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Retraite et vie associative: Cas de l'association des retraités de Cocody(ARECO)

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par Noel Pacome BROU
Université Cocody-Abidjan - Maitrise 2007
  

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I-2-PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESE DE RECHERCHE

I-2-1-Problématique

A l'origine, la retraite en Afrique en général et en Côte d'Ivoire en particulier fût une institution héritée des puissances coloniales. Celles-ci n'ont fait que transposer ce phénomène qui existait déjà dans les pays occidentaux. L'institution de la retraite découle de l'introduction du travail salarié en Afrique noire à laquelle elle est intimement liée. Cependant, la mise en place de la retraite par l'administration coloniale s'est fait accompagner de la mise en place d'une forme de sécurité sociale à laquelle étaient soumis les fonctionnaires et les travailleurs de l'époque. Cette couverture des retraites ne se limitait qu'à une population minoritaire effectuant un travail rémunéré.

Par ailleurs, la particularité de ce système de retraite nouvellement introduite dans la société africaine inscrit l'africain dans un système de production nouveau qui avait un début et une fin et donc différent de celui qu'il connaissait jusqu'alors. C'est ce qui justifie l'intérêt accordé à la retraite par les autorités publiques africaines dès l'accession à l'indépendance.

Une première expérience a été mise en oeuvre sur la question de la retraite au niveau de l'Afrique de l'ouest. Il s'agit en effet de l'Institut de Prévoyance Sociale de l'Afrique Occidentale (IPRAO) de Dakar en 1958 dès la mise en application du code de travail issu d'une convention intersyndicale datant des années 1952. Ce régime de retraite est cependant limité qu'aux travailleurs issus du secteur privé. Après les indépendances et l'éclatement de l'Afrique Occidentale Française (AOF), bon nombre des Etats membres de l'IPRAO se retirèrent de cette institution pour réorienter leur politique de retraite au plan strictement local.

En Côte d'Ivoire, des mécanismes institutionnels ont été mis en oeuvre dès l'indépendance pour régir la retraite dans une perspective de la réglementation du travail. C'est la loi n° 60-537 du 07 Septembre 1960 portant statut général de la Fonction Publique revue par la loi n°92-570 du 11 Septembre 1992 portant le même statut, qui a été élaborée à cet effet ; elle-même influencée par les textes du Bureau International du Travail. Cette loi relative au travail a été instituée par le Gouvernement en vue de mettre en exécution certaines décisions administratives à savoir: le départ systématique à la retraite après trente (30) ans de services ou cinquante cinq (55) ans d'âge (pour l'ensemble des fonctionnaires et soixante (60) ans pour certains corps de l'Administration Publique ou Parapublique)1(*).

Les prestations découlant du régime des pensions civiles sont régies et organisées par la loi n° 62-405 du 07 Novembre 1962 à laquelle ont été progressivement jointes et au fil des temps d'autres lois spécifiques relatives à la planification de la retraite. De ce fait, deux (2) structures en Côte d'Ivoire sont chargées de la gestion des régimes de retraite. Il s'agit de la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale (CNPS), créée en 1960, ayant la charge des pensionnés issus des entreprises privées du secteur moderne de l'économie et de la Caisse Générale de Retraite des Agents de l'Etat (CGRAE), aujourd'hui société d'Etat, créée en 1962, gérant les pensions des retraités issus de l'Administration Publique.

Le régime de base de retraite de la CNPS tout comme celui de la CGRAE repose sur un système par répartition, c'est une sorte de solidarité intergénérationnelle entre actifs et retraités. C'est la loi de 1962 relative à l'organisation de la pension civile qui rend obligatoire l'affiliation à ce régime de retraite pour tous les travailleurs salariés et pour les employeurs.

En effet, le mécanisme de ce système consiste à allouer aux allocataires une partie des cotisations versées par les cotisants (3,2% part employé et 4,8% part employeur) après déduction des frais de gestion. Par conséquent, les retraites d'une période donnée sont financées par prélèvement sur les revenus d'activité de la même période.

Quant à la CGRAE, c'est aussi un système par répartition régit plus ou moins par les mêmes principes que la CNPS. La solidarité entre retraités et actifs (c'est-à-dire les actifs financent en quelque sorte les pensions des « inactifs ») est accentuée. Ce qui rend obligatoire l'affiliation à ce régime. Et les taux de cotisation oscillent entre 6% pour l'employé et 12% pour l'Etat. Le régime de la CGRAE a été renforcé depuis 1999 par un nouveau régime dit régime complémentaire par capitalisation2(*) qui offre une forme de liberté au travailleur de cotiser en vue d'augmenter son revenu durant la période dite « d'inactivité professionnelle ».

En outre, la question de la retraite et de la vieillesse comme problème social est devenue une préoccupation à l'échelle mondiale. Tous les gouvernants accordent un intérêt particulier au devenir du travailleur une fois qu'il quitte définitivement la vie professionnelle pour la retraite. Bien qu'en Côte d'Ivoire, le paiement de la sécurité sociale représente moins de 1% du Produit Intérieur Brut (PIB)3(*), il est supérieur à la moyenne des pays de l'Afrique Subsaharienne. On note cependant que la couverture des retraites demeure toujours insuffisante et limitée. C'est pourquoi, il est nécessaire d'envisager d'autres perspectives en termes d'actions sociales en faveur des retraités.

Les nouvelles réflexions politiques dans le contexte de la retraite s'orientent vers la promotion de l'idée de bien vieillir à sa retraite. Ceci implique un ajustement du revenu du retraité, l'accès aux ressources sanitaires et une élévation du pouvoir d'achat. Car si l'on s'en tient à la prévoyance sociale telle que définie par le Bureau International du Travail dans sa convention n° 102, doit prendre en compte sept (7) des neuf (9) risques sociaux : soins médicaux, des indemnités de maladie, des prestations d'invalidité en cas de lésion d'origine professionnelle, des allocations familiales, des prestations de maternité. Alors que cela est en réalité loin d'être le cas en Côte d'Ivoire «un pays à l'essai du développement ».

Aussi, l'élaboration de nouveaux produits liés à la retraite tels que l'Assurance-retraite ou le régime complémentaire par capitalisation devrait-elle tenir compte du contexte social global et de cadre institutionnel actuel dans lesquels évoluent les retraités ivoiriens. Cela contribuerait sans doute à mieux prendre en compte leurs aspirations surtout que l'objectif visé par l'institution de ces produits est une élévation du niveau de vie des retraités. Malgré cela, la situation du retraité n'a pas fondamentalement changé.

Nous pouvons dès lors comprendre qu'au regard de tout ce qui précède que les rapports entre l'Etat et retraités restent à revoir d'autant plus que les systèmes de retraite comportent toujours des points de défaillance. Les réformes structurelles et politiques restent toujours limitées eu égard aux attentes des personnes à la retraite et surtout la configuration sociale que ce nouveau statut engage dans le contexte social ivoirien.

Par ailleurs, le constat de ces dernières années est la floraison des associations de retraités sur l'ensemble du territoire ivoirien en général et du district d'Abidjan en particulier. Chaque commune compte presque une association de retraités. On peut citer entre autres l'Union Nationale des Fonctionnaires Retraités de Côte d'Ivoire (UNAFRECI) à Williamsville ; l'Union Nationale des Retraités de Côte d'Ivoire (UNARCI) dans la commune de Yopougon, l'Union des Retraités du Privé de Côte d'Ivoire (UREPCI), la Fédération Nationale des Retraités de Côte d'Ivoire (FENARECI) ; l'Association des Retraités de Cocody (ARECO).

Alors, quels sont les facteurs explicatifs de la ruée des retraités vers les espaces associatifs ?

Dans cette dynamique de la retraite, nous pouvons également faire le constat que la composition de ces groupements de retraités bien que minoritaires parfois, reflète la coprésence de plusieurs générations de retraités dont les centres d'intérêts semblent converger. Car, il n'y a aucune différence en profondeur entre ces associations et les formes traditionnelles d'associations que nous connaissons d'un point de vue structurel et fonctionnel.

Dans une telle perspective, cette dynamique des associations de retraités suscite des interrogations. Car, le retraité ivoirien s'extériorise davantage. On assiste aujourd'hui de la «retraite-retrait» à la «retraite-revendication» selon les dénominations d'Anne-Marie Guillemard4(*). Le premier type de retraite se réduit à la perception de la pension, à la vie repliée sur soi, un faible niveau d'activité et peu de contact social. Le second type de retraite se caractérise par le refus de la place laissée aux retraités dans la société et entreprennent de ce fait de nombreuses activités sociales avec des personnes de leur âge dans un but d'améliorer de leurs conditions de vie, s'ouvrir aux autres et d'étendre leurs réseaux sociaux.

En Côte d'Ivoire, la création des associations est régie par la loi n° 60-315 du 11 Septembre 1960 et les premières associations qui ont vues le jour dans les espaces urbains regroupaient des personnes originaires de la même région, de la même communauté ethnique ou encore de mêmes catégories socioprofessionnelles. Ainsi, Sala N. (1993) nous signale que les premières formes d'association apparaissent spontanément dès les débuts de l'urbanisation dans les espaces urbains. Ces premiers réseaux sociaux qui, la plupart s'adressent à la jeunesse spécifiquement ont été hérités des modèles européens au cours de la période coloniale. Ces structures sociales informelles constituent un cadre d'intégration et de structuration de la population urbaine. Elles ont plusieurs fonctions sociales selon Delpêch (1983) à savoir: perpétuer les relations avec le milieu d'origine; assurer l'intégration des nouveaux adhérents dans le nouveau cadre urbain, susciter entre les membres une idée du lien social et surtout se procurer une place sociale. En d'autres termes, resocialiser l'individu dans le milieu urbain. Par ailleurs, la première association de retraités a vu le jour le 14 Juin 1985 à Abidjan. Il s'agit de la Fédération Nationale des retraités de Côte d'Ivoire (FENARECI). Mais, peut-on dire à la lumière de la réalité sociale que ces associations de retraités se réduisent-elles seulement à ces fonctions traditionnelles des associations en milieu urbain ?

Le passage à la retraite constitue en lui-même une rupture avec le monde professionnel. Dès lors, la perte de l'identité professionnelle et la déconstruction du statut lié à celle-ci entraînent chez le retraité parfois une mobilité de type descendant. Cette perte de l'identité professionnelle ne se compense t-elle pas par l'acquisition de nouveaux rôles sociaux dans les espaces associatifs ?

En tant qu'expression d'une époque comme le souligne Barthélemy Martine5(*) (2000), « les associations reflètent par leurs activités les manques d'une société, la faiblesse du lien social, le prolongement des pouvoirs institutionnels notamment l'Etat, les collectivités locales, l'Eglise, etc.... qui régulent et favorisent leur action dans le but d'assurer l'adaptation et l'intégration sociale de l'individu »; la vitalité associative s'inscrit dans la vitalité du contexte social. Dès lors, la création d'une association répond à un but précis : résoudre un problème d'ordre social. En fait, de quel problème social pourrait-il s'agir ici puisque l'adhésion à une association reflète également des motivations variables selon les milieux sociaux.6(*)

En clair, comment une association peut-elle reconstruire et donner sens à la retraite? Quel intérêt recouvre l'adhésion des retraités aux associations? En d'autres termes, quels sont les enjeux que recèle cet espace social et qui de ce fait constituent aujourd'hui des sources de motivations chez les retraités ivoiriens? Enfin, comment les pratiques sociales de ce champ contribuent à construire la figure sociale du retraité ?

I-2-2-Hypothèse de recherche

Les questions essentielles que nous venons de soulever nous conduisent selon les règles de la démarche scientifique à l'élaboration d'une hypothèse. Celle-ci est pour nous une voie possible de réponse aux questions que nous nous sommes initialement posées.

L'adhésion massive des retraités aux associations s'explique par le fait que l'espace associatif est un espace réel ou fictif de liens sociaux et identitaires. C'est sur la base de cette hypothèse que nous allons travailler. Mais, il serait important d'apporter des précisions sur certains concepts qui composent l'hypothèse

* 1 On enregistre entre 2000 et 2006, des totaux de 19716 départs à la retraite soit 5 à 6000 départs par an selon les chiffres de la Sous-Direction des pensions civiles du Ministère de la Fonction Publique et de la Réforme Administrative.

* 2 Ce nouveau régime a vu le jour à l'issu du séminaire la CGRAE qui s'est tenu à Yamoussoukro, le 6 et 7 Mai 1999. (cf. CGRAE, La Nouvelle CGRAE et les Retraités du 3ème millénaire, Séminaire CGRAE, Yamoussoukro 6 et 7 Mai 1999.

* 3 Extrait du Rapport de la Banque Mondiale lors du séminaire CGRAE à Yamoussoukro

* 4 Anne-Marie Guillemard, La retraite une mort sociale? Sociologie des conduites en situation de retraite, Mouton, Paris, 1972.

* 5 Barthélemy Martine, Association : un nouvel âge de la participation, Presse de sciences politiques, Paris, 2000

* 6 Extrait de l'étude du Conseil Economique et Social de France publié en 1993.

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore