterminé »109(*). Bien entendu le cadre de ce raisonnement n'est pas l'article 9 de la Convention, mais l'article 2 du protocole qui n'évoque pas la question du changement de religion. Néanmoins comme l'a souligné la Cour cet article doit être lu à la lumière de l'article 9 (§ 52 de l'arrêt). L'Etat ne peut donc, par le moyen de son système éducatif inciter les enfants qui lui sont confiés à changer de religion ou, plus subtilement, à délaisser les croyances qui leur sont inculquées par leurs parents en tournant ces croyances en ridicule, en les présentant comme erronées ou dépassées. La Commission, dans une affaire relative à un refus de dispense d'instruction religieuse opposé aux requérants athées, relève que « l'article 9 protège contre l'endoctrinement religieux par l'Etat » et que « l'enseignement qui ne fournit que des informations ne saurait être considéré comme contraire à la Convention ou à ses protocole : en l'occurrence le fait que l'instruction religieuse soit axée sur le christianisme dès le premier cycle scolaire ne signifie pas que (...) la requérante ait fait l'objet d'un endoctrinement religieux contraire à l'article 9 de la Convention »110(*). En d'autres termes, la Commission considère que l'athéisme du requérant n'est pas menacé par la diffusion d'informations relatives au christianisme en général. Replacée dans son contexte, la conclusion n'est pas satisfaisante. Certes la Commission a été empêchée de se prononcer sur le fondement de l'article 2 du Protocole en raison de la réserve suédoise. Mais sur le terrain de l'article 9, après avoir fort justement souligné que cet article protège contre l'endoctrinement religieux de l'Etat et que, de ce point de vue, la réserve suédoise ne saurait en limiter la portée qui pèse sur les Etats. La liberté de changer de religion ou de convictions leur impose de ne pas s'immiscer de quelque façon que ce soit dans ce choix.

Concernant la Grèce, on peut citer l'affaire Valsamis, où les parents de l'écolière sanctionnée pour son refus de participer au défilé commémoratif discernent dans cette ingérence « une tentative d'endoctrinement contraire à leurs convictions religieuses »111(*), opinion partagée par huit membres de la Commission.

L'important est que la matière enseignée soit présentée de façon telle qu'elle ne mette pas en cause les convictions religieuses ou philosophiques inculquées par les parents à leurs enfants. La même obligation devrait peser avec force, lorsque l'Etat instructeur sort de son cadre strictement entendu de l'enseignement et organise des manifestations publiques ou décide de la participation des élèves dont il a la charge à de telles manifestations112(*).

En somme, si la France et la Grèce se rejoignent quant à la garantie de la liberté religieuse du for intérieur, il n'en demeure pas moins que s'agissant de l'expression de cette liberté religieuse par les différents moyens, dont le prosélytisme non abusif, on constate une différence nette et sans équivoque.

On peut affirmer sans guère risquer de se tromper, la France constitue un modèle européen concernant la liberté religieuse et sa garantie.

La Grèce est certes tributaire de la relation intime qu'elle entretient avec l'Eglise orthodoxe, de ce fait il n'est pas surprenant que cette dernière fait tout pour empêcher un pluralisme réel concernant les croyances religieuse et en conséquence la manifestation extérieure de la liberté religieuse se trouve entravée. Il suffit, pour se convaincre d'analyser la jurisprudence en la matière et d'écouter les déclarations publiques du Patriarche d'Athènes qui estime que seul la religion orthodoxe peut se manifester en public et que les autres religions doivent rester au stade de la foi intérieur.

PARTIE II- Le prosélytisme comme menace à la liberté religieuse.

Au cours des siècles, l'unité doctrinale et institutionnelle des Eglises dominantes en Europe n'a cessé de s'affirmer aux dépens d'une foule d'excommuniés, de schismatiques et d'hérétiques. La structure manichéenne de certains discours religieux a toujours convenu a merveille aux artifices simplificateurs de la propagande113(*). Tout s'est passé comme si la force d'impact d'un slogan religieux était fonction de sa pauvreté intellectuelle en même temps que de sa charge émotionnelle114(*) En invoquant une prédication fort ethnocentrique du salut, Augustin a légué au Moyen Age une redoutable formule. Si l'Eglise, selon lui, force les hérétiques et les schismatiques à entrer dans son sein, « que ceux-ci ne se plaignent pas d'être contraints, mais qu'ils considèrent où on les pousse »115(*).

Par ailleurs, le prosélytisme non abusif n'est que la conséquence de la liberté de religion. Une fois assuré le sort de la liberté principale celui de la liberté dérivé peut être considéré comme allant de soi. Mais la liberté religieuse n'est pas absolue et ainsi l'article 9-2 de la Convention européenne des droits de l'homme énonce je cite : « la liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à la protection de l'ordre, de la santé ou de la morale publique, ou à la protection des droits et libertés d'autrui »116(*).

Ainsi la liberté religieuse et par voie de conséquence le prosélytisme, doivent respecter plusieurs exigences : d'une part, cette liberté religieuse et son corollaire le prosélytisme, ne doivent pas remettre en cause ou menacer la sécurité nationale ou l'ordre, la santé ou la morale publique et d'autres part cette liberté ne doit en aucun cas porter atteinte aux droits et libertés d'autrui.

Evidemment, le droit français et le droit grec se rejoignent quant à ces limites pouvant être opposées à l'exercice de la liberté religieuse (d'ailleurs ce sont les mêmes limites dans les droits nationaux interne), mais c'est plutôt concernant l'appréciation de certains fait s religieux que la Grèce se distingue de la France, pour le droit grec ce qui ne relève pas de la religion dominante peut être menacé d'interdiction sous prétexte d'atteinte à l'ordre public ou aux droits et libertés d'autrui.

Aussi, on va s'intéresser dans un premier temps aux limites classiques du prosélytisme (Titre I), et ensuite nous examinerons les nouveaux défis de l'Europe en matière religieuse et surtout l'accroissement aussi bien en Grèce qu'en France d'un prosélytisme abusif tendant à l'endoctrinement et l'exploitation des personnes et cela au nom de Dieu (Titre II).

Titre I- Les limites classiques du prosélytisme

Titre II- Les nouveaux défis de l'Europe en matière religieuse

Titre I- Les limites classiques du prosélytisme.

Le concept même de liberté inclut à la fois l'idée de garantie et de limite117(*). Selon Jean Rivero, « affirmer une liberté, c'est nécessairement en définir les limites. Toutes libertés s'exercent dans le cadre d'une société. Elle ne peuvent pas ne pas tenir des exigences de la vie sociale, de la liberté des autres, et des conflits qui peuvent naître de leur existence »118(*)

L'idée selon laquelle la limite d'une liberté serait inhérente à celle-ci est largement illustrée dans les textes nationaux grec et français mais aussi internationaux proclamant les libertés.

L'article 4 de la déclaration des Droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789 définit la liberté comme consistant à « pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui ». Consacrant l'idée de limite imminente à la notion de liberté, il dispose ensuite « ainsi, l'exercice des droit naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance de ces droits ».

L'article 10 de la Déclaration proclame la liberté d'opinion, notamment religieuse en conservant la dualité énoncée par l'article 4 puisqu'il pose en premier lieu le principe avant d'en préciser la limite en disposant : « nul ne doit être inquiété pour ses opinions, mêmes religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la loi ».

Enfin, l'article premier de la loi du 9 décembre 1905, de même que l'article 9 de la Convention européenne des droits de l'homme et l'article 18 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966 adoptent la même démarche que l'article 10 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen en énonçant dès après le principe de la liberté religieuse, la limite attachée à cette liberté.

Ainsi, à travers les limites classiques de la liberté religieuse, nous examinerons la prohibition unanime du prosélytisme dit « abusif », d'une part (Chapitre I), et ensuite nous présenterons les sanctions pénales face à l'exercice abusif de cette liberté, d'autre part (Chapitre II).

Chapitre I- Prohibition unanime d'un prosélytisme abusif

Chapitre II- Les sanctions d'un prosélytisme abusif

Chapitre I- Prohibition unanime d'un prosélytisme abusif.

Les impératifs de la vie collective constituant la limite à la liberté religieuse et par voie de conséquence au prosélytisme sont regroupés généralement sous la notion d'ordre public.

Plus précis est l'article 9 de la Convention qui énonce limitativement les valeurs fondant les restrictions de la liberté de manifester sa religion comme la sécurité publique, la protection de l'ordre, de la santé ou de la morale publiques ainsi que la protection des droits et libertés d'autrui.

A l'exception de la moralité publique qui n'a jusqu'alors jamais été invoquée pour justifier une ingérence étatique dans la liberté de manifester sa religion119(*), l'énumération de l'article 9 semble correspondre à la notion française et grecque de l'ordre public.

Pour présenter les nombreuses limitations justifiées par le maintien de l'ordre public qui s'imposent à la liberté religieuse dans son expression, on peut distinguer deux formes d'ordre public qui sont fonction de leur contenu. L'ordre public objectif s'impose en raison de la logique même de la liberté et des droits de l'homme. Il renvoie ainsi à tout ce qui est nécessaire à l'existence de la liberté elle-même : le maintien du bon ordre en général, le respect de la liberté d'autrui et le respect de l'Etat nécessaire à l'existence des droits de l'homme. L'ordre public subjectif concerne essentiellement des valeurs autres que les seuls droits de l'homme ou les valeurs de liberté. Il s'agit souvent de valeurs morales variables d'un pays à l'autre et d'une époque à l'autre qui représentent à un moment donné des valeurs que la société se sent en droit d'imposer à tous comme fondamentales.

Concernant le prosélytisme abusif, qui d'après la Cour, serait le fait de proposer des avantages matériels et sociaux, de pratiquer des pressions abusives sur des personnes affaiblies, le fait d'utiliser la violence ou le lavage de cerveau et plus généralement le fait de ne pas respecter la liberté de conscience. Ce type de prosélytisme est prohibé aussi bien en droit français qu'en droit grec, d'ailleurs la loi hellénique n  1363/1938 le pénalise.

Aussi, nous allons nous intéresser, dans un premier temps, aux limites relatives aux exigences de la stabilité de la vie sociale (Section I) et dans un second point, présenter les exigences quant à une harmonie des rapports sociaux (Section II).

Section I- Le prosélytisme ne peut porter atteinte aux exigences de la stabilité de

vie sociale.

Les impératifs garantissant la stabilité sociale correspondent à la conception traditionnelle de l'ordre public en ce qu'ils visent au maintien de l'ordre social d'une part (§ I) et à la protection de la sécurité, de la tranquillité et de la salubrité publiques d'autre part (§ II).

§ I- Le maintien de l'ordre.

Le motif de sécurité, entendu au sens strict, a pu justifier plusieurs atteintes, réelles ou apparentes, à la liberté de manifester sa religion. L'interdiction d'un ouvrage de spiritualité orientale demandé par un prisonnier est suffisamment motivée par le fait qu'un chapitre sur les arts martiaux peut entraîner dans le contexte d'une prison des dangers pour les tiers.120(*). Il en va de même du non-renouvellement du titre de séjour d'un ministre du culte musulman : à supposer même qu'il y ait eu un lien entre ses fonctions religieuse et le refus, les motifs d'ordre public sont suffisants.

Un étudiant peut parfaitement être soumis au respect des règles disciplinaires dans l'université même si celles-ci par leur laïcité contreviennent à certaines pratiques religieuses. La Commission estime que « les universités laïques, lorsqu'elles établissent des règles disciplinaires concernant la tenue vestimentaire des étudiants, peut veiller à ce que certains courants fondamentalistes religieux ne troublent pas l'ordre public dans l'enseignement supérieur »121(*).

La protection de la sécurité publique justifie le retrait de l'autorisation d'exploitation d'une agence de sécurité dès lors que son directeur, par son appartenance à une secte, n'offre plus la garantie d'honorabilité exigée par la loi suisse. La Cour a estimé qu'il n'y avait pas d'atteinte à la liberté religieuse car la décision n'était pas motivée par les objections sur ses convictions religieuses mais bien par les risques encourus pour l'ordre public dans une profession particulière. Au demeurant, comme la Cour le fait souvent remarquer, le requérant n'a pas été obligé d'abandonner ses convictions ou sa pratique dans la secte.

Pour la France, le prosélytisme religieux ne peut troubler ni la sûreté intérieure ni la sûreté extérieure de l'Etat. Cette interdiction est pénalement sanctionnée par les titres I et II du Code pénal relatifs aux atteintes aux intérêts fondamentaux de la Nation et au terrorisme.

§ II-- L'hygiène et la santé publique.

L'hygiène publique est caractérisée par l'absence de maladies ou de menace de maladies. Elément de l'ordre public, elle s'impose, comme la sécurité et la tranquillité au fait religieux.

C'est la nécessité de protéger l'intérêt général contre « des abatages sauvages pratiqués dans des conditions d'hygiène douteuse » qui justifie l'obligation de le faire dans les abattoirs contrôlés par l'autorité publique et induit par voie de conséquence la mise en place d'un mécanisme d'agrément.122(*). Les restrictions qui pèsent sur l'association requérante sont justifiées par la protection de la santé et de l'ordre public123(*). Mais fallait-il pour autant réserver l'agrément aux sacrificateurs désignés par la majorité de la communauté religieuse concernée ? La limitation du pluralisme en cette matière peut se justifier par des motifs techniques d'hygiène publique. Encore faut-il que le juge ne renonce pas de fait par un contrôle trop restreint à vérifier la réalité du motif invoqué par l'administration.

On peut noter que la Commission n'a pas utilisé un motif d'hygiène publique à propos du refus d'autoriser la dispersion des cendres d'un défunt sur sa propriété mais très nombreux autres motifs d'ordre public (repos paisible, respect de l'aménagement urbain...).

Le respect de la santé publique autorise la vaccination obligatoire quelle que soit la religion ou la conviction personnelle des individus. Le souci de la santé de l'enfant est un motif légitime qui permet au tribunal, sans qu'il y ait discrimination, de prendre en compte les convictions religieuses de l'un des parents pour déterminer la garde de l'enfant124(*). Le port obligatoire d'un casque relève de la protection de la santé et permet de passer outre certaines prescriptions religieuses comme le port du turban pour les sikhs125(*).

Notons, que le Comité des droits de l'homme des Nations-Unies a considéré de même que l'obligation de porter un casque de sécurité pouvait être considéré aussi bien comme une restriction justifiée à la liberté de religion que comme une discrimination de fait raisonnable.

Enfin, un sujet qui a fait l'actualité, en effet les organes européens se sont montrés sensibles à la question du refus de la transfusion sanguine par les Témoins de Jéhovah. Sans qu'il y ait eu de décision sur ce sujet, on peut relever que la Cour et la Commission ont pris soin de noter par deux fois le renoncement d'un parent voire d'une association, à exiger ce refus de transfusion.

Le droit grec et le droit français sont convergent, si une personne refuse, fusse t-elle Témoins de Jéhovah, de se faire transfuser alors que sa vie est en danger, dans ce cas le médecin doit passer outre ce refus et accomplir les actes médicaux nécessaires à la survie ou à la guérison de la personne.

Section II- Le prosélytisme doit respecter l'harmonie des rapports sociaux.

Le respect des droits d'autrui est un principe fondamental de limitation de la liberté religieuse et de la même du prosélytisme. Dans l'hypothèse où ce dernier ne respecterai pas cette exigence, on est donc en présence du prosélytisme abusif, celui-ci est prohibé aussi bien en droit franco-grec que par l'article 9-2 de la Convention.

Ainsi, si la liberté de religion doit être considéré comme une liberté fondamentale, la question concrète est de savoir comment peut se faire l'harmonisation avec d'autres libertés concurrente ? La Cour a pu considérer comme légitimes les sanctions prises contre des officiers pour prosélytisme envers des soldats sous leurs ordres parce qu'il s'agissait « de protéger les droits et libertés d'autrui »126(*).

Le principe de respect des droits et libertés d'autrui connaît deux terrains d'élection : le respect des rapports familiaux et des convictions d'autrui, qu'elles soient d'essence religieuse ou non (§ I) et surtout le respect des droits de l'homme ou plus précisément il s'agira de montrer que le prosélytisme dans sa forme la plus radicale porte atteinte aux droits de l'homme (§ II).

§ I- Le respect des droits et libertés d'autrui.

Il s'agit d'examiner le respect des droits et libertés d'autrui dans le cadre des rapports familiaux (A), mais également le respect des convictions d'autrui qu'elles sont religieuse ou pas (B).

A- Le respect des droits et libertés d'autrui dans les rapports familiaux.

A l'intérieur de la famille et en matière de liberté religieuse, les principaux problèmes concrets se situent autour de la question du changement de religion. Comme nous avons pu voir que ce soit la Convention ou le droit français, toute personne est libre de changer de religion. Certes, le droit grec semble le reconnaître en théorie, mais en pratique il ne le rend pas effectif.

En l'espèce, il peut s'agir de celui d'un des parents qui cherche à entraîner ses enfants contre le gré de l'autre parent ou de la volonté de l'enfant qui s'oppose à celle de ses parents.

L'autre source de difficulté provient du conflit éventuel entre le droit de transmettre ses convictions et les autres droits de l'enfant.

Le droit de transmettre ses convictions à ses enfants est fortement garanti à l'article 2 du Protocole n  1 de la Convention européenne sous la forme d'un droit des parents d'assurer l'enseignement des enfants conformément à leurs convictions religieuse et philosophiques.

L'article 18 alinéa 4 du Pacte est encore plus explicite en proclamant la liberté des parents de faire assurer l'éducation morale et religieuse de leurs enfants conformément à leurs propres convictions.

Ce droit n'est pourtant pas absolu. On a déjà vu qu'il pouvait céder devant des objectifs de santé publique par exemple (affaire Kjeldsen). Les droits de l'enfant peuvent aussi entrer en ligne de compte.

Une jurisprudence précise de la Commission et de la Cour européenne a clairement affirmé que l'Etat a le devoir de veiller à ce que les enfants puissent exercer leur droit à l'instruction et que lorsqu'au lieu de le conforter, le droit des parents au respect de leurs convictions religieuses entre en conflit avec le droit de l'enfant à l'instruction, les intérêts de l'enfant priment

Dans l'affaire Zénon Bernard, la Commission avait affirmé que la conviction des parents ne peut aller à l'encontre du droit fondamental de l'enfant à l'instruction127(*).

Ainsi des parents ne peuvent s'opposer, dès lors qu'il n'y a pas d'endoctrinement, à un cours de formation morale et sociale dont on ne peut se dispenser que par une appartenance à une croyance religieuse. Même lorsqu'il n'y a pas de conflit véritable.

L'Etat a le droit de faire prévaloir les intérêts de l'enfant sur les voeux des parents lorsqu'il faut rechercher des solutions concrètes les plus conformes aux intérêts de l'enfant : il est possible de placer un enfant handicapé dans une école qui ne correspond pas aux convictions des parents dès lors que l'éducation de l'enfant y est efficace et qu'elle ne pratique pas l'endoctrinement128(*).

La Commission s'est appuyée sur la protection des droits d'autrui pour écarter l'argument d'un père naturel invoquant ses convictions religieuses contre l'avortement de la mère de l'enfant.

Elle considère qu'il faut en cette matière tenir des droits de la mère puisque c'est elle qui supporte la grossesse. Il n'y a pas eu d'ingérence dans les droits du père parce que ce qui a été fait était nécessaire à la protection des droits d'autrui.

Concernant le droit français, le droit des mineurs fait l'objet d'un chapitre particulier au sein du livre II du Code pénal en raison de la spécificité du régime des mineurs qui doivent être protégés non seulement dans leur vie, dans leur intégrité physique et psychique, mais également dans leur santé, sécurité et éducation. La liberté de manifester sa religion et plus précisément la transmission de ces croyances religieuses à l'enfant est très contrôlée.

La protection des mineurs est également assurée par le droit civil, le plus souvent appliqué pour protéger les enfants des dangers constitués par les pratiques religieuses de leurs parents. C'est d'ailleurs cette matière qui a donné une illustration récente de la limite de la liberté de transmettre sa religion ou sa conviction religieuse résultant de la sauvegarde des intérêts des mineurs.

La première chambre civile de la Cour de cassation a en effet rejeté le pourvoi contre un arrêt qui avait interdit à une mère de mettre ses enfants en contact avec des membres du mouvement raëlien auquel elle appartenait129(*). La Cour a donc approuvé les juges d'appel en relevant que la liberté de manifester sa religion, pouvait aux termes de l'article 9 de la Convention européenne des droits de l'homme, être l'objet de limitations dès lors que celles-ci sont « prévues par la loi et nécessaires dans une société démocratique à la poursuite des buts légitimes énoncés par cet article ».

Constatant que l'arrêt attaqué n'avait pas porté une atteinte directe à la liberté de pratiquer sa religion, mais s'était borné à restreindre son exerce dans le seul intérêt des enfants, la première chambre civile a rejeté le pourvoi dont elle était saisie. Elle a ainsi admis la conventionalité de la limitation contestée en affirmant non seulement que celle-ci était fondée sur l'intérêt des enfants mais qu'elle répondait aux exigences de prévision et de nécessité posées dans l'article 9 alinéa 2 de la Convention.

La Cour de cassation a donc approuvé la limite apportée à la liberté de la mère de manifester sa religion par la Cour d'appel tant dans son principe que de ses conditions. Car, si la faculté de restreindre cette liberté est admise sur le fondement de la protection des droits d'autrui, cette limitation doit également obéir à certaines conditions dans sa mise en oeuvre.

Le droit grec fait également prévaloir les intérêts de l'enfant sur celui des parents en matière de liberté religieuse.

La jurisprudence et la doctrine sont unanime pour dire, que si l'exercice de la liberté religieuse des parents nuit à l'enfant ou peut mettre en danger l'équilibre psychique ou physique de l'enfant, l'Eta doit intervenir pour limiter la liberté religieuse des parents et de ce fait préserver l'enfant de toute nuisance.

Par contre, un problème plus délicat peut se rencontrer, c'est l'hypothèse où il y aurait un conflit entre les parents concernant la religion a inculqué à l'enfant. Imaginons que le père est orthodoxe et la mère Témoins de Jéhovah, il me semble d'après la jurisprudence des tribunaux grecs en la matière, que le père pourrait imposer sa religion à l'enfant au détriment de la religion de la mère.

B- Le respect des convictions d'autrui.

Le respect du pluralisme dont la Cour a proclamé le caractère fondamental pour une société démocratique, vaut tout particulièrement en matière religieuse. Il vrai que le prosélytisme permet ce pluralisme religieux mais il ne doit pas aussi déboucher sur une intolérance à l'égard des autres religions ou courants religieux.

Ce respect prend une double forme qui peut conduire à des conflits en droits réciproques. Il désigne à la fois le droit de se voir respecter dans ses convictions mais aussi celui de respecter la conviction des autres. Ceci implique, entre autres conséquences, que tous ont un égal droit d'exprimer leurs convictions et de les manifester. De telles manifestations ou expressions peuvent être perçues comme un manque de respect par d'autres. Un des moyens de résoudre le problème pourrait être de neutraliser tout l'espace public et de le vider de ce type de manifestation. C'est ce que semble reconnaître la Commission à l'égard de la laïcité turque. La réglementation dans une université laïque peut « soumettre la liberté des étudiants de manifester leur religion à des limitations de lieu et de forme destinées à assurer la mixité des étudiants de croyance diverses ». Il s'agit en particulier de protéger la minorité non-croyante contre les pressions que la majorité religieuse du pays peut exercer sue elle. 130(*). Il est vrai que la Commission envisage implicitement l'existence parallèle d'université religieuse et que la liberté religieuse est suffisamment assurée par la possibilité de ce choix. Dans l'arrêt Dahlab131(*), la Cour a eu à trancher pour la première fois le problème du port de signes extérieurs d'appartenance religieuse dans le cadre de l'enseignement laïc. Elle a clairement consacré pour l'enseignement l'obligation de neutralité qui résulte du respect de la conscience d'autrui, notamment s'agissant de jeunes enfants « plus facilement influençable que d'autres élèves se trouvant dans un âge plus avancé ». La position de la Cour est assez pragmatique dans la mesure où elle rapporte l'obligation de neutralité aux conditions concrètes du respect de la conscience d'autrui qui, à l'évidence, varie selon de nombreux paramètres. Il vrai qu'elle introduit une considération supplémentaire de caractère idéologique qui ne paraît pas aller dans le sens du plus grand pluralisme puisqu'il lui paraît « difficile de concilier le port du foulard islamique avec le message de tolérance, de respect d'autrui et surtout d'égalité et de non discrimination que dans une démocratie tout enseignant doit transmettre ». La Cour semble donc admettre qu'on exige un conformisme idéologique des enseignants à l'égard des principes de la démocratie qui ne serait pas exigible des autres citoyens.

Quant au prosélytisme, c'est la question de la contradiction entre la liberté d'expression ou de manifester sa liberté religieuse par la parole ou l'acte et l'obligation de respecter les obligations d'autrui. Il est clair qu'à partir du moment où le prosélytisme porte atteinte aux droits et libertés d'autrui, celui-ci doit être interdit.

Dans ce dernier cas, la Grèce a prévu une loi incriminant ces agissements et en France c'est les délits comme la diffamation ou l'interdiction de la discrimination... Il faut rappeler que le prosélytisme est une notion qui concerne essentiellement la religion et qui ne s'applique pas en matière politique, philosophique. Elle exprime une certaine peur, soit de la religion, soit de la propagande religieuse, comme si celle-ci pouvait déclencher des réactions plus grandes ou plus graves que n'importe quelle autre forme de propagande, politique, philosophique... Avec l'affaire Kokkinakis la Cour a eu l'occasion d'aborder ce sujet d'une façon trop prudente et conformiste par rapport à la loi grecque. La Cour a accepté sans problème la possibilité de réprimer le prosélytisme en se fondant sur la protection des droits et libertés d'autrui, mais dans ce cas on est en présence d'un prosélytisme abusif (§ 44 de l'arrêt). On ne saurait oublier que, dans le contexte grec, la lutte contre le prosélytisme revient à protéger la religion dominante.

Dans les deux affaires Kokkinakis et Larissis, la Grèce fut condamnée parce que les tribunaux n'avaient pas motivés l'existence du prosélytisme autrement que par une référence abstraite à la loi.

Comme le fait remarquer F. Rigaux, cette attitude des tribunaux grecs revenaient à sanctionner un véritable délit d'opinion incompatible avec la Convention. Cette acceptation de la notion très floue difficile qui la condamne si elle veut rester fidèle au libéralisme de la Convention à n'entendre que le caractère abusif du prosélytisme que de façon très stricte.

La jurisprudence internationale a surtout eu à examiner des plaintes pour violation du respect dû à une croyance ou une conviction.

De l'existence de ce pluralisme tellement fondamental dans la conception de la démocratie défendue par la Convention européenne, la Cour a déduit une position de principe équilibrée dans sa jurisprudence Otto-Preminger et Wingrove. Elle tient en deux propositions complémentaires : le pluralisme implique inévitablement la critique dans la manière dont elle est effectuée peut appeler une intervention de l'Etat pour protéger la jouissance paisible des droits reconnus par l'article 9. « Ceux qui choisissent d'exercer la liberté de manifester leur religion, qu'ils appartiennent à une majorité ou une minorité religieuse, ne peuvent raisonnablement s'attendre à le faire à l'abri de toute critique. Ils doivent tolérer et accepter le rejet par autrui de doctrines hostiles à leur foi »132(*). Pour l'essentiel ces critiques viendront d'autres groupes au sein de la société. Qu'une association française attaque vivement comme secte dangereuse les Témoins de Jéhovah, ne suffit pas à faire considérer que l'Etat qui a reconnu l'utilité publique de l'association, est responsable. Un Etat peut classer une association comme secte en vue de combattre certaines conduites jugées incompatibles avec la liberté de pensée, de conscience et de religion sans porter atteinte à la liberté religieuse.

Mais, dès l'arrêt Kokkinakis, la Cour a affirmé le devoir pour l'Etat d' « assurer le respect des convictions de chacun » dans une société pluraliste. Elle avait eu auparavant l'occasion de souligner que « la manière dont les croyances et doctrines religieuses font l'objet d'une opposition ou d'une dénégation est une question qui peut engager la responsabilité de l'Etat, notamment celle d'assurer à ceux qui professent ces croyances et doctrines la paisible jouissance du droit garanti par l'article 9 »133(*).

Devant l'existence d'une liberté d'expression particulièrement protégée et l'obligation de faire respecter l'égale protection due à toutes les convictions, la justification et l'ampleur de l'intervention protectrice de l'Etat est commandée dans la jurisprudence européenne par une double distinction. Il ne peut être question de sanctionner des opinions en fonction de leur contenu, seule la manière de les exprimer peut permettre une ingérence étatique. La seconde distinction porte sur le contenu de l'opinion exprimée.

En droit interne français ainsi qu'en droit grec, la manifestation religieuse ne doit pas porter atteinte au repos du sentiment religieux134(*). Il peut donc être saisi par les incriminations d'injure et de diffamation religieuse et de provocation à la discrimination religieuse.

Enfin, la liberté religieuse et ses manifestations doivent respecter la liberté religieuse d'autrui. Le fait religieux ne peut porter atteinte à l'exercice par autrui de sa propre liberté religieuse. Cette liberté est protégée par le droit pénal par le biais des incriminations contenues dans les articles 31 et 32 de la loi de Séparation de 1905 qui la mettent à l'abri des contraintes et des troubles, mais aussi par des incriminations diverses saisissant certains aspects de l'extériorisation du sentiment religieux.

§ II- Le prosélytisme abusif : une atteinte aux droits de l'homme.

Le prosélytisme est abusif car il fait appelle aux techniques d'endoctrinement et de manipulations mentale (A), mais il est source d'incitation à la haine et à la provocation religieuse (B).

A- L'endoctrinement et la manipulation mentale.

La précaution adoptée par la Cour européenne des droits de l'homme dans son arrêt Kokkinakis reflète une prudence satisfaisante.

En effet, la Cour distingue le témoignage chrétien du prosélytisme abusif. Le premier correspond à la mission d'évangélisation qu'un rapport élaboré en 1956, dans le cadre du Conseil oecuménique des Eglises, qualifie de mission essentielle et de la responsabilité de chaque chrétien et de chaque église. Le second correspond à la corruption ou la déformation. Il peut revêtir la forme d'activités offrant des avantages matériels ou sociaux en vue d'obtenir des rattachements à une église ou exerçant une pression abusive sur des personnes en situation de détresse ou de besoin voire impliquer le recours à la violence ou au lavage de cerveau.

Rappelons, que dans son opinion partiellement concordante, le juge européen Pettiti explique que « les seules limites à l'exercice de la liberté de religion sont celles correspondant au respect des droits d'autrui dans la mesure où il y aurait tentative de forcer le consentement de la personne ou d'user de procédés de manipulation ». Il dénonce le lavage de cerveau, les atteintes au droit du travail, à la santé publique, l'incitation à la débauche. Or, il existe bien des mouvements qui, sous couverts de religiosité, utilisent un tel matériel méthodologique pour recruter des adeptes. Leurs sources d'inspiration sont diverse : ésotérisme, para-psychologie, science-fiction, psychologie transpersonnelle mais aussi le christianisme135(*).

Par ailleurs le prosélytisme ne doit pas s'exercer par une contrainte imposée, c'est-à-dire sans le consentement du converti, par des moyens déloyaux en abusant des mineurs, ou frauduleux en tirant bénéfice des circonstances économiques d'autrui. Sont ici visés, notamment les objectifs financiers de certains mouvements qui usent de pressions intellectuelle ou morale sur des individus attirés par l'espérance d'un meilleur équilibre personnel. Cependant, qu'est ce que la contrainte morale extérieure ? Le premier contact de celui qui dialogue avec un représentant religieux, dans la rue ou à son domicile, reste un acte libre, consenti, sans contrainte. Pour être irrésistible, la contrainte abusive doit supprimer dans l'esprit du récepteur les facultés de libre décision. La suggestion collective n'annihile pas cette faculté d'agir. La crainte qui en découle, même accompagné de menaces de sanctions spirituelles, ne fait pas ipso facto disparaître la volonté et la liberté de penser et de réagir.

La conversion forcée et contrainte obéit à des mécanismes sociaux et psychologiques complexes. Elle met en péril l'individu, considéré comme libre et responsable. Ne pourrait-on pas mesurer l'existence de ces abus en se référant aux possibilités de quitter le mouvement136(*).

Enfin, où faut-il placer les méthodes des associations dites anti-sectes qui, sous couvert de vouloir protéger l'individu, victimes de manipulations mentales véhiculées par des mouvements religieux ou pseudo-religieux, recourent à leur tour à la psychothérapie137(*) ? Les techniques qualifiées de deprogramming sont-elles adaptées à ces situations138(*) ? Le risque est grand de voir se constituer en Europe une croisade, entreprise au nom de la sauvegarde des individus, qui bafouerait à son tour les droits élémentaires de la personne humaine.

B- Le prosélytisme abusif support de la haine et de la provocation religieuse.

La montée de l'intégrisme religieux en Europe représente un enjeu culturel et politique.

En France l'affaire dite du foulard islamique a mis en lumière la difficile intégration de la religion musulmane dans ses formes traditionnelles d'expression et de représentation. Les faits étaient d'une extrême simplicité : trois élèves refusèrent en 1989 d'enlever en classe le hijeb (foulard islamique), en vertu des prescriptions coranique (Sourate 33, verset 59). Les jeunes filles seront finalement exclues du collège sur le fondement d'une disposition du règlement intérieur interdisant le port du foulard islamique. Le 2 novembre 1992, le Conseil d'Etat a considéré que cette exclusion était illégale : le port d'un foulard qualifié de signe d'appartenance religieuse par les jeunes élèves n'avait pas le caractère d'un acte de pression, de provocation, de prosélytisme ou de propagande139(*). Cette affaire s'insère dans le cadre de la revendication légitime des mouvements religieux, mais pose la question des modes de régulation de l'expression des croyances religieuses (des vêtements à la parole).

Mais comment le port d'un foulard, d'une étoile à six branches, d'une croix, peuvent-ils être des actes de propagande140(*) ? L'extériorisation de la croyance religieuse peut présenter cependant, et trop souvent, un caractère volontairement militant et revendicatif qui en fait un acte de militantisme et de prosélytisme religieux.

Cependant, à travers cette affaire, on mesure toute le difficulté à qualifier ce qui relève d'un comportement de prosélytisme (nous développerons cette problématique dans le titre II de cette seconde partie).

Cela dit, il y a des blessures faites aux convictions d'autrui qui sont inadmissibles et condamnables ; en particulier, si elles reposent sur une contrainte incontournable, positive (obligation juridique ou politique) ou négative (interdiction). C'est le cas lorsque la violence de l'Etat, d'un groupe ou d'un individu contraint autrui a des actes qui contredisent ses propres croyances ou, à l'inverse, lui interdit des actes que sa conviction appelle. Voici quelques exemples : contraindre un protestant ou un juif à se convertir au catholicisme romain ou orthodoxe, la fermeture autoritaire de mosquée, d'église, de synagogue ou de temple141(*).

Chapitre II- Les sanctions pénales d'un prosélytisme abusif.

Au préalable, nous devons préciser, que par le terme de fait religieux, on entend tous les actes religieux (parole, rituel ou prédication...), découlant de la liberté de manifester sa religion et par voie de conséquence tout acte de prosélytisme.

Poser les limites d'une liberté implique nécessairement de sanctionner la méconnaissance de ces limites.

Si la seule proclamation du respect nécessaire des exigences de la vie collective permet de circonscrire la liberté religieuse et ses manifestations extérieures, le droit pénal vient punir l'exercice de cette liberté qui violerait les doits et impératifs ainsi proclamés.

La liberté religieuse est pénalement sanctionnée en ce que le fait religieux qui méconnaîtrait les exigences de la vie collective est condamnable.

Celui-ci n'est, en effet, exclusif ni de la responsabilité pénale (Section I), ni de sanction pénale (Section II).

Notons enfin, qu'il existe une parfaite ressemblance entre le droit franco-hellénique en matière de responsabilité pénale, à la seule différence bien sur de l'existence d'une loi spéciale interdisant le prosélytisme en Grèce et les peines pénales qui varient entre les deux pays. Mais les principes de base de la responsabilité restent identiques.

Section I- Le prosélytisme abusif, non exclusif de responsabilité pénale.

La responsabilité pénale est « l'aptitude à répondre de ses fautes pénales »142(*). Elle implique deux opérations successives. La première est le mécanisme d'imputation qui consiste à mettre un acte au compte d'un agent. La seconde réside dans la constatation de la criminalité de l'acte mis au compte de la personne.

Certaines circonstances sont exclusives de la responsabilité pénale en ce qu'elles font obstacle à l'imputation d'un acte à une personne. D'autres circonstances excluent la criminalité d'un acte en rendant « exceptionnellement légal un fait qui, sans elles, eût été constitutif d'une infraction »143(*). Il s'agit de faits justificatifs.

Le fait religieux ne constitue pas, en effet, un obstacle à la responsabilité pénale puisqu'il n'est ni une cause de non-imputabilité, ni un fait justificatif. Le fondement religieux d'un acte ne lui ôte ni son imputabilité (§ I), ni sa criminalité (§ II).

§ I- L'imputabilité du prosélytisme abusif.

Les circonstances exclusives de l'imputabilité recouvrent des hypothèses où la personne est privée des facultés nécessaires à sa responsabilité pénale. Elles résultent donc, soit du défaut de discernement de l'individu qui est « l'aptitude à percevoir exactement le monde qui l'environne et les conséquences de ses actes »144(*), soit du défaut de la liberté de choisir son comportement. Or, le caractère religieux d'un acte ne constitue pas une cause de non-imputabilité en ce que la religion n'est ni privative de lucidité (A), ni privative de liberté (B).

A- La religion, non privative de lucidité.

Deux causes de non-imputabilité sont fondées sur le défaut de lucidité : la minorité et le trouble psychique ou neuropsychique.

Par ailleurs la religion est, par essence, de nature à modifier la perception du monde qui nous entoure. Selon Monsieur Moulin en effet, « ...les religions, fournissent une explication globale du monde, prétendent généralement exercer une emprise totale sur leurs adeptes, en modelant leur pensée, mais aussi en guidant leur comportement sociaux »145(*). Ainsi, l'adhésion à une doctrine religieuse fondée sur des préceptes divins auxquels est attachée une autorité suprême influe indubitablement sur l'entendement de chacun.

Néanmoins, ce façonnement, propre à la religion, ne peut que modifier le discernement, sans pour autant l'abolir complètement. Or, aux termes de l'article 122-1 du Code pénal, le trouble psychique ou neuropsychique ne supprime la responsabilité pénale autant qu'il abolisse pleinement le discernement. L'alinéa 2 de ce même article envisage cependant l'hypothèse d'une altération du discernement en précisant que cette altération n'est pas un obstacle à la responsabilité pénale de la personne qu'elle atteint, mais constitue seulement une circonstance dont la juridiction tiendra compte lors du prononcé de la peine.

On peut dire en résumé, que la croyance religieuse qui a commandé un acte répréhensible pénalement n'est nullement une cause d'abolition de son discernement.

B- La religion, non privative de liberté.

La religion ne supprime pas la liberté de la personne. En effet, la cause de non imputabilité fondée sur l'absence de liberté est la contrainte, visée par l'article 122-2 du Code pénal. Celui-ci dispose : « N'est pas pénalement responsable la personne qui a agi sous l'emprise d'une force ou d'une contrainte à laquelle elle n'a pu résister ».

La contrainte est définie comme une circonstance caractérisée par l'impuissance ou la détermination de la volonté, soit par la perte totale de la liberté ou l'absence de spontanéité de l'acte146(*). Cette définition amène à se poser la question si la nécessité religieuse qui caractérise le fait religieux peut constituer une forme de contrainte exonératoire de responsabilité pénale. La réponse est négative et cela pour deux raisons : d'une part, même si l'impératif religieux constitue une contrainte morale interne, cela n'entraîne pas l'effet exonératoire de la responsabilité pénale. D'autre part, l'impératif religieux est dénué de toute contrainte morale et de ce fait ; il n'est exempt de la responsabilité pénale

Enfin, on ne peut nier que certaines techniques de persuasion agissent sur le psychisme, demeure le délicat problème de l'administration de la preuve de l'usage de ces procédés et de leur résultat sur la liberté de l'individu qui en a fait l'objet.

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§ II- la criminalité du prosélytisme abusif.

Si la responsabilité pénale exige en premier lieu que l'acte soit imputable à l'individu, elle implique également qu'il constitue une faute pénale. Certaines circonstances sont exclusives de la criminalité d'un acte. Ce sont les faits justificatifs, rendant légal un acte ordinairement punissable147(*).

Le fondement religieux d'un acte de prosélytisme abusif n'est pas constitutifs d'aucun des faits justificatifs énoncés aux articles 122-4 et suivants du Code pénale puisque ni l'ordre (A), ni la nécessité (B) d'origine religieuse ne peuvent justifier une action contraire à la loi pénale.

A- L'ordre religieux, non justificatif148(*).

L'article 122-4 du Code pénal prévoit deux types de faits justificatifs fondés sur l'obéissance à un ordre : l'ordre de la loi et le commandement de l'autorité légitime. Ainsi ni la loi divine, ni le commandement d'une autorité religieuse n'ont d'effet justificatif.

Concernant tout d'abord la loi divine, cette dernière ne constitue pas une loi au sens de l'article 122-4 puisqu'elle n'est pas un texte de droit français.

L'Etat français est un état laïc dans lequel la religion est cantonnée à la sphère privée. Quant à la Grèce, même si elle est un état confessionnel, la loi divine ne saurait être invoquée pour justifier un acte.

Un autre argument a pu être avancé en faveur de la justification du fait religieux, fondé sur la coutume religieuse. Cet argument doit être écarté, car une coutume contra legem c'est-à-dire non conforme au droit positif, ne peut justifier un acte contraire à la loi pénale149(*).

Quant au commandement d'une autorité religieuse, pour que ce motif exonératoire de responsabilité pénale joue, il faudrait que l'autorité religieuse soit investie d'un pouvoir de commandement au nom de la puissance publique. Cependant, une nuance doit être apportée, nous savons que la Grèce se distingue de la France, par le fait notamment que l'Eglise orthodoxe jouit d'un rapport privilégié avec l'Etat hellénique, peut-on dire pour autant que l'Eglise est investie d'un commandement de la puissance publique ?, la réponse semble être négative, mais il serait intéressant de voir quelles seraient la position des tribunaux grecs, dans l'hypothèse où un représentant de l'église orthodoxe commettrait un acte répréhensible du point de vue du droit pénal mais commandé par une autorité religieuse .

Finalement, selon René Garraud, « la subordination spirituelle ne peut avoir aucun effet, dans l'Etat moderne, en dehors du champ de la conscience, sur lequel la loi positive est sans empire »150(*).

B- La nécessité religieuse, exclusive de justification151(*).

Il convient ici de se demander si la nécessité religieuse peut constituer un cas de nécessité propre à justifier un acte ordinairement punissable.

Avant même d'examiner les conditions de la nécessité telle que définie par l'article 122-7 du Code pénal français, il est nécessaire de vérifier si l'action commise sous l'influence d'une nécessité exige que la personne ne soit pas privé de sa liberté, ce qui la distingue de la contrainte, caractérisée par l'abolition totale de la liberté. La nécessité religieuse n'entre pas dans le domaine de la nécessité de l'article 122-7 qui si le fait religieux qu'elle engendre résulte d'un choix librement opéré.

C'est en matière d'objection de conscience que la question de l'état de nécessité tiré du devoir religieux s'est, le plus souvent, posée. Pourtant aussi bien la jurisprudence grecque que française n'a reconnu que la nécessité religieuse caractérise ce fait justificatif.

L'état de nécessité suppose le libre choix de la personne et le caractère nécessaire de son acte. En matière religieuse, la nécessité reviendrait à faire prévaloir les prescriptions religieuses sur l'intérêt protégé par la loi pénale, non seulement pour échapper à la sanction religieuse de la désobéissance à un commandement divin mais également dans le but de rester fidèle à ses convictions religieuse. Peut reconnaître là un état de nécessité152(*) ?

Plus que la jurisprudence, qui ne s'est pas aventuré sur ce terrain, c'est la doctrine qui s'est interrogé à propos de savoir si la nécessité religieuse remplissait les conditions de l'état de nécessité. Elle a unanimement conclut par la négative.

Les conditions de l'état de nécessité posées par l'article 122-7 du Code pénal, confirmant lui-même les solutions prétoriennes antérieures, tiennent à la fois au danger que la personne a voulu éviter et à la réaction suscitée par ce danger.

On peut affirmer que l'acte accompli par la nécessité religieuse ne remplit pas les conditions de l'état de nécessité posées par l'article 122-7 du Code pénal tant quant au danger menaçant le croyant que quant à la mesure exigée entre la réaction suscitée et ce danger.

Ce constat va s'appliquer non seulement pur le cas des objections de conscience mais s'étend également à tous les actes positifs contraires à la loi pénale et commis en conformité avec les commandements religieux.

L'impossibilité de justifier un fait religieux sur le fondement de l'état de nécessité est donc également opposable à tous les agissements délictueux, positifs ou négatifs, commis par certains mouvements religieux au nom de leurs convictions tels que les agressions sexuelles, enlèvement ou atteintes aux mineurs.

En conséquence, si le caractère religieux d'une action n'ôte ni l'aptitude à répondre de ses fautes pénales, ni la criminalité de cette action, il n'est pas non plus exclusif de sanction pénale en ce qu'il ne s'oppose en rien à l'application d'une peine à son auteur153(*).

Section II- Le prosélytisme abusif, non exclusif de sanction pénale.

Le caractère religieux d'un acte ne fait pas obstacle à la sanction pénale en ce qu'il ne s'oppose na à la qualification pénale de l'acte (§ I) ni à la répression de son auteur (§ II).

§ I- La qualification pénale du prosélytisme abusif.

La qualification pénale est « l'opération intellectuelle consistant à déterminer le texte pénal s'appliquant éventuellement à un comportement »154(*). Elle exige de caractériser, dans le comportement examiné, chacun des éléments constitutifs décrits dans le texte d'incrimination.

Deux arguments sont souvent avancés pour combattre la qualification pénale du fait religieux. Ceux-ci reposent d'une part sur la sincérité des croyances et d'autres part le consentement du fidèle, lorsque la victime du comportement punissable est lui-même un adepte de la doctrine religieuse qui est à l'origine de cet acte. La sincérité des croyances s'opposerait à la qualification pénale en ce qu'elle ferait disparaître l'élément moral de l'infraction. Le consentement de la victime ferait également disparaître le caractère délictueux de l'infraction, en supprimant un de ces éléments matériels.

L'examen de ces deux circonstances amène pourtant à constater que ni la sincérité des croyances ni le consentement apparent du croyant ne font obstacle à la qualification pénale du fait religieux.

La sincérité des croyances est souvent invoquée comme un moyen de défense tendant à combattre la qualification pénale du fait religieux en ce qu'elle exclurait une intention coupable. Respectueuse de cette sincérité, la jurisprudence a parfois admis ce moyen de défense, avec nuance cependant. La sincérité des croyances religieuses, exclusive d'intention de nuire, n'est pourtant pas un obstacle général à la qualification pénale d'un fait religieux car la présomption dont elle résulte peut être combattue par la preuve d'une intention de nuire, couvrant ainsi la faculté de qualifier le fait religieux155(*).

Selon cet argument, le fait religieux n'est pas accompli dans le but de nuire à autrui mais dans celui d'obéir à un commandement religieux, exclusif de toute volonté de blesser son prochain. Il ne peut donc être saisi par les incriminations exigeant une volonté tendue vers la réalisation d'un dommage. Néanmoins ; ce moyen de défense est rejeté.

Le droit grec, quant à l'appréciation de ces moyens de défense, ne diffère pas du droit français.

En effet, les juges helléniques ont toujours refusaient les moyens de défense portant sur la sincérité de l'auteur de l'infraction ou alors son intention de ne pas nuire, ceci bien évidemment dans le dessein de faire échec à l'élément moral de l'infraction.

Enfin, n'est pas un obstacle de principe à la répression pénale. Ainsi le prouvent certaines condamnations pénales fondées sur des infractions exigeant un vice de consentement de la victime telles que l'escroquerie156(*)

§ II- La répression pénale du prosélytisme abusif.

La répression est l'application d'une peine à un comportement pénalement qualifié. Elle implique l'existence d'un procès pénal d'une part, et le choix d'une peine d'autre part. Le caractère religieux de l'acte punissable engendre des spécificités dans ces deux aspects de la répression pénale.

Ainsi on peut constater une sorte d'inaction des victimes de faits religieux (A) ce qui n'empêche pas le prononcé de peine pénale (B) contre les auteurs de faits religieux délictueux comme par exemple prosélytisme en Grèce.

A- L'inaction des victimes de faits religieux.

Le nombre de plaintes émanant de victimes de pratiques religieuses punissables est faible. Des raisons psychologiques, financières et juridiques expliquent cette inaction.

S'agissant des raisons psychologiques, le désir d'occulter l'expérience douloureuse des agressions subies ou la priorité donnée à d'autres exutoires tels que la thérapeutique psychiatrique ou la reconstruction d'une vie sociale expliquent largement la faible mobilisation judiciaire des victimes157(*). Par ailleurs, la peur du ridicule ressentie après la prise de conscience de l'endoctrinement religieux, mais aussi la crainte de représailles exercées par le groupement religieux dissuadent parfois les victimes de se constituer partie civile158(*). Enfin l'idée d'une inefficacité de la Justice face aux infractions imputées aux nouveaux mouvements religieux constitue également un facteur de l'inaction des victimes.

Les raisons financières au défaut d'initiative des victimes, voire à leur désistements résident dans les proportions d'indemnisation de l'ancien adepte par le mouvement religieux lui-même, soucieux d'éviter des démêlés judiciaires159(*).

Enfin, une difficulté juridique apparaît, susceptible également d'expliquer le faible nombre de plaintes émanant des victimes. La prise de conscience, par l'adepte, de son endoctrinement religieux et de sa qualité de victime est souvent longue car l'emprise religieuse ne disparaît pas immédiatement dans son esprit. La sortie définitive de l'adepte du groupe religieux n'est pas immédiate. Partant, les plaintes et dénonciations sont souvent déposées tardivement et il est possible que la prescription d'infractions instantanées soit acquise. Les agressions sexuelles pratiquées par certains groupes religieux, peuvent par exemple, ne remplir qu'une fonction d'initiation et ne pas être renouvelées sur les adeptes déjà initiés.

Ainsi, la commission de l'infraction pourra remonter à plusieurs années lorsque l'adepte quittera le mouvement, et être couverte par la prescription.

Une proposition peut être faite, destinée à surmonter cet obstacle juridique à la poursuite des agissements religieux délictueux. Elle tend à prévoir un report du délai de prescription à partir du moment où la personne a été capable d'appréhender la réalité des faits sans manipulation de son discernement. Une tendance actuelle se dessine en faveur de la fixation du point de départ du délai de prescription au moment où, concrètement la victime a été en mesure de déclencher la poursuite du fait répréhensible160(*). Cette tendance pourrait être appliquée en matière d'infractions religieuses, lorsqu'il est établi que la victime ne disposait pas d'un discernement éclairé lui permettant de prendre conscience de l'infraction dont elle était victime. Elle tiendrait à reporter le point de départ du délai de prescription au jour où la victime serait en mesure de prendre connaissance des infractions, c'est-à-dire le jour où la captation du consentement prendrait fin.

Cette proposition n'est pas envisageable pour des raisons probatoires et juridiques. Une autre solution a été proposée pour pallier à l'inaction pénale des victimes de faits religieux punissable. Elle tend à donner aux associations de lutte contre les activités punissables des mouvements religieux l'initiative de la poursuite de ces activités.

Cependant, une limite doit être soulevée, Monsieur Garay appelle également à une grande prudence à l'égard de la stratégie militante des associations dites « anti-sectes » qui, selon lui, « manifeste parfois un sectarisme identique à celui qu'elles prétendent combattre en prenant le risque de susciter un climat de chasse aux sorcières »161(*).

Sans doute conscients du péril pour la liberté de religion que constituerait la privatisation de l'action publique au profit de ces associations, les parlementaires ont subordonné la faculté d'exercer les droits de la partie civile à la reconnaissance d'utilité publique162(*).

B- La peine du fait religieux délictueux.

Si la peine du fait religieux doit être prononcée à l'égard de l'auteur de l'acte punissable en application du principe de la responsabilité du fait personnel, elle pourra également, lorsque le fait religieux aura été commis pour le compte d'un groupement religieux, frapper ce groupement en vertu de la responsabilité pénale des personnes morales.

Lorsque le fait religieux est un fait imputé à une personne isolée, sans que soit relevée de participation collective ou d'instigation émanant d'une autre personne, le fondement religieux du comportement punissable est, de façon exceptionnelle, pris en considération pour le prononcé de la sanction pénale. Si en effet, le mobile religieux n'est pas pris en compte s'agissant de la culpabilité, il peut l'être en ce qui concerne la fixation de la peine.

Le caractère religieux de l'acte punissable peut ainsi donner lieu à une certaine clémence, fondée sur la sincérité des croyances et l'humilité de la justice des hommes devant la croyance religieuse.

Ainsi, en 1953, le tribunal de Dunkerque a déclaré les parents, qui s'étaient abstenus de faire appel à un médecin pour soigner leur enfant gravement malade, coupables d'homicide par imprudence malgré la sincérité de leur croyance. Il a cependant pris en considération cette sincérité pour assortir la peine d'emprisonnement prononcée à leur encontre avec sursis163(*). De même, en matière d'exercice illégal de la médecine, si la sincérité de la croyance et la gratuité de l'intervention d'une guérisseuse ne font pas obstacle à la déclaration de sa culpabilité, elles n'en sont pas moins prises en compte dans le choix de la peine164(*).

Enfin, le fait religieux peut être appréhendé comme l'agissement d'un groupement.

Il ne résulte plus de la seule obéissance d'un fidèle à des préceptes religieux mais d'une volonté collective attachée à un ensemble de personnes. La peine prononcée en raison du fait religieux punissable ne doit alors plus toucher le seul individu qui a commis l'infraction, mais également le groupement qui en a permis ou causé la commission.

La plupart des religions sont organisées sous la forme de personnes morales. Si les religions traditionnelles sont généralement constituées sous des formes spécifiquement religieuse165(*), les nouveaux mouvements religieux prennent le plus souvent la forme d'associations de droit commun régies par la loi du 1er juillet 1901.

Notons pour finir, les personnes morales susceptibles d'être rendues responsables sont toutes les personnes morales, de droit privé ou de droit public. Dès lors, toutes associations abritant un mouvement religieux, de droit commun ou régies par les dispositions de la loi du 9 décembre 1905, peuvent voir leur responsabilité pénale engagée. Pour le droit grec, la situation est identique, tout mouvement religieux coupable de prosélytisme au sen s de la loi hellénique encourt la dissolution de l'association et des peines de prison tres sévère car contrairement à la France, les juges grecs n'ont pas autant de compréhension que les juges français.

Titre II- Les nouveaux défis de l'Europe en matière religieuse.

Comme nous l'avons vu tout au long de notre analyse, le prosélytisme a vraiment un caractère ambivalent qui fait de lui une notion difficile à cerner et à encadrer.

Cependant à travers le prosélytisme, c'est finalement le degré de liberté de manifester sa religion ou sa conviction qui est examiné. On s'aperçoit qu'il existe des différences notables entre la Grèce et la France. Néanmoins lorsque le fait religieux porte atteinte par exemple à la liberté d'autrui, le droit franco-hellénique se rejoint pour réprimer ces agissements.

Actuellement le religieux occupe une place de plus en plus importante dans nos sociétés, mais malheureusement c'est plutôt le côté néfaste et problématique de la religion qui se développe.

L'espace européen est incontestablement une zone de liberté ou toute religion peut s'épanouir en toute quiétude, exception faite de la Grèce où certains cultes sont peu appréciés par les autorités politiques et religieuses (l'exemple des Témoins de Jéhovah ou alors les Pentecôtistes).Seulement, la France par exemple se trouve confronter à des manifestations religieuses qui menacent le régime laïque, la Grèce quant elle ne rencontre pas trop cette difficulté (Chapitre I), mais plus grave encore c'est le développement des sectes qui au nom de la liberté religieuse s'adonnent à des pratiques qui dans certains cas sont criminelles (Chapitre II).

Face à cela, il faut impérativement réagir, car outre le fait que ces événements menacent la société, ils portent également atteinte à la liberté religieuse elle-même.

Chapitre I- La problématique de l'expression de la liberté religieuse par le biais de signes religieux

Chapitre II- Les sectes : un phénomène transnational

Chapitre I- La problématique de l'expression de la liberté religieuse par le biais

de signes religieux.

Il s'agit pour l'essentiel de la question du port du voile islamique. En effet ce problème se rencontre essentiellement en France, la Grèce quant à elle, n'a pas rencontré cette revendication du port du voile islamique comme forme de manifestation de la religion

En effet, en Grèce la communauté musulmane se trouve en Thrace, elle est composée pour une grande partie de personnes d'origine turque. Cette population dispose d'écoles aux seins desquelles ils apprennent le turc mais suivent également des cours de théologie (cours relatifs à l'islam). Dans le reste du territoire grec, il est vrai que le problème du port de signe religieux ne se pose pas, d'autant plus qu'en termes de signes religieux, en Grèce contrairement à la France, ils sont partout, dans tout les lieux publics ou privés et la population grecque porte des signes religieux rappelant leur attachement à l'Eglise orthodoxe. En d'autres termes, l'approche hellénique des signes religieux est diamétralement opposée à celle de la France.

Cependant, ces revendication s'intègre dans un courant religieux de type intégriste menaçant de ce fait l'exercice d'une liberté religieuse respectueuse des droits et libertés d'autrui. En réalité, ce nouveau courant use de cette revendication dans un but caché qui est celui de la propagande destinée à infiltrer le système éducatif pour peut être recruter le cas échéant de nouveaux adeptes avec des conceptions dures de l'islam et du rapport avec les autres religions ou convictions.

Aussi, dans un dessein de préserver la laïcité de l'éducation nationale, l'Etat se devait d'interdire le port de signe religieux et plus spécifiquement le foulard islamique (Section I) sans pour autant négliger le contrôle du juge administratif (Section II).

Section I- L'interdiction du port de signes religieux par les élèves.

Le foulard islamique semble véhiculer beaucoup de crainte surtout avec les événements tragiques de ces dernières années. Il est toujours assimilé à l'intégrisme ou au terrorisme, cependant cela est loin de correspondre à la réalité du monde islamique.

Néanmoins, ce tissu posé sur le tête des jeunes musulmanes suscita des réactions multiples et passionnées. De ce fait, il est intéressant d'examiner la notion de signe religieux (§ I), pour constater que ce dernier est dorénavant interdit dans l'enceinte de l'école (§ II).

§ I- La notion de signe religieux.

Aux termes de l'avis du Conseil d'Etat rendu le 27 novembre 1989, la liberté pour les élèves de manifester leurs croyances religieuses au sein des établissements scolaires : « ne saurait permettre aux élèves d'arborer des signes d'appartenance religieuse qui, par leur nature, par les conditions dans lesquelles ils seraient portés individuellement ou collectivement, ou par leur caractère ostentatoire ou revendicatif constitueraient un acte de pression, de provocation, de prosélytisme ou de propagande, porteraient atteinte à la dignité ou à la liberté de l'élève ou d'autres membres de la communauté éducative, compromettraient leur santé ou leur sécurité,perturberaient le déroulement des activités d'enseignement et le rôle éducatif des enseignants, enfin troubleraient l'ordre dans l'établissement ou le fonctionnement normal du service public ».

Les limites posées à la liberté des élèves sont ainsi de deux ordres. Les unes tiennent au comportement général des élèves, les autres au port même des signes religieux166(*). La circulaire Jospin a repris cette distinction, précisant que « les élèves doivent se garder de toute marque ostentatoire, vestimentaire ou autre, tendant à promouvoir une croyance religieuse »

« Le caractère démonstratif des vêtements ou des signes portés peut notamment s'apprécier en fonction de l'attitude et des propos des élèves et des parents. ». Ainsi, le caractère ostentatoire ou démonstratif peut investir prioritairement la tenue vestimentaire (visant ici spécifiquement le foulard islamique) et donc à travers elle, le signe d'appartenance religieuse.

Les premières décisions rendues par le Conseil d'Etat n'ont pas précisé la notion de « signes ostentatoire »167(*). A la rentrée 1994, au plus fort de la polémique entourant les « affaires du foulard islamique », dans un climat entretenant la peur de l'intégrisme, où le foulard était assimilé à « l'uniforme islamique, marque d'un engagement complet dans un courant de pensée militant »168(*) perçu comme « un test sur la capacité pour un courant islamique de se répandre dans un état étranger donné, un moyen d'évaluer la qualité de riposte de l'Etat d'accueil »169(*), le ministre de l'Education nationale a tenté de préciser la notion en prenant une circulaire le 20 septembre 1994 qui, selon certains auteurs, aurait marqué un durcissement de la position administrative 170(*). Cette circulaire comporte une proposition d'article destiné à être inséré dans le règlement intérieur des établissements. Cette proposition est ensuite suivie de l'exposé des motifs du ministre. La modification proposait ainsi d'interdire le port de signes, « si ostentatoires que leur signification est précisément de séparer certains élèves des règles de vie commune de l'école ». Cependant la circulaire recommande de tolérer le port de « signes discrets ». Pour le ministre, si les « signes discrets » manifestant un attachement à des convictions religieuses sont admis, en revanche, sont prohibés les signes ostentatoires.

En associant le caractère ostentatoire au port d'un signe tel que le foulard, extériorisant une croyance religieuse, la circulaire entendait-elle prohiber le port des signes les moins discrets indépendamment du comportement de l'élève ? Indirectement, la circulaire Bayrou 171(*) incitait les établissements à modifier leur règlement intérieur afin de pouvoir exclure les élèves sur la base du seul port ostentatoire du signe religieux172(*) ce qui revenait à interdire aux jeunes filles voilées de fréquenter les établissements scolaires173(*).

Mais encore fallait-il que les chefs d'établissement procèdent à une modification des règlements intérieurs en ce sens. Ainsi, c'est à eux que revenait le soin de distinguer le discret de l'ostentatoire.

Le foulard islamique est matériellement plus visible que les autres signes, et c'est pour cette raison que l'on a pu avancer qu'il était le seul signe d'appartenance religieuse à être de facto assimilable à un signe ostentatoire au sens de la circulaire Bayrou.

Dès lors, celle-ci établissait bien une distinction entre le foulard et les autres signes d'appartenance, pouvant le cas échant aboutir à une discrimination entre les religions, en particulier dans les trois départements concordataires de l'Est de la France (où la législation a instauré un régime de coopération entre les religions et l'Etat, et où existe une distinction entre cultes reconnus, tels les cultes catholique, protestant et israélite et non reconnus comme en l'occurrence le culte musulman) 174(*). Comme le rappelait Rivero, « aucune règle vestimentaire ne s'impose aux chrétiens. Croix ou médailles suspendues à une chaîne (...) ne sont qu'un ornement qui n'entend pas traduire une appartenance religieuse. » 175(*)

A partir de quelles dimensions un signe cesse t- il d'être discret pour devenir ostentatoire ? Un foulard déposé sur les cheveux est- il, en lui-même, ostentatoire ?

Autant de questions auxquelles les tribunaux, puis le Conseil d'Etat ont été successivement conduits à répondre. Suite à la modification du règlement intérieur de plusieurs établissements, précisant dorénavant que « le port par les élèves de signes discrets, manifestant leur attachement personnel à des convictions notamment religieuses, est admis dans l'établissement. Mais les signes ostentatoires, qui constituent en eux-mêmes des éléments de prosélytisme ou de discrimination, sont interdits » 176(*)et suite à l'exclusion sur cette base de jeunes filles voilées, plusieurs recours en annulation de décisions prononcées ont été formés.

Par un jugement du 3 mai 1995, le tribunal administratif de Strasbourg177(*) a retenu que les dispositions du règlement intérieur attaquées : « n'ont pas eu pour effet de proscrire le port de signes religieux à raison de leur seul caractère ostentatoire, mais se sont bornées à rappeler les principes applicables en matière de laïcité. Elles n'ont pas édicté d'interdiction générale et absolue du port du foulard islamique au sein de l'établissement, qui demeure licite dès lors qu'il ne s'accompagne pas d'actes prosélytique ou discriminatoire. L'exception tirée de leur illégalité à l'appui du recours dirigé contre une décision d'exclusion définitive de l'une des élèves du lycée n'est donc pas fondée. ». Retenant que la décision d'exclusion définitive de la requérante n'était en réalité fondée que sur le port d'un foulard considéré comme étant par nature un signe religieux ostentatoire sans que soit démontré l'existence d'un acte prosélytique ou de discrimination, le tribunal à annulé la décision d'exclusion.

Comme le soulignait le Commissaire du gouvernement Martinez dans ses conclusions sous un jugement rendu le même jour et se rapportant à des faits identiques178(*), « on ne voit guère que le port du signe puisse par lui-même constituer un acte de prosélytisme. Le prosélytisme implique des propos, une comportement, une attitude. » Le Conseil d'Etat, le 10 juillet 1995, a retenu que le port du foulard islamique n'avait pas obligatoirement un caractère ostentatoire ou prosélyte179(*). Dans ses conclusions, le Commissaire du gouvernement Schwartz avait avancé une question jusqu'alors jamais abordée. Le port collectif pouvait- il revêtir le caractère d'acte ostentatoire ou de provocation ? Une partie de la doctrine avait très tôt remarqué que la distinction par le signe risquait de n'être plus d'ordre « individuel » mais bien d'ordre « collectif »180(*).

Ainsi le Commissaire du gouvernement Schwartz retenait que « le port du foulard par la jeune Saglamer n'avait peut-être pas revêtu un caractère ostentatoire, mais c'est collectivement que le port du foulard s'est posé dans le lycée (à la rentrée 94/95, quarante cinq jeunes filles étaient voilées). Et c'est collectivement que le port du signe a pu revêtir un caractère ostentatoire ». Le Conseil d'Etat n'a jamais suivi cette opinion, réaffirmant depuis que le foulard :« ne saurait être regardé comme un signe présentant par sa nature un caractère ostentatoire ou revendicatif et dont le port constituerait dans tous les cas un acte de pression ou de prosélytisme. » 181(*).

Cependant en 1996 et 1997, le Conseil d'Etat a simultanément pris soin de préciser que si le règlement intérieur des établissements, modifié conformément aux dispositions de la circulaire Bayrou, sanctionne le port de signes ostentatoires, il ne constitue pour autant pas une interdiction générale et absolue. Ainsi, si le règlement intérieur : « interdit le port des signes ostentatoires constitutifs d'éléments de prosélytisme ou de discrimination, il n'a ni pour objet ni pour effet d'interdire de manière générale et absolue le port de signes d'appartenance religieuse dans l'établissement ; qu'ainsi, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les décisions attaquées du recteur de l'académie de Lille auraient été prises en application d'un règlement illégal. »182(*)

La jurisprudence administrative considérant traditionnellement les mesures« générales et absolues », comme illégales, qu'adviendrait- il d'une mesure n'interdisant le port de signes d'appartenance religieuse qu'à certaines heures et que dans certains endroits de l'établissement scolaire ?

La nature d'un signe religieux ne peut transformer celui-ci en un « acte de propagande » et puisque son port est compatible avec le principe de laïcité de l'enseignement public, le Conseil d'Etat, a dès lors privilégié l'appréhension de l'attitude des élèves, pouvant le cas échéant concourir à l'ostentation ou au prosélytisme. Le signe n'étant pas par lui-même ostentatoire, on appréhendera le comportement des élèves. C'est ainsi que le port par nature licite du foulard peut occasionnellement s'accompagner de manifestations illicites.

Cependant en 1996 et 1997, le Conseil d'Etat a simultanément pris soin de préciser que si le règlement intérieur des établissements, modifié conformément aux dispositions de la circulaire Bayrou, sanctionne le port de signes ostentatoires, il ne constitue pour autant pas une interdiction générale et absolue. Ainsi, si le règlement intérieur : « interdit le port des signes ostentatoires constitutifs d'éléments de prosélytisme ou de discrimination, il n'a ni pour objet ni pour effet d'interdire de manière générale et absolue le port de signes d'appartenance religieuse dans l'établissement ; qu'ainsi, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les décisions attaquées du recteur de l'académie de Lille auraient été prises en application d'un règlement illégal. »183(*) .

La jurisprudence administrative considérant traditionnellement les mesure « générales et absolues », comme illégales, qu'adviendrait- il d'une mesure n'interdisant le port de signes d'appartenance religieuse qu'à certaines heures et que dans certains endroits de l'établissement scolaire ?

La nature d'un signe religieux ne peut transformer celui-ci en un « acte de propagande » et puisque son port est compatible avec le principe de laïcité de l'enseignement public, le Conseil d'Etat, a dès lors privilégié l'appréhension de l'attitude des élèves, pouvant le cas échéant concourir à l'ostentation ou au prosélytisme. Le signe n'étant pas par lui-même ostentatoire, on appréhendera le comportement des élèves.

C'est ainsi que le port par nature licite du foulard peut occasionnellement s'accompagner de manifestations illicites.

§ II- Interdiction du signe religieux.

Le juge administratif a donc affiné, au cas par cas, les limites contentieuses du port de signes d'appartenance religieuse. Contrairement au port du signe religieux, le comportement de l'élève peut quant à lui être prosélytique.

Partant, le Conseil d'Etat a sanctionné le comportement d'un groupe d'élèves ayant troublé le fonctionnement normal de l'établissement en participant à des mouvements de protestation, soutenus par des personnes extérieurs à l'établissement : « Considérant toutefois qu'il ressort des pièces du dossier, et qu'il n'est au demeurant pas contesté par les requérants, que les dix-sept élèves en cause ont participé,notamment le 3 octobre 1994, à des mouvements de protestation ayant gravement troublé le fonctionnement normal de l'établissement, et ayant au surplus été soutenus par des éléments extérieurs à celui-ci ; que ces élèves ont ainsi excédé les limites du droit d'exprimer et de manifester leurs croyances religieuses à l'intérieur des établissements scolaires ; que la sanction de l'exclusion définitive qui a été infligée à ces dix-sept élèves était légalement justifiée par les faits ainsi relevés à leur encontre ;qu'à supposer que les autres motifs retenus par le recteur soient erronés en droit ou en fait, il résulte de l'instruction que le recteur de l'académie de Lille aurait pris la même décision s'il s'était fondé sur les seuls motifs tirés des perturbations que ces élève savaient apportées au fonctionnement de l'établissement ».

Le Conseil d'Etat a par ailleurs eu l'occasion de confirmer le renvoi définitif de quatre élèves ayant notamment fait signer des pétitions à l'entrée de leur établissement et participé à des mouvements de protestation, tout en reconnaissant que l'une d'entre elles n'avait pas fait oeuvre de pression ou de prosélytisme.

Enfin, la Haute juridiction administrative a sanctionné simultanément le comportement actif et passif d'une élève ayant participé à des mouvements de protestation, mais ayant aussi accumulé les absences injustifiées aux cours de natation

Selon le Conseil d'Etat, les troubles occasionnés par le refus d'ôter le foulard constituant non pas un acte de prosélytisme mais plutôt ce qu'il faudrait désigner comme étant un acte de provocation, étaient aggravés par les manifestations auxquelles l'un des parents des élèves avait participé.

Le Conseil d'Etat n'a pas, semble-t- il, distingué l'instigateur du trouble. A priori, le comportement du père des deux jeunes filles aurait conduit à leur renvoi bien qu'elles n'étaient pas responsables des agissements de celui-ci. Une sanction disciplinaire, telle l'exclusion définitive d'une élève, ne peut être motivée que pour les fautes effectivement commises par cette élève184(*). Pour le Commissaire du gouvernement Aguila185(*) , les parents des jeunes filles avaient « fermement opté pour une position radicale dans une affaire dont la presse locale s'est emparée », ce qui de toute évidence constituait tout à la fois un acte de provocation et de prosélytisme.

Cependant, avant de conclure à la confirmation de la décision de renvoi des deux élèves, le Commissaire du gouvernement souligna que le refus d'ôter leur foulard en cours d'éducation physique faisait courir aux deux élèves un risque pour leur sécurité, et que, dans de telles circonstances, refuser de l'ôter était dors et déjà fautif. Suivant les conclusions du Commissaire du gouvernement Aguila, le Conseil d'Etat a donc précisé que : « le port de ce foulard est incompatible avec le bon déroulement des cours d'éducation physique. »

Les jeunes filles portant le foulard ne pouvant se dispenser de suivre les enseignements obligatoires, le contentieux s'est ainsi très vite recentré autour de l'impératif de sécurité englobant celui tenant à la santé. Cet impératif répond à l'exigence pour le service public d'appréhender les risques et dangers que certains comportements peuvent faire courir aux autres comme à ceux qui les adoptent186(*).

Toutes les disciplines dispensées au sein des établissements scolaires ne sont pas concernées. Ne sont ainsi visés que les cours d'éducation physique, de technologie et de physique chimie (essentiellement durant les enseignements pratiques).

Dans une série d'arrêts rendus le 27 novembre 1996, le Conseil d'Etat a confirmé plusieurs exclusions définitives. C'est ainsi que dans sa décision Wissaadane et autres, le Conseil d'Etat a constaté, selon avis du médecin scolaire, qu'ayant refusé sans motif valable de participer aux cours d'éducation physique, les jeunes élèves avaient manqué à l'obligation d'assiduité :

Section II- Le contrôle juridictionnel.

Les mesures d'ordres intérieurs prise par les chefs d'établissements vont constituer des instruments permettant d'exclure les élèves ne voulant pas se conformer au règlement intérieur de l'établissement scolaire (§ I).

Les décisions d'exclussions définitives prononcées à l'encontre d'élèves voilées constituent des mesures susceptibles de recours pour excès de pouvoir. Les juridictions administratives doivent ainsi se livrer à une appréciation des situations au cas par cas afin d'entériner ou d'annuler la sanction (§ II).

§ I- Les mesures d'ordre intérieur, support de la prohibition.

Les mesures d'ordre intérieur visent toutes les mesures insusceptibles de recours pour excès de pouvoir. Dans un sens plus large, il s'agit des mesures prises au sein du service, par son chef (ou ses délégués), et qui ont pour objet de régir l'ordre interne, l'organisation, le fonctionnement et la discipline du service, en s'adressant aux personnes se trouvant en relation directe avec cet ordre juridique, à savoir ses agents mais aussi les usagers.

Le Conseil d'Etat en donne une définition plus étroite, limitant la notion aux mesures prises au sein du service qui échappent au contrôle juridictionnel et qui quelquefois ne concernent que certains services publics, par exemple pénitentiaire ou de l'enseignement, au sein desquels les exigences d'ordre et de discipline apparaissent plus rigoureuses. Néanmoins, certaines mesures prises en vue de régir l'organisation interne d'un service peuvent faire l'objet d'un recours en annulation alors même qu'elles constituent bien des mesures d'ordre intérieur. Ces mesures ayant une portée immédiate et directe sur les droits de leurs destinataires, devaient pouvoir être attaquées devant le juge de l'excès de pouvoir. Par conséquent, l'irrecevabilité d'un recours dirigé contre une telle mesure ne saurait être exclusivement motivée eu égard à sa nature. Car, c'est bien l'objet et non la nature d'une mesure qui doit effectivement permettre de la désigner comme étant d'ordre intérieur.

Jusqu'à l'arrêt Kherouaa, les mesures prises dans le cadre du service public de l'enseignement et fixant la tenue des élèves, bien que pouvant affecter la liberté d'opinions des intéressés lorsqu'elles interdisent le port d'insignes politiques, étaient insusceptibles de recours. Le juge administratif préférait privilégier de cette façon l'autorité du chef d'établissement plutôt que la liberté des élèves.

En rendant en 1985 sa décision dans l'affaire Rudent, le juge accepta d'examiner le recours dirigé contre une décision d'un chef d'établissement réglementant les conditions dans lesquelles les élèves pourraient organiser des réunions politiques au sein du lycée.

En 1989, le Conseil d'Etat dans sa formation consultative confirma sa position, confiant au juge le contrôle juridictionnel des règlements intérieurs des établissements scolaires :« Il appartient aux autorités détentrices du pouvoir disciplinaire d'apprécier, sous le contrôle du juge administratif, si le port par un élève, à l'intérieur d'un établissement scolaire public ou dans tout autre lieu ou s'exerce l'enseignement, d'un signe d'appartenance religieuse qui méconnaîtrait l'une des conditions énoncées au 1 du présent avis ou la réglementation intérieure de l'établissement, constitue une faute de nature à justifier la mise en oeuvre de la procédure disciplinaire et l'application, après respect des garanties instituées par cette procédure et des droits de la défense,de l'une des sanctions prévues par les textes applicables, au nombre desquelles peut figurer l'exclusion de l'établissement. »

Mais toutes les mesures d'ordre intérieur ne font pas grief. Il est facile d'imaginer qu'une simple retenue, puisse faire l'objet d'un recours juridictionnel. Cependant, le Conseil d'Etat a pu estimer qu'une exclusion temporaire, pouvait être contestée devant unejuridiction1. Ce faisant, la sanction de l'exclusion définitive d'un établissement scolaire constituait bien un acte faisant grief.

Une seconde difficulté est apparue en 1994. La circulaire Bayrou du 20 septembre 1994137 ajoutait-elle quelque chose vis à vis de la circulaire Jospin de 1989 au point de faire grief et de rendre recevable toute action tendant à son annulation ? Le 10 juillet 1995, le Conseil d'Etat s'est prononcé sur ce point en deux temps, par deux arrêts.

Saisi d'une part d'un recours intenté par une association138 réclamant l'annulation de la circulaire Bayrou, le Conseil rappelle que :« par sa circulaire du 20 septembre 1994 le ministre de l'Education nationale s'est borné, après avoir donné son interprétation du principe de laïcité, à demander aux chefs d'établissements destinataires de ladite circulaire de proposer aux conseils d'administration de leurs établissements une modification des règlements intérieurs conforme à cette interprétation ; qu'une telle instruction ne contient, par elle-même,aucune disposition directement opposable aux administrés susceptible d'être discutée par la voie du recours pour excès de pouvoir, que les conclusions de la requête sont dès lors irrecevables ; »

Pour le Conseil d'Etat suivant les conclusions de son Commissaire du gouvernement et niant tout ajout, la circulaire n'était donc qu'une instruction. Pour le Commissaire du gouvernement Schwartz, en demandant que soient explicitement interdits les signes ostentatoires, le ministre de l'Education nationale se serait borné à reprendre la teneur de l'avis du 27 novembre 1989, qui effectivement faisait allusion aux « signes d'appartenance religieuse qui (...) par leur caractère ostentatoire, constitueraient un acte de pression, de provocation, de prosélytisme ou de Propagande (...) »187(*).

Cependant et d'autre part, toujours le même jour, dans une seconde espèce, le Conseil d'Etat a rejeté les conclusions du ministre de l'Education nationale tendant à ce que soit ordonné le sursis à exécution d'un jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 3 mai1995 ayant quelques mois auparavant sanctionné le renvoi d'une élève dont le foulard islamique avait été considéré par nature comme un signe religieux ostentatoire.

Le Conseil d'Etat a, implicitement en 1995 mais explicitement à partir de cette date, retenu que le foulard islamique ne pouvait être assimilé à un signe ostentatoire et être interdit pour ce seul motif. Il démontrait ainsi que la circula ire Bayrou n'ajoutait rien par rapport au contenu de la circulaire Jospin, sauf pour le ministre à donner une interprétation personnelle du principe de laïcité.

Ainsi, le contrôle exercé sur la mesure a conduit le juge à apprécier, au cas par cas, le bien fondé d'un acte en mettant en balance la valeur de la liberté en cause et la légitimité des motifs fondant la restriction.

§ II- L'appréciation des situations au cas par cas et ses limites.

En rendant son avis le 27 novembre 1989, le Conseil d'Etat préconisait une étude « au cas par cas ». Cette démarche individualiste demeure notamment justifiée à la fois par le pluralisme religieux et surtout par l'individualisation de la pratique religieuse188(*).

Afin de garantir l'intégrité du droit au respect des croyances, le juge doit aussi demeurer attentif à toutes les circonstances entourant l'affaire, aussi bien à l'événement qui a déclenché des incidents qu'à leur ampleur et à l'attitude des familles concernées 189(*).

Pour Claude Durand-Prinborgne, le raisonnement du juge s'articulerait en deux temps, deux « constats »190(*). Le juge vérifierait tout d'abord « l'existence d'effets condamnables ».

Ensuite, les confirmations de décisions d'exclusion seraient « toutes intervenues au sujet d'affaires dans lesquelles la motivation était précise, explicite et crédible et à l'inverse les rejets d'appels contre des jugements annulant des sanctions concerneraient des affaires pour lesquelles les motifs des décisions étaient imprécis, mal formulés, douteux. »191(*)

Plus précisément, le juge détermine tout d'abord après examen des pièces du dossier si les élèves visées par une mesure d'exclusion définitive ont, par leur comportement, perturbé le fonctionnement normal de leur établissement si le cas échéant il y a eu acte pression et/ou de prosélytisme sur d'autres camarades. Dans cette hypothèse, le juge confirme automatiquement la sanction prononcée192(*).

En l'absence de comportement prosélytique de la part de l'élève, le juge administratif examine la disposition litigieuse contenue dans le règlement intérieur afin d'en déceler une interdiction générale et absolue du port de signes d'appartenance religieuse. En présence d'une telle interdiction, il ne peut qu'annuler la sanction193(*).

Enfin, en l'absence à la fois d'un comportement prosélytique de l'élève et d'une interdiction générale d'extérioriser ses convictions religieuses, le juge administratif recherche alors si l'exclusion peut être justifiée au regard d'autres dispositions du règlement intérieur.

Ainsi, les élèves refusant dans la grande majorité des cas d'ôter leur foulard en cours d'éducation physique et de technologie, le juge confirme le renvoi définitif au nom du manquement aux obligations d'assiduité et de sécurité194(*).

Ce raisonnement par cercles concentriques est a priori le gage pour le requérant d'un examen in concreto de sa situation. Corrélativement, il constitue aussi à terme un risque d'enfermement du contentieux dans une logique « systématique ». Les décisions les plus récentes rendues par les juges de première instance, d'appel ou de cassation confirment les exclusions prononcées suite au refus par les jeunes filles d'ôter leur foulard en cours d'éducation physique et de technologie.

La Cour administrative d'appel de Paris a ainsi confirmé en 1998, au regard de manquements répétés à l'obligation d'assiduité ou suite à une absence de participation aux cours de d'éducation physique ainsi qu'aux travaux pratiques de technologie, l'exclusion définitive de deux élèves :

« Considérant, en dernier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que Sabrina et Mériem Moueddene ont refusé, lors des enseignements d'éducation physique et, en cequi concerne Sabrina, lors des travaux pratiques de technologie, d'ôter le foulard qu'elles portaient en signe d'appartenance religieuse, comme le leur demandaient les enseignants, pour des raisons de sécurité ; que Mériem Moueddene n'a plus assisté par la suite au cours d'éducation physique, tandis que sa soeur Sabrina faisait acte de présence à ce cours, ainsi qu'aux travaux pratiques de technologie, sans cependant participer aux activités et aux enseignements dispensés ; que du fait de leurs manquements répétés à l'obligation d'assiduité et de leur absence de participation,dans ces deux matières, aux activités d'enseignement, la sanction de l'exclusion définitive qui leur a été infligée était légalement justifiée par les faits relevés à leu rencontre » 195(*).

En 1999, la Cour administrative d'appel de Lyon, a également confirmé le renvoi de deux élèves pour des motifs similaires, précisant en l'espèce que les cours de sciences présentaient par leur objet même des risques incompatibles avec le port du foulard : « Considérant que par deux décisions du 22 novembre 1995, le recteur de l'académie de Dijon a exclu définitivement du lycée Jules Renard d'Auxerre Mlles Khansa et Ala Mahmoud en retenant notamment comme motif le refus persistant de ces deux élèves de quitter leur foulard pour assister aux cours d'éducation physique, alors qu'elles ne soutenaient pas présenter de contre indications médicales à cet enseignement, et aux cours de sciences présentant pourtant par leur objet même des risques incompatibles avec le port de ce foulard ; qu'un tel comportement était à lui seul de nature à justifier leur exclusion définitive du lycée ; qu'ainsi c'est à tort que pour annuler les décisions susmentionnées, le tribunal administratif a retenu qu'elles étaient entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ; »196(*)

Enfin en 2000, la Cour administrative d'appel de Nantes a une fois encore confirmé l'exclusion de Mlle Nimet Yilmaz, élève portant le foulard en classe de B.E.P. « matériaux souples » (impliquant que la majeure partie de l'enseignement soit dispensé en atelier) pour le seul motif du non respect des règles de sécurité : « Considérant qu'il est constant que la requérante, en gardant sur elle son foulard, a effectivement refusé de se plier aux règles de sécurité et de se conformer aux consignes en ce sens données par l'enseignante du cours pratique de montage fabrication de matériaux souples ; que la sanction d'exclusion définitive dont elle a fait l'objet est, dès lors,justifiée par ces faits relevés à son encontre ; que si le second motif tiré du refus de Mlle Yilmaz d'ôter également ledit foulard en cours d'éducation physique et sportive ne pouvait être retenu dans la mesure où il ne lui avait pas été communiqué en temps utile, il résulte de l'instruction que le recteur de l'académie de Nantes aurait pris la même décision à son égard s'il s'était fondé sur le seul motif légal sus rappelé ; »197(*).

Ainsi, pour leur propre sécurité mais aussi pour celle des autres, les élèves se voient désormais contraintes d'ôter leur voile en cours de technologie, de science et d'éducation physique et sportive. L'argument est aussi incontestable qu'incontournable.

Le juge administratif reconnaît aux chefs d'établissement mais aussi, fait nouveau, au personnel enseignant le droit de réclamer de la part des élèves une tenue correcte, compatible avec le bon déroulement d'un enseignement. Outre la place ainsi laissée à l'arbitraire, le juge soumet la liberté religieuse à l'aléa que constitue la volonté de l'enseignant198(*). L'importance de la liberté religieuse n'est-elle pas susceptible de justifier une dérogation ? Le juge administratif ne semble actuellement pas y être favorable.

Finalement, un projet de loi est en cours actuellement et dont l'objet est d'interdire tous les signes religieux en primaire, au collège et au lycée.

Il est cependant regrettable que ce soit par une loi que doit se régler le problème du foulard islamique. Mais, il faut faire extrêmement attention que ces futures dispositions législatives n'excluent pas de la société les jeunes filles qui portent le voile, car la lutte contre le hijab est destinée à sauvegarder la laïcité de l'éducation nationale mais aussi d'éviter que des groupes se forment et que de ce fait cela se transforme en un communautarisme extrême. Il ne faut jamais perdre de l'esprit que les revendications de libertés et de droits des communautés menacent directement les droits et libertés individuelles.

Chapitre II- Les sectes : un phénomène transnational.

Pour définir le terme de secte, il faut se référer au dictionnaire Robert français qui propose deux définitions suivant lesquelles la secte est soit « une groupe organisé de personnes qui ont une même doctrine au sein d'une religion », soit « un groupe d'inspiration religieuse ou un mystique dont les adeptes vivent en communauté sous l'influence psychologique d'une ou plusieurs personnes ».

Le phénomène des sectes devient très inquiétant, nous avons pu voir par exemple la secte du temple solaire et son mode de fonctionnement. Cette dernière portait atteinte aux droits les plus fondamentaux, notamment la dignité humaine.

Ces nouveaux courants pseudo-religieux se fondent sur la liberté religieuse pour recruter et former leurs adeptes.

La législation grecque et française commence à prendre au sérieux ce nouveau fléau, en la matière il faut réagir rapidement pour neutraliser ces groupes qui ont pour caractéristique essentielle, la destruction psychologique et quelques fois physiques de ces adeptes.

Les sectes constituent un défi pour la France et la Grèce voire pour l'Europe. La problématique des sectes tourne autour de la question de l'adoption d'une législation spécifique à leur égard (Section I). La jurisprudence de la Commission et de la Cour ne permet pas pour l'heure de répondre clairement à la question d'une compatibilité d'une telle législation avec les dispositions de la Convention (Section II).

Section I- Nécessité d'adopter une législation relative aux sectes.

Le débat relatif à la qualification des mouvements dits sectaires trouve son origine dans la volonté de lutter contre les pratiques dangereuses de certains de ces mouvements parsemant l'actualité judiciaire et médiatique française et étrangère (notamment l'arrestation d'un mouvement religieux sectaire qui avait pour adoration Satan ou dialo).

Ainsi, il faut voir tout d'abord le caractère religieux de ces mouvements sectaires (§ I), pour analyser ensuite les mesures juridiques destinées à enrayer ces mouvements (§ II).

§ I- Les mouvements dits sectaires : mouvements religieux.

Dés lors qu'ils font apparaître l'élément objectif d'une communauté d'individus et l'élément subjectif d'une croyance divine, les sectes sont des mouvements religieux et théoriquement doivent bénéficier d'une protection comme tout autre religion.

Cependant, les activités quelques fois criminelles de ces groupes, ont conduit tant les pouvoirs publics que l'opinion à une méfiance. Ainsi, a germé l'idée d'une distinction entre les nouveaux mouvements religieux et les religions traditionnelles. De ce fait, sans remettre expressément en cause le caractère religieux de ces mouvements et leur bénéfice de la liberté religieuse, d'ailleurs de nombreux documents internationaux et nationaux ont tenté de les isoler des religions traditionnelles199(*).

Ces sectes, en général, s'inspirent des religions existantes pour développer leur dogme, leurs règles de fonctionnement et les rituels à accomplir.

Généralement il y a un gourou ou un chef spirituel que les adeptes lui portent une adoration absolue allant même dans certain cas, à se sacrifier pour lui.

Ces mouvements sectaires sont une menace pour la liberté religieuse mais aussi pour les religions traditionnelles. Ces groupes ne peuvent avoir le droit de faire du prosélytisme en vertu du droit de manifester sa religion, dans leur cas, ça ne peut être qu'un prosélytisme abusif dont l'objectif est seulement l'endoctrinement et le lavage de cerveaux des victimes en vue tout simplement de tirer le maximum d'avantages matériels

Bien qu'au départ, l'idée de créer une législation spécifique aux nouveaux mouvements religieux, sans nul doute en raison de la conscience du risque d'une telle réglementation ferait courir à la liberté de conscience et de religion. En effet, la recommandation 1178 adoptée par l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, le 5 février 1992, a ainsi précisé dans son article 5, que « la liberté de conscience et de religion garantie à l'article 9 de la Convention européenne des droits de l'homme rend inopportun le recours à une législations majeure pour les sectes, qui risquerait de porter atteinte à ce droit fondamental et aux religions traditionnelles ».

Néanmoins, les préoccupations gouvernementales à propos des mouvements dits sectaires ont été rapidement relayées par des mesures législatives destinées à la prévention qu'à la répression des activités dangereuses de certains nouveaux mouvements religieux.

§ II- Les mesures législatives luttant contre les sectes.

On peut citer en premier lieu, la loi du 18 décembre 1998 200(*) « tendant à renforcer le contrôle de l'obligation scolaire » fut notamment votée dans l'intention déclarée de soustraire les enfants instruits dans leur famille à une emprise excessive de l'influence « sectaire » de leurs parents. Elle instaure un contrôle de la compatibilité de l'instruction donnée avec l'état de santé de l'enfant et sur le contenu des connaissances requises de l'élève. Conformément au voeu de ne point créer une législation spécifique aux nouveaux mouvements religieux, la loi ne visait pas expressément ceux-ci.

A l'inverse, la loi votée le 15 juin 2000201(*), renforçant la présomption d'innocence et les droits des victimes a introduit, dans son article 105, une disposition procédurale visant exclusivement la poursuite des agissements délictueux des mouvements dits sectaires qu'elle définit comme des mouvements ou organisations ayant pour but ou pour effet de créer ou d'exploiter une dépendance psychologique ou physique. Insérant un nouvel alinéa à l'article 2 du Code de procédure pénale, elle a conféré aux associations de luttes contre ces mouvements les droits reconnus à la partie civile pour exercer l'action civile lorsque l'action publique a été mise en mouvement par le ministère public ou la partie lésée202(*).

Quelques jours plus tard, le 22 juin 2000, l'Assemblée nationale a adopté à l'unanimité une proposition de loi intitulée « Prévention et répression à l'encontre des groupements à caractère sectaire » contenant diverses dispositions relatives aux mouvements dits sectaires, au nombre des quelles l'incrimination nouvelle de la manipulation mentale et l'institution d'une procédure judiciaire de dissolution de ces groupements.

La démarche gouvernementale et parlementaire dénote manifestement une volonté de distinguer les mouvements dits sectaires des religions traditionnelles.

Cependant, cette distinction entre secte et religion traditionnelle n'est pas convaincante.

En effet, l'excentricité de la croyance ne peut justifier une distinction en ce qu'elle constitue un critère exclusivement subjectif qui amènerait nos magistrats à s'ériger en juge de la respectabilité des croyances. Le petit nombre des adeptes et la nouveauté de la doctrine sont par ailleurs évolutifs. Il faudrait alors envisager qu'un mouvement religieux, qualifié en un temps de secte, puisse revendiquer plus tard, le statut de religion traditionnelle.

Une partie de la doctrine souligne à cet égard que la plupart des grandes religions actuelles ont été, à leur origine, des sectes à l'instar de la religion chrétienne, considérée dans les premiers siècles par les Romains comme une secte dangereuse corruptrice et sacrificatrice203(*). On peut résumer cette idée d'après les mots de Monsieur Robert, qu'une religion ne serait « qu'une secte qui a réussi ».

Section II- La position de la Commission et de la Cour face à ces nouveaux

mouvements religieux.

Dans les travaux préparatoires de la Convention le problème des sectes n'avait pas été évoqué. En Europe, il n'était pas encore d'actualité. Bien que l'action de certains de ces nouveaux mouvements s'y manifestât déjà, c'était encore à trop petite échelle pour passer pour autre chose que de la curiosité.

Ainsi, la Cour a toujours traité sur le même pied d'égalité les religions traditionnelles et les nouveaux groupements religieux (§ I). De ce fait se pose la problématique de la conformité à la Convention d'une législation nationale spécifique à ces groupements (§ II).

§ I- Absence de distinction entre religion traditionnelle et nouveaux groupements religieux.

La multiplication de ces groupements, en nombre et en adeptes, suscita dans les années soixante-dix une inquiétude croissante dans certains milieux : la famille d'abord, les parents se montrant soucieux de voir leur descendance suivre leurs propres choix, inquiétude bien naturelle mais débordant du cadre des seules convictions religieuses ; les pouvoirs publics ensuite, confrontés à un phénomène nouveau, porteur d'une délinquance avérée ou potentielle difficile à appréhender. Pourtant, apparemment à contre-courant de ces interrogations, la Commission en ouvrant le droit de saisine sur le fondement de l'article 9 de la Convention aux organes ecclésiaux, donnait aux nouveaux mouvements religieux le moyen de contenir les ingérences étatiques trop fréquentes. Elle se donnait aussi le moyen de contrôler indirectement l'activité de ces organismes. Par ailleurs, le recours individuels des membres de ces groupements ont permis à la Commission et à la Cour d'exprimer également leur point de vue sur l'attitude des Etats membres par rapport aux adeptes eux-mêmes ainsi que, plus largement, à leur groupe d'appartenance.

Depuis 1979, rares sont les églises traditionnelles à avoir utilisé la possibilité de saisir la Commission. Les quelques cas recensés, bien que se rattachant à des courants traditionnels, concernent des églises en situation minoritaire dans le pays auquel elles reprochent une ingérence étatique, tel que par exemple de l'arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme du 9 décembre 1994 où les Saints Monastères agissaient contre la Grèce. En réalité, ce sont les nouveaux groupements religieux qui ont utilisé cette nouvelle possibilité, tel que par exemple la Divine Light Zentrum ou encore l'Associazione Spirituale per l'Unificazione del mundo cristiano.

Quant au vocabulaire employé, la Commission n'utilise jamais le terme secte lorsqu'elle est saisie par un organe ecclésial. Elle parle d'association à but religieux ou philosophique, d'Eglise ou groupement religieux ou tout simplement d'association.

Le druidisme lui-même est considéré a priori comme une religion204(*)

A l'inverse, saisie par un adepte, il lui est arrivé d'employer dans ses décisions le terme secte pour désigner le groupement des Témoins de Jéhovah 205(*) ou l'Eglise du révérend Moon206(*). Au moins dans le premier cas l'emploi du mot secte était lié à l'objet de la requête intentée par un objecteur de conscience suédois qui reprochait à la loi d'exemption totale de service militaire et civil de profiter aux seuls « membres de la secte des témoins de Jéhovah ». D'ailleurs dans sa décision sur l'affaire Hoffmann, la Commission parlera de la « Communauté des Témoins de Jéhovah ».

Enfin dans l'arrêt Kokkinakis elle fait référence au « mouvement des Témoins de Jéhovah » et, reprenant les conclusions des arrêts du Conseil d'Etat grec, qui lui parle de « religion connue »207(*).

La ligne générale de cette jurisprudence est donc que religions traditionnelles et nouveaux groupements religieux soient traités sur un pied d'égalité. Que penser dés lors d'une législation spécifique à ces derniers208(*).

§ II- Conformité des législations nationales spécifiques aux nouveaux groupement au regard de la Commission et de la jurisprudence de la Cour.

La Commission et la cour ne se sont jamais prononcées sur cette question de conformité. Cela dépendrait sans doute du contenu de la loi.

Par ailleurs, cette loi devra répondre à une triple exigence, d'être prévue par la loi de façon suffisamment claire, de poursuivre un but légitime et d'être nécessaire dans une société démocratique. Le premier obstacle est l'adoption d'une définition précise du terme secte ; le but légitime invoqué pourrait être la protection des droits et libertés d'autrui ou la recherche d'une certaine transparence ; mais il y aurait beaucoup de difficulté à démontrer le caractère proportionné de la mesure. De plus la compatibilité avec d'autres dispositions de la Convention comme l'article 11 relatif à la liberté d'association pourrait poser problème.

L'adoption de législations spéciales concernant une activité en particulier, un comportement, se heurte aux mêmes difficultés. Dans ce cas toutefois le problème de la définition du terme secte n'est pas indispensable. La Commission a admis qu'une loi suédoise sur la conscription posant certaines conditions pour ne pas être appelé sous les drapeaux pouvait sans violer l'article 14 ne s'appliquer de fait qu'aux Témoins de Jéhovah du moment qu'elle n'exclut pas une application à d'autres groupements religieux « professant des opinions analogues »209(*).

Tous les groupements religieux et leurs adeptes bénéficient d'une égale garantie au regard de la Convention et jusqu'ici aucun Etat partie ne s'est hasardé a adopter une législation spécifique aux plus nouveaux de ces groupements. Que l'un d'eux bascule dans la malice, l'escroquerie, la fraude ou pire la manipulation mentale, dans ces cas, il doit être lui ou ses dirigeants, mis hors la loi et poursuivi et puni.

Les moyens ne manques au civil comme au pénal. Encore faut-il la volonté de les utiliser, choisir le moment opportun et ne pas se tromper d'objectif.

Le plus souvent « l'impression prédomine que les actes répréhensibles des uns ne sont que prétextes à un déchaînement, non pas à l'égard du seul coupable, mais de tous ceux qui, de prés ou de loin, lui ressemblent seulement par le nombre, l'originalité ou parce que la rumeur publique en a décidé ainsi. Alors que l'attention est focalisée sue quelques grands groupements d'autres, plus insignifiants par le nombre, mais dont la dangerosité est avérée, profitent de cette confusion. Comme l'attestent quelques affaires dramatiques parmi les plus récente, l'autorité publique elle-même se trouve, de ce fait, plongée dans une coupable confusion » 210(*).

A titre d'exemple, on peut citer la dramatique affaire de l'Ordre du Temple Solaire (OTS). Après avoir vainement tenté, en 1980, de prendre le contrôle de l'Ordre Réformé du Temple, Luc Jouret fonde en 1984 ce qui deviendra l'Ordre du Temple Solaire. Lorsque le 5 octobre 1994, sont découverts en Suisse et au Canada 53 adeptes victimes de mort violente, on apprend que le fondateur de l'OTS et le « grand maître » trésorier, tous deux parmi les victimes ; étaient impliqué dans affaires d'escroquerie et de trafic d'armes. A la suite de ce drame la justice suisse avait enquêté et plusieurs adeptes avaient ouvertement regretté devant le juge d'instruction, de ne pas avoir participé au « grand voyage ». L'inaction des autorités leur permettra d'être parmi les participants du second qui conduisit à la découverte, le 23 décembre 1995, de 16 autres victimes dans le Vercors, en France.

En réalité , alors que certains groupements sont la cibles toutes désignés du discours globalisant et simplificateur sur les sectes, certains groupuscules dont la dangerosité est nettement plus importante, bénéficient paradoxalement de la retenue des autorités publiques abusivement justifiée par le respect de la liberté religieuse 211(*).

Conclusion

Un nouveau paysage religieux se dessine qui se caractérise par la juxtaposition, parfois le mélange, de différentes églises et religion. Il se crée ainsi une sorte de marché aux croyances et religions, lié à la mobilité sociale et à la culture qui favorise les échanges et la réciprocité.

La liberté religieuse sur laquelle est fondée le prosélytisme non abusif, ne doit pas devenir un instrument de manipulation et d'endoctrinement.

Par ailleurs, la France, doit mettre en place une définition claire du prosélytisme et encadrer avec plus de rigueur certaines activités religieuses, car tout abus en la matière jetterai le discrédit sur des organisations religieuses ayant des objectifs louables.

En Grèce, deux tendances opposées se dessinent progressivement : celle qui trouve rien à changer à l'état de chose actuel si ce n'est pour le consolider en présence de dangers que l'on voit toujours se dessiner à l'horizon et ceux qui réclament l'abandon de la relation intime Etat-Eglise et l'inauguration d'une liberté religieuse sans obstacle ni réticences. Parmi ceux qui représentent ce second courant, la plupart pensent que la réforme passe par une séparation entre l'Eglise et l'Etat. D'autres pensent que, sans aller jusqu'à la séparation ou sans parler d'elle, on peut très bien débarrasser la Constitution grecque et la législation de tout ce qui est venu s'agglutiner à la notion d'Eglise prépondérante.

On peut regretter le fait que, la Cour européenne des droits de l'homme, a eu plusieurs fois l'occasions (arrêts Kokkinakis et larissis et autres par exemple) de demander à la Grèce l'abrogation pure et simple de sa législation relative au prosélytisme, mais cela ne fut jamais fait.

Par ailleurs, la Grèce tente de protéger sa religion dominante par l'existence de ce délit de prosélytisme, mais elle dispose d'un arsenal pénal et civil suffisamment important pour réprimer des actes considéraient comme étant du prosélytisme dit abusif, ne serait-il pas plus favorable pour un Etat démocratique, telle que la Grèce, de recourir aux dispositions pénales ou civiles au lieu de dresser une loi qui sanctionne simplement l'exercice de la liberté religieuse ?

Les pouvoirs publics aussi bien français que grecs doivent trouver le point d'équilibre afin de préserver la liberté religieuse des individus tout en restant vigilant fasse à de nouveaux courants extrémistes et dont le prosélytisme qui peut se traduire par la parole et des actes constituent le principal moyen pour véhiculer leurs idées dangereuse, d'ailleurs ces dernières sont une menace directe à la démocratie.

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-M.J Gisser-Pierrard, obs. sous Paris, 28 janvier 1957, JCP 1958, II, 10416,

-M.L Rassat, Troubles psychique ou neuropsychique, Jurisclasseur pénal, 1998, n  4.

-M.L Rassat, Trouble psychique ou neuropsychique et contrainte, Jurisclasseur pénal, 1998, n  65.

Jean Rivero, « Laïcité scolaire et signes d'appartenance religieuse ». RFDA janvier-février 1990, pp. 1-7.

-F. Rigaux, l'incrimination de prosélytisme face à la liberté d'expression : observations sous arrêt Kokkinakis c/ Grèce, Revue Trimestrielle des Droits de l'Homme, éd.Bruylant, Bruxelles, 1994, pp. 146-147

-J. Rivero, laïcité scolaire et signes d'appartenance religieuse, R.F.D.A., 1990, p.1.

-R. Renard, note sous Cour d'appel de Lyon, 28 juillet 1997, JCP G 1998, II, 10025.

-P.Tavernier, Larissis et autres c/ Grèce, Cour européenne des droit s de l'homme, arrêt du 24 février 1998, Journal du droit international, éd. Clunet, Paris, n 1du 1 janvier 1999, p. 226.

R. Schwartz, CE, 10 juillet 1995, Association « Un sysiphe » : AJDA 1995, p. 644.

R. Schwartz, CE, 10 juillet 1995, conclusion sous l'arrêt Saglamer, AJDA 1995, p. 647, p. 644.

.

-M. Schockweiller, la notion d'abus de détournement de pouvoir en droit communautaire, AJDA, 1990, p. 437.

-L. Teillot, Religion et droit pénal, Paris II, Novembre 2002.

-A.Vitu, sous Trib. Corr. Bar-le-Duc, R.S.C, 1983, p.76.

III- Ouvrages, articles et jurisprudences étrangers

A- Ouvrages

-A. ËÏÌÂÅÑÄÏÓ: "Ðñïóçëõôéóìüò", ÓÜêêïõëáò 1986, 324 óåë.

-Å. ÂÅÍÉÆÅËÏÓ: " Ïé ó÷óåéò ÊñÜôïõò êáé Åêêëçóßáò", ÓÜêêïõëáò, 1993, 489 óåë.

-Ê. ×ÑÕÓÏÏÍÏÓ : " ÁôïìéêÜ êáé êïéíùíéêÜ äéêáéþìáôá', ÓÜêêïõëáò, 2002, 540 óåë.

-Å. ÂÅÍÉÆÅËÏÓ: " Ôï Óýíôáãìá ôïõ 1975/1986/2002" ÓÜêêïõëáò, 2001, 290 óåë.

B- Articles

-Kelly, Harbison, Belz, The American Constitution, Its origins and development, 7ème éditions, Volume II, Norton & Cie, New-York, 1991, p. 527.

-ÌÁÑÉÍÏÓ: "Ðñïóçëõôéóìüò óõí÷åéá", ÅëëçíéêÞ Äéêáéïóýíç, 1994, óåë.É.

-ÓÔ. ÓÔÁÕÑÏÓ: "Ï ðñïóçëõôéóìüò êáé ôï äéêáßùìá óôç èñçóêåõôéêÞ åëåõèåñßá", ÐïéíéêÜ ×ñïíéêÜ 1993, óåë. 964.

-ÔÓÁÔÓÏÓ: " íùìïäüôçóç ãéá ôçí ííïéá ôïõ ðñïóçëõôéóìïý", Äßêáéï êáé ÐïëéôéêÞ, 1990, ô.15, óåë.203.

-ÁÍÄÑÏÕËÁÊÇÓ: "Ôï áîéüðïéíï ôïõ ðñïóçëõôéóìïý êáé ç áíôéóõíôáãìáôéêüôçôÜ ôïõ", Íïìéêü ÂÞìá 1986, óåë.1031

-ÐÏÕËÇÓ: " Åëåõèåñßá ôçò èñçóêåõôéêÞò óõíåßäçóçò êáé ôïõ ðñïóçëõôéóìïý", ÕðåñÜóðéóç, 1997, óåë.241.

-ÐÁÑÏÕËÁ ÍÁÓÊÏÕ-ÐÅÑÑÁÊÇ" Ç íïìïëïãßá ôïõ Åõñùðáéêïý Äéêáóôçñßïõ ÄéêáéùìÜôùí ôïõ áíèñþðïõ ó÷åôéêÜ ìå ôçí ðñïóôáóßá ôçò èñçóêåõôéêÞò åëåõèåñßáò óôçí ÅëëÜäá" ,ÅÅÅÄ(., RHDE), 2001, óåë. 785.

-MARINOS: " La notion du Prosélytisme religieux selon la Constitution", RHDI 1994, p.372.

-C. Morviducci, « la protezione della liberta religiosa del sistema del consiglio d'europa », in la tutella della liberta di religione, Padova, 1988.

-S.C Neff «An evoling international legal norm of religious freedom: problems and prospects», California Western International Law Journal, 1997, number 3.

-D.J Sullivan, Advancing the freedom of religion or belief through the United Nations

Déclaration on the élimination of religious intolérance and discrimination, 1988.

C- Jurisprudences

-ÁÐ 1304/82: ÐïéíéêÜ ×ñïíéêÜ Ë', óåë.502.

-ÁÐ 728/83: ÐïéíéêÜ ×ñïíéêÜ Ë', óåë. 937.

-ÁÐ 840/86: ÐïéíéêÜ ×ñïíéêÜ ËÓÔ', óåë.767.

-ÁÐ 704/88: ÔïÓ 1989, óåë.307.

-ÁÐ 480/92: ÅëëçíéêÞ Äéêáéïóýíç, 1992, óåë.1573.

Nb : ÁÐ: Áñåéïò ÐÜãïò= Cour de Cassation

IV- Jurisprudences européennes

-Décision de la Commission, 11 octobre 1984, N c/ Suède, D.R. 40, p.203.

-Décision de la Commission, 15 octobre 1981, D.R. 21, p. 96.

-Décision de la Commission, 11 octobre 1984, N c/ Suède, D.R. 40, p.213.

-Décision de la Commission, 12 juillet 1978, X c/ Royaume-Uni, D.R. 14, pp. 236-237.

-Décision de la Commission, 8 septembre 1993, Z. Bernard c/ Luxembourg, , D.R. 75, p 57.

-Décision de la Commission, 5 février 1990, Graeme c/ Royaume-Uni, , D.R. 64, pp. 174-175.

-Décision de la Commission, , 18 mai 1976, X c/ Royaume-Uni, D.R. 5, p.102.

-Décision de la Commission, 8 mars 1976, X c/ Danemark, D.R. 51, p. 160.

-Décision de la Commission, 8 septembre 1988, Jan Ake Karlsson c/ Suède, D.R. 57, p. 178.

-Décision de la Commission, 5 Mars 1976, X c/ Royaume-Uni, D.R. 5, p. 8.

-Décision de la Commission, 15 février 1965, ACEDH, T. VIII ; p. 175.

-Décision de la Commission, 5 Mars 1976, X c/ Royaume-Uni, D.R. 5, p. 8.

-Décision de la Commission, 15 février 1965, ACEDH, T. VIII ; p. 175.

-Décision de la Commission, 19 mars 1981, DLZ, D.R. 25, p. 135 § 6.

-Décision de la Commission, 3 décembre 1982, Lena et Anna-Nina Angelini c/ Suède, D.R. 51, pp. 57-59.

-Décision de la Commission, 18 mai 1976, X c/ Royaume-Uni, D.R. 5, p. 100.

-Décision de la Commission. Européenne, requête n 7805/77, Eglise de scientologie c/ la Suède, 5 mai 1977, Ann. Tome 22, p. 244.

-Décision de la Commission, 12 juillet 1976, X c/ Royaume-Uni, D.R 14, p. 236.

-Décision de la Commission, 14 décembre 1962, X c/ Pays-Bas, ACEDH, Tome 5, p.279.

-Décision de la Commission, 8 septembre 1993, Bernard et autres c/ Luxembourg.

-Décision de la Commission, 30 juin 1993, Berno et Signhild Nilsson c/ Suède, Requête 17678/91.

-Décision de la Commission, 14 juillet 1987, Chappel c/ Royaume-Uni, D.R. 53, p. 248.

-Décision de la Commission, 6 décembre 1983, D c/ France, D.R. 35, p. 201.

-Décision de la Commission, 7 octobre 1987, Requête n  12902/87, Daratsakis c/ Grèce.

-Décision de la Commission, 13 mai 1988, Requête n  13271/87, Polyzos et autres c/ Grèce.

-Cour européennes des droits de l'homme, arrêt du 24 avril 1990, Kruslin et Huving c/ France, Série A n  116, p. 24 §35 et p.56 §34.

-Cour européenne des droits de l'homme, 27 octobre 1978, arrêt Sunday Times,Série A n 30 §49.

-Cour européenne des droits de l'homme, arrêt du 23 juillet 1968, Série A n  6, pp. 30-32.

-Cour européenne des droits de l'homme, arrêt du 18 décembre 1996, Petros Efstration c/ Grèce, Requête 24095/94.

-Cour européenne des droits de l'homme, arrêt du 7 décembre 1976, Kjeldsen, § 53.

-Rapport de la Commission, 25 mai 1995, Titos Manoussakis et autres c/ Grèce, requête

n 18748/91.

-Rapport de la Commission, 14 janvier 1993, Les Saints Monastères c/ Grèce, requête 13092/87 et 13984/88, CEDH, 9 décembre 1994, Série A, n 301-A.

V- Autres documents

-Loi n  2000-516 du 15 juin 2000, renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, JCP G 2000, III, 20301.

-Circulaire du 29 Septembre 1994. DIR/CAB/ N° 1649. Bulletin officiel du ministère de l'Education nationale, p.2528.

-Article 11 de la proposition adoptée le 22 juin 2000, Assemblée nationale, texte adopté n  546.

-Matt, 24 : 14, Les Saintes écritures, Traduction du monde nouveau.

-Les Témoins de Jéhovah : prédicateurs du Royaume de Dieu, précité, p. 555.

-Les Témoins de Jéhovah : prédicateurs du Royaume de Dieu, précité, p. 556.

-La tour de Garde, 1er mars 1965, pp. 159-160.

-Résolution adoptée par le Parlement européen « sur une action commune des Etats membres de la Communauté européenne à la suite de diverses violations de la loi commises par de nouvelles organisations oeuvrant sous le couvert de la liberté religieuse », 22 mai 1984, J.O.C.E. 2 juillet 1984, n  C 172/41.

-Rapport Hunt « sur les sectes et les nouveaux mouvements religieux », 1991, Doc. Ass. Parlementaires du conseil de l'Europe, n  6535

-Avis et rapports sur les activités illégales des sectes de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, Doc. Ass. parlementaire du Conseil de l'Europe, n  8373, 8379, 8383 et la recommandation 1412 votée par l'Assemblée le 22 juin 1999.

* 1 Gérard Gonzalez, la Convention européenne des droits de l'homme et la liberté des religions, Centre d'Etudes et de Recherches Internationale et Communautaires, Université d'Aix-Marseille III, éd. Economica, Paris, 1997, p.5.

* 2 A. Amor, Rapporteur spécial, rapport sur « l'application de la Déclaration sur l'élimination de toutes les formes d'intolérances et de discriminations fondées sur la religion ou la conviction », N.U ; doc. E/CN.4/1997/91, § 85.

* 3 Arrêt de la Cour d'appel de Lyon, 28 juillet 1997, JCP G 1998, II, 10025, note M.R Renard.

* 4 Paroula Peraki, la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme relative a la protection de la liberté religieuse en Grèce, in Revue hellénique de droit européen, octobre-décembre 1999, p.790.

* 5 J.F. Collange, la liberté de croyance dans la pensée religieuse, in Publications de l'institut des droits de l'homme, la protection internationale de la liberté religieuse, éd. Bruylant, Bruxelles, 2002, pp. 1-2.

* 6 Charalambos Papastathis, Etat et Eglise en Grèce, in Etat et Eglises dans l'Union européenne, Nomos Verlagsgesellschaft (Baden-Baden), 1997, p.90.

* 7 Le préambule se réfère expressément à la déclaration des Droits de l'Homme et du citoyen de 1789 et au préambule de la Constitution de 1946 garantissant la liberté de conscience.

L'article 2 prévoit que la république «  ... assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances ».

* 8 J.Robert, la liberté religieuse et le régime des cultes, éd. PUF, Paris, 1997, p 17

* 9 Charalambos Papastathis, Etat et Eglise en Grèce, précité, p. 93.

* 10 Charalambos Papastathis, précité, p. 94.

* 11 . Charalambos Papastathis, précité, p. 93.

* 12 Alban Doudelet, les orthodoxes grecs, éd. Brepols, Paris, 1996, p. 119.

* 13 Alain Garay, liberté religieuse et prosélytisme : l'expérience européenne, Revue trimestrielle des droits de l'homme, numéro 17, 1 janvier 1994, éd. Bruylant, Bruxelles, p.8

* 14 Garay Alain, précité, p. 8.

* 15 S.C Neff «An evoling international legal norm of religious freedom: problems and prospects», California Western International Law Journal, 1997, number 3.

* 16 J-C Ricci, laïcité, vieux débat ou question nouvelle? Les rapports Eglise-Etat en France, RRJ, 1989-3, p.712.

* 17 R.Garraud, Traité théorique et pratique du droit pénal français, Tome IV, 3e édition, Sirey, Paris, 1922, p.673, n 1738.

* 18 Article 260 du Code pénale de 1810 : « Tout particulier qui, par des voies de fait ou des menaces, aura contraint ou empêché une ou plusieurs personnes d'exercer l'un des cultes autorisés, d'assister à l'exercice de ce culte, de célébrer certaines fêtes, d'observer certains de repos et, en conséquence, d'ouvrir ou de fermer leurs ateliers, boutiques, et de faire ou quitter certains travaux, sera puni, pour ce seul fait, d'une amende de 16 à 200 francs, et d'un emprisonnement de six jours à deux mois ».

L'article 261 du Code pénal : « Ceux qui auront empêché, retardé ou interrompu les exercices d'un culte par des troubles ou désordres causés dans le temple ou autre lieu destiné ou servant actuellement à ces exercices, seront punis d'une amende de 16 francs à 300 francs, et d'un emprisonnement de six jours à trois mois ».

* 19 E.Garçon, Droit pénal annoté, Tome I, éd.Sirey, Paris, 1952, p.928.

* 20 A.Vitu, sous Trib. Corr. Bar-le-Duc, R.S.C, 1983, p.76.

* 21 R.Garraud, Traité théorique et pratique du droit pénal français; précité, p.675.

* 22 Poitiers, 20 novembre 1901, D.P. 1902, 2, p.81, note G.Le Poittevin.

* 23 Cass. crim, 22 octobre 1936, Bull. crim. n 97.

* 24 D. Imbert et E. Millard, la liberté de religion en droit international, in Religions, Eglises et droit, Publication de l'université de Saint-Etienne, 1990, p.279.

* 25 Gérard Gonzalez, la Convention européenne des droits de l'homme et la liberté religieuse, précité, p.7.

* 26 C. Morviducci, « la protezione della liberta religiosa del sistema del consiglio d'europa », in la tutella della liberta di religione, Padova, 1988.

* 27 Ne relève pas de ce droit la publicité commerciale qui accompagne la vente considérée comme lucrative d'objets qualifiés de religieux, Commission. Européenne, requête n 7805/77, Eglise de scientologie c/ la Suède, 5 mai 1977, Ann. Tome 22, p. 244.

* 28 F. Rigaux, l'incrimination de prosélytisme face à la liberté d'expression : observations sous arrêt Kokkinakis c/ Grèce, Revue Trimestrielle des Droits de l'Homme, éd. Bruylant, Bruxelles, 1994, pp. 146-147.

* 29P.Tavernier, Larissis et autres c/ Grèce, Cour européenne des droit s de l'homme, arrêt du 24 février 1998, Journal du droit international, éd. Clunet, Paris, n 1du 1 janvier 1999, p.226.

* 30 P Tavernier, larissis et autres c/ Grèce, précité, p. 228.

* 31 P. Tavernier, larissis et autres c/ Grèce, précité, p. 229.

* 32 Gérard Gonzalez, précité, p.66.

* 33 Gérard Gonzalez, précité, p.67.

* 34 Gérard Gonzalez, précité, p.67

* 35 Gérard Gonzalez, précité, p.70.

* 36 Rapport de la Commission, 14 janvier 1993, Les Saints Monastères c/ Grèce, requête 13092/87 et 13984/88, CEDH, 9 décembre 1994, Série A, n 301-A.

* 37 Rapport de la Commission, 14 janvier 1993, précité, § 92.

* 38 Rapport de la Commission, 14 janvier 1993, précité, § 93

* 39 Rapport de la Commission, 14 janvier 1993, précité, § 94

* 40 N. Quoc, P. Daillier et A. Pellet, Droit international Public, 4e éd., LGDJ, Paris, 1994, p. 344.

* 41 P. Guggenheim, Traité de Droit international public, Tome I, Genève, 1953, p. 91 note 2.

* 42 Vedel et P. Delvolvé, Droit administratif, PUF, Paris, 1990, Tome II, p. 324.

* 43 D. Lagasse, l'erreur manifeste d'appréciation en droit administratif, Bruylant, Bruxelles, 1986, pp. 297-315.

* 44 M. Schockweiller, la notion d'abus de détournement de pouvoir en droit communautaire, AJDA, 1990, p. 437.

* 45 F. Sudre, Droit international et européen des droits de l'homme, PUF, Paris, 1995, p. 317.

* 46 Gérard Gonzalez, précité, p.98.

* 47 Cour européennes des droits de l'homme, arrêt du 24 avril 1990, Kruslin et Huving c/ France, Série A n  116, p. 24 §35 et p.56 §34.

* 48 Cour européenne des droits de l'homme, arrêt Sunday Times du 27 octobre 1978, Série A n 30 §49.

* 49 François Rigaux, arrêt Kokkinakis, précité, § 40, p. 141.

* 50 Cour européenne des droits de l'homme, arrêt du 23 juillet 1968, Série A n  6, pp. 30-32.

* 51 Requête 17187/90, décision de la Commission, 8 septembre 1993, Bernard et autres c/ Luxembourg

* 52 François Rigaux, arrêt Kokkinakis, précité, §53, p.143.

* 53 François Rigaux, arrêt Kokkinakis, précité, §53, p.143.

* 54 Requête 6886/75 décision de la Commission, 18 Mai 1976, X c/ Royaume-Uni, D.R 5, p.102.

* 55 Décision de la Commission, 12 juillet 1976, X c/ Royaume-Uni, D.R 14, p. 236, il s'agissait dans cette décision le port du casque.

* 56 Décision de la Commission, 14 décembre 1962, X c/ Pays-Bas, ACEDH, Tome 5, p.279.

* 57 Cour européenne des droits de l'homme, arrêt du 7 décembre 1976, Kjeldsen, § 53.

* 58 Requête 17678/91, décision de la Commission, 30 juin 1993, Berno et Signhild Nilsson c/ Suède.

* 59 Cour européenne des droits de l'homme, arrêt du 18 décembre 1996, Petros Efstration c/ Grèce, Requête 24095/94.

* 60 François Rigaux, Arrêt Kokkinakis, précité, § 31, p. 139.

* 61 Gérard Gonzalez, précité, p. 104.

* 62.Gérard Gonzalez, précité, p. 104.

* 63 Gérard Gonzalez, précité, p. 105.

* 64 Gérard Gonzalez, précité, p. 105.

* 65 Décision du 14 juillet 1987, Chappel c/ Royaume-Uni, D.R. 53, p. 248.

* 66 Décision de la Commission, 6 décembre 1983, D c/ France, D.R. 35, p. 201.

* 67 Requête n  12902/87, décision de la Commission, 7 octobre 1987, Daratsakis c/ Grèce.

* 68 Décision de la Commission, 5 Mars 1976, X c/ Royaume-Uni, D.R. 5, p. 8.

* 69 Décision de la Commission, 15 février 1965, ACEDH, T. VIII ; p. 175.

* 70 Requête n  16278/90, décision de la Commission, 3 Mai 1993, Karaduman c/ Turquie.

* 71 Décision de la Commission, 8 mars 1976, X c/ Danemark, D.R. 51, p. 160.

* 72 Décision de la Commission, 8 septembre 1988, Jan Ake Karlsson c/ Suède, D.R. 57, p. 178.

* 73 Décision de la Commission, 7 octobre 1987, Daratsakis, précité.

* 74 Décision de la Commission, 12 Mars 1981, précitée, D.R. 22, p. 45 § 4.

* 75 Décision de la Commission, 12 mars 1981, précitée, p. 45 § 5.

* 76 Requête n  13271/87, décision de la Commission, 13 mai 1988, Polyzos et autres c/ Grèce.

* 77 Rapport de la Commission, 25 mai 1995, Titos Manoussakis et autres c/ Grèce, requête n 18748/91 et, même affaire, Cour européenne des droits de l'homme, arrêt du 26 septembre 1996.

* 78 François Rigaux, arrêt Kokkinakis, précité, § 38, p. 140.

* 79 § 47 du rapport déposée le 23 juin 1983, la demande d'autorisation était toujours sans réponse lorsque des poursuites ont été engagées contre les requérants en 1986.

En décembre 1984, suite à une nouvelle sollicitation de leur part, le Ministre de l'Education nationale et des Cultes avait répondu que leur demande était toujours en cours d'examen.

* 80Stavros Stefanos, o proslilitsmos kai to dikaioma sti friskevtiki elevferia, Moinika Xpovina, 1993, p.966.

* 81 Stavros Stefanos, précitée, p. 967.

* 82 Gérard Gonzalez, précité, p 115.

* 83 Gérard Gonzalez, précité, p 115..et voir également Stavros Stefanos, précité, p.966.

* 84 La tour de Garde, 1er mars 1965, pp. 159-160.

* 85 J.C Murray et autres, la liberté religieuse, exigence spirituelle et problème politique, p. 51

* 86 Publié en 1993, Watch Tower Bible and Tract Society of Pennsylvania, p. 186.

* 87 Watch Tower Bible and Tract Society of Pennsylvania, précité, p. 478.

* 88 Décision de la Commission, 11 octobre 1984, N c/ Suède, D.R. 40, p. 213.

* 89 Gérard Gonzalez, précité, p 118.

* 90 François Rigaux, précitée, § 29, p. 138.

* 91 François Rigaux, § 31-2, p. 139.

* 92 François Rigaux, § 36, p. 140.

* 93 Matt, 24 : 14, Les Saintes écritures, Traduction du monde nouveau.

* 94 Les Témoins de Jéhovah : prédicateurs du Royaume de Dieu, précité, p. 555.

* 95 Les Témoins de Jéhovah : prédicateurs du Royaume de Dieu, précité, p. 556.

* 96 Kelly, Harbison, Belz, The American Constitution, Its origins and deveopment, 7ème éditions, Volume II, Norton &Cie, New-York, 1991, p. 527.

* 97 Gérard Gonzalez, précité, p. 91.

* 98 D.J Sullivan, Advancing the freedom of religion or belief through the United Nations Déclaration on the élimination of religious intolérance and discrimination, 1988, pp. 487-520.

* 99 Rapport de Mme Odio Benito, Sous-commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités, Doc. E/CN.4/sub.2/1987/26, Nations-Unies, § 21.

* 100 K.J Partish, Les principes de base des droits de l'homme, in Les dimensions internationales des droits de l'homme, K. Vasak éd., UNESCO, Paris, 1978, p. 94.

* 101 Décision de la Commission, 19 mars 1981, DLZ, D.R. 25, p. 135 § 6.

* 102 Requête n  68886/75, décision de la Commission, 18 mai 1976, X c/ Royaume-Uni, D.R. 5, p. 100.

* 103 Arrêt du 23 juin 1993, précité.

* 104 Gérard Gonzalez, précité, p.95.

* 105 J.C Murray, F. Schilleheeckx, A.F Carillo de Albornoz, P.A Liège, la liberté religieuse, éxigence spirituelle et problème politiques, Ed. Du Centurion, 1965, pp. 219-222.

* 106 Arrêt du 25 mai 1993, précité, p. 17 § 31.

* 107 Arrêt du 7 décembre 1970, précité, série A n  23.

* 108 Arrêt du 7 décembre 1970, précité, § 53, p. 26.

* 109 Arrêt du 7 décembre 1970, précité, § 54, p 27.

* 110 Décision de la Commission, 3 décembre 1982, Lena et Anna-Nina Angelini c/ Suède, D.R. 51, pp. 57-59.

* 111 Elias, Maria et Victoria Valsamis c/ Grèce, requête n  2178/93, précité.

* 112 Gérard Gonzalez, précité, p. 97.

* 113 Alain Garay, précité, p.21.

* 114 J. Ellul, Propagandes, éd. Armand Collin, Paris, 1962.

* 115 Alain Garay, précité, p.21.

* 116 L.E Pettiti, E. Decaux et P.H Imbert, la Convention européenne des droits de l'homme, commentaire article par article, éd. Economica, Paris, 1995.

* 117 F. Luchaire, la protection constitutionnelle des droits et libertés, éd. Economica, Paris, 1987, p. 367. Selon lui « garanties et limites sont indissociables car la limitation ne doit pas excéder ce qui est nécessaire à garantir l'exercice d'une liberté ».

* 118 J. Rivero, laïcité scolaire et signes d'appartenance religieuse, R.F.D.A, 1990, p.1.

* 119 Gérard Gonzalez relève fort utilement que la protection de la morale publique n'a jamais été invoquée pour justifier une ingérence étatique dans la liberté de manifester sa religion in La convention européenne des droits de l'homme et la liberté des religions, précité, p. 185.

* 120 Commission, X c/ Royaume-Uni, 18 mai 1976, D.R. 5, p.102.

* 121 Commission, Senay Karaduman, 3 mai 1993, note J.F Flauss, les Petites Affiches, 26 novembre 1993, pp. 11-13.

* 122 Cour européenne des droits de l'homme, Cha'are Schalom V tsedek, 27 juin 2000, obs. J.F Flauss, Revue trimestrielle des droits de l'homme, 2001, pp. 195-197.

* 123 Cha'are Schalom V tsedek, 27 juin 2000, précité, §§ 77et 84.

* 124 CEDH, Hoffmann, 23 juin 1993, précité, § 34.

* 125 Commission,X c/ Royaume-Uni, 12 juillet 1978, D.R. 14, pp. 236-237.

* 126 CEDH, Larissis et autres, 24 février 1998, précité, § 44.

* 127 Commission, Z. Bernard c/ Luxembourg, 8 septembre 1993, D.R. 75, p 57.

* 128 Commission, D. Graeme c/ Royaume-Uni, 5 février 1990, D.R. 64, pp. 174-175.

* 129 Cass. Civ. 1ére , 22 février 2000, D. 2000, I.R, p. 86, p. 273, Obs. A. Lepage, D. 2001, p. 398, note C. Courtin.

* 130 Commission, S. Karaduman, précité, p. 7.

* 131 C.E.D.H, Dahlab c/ Suisse, 15 février 2001, note J.F Flauss, A.J.D.A 2001, pp. 482-484.

* 132 Otto-Preminger, précité, § 47.

* 133 Otto-Preminger, précité, § 47.

* 134 Line Teillot, précité, p. 396.

* 135 Alain Garay, précité, p.25.

* 136 L. Landau, « Comment entre-t-on dans le judaïsme ? Peut-on le quitter ? », Praxis juridique et religion, 2, 1985, pp.16-26.

D.L Thompson, « De chaque côté de la porte : l'entrée et la sortie de l'Eglise Mormon », Praxis juridique et religion, 2, 1985, pp. 7-15.

* 137 Alain Garay, précité, p.27.

* 138 F. Messner, « La répression des déviances religieuses aujourd'hui : le cas de la deprogramming aux U.S.A », Praxis juridique et religion, 2, 1985, pp. 53-73.

* 139 Affaire Kherouaa et autres, D., 1993, p. 108, note G. Koubi.

* 140 Pour G. Koubi, « un signe n'a de sens religieux qu'en tant que celui qui l'expose le lui donne ; et pourtant, parfois la situation est l'inverse, et la qualité religieuse du signe dépend du regard de l'autre », « De la laïcité à la liberté de conscience », Les Petites Affiches, 5 janvier 1990, p.10.

* 141 Alain Garay, précité, p. 28.

* 142 M.L Rassat, J.-CL Pénal Code, Troubles psychique ou neuropsychique, 1998, n  4.

* 143 A. Decocq, Droit pénal Général, éd. Armand Colin, Paris, 1971, p. 300.

* 144 J.H Robert, Droit pénal général, P.U.F, Coll. Thémis, 4éme éd., Paris, 1999, p. 272.

* 145 R. Moulin, Service public et convictions religieuses : une neutralité illusoire ? , Mélanges Goy, Du droit interne au droit administratif : le facteur religieux et l'existence des droits de l'homme, Publications de l'université de Rouen, p. 285.

* 146 M.L Rassat, Trouble psychique ou neuropsychique et contrainte, Jurisclasseur pénal, 1998, n  65.

* 147 J.H Robert, précité, p. 246.

* 148 Line Teillot, précité, p.427.

* 149 Cass. crim, 5 janvier 1973, Bull. crim, n  7, D. 1973, p. 541.

* 150 René Garraud, précité, p. 60.

* 151 Line Teillot, précité, p. 429.

* 152 Line Teillot, précité, p. 431.

* 153 Line Teillot, précité, p. 435.

* 154 Vocabulaire juridique, sous la direction de G. Cornu, Association Henri Capitant, P.U.F., 4émé éd., Paris, qualification pénale.

* 155 Line Teillot, précité, p.437.

* 156 Lyon, 28 juillet 1997, Gaz. Pal. 1997, chr crim, p. 182, Obs. J.P Doucet.

* 157 S. Orsel, Les sectes et le droit pénal, mémoire D.E.A. droit pénal et sciences pénales, Paris II, 1998, p. 50.

* 158 E. Campos, Le phénomène sectaire et le droit pénal, Problèmes actuels de la science criminelle, volume X., Presses Universitaires Aix-Marseille, 1997, p. 135.

* 159 Rapport Sénat n  131, sur la proposition de loi tendant à renforcer le dispositif pénal à l'encontre des associations ou groupements à caractère sectaire qui constituent, par leurs agissements délictueux, un trouble à l'ordre public ou un péril majeur pour la personne humaine ou la sûreté de l'Etat, présenté par Nicolas About, Annexe au procès-verbal de la séance du 14 décembre 1999, p. 11. Voir également Rapport « Les sectes et l'argent », Assemblée nationale, 10 juin 1999, n  1687, p. 210.

* 160 Cette faculté de mettre en mouvement l'action publique est dépendante à la fois de la connaissance du fait délictueux et de la capacité a agir en justice. Le report du point de départ de la prescription a donc été opéré d'une part à propos des infractions dites clandestines afin de permettre la connaissance du caractère délictueux du fait et d'autre part en faveur des victimes mineures afin qu'elles puissent elles-mêmes déclencher les poursuites dès leur accession à la capacité d'ester en justice. Ce report a été opéré tant par la jurisprudence en matière d'infractions clandestines (Voir M. Véron, clandestinité et prescription, Droit pénal, 1998, chron. 16) que par le législateur en ce qui concerne les mineurs (Loi n  89-487 du 10 juillet 1989, loi 98-468 du 17 juin 1989, voir article 7 du Code de procédure pénale).

* 161 Pour une étude de la stratégie militante des associations dites anti-sectes, caractérisée par un monopole du discours médiatique et une large influence sur les pouvoirs publics, Alain Garay, Réflexions sur les lobbies associatifs : le cas des associations dites anti-sectes, Gaz. Pal. 1996, doctr, p. 443.

* 162 Article 11 de la proposition adoptée le 22 juin 2000, Assemblée nationale, texte adopté n  546.

* 163 Trib. corr., Dunkerque, 30 octobre 1953, D. 1954, p. 270, JCP 1954, II, 8095, Obs. Pageaud.

Egalement, Trib. Douala, Penant, 1951, I, p. 60, note H.D Cosnard. Le tribunal de première instance de Douala a également, sur le fondement de la bonne foi, accordé le bénéfice du sursis au complice d'un délit de pratiques de sorcellerie ayant troublé l'ordre public (incrimination particulière au droit du Cameroun) en raison de sa participation de bonne foi à la commission du délit, avec la croyance sincère dans la réalité du pouvoir mystérieux du sorcier.

* 164 Paris, 28 janvier 1957, JCP 1958, II, 10416, Obs. M.J Gisser-Pierrard. La Cour a confirmé la décision de condamnation tout en réduisant cependant la peine.

* 165 La religion catholique est principalement composée d'associations cultuelles diocésaines. Le Consistoire central israélite de France et d'Algérie est également une association régie par la loi de 1905. En revanche, le Fédération protestante de France est une association de droit commun regroupant des associations cultuelles régies par la loi du 9 décembre 1905 mais aussi des mouvements et associations de la loi de 1901.

* 166 Denis Mardesson, note sous CE 2 novembre 1992 Kherouaa. Gaz. Pal., 25 novembre 1993 p. 8.

* 167 CE 2 novembre 1992 M. Kherouaa et Mme Kachour, M. Balo et Mme Kizic N° 130.394 et CE 14 mars 1994.Mlles Neslinur et Zehranur Yilmaz N° 145.656.

* 168 Claude Botems, « A Dieu foulard... islamique ! ». Revue administrative 1993 p. 583-588.

* 169 Claude Botems, « A Dieu foulard... islamique ! ». Revue administrative 1993 p. 583-588

* 170 Yves Madiot, « Le juge et la laïcité ». Pouvoirs n°75 1995 p. 73-84.

* 171 Circulaire du 29 Septembre 1994. DIR/CAB/ N° 1649. Bulletin officiel du ministère de l'Education nationale, p.2528.

* 172 Arnaud de Lajartre, « Le port ostentatoire des signes religieux à l'école ». DA, Février 1996, p. 1-4.

* 173 Berengère Legros, note sous arrêt CE 14 mars 1994 Yilmaz. D. 1995 Somm Com p. 135-136.

* 174 Francis Messner, « Voiles islamiques et droit local de l'éducation ». RDL 1995 n°15.

* 175 Jean Rivero, « Laïcité scolaire et signes d'appartenance religieuse ». RFDA janvier-février 1990, pp. 1-7.

* 176 TA Strasbourg, 3 mai 1995, Saglamer.

* 177 TA Strasbourg, 3 mai 1995, Saglamer.

* 178 Conclusions du Commissaire du gouvernement Martinez, sous TA Strasbourg 3 mai 1995 Aksirin. RDP1995, p. 1349-1369.

* 179 CE, 10 juillet 1995, Saglamer. AJDA 1995, p. 647 concl. R Schwartz, p. 644.

* 180 Geneviève Koubi Note sous arrêt CE 2 novembre 1992 Kherouaa. D 1993 jurisprudence p. 108-111.

* 181 CE, 27 novembre 1996, précité, Mlle Saglamer n° 169522.

* 182 CE 27 novembre 1996, M. et Mme Wissaadane M. et Mme Hossein Chedouane n° 170209 et CE M. et Mme Ait Maskour et autres 15 janvier 1997 n° 172937.

* 183 CE 27 novembre 1996, M. et Mme Wissaadane M. et Mme Hossein Chedouane n° 170209 et CE M. et Mme Ait Maskour et autres 15 janvier 1997 n° 172937.

* 184 Conclusions du Commissaire du gouvernement Bouleau sous arrêt TA Paris 10 juillet 1996 Kherouaa. LPA1997 n°106 p. 12-18.

* 185 AJDA 1995, p. 332-335.

* 186 Gilles J. Guglielmi et Geneviève Koubi : « Le port du foulard et le principe de sécurité », note de

jurisprudence sous arrêt CE 20 octobre 1999 Min. de l'Education national, de la recherche et de la technologie c/Epx Ait Ahmad. JCP G 2000 II 10306 p. 862-865.

* 187 CE, 10 juillet 1995, Association « Un sysiphe » : AJDA 1995, p. 644, concl. R. Schwartz.

* 188 Zarah Anseur « Le couple laïcité-liberté religieuse : de l'union à la rupture ? Réflexions à partir de l'affaire Ait Ahmad ». RTDH 1-2001 p. 77-94.

* 189 Patrick Wachsmann : « Libertés publiques ». Dalloz 3eme édition 2000 p. 490.

* 190 Claude Durand-Prinborgne « Le port des signes extérieurs de convictions religieuses à l'école : une

jurisprudence affirmée..., une jurisprudence contestée ». RFDA 1997 p. 151-172.

* 191 Claude Durand-Prinborgne, précité, p. 151-172.

* 192 CE 2 avril 1997 Epoux Mehila et autres n° 173103

* 193 CE 26 juillet 1996 Université de Lille II, n° 170106.

* 194 CE 20 octobre 1999 M. et Mme Ait Ahmad n° 181486.

* 195 CAA Paris 22 janvier 1998 M. et Mme Moueddene n° 96PA00645.

* 196 CAA Lyon 15 juillet 1999 Mlles Ala et Khansa Mahmoud n° 97LY22089.

* 197 CAA Nantes 27 avril 2000 Mlle Nimet Yilmaz.

* 198 Olivier Carton, « Les limites à la liberté d'expression religieuse : entre fermeté et errements du Conseil d'Etat ». RRJ 2000-4 p. 1561-1575.

* 199 Voir la résolution adoptée par le Parlement européen « sur une action commune des Etats membres de la Communauté européenne à la suite de diverses violations de la loi commises par de nouvelles organisations oeuvrant sous le couvert de la liberté religieuse », 22 mai 1984, J.O.C.E. 2 juillet 1984, n  C 172/41.

Egalement, le rapport Hunt « sur les sectes et les nouveaux mouvements religieux », 1991, Doc. Ass. Parlementaires du conseil de l'Europe, n  6535. Et les avis et rapports sur les activités illégales des sectes de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, Doc. Ass. parlementaire du Conseil de l'Europe, n  8373, 8379, 8383 et la recommandation 1412 votée par l'Assemblée le 22 juin 1999.

Enfin, le rapport parlementaire français, « les sectes en France : expression de la liberté morale ou facteurs de manipulations ? La documentation française, 1985.

* 200 Line Teillot, précité, pp. 34-35.

* 201 Line Teillot, précité, p. 35.

* 202 Loi n  2000-516 du 15 juin 2000, renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, JCP G 2000, III, 20301.

* 203 P. Gast, Les sectes et la démocratie, L.P.A. 1994, n  125, p. 14.

* 204 Décision de la Commission, 14 juillet 1987, précité.

* 205 Décision de la Commission, 11 octobre 1984, N c/ Suède, D.R. 40, p.203.

* 206Décision de la Commission, 15 octobre 1981, D.R. 21, p. 96.

* 207 Arrêt Kokkinakis, précité, §§. 22-32.

* 208 Gérard Gonzalez, précité, p. 79.

* 209 Décision de la Commission, 11 octobre 1984, N c/ Suède, D.R. 40, p.213.

* 210 Gérard Gonzalez, précité, p. 81.

* 211 Gérard Gonzalez, précité, p. 81, voir bas de page.






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