1-2-2-4 Endettement public et
performances macroéconomiques
Il est utile de faire une distinction entre les
conséquences d'une nouvelle accumulation de dette extérieure et
les conséquences d'une dette extérieure existante sur
l'efficacité des politiques macroéconomiques. L'accumulation de
dette extérieure (notamment aux fins des dépenses
intérieures) dans des conditions de taux de change fixe tend à
affaiblir la régulation monétaire en influant directement sur la
masse monétaire. Cet effet s'observe en particulier dans les pays
débiteurs qui ne disposent pas des moyens appropriés pour
stériliser l'impact des entrées de capitaux sur la masse
monétaire. Même si les effets sur la masse monétaire et sur
le revenu finiront à terme par renverser la tendance initiale à
l'expansion monétaire, ce processus de correction découle de
l'expansion monétaire elle-même, et perturbe la stabilité
à court terme du taux de change. L'ampleur de cette perturbation
dépend du cadre temporel et de l'intensité des flux par rapport
à la taille de l'économie. Ainsi, pour maîtriser
entièrement les conséquences des emprunts extérieurs sur
l'expansion monétaire, il faudrait renoncer à l'engagement en
faveur d'un taux de change fixe ou imposer des limites aux mouvements de
capitaux.
Un endettement élevé peut
également nuire à la politique monétaire, en particulier
lorsqu'on procède au refinancement d'une dette extérieure
importante ou à la correction d'un taux de change
désaligné. La présence de tels facteurs signifie que des
variations du taux de change peuvent avoir des incidences importantes sur le
bilan des entreprises et des sociétés financières. En
particulier, une dévaluation de la monnaie peut rendre ces entreprises
techniquement insolvables sous l'effet de la hausse de la valeur de la dette
extérieure en monnaie nationale. Cette solution est parfois
nécessaire et utile, en particulier dans les pays où les
entreprises se sont mises en situation financièrement vulnérable
pour avoir compté sur une monnaie surévaluée. Dans la
mesure où ces entreprises utilisent des facteurs importés, leurs
coûts d'exploitation risquent d'avoir été réduits
artificiellement par cette surévaluation. La dévaluation de la
monnaie met un terme à ce processus et impose une discipline
économique salutaire. Toutefois, les autorités craignent les
effets possibles de cette mesure sur les entreprises nationales et leur
réticence à pousser ces dernières à la faillite
pourrait les conduire à surseoir à la correction du
déséquilibre du taux de change. C'est ainsi que l'existence d'une
dette extérieure importante limite l'application des politiques
macroéconomiques.
Une dette extérieure importante réduit
également la souplesse de la politique budgétaire. Comme il est
impossible de réduire les paiements d'intérêts, en
particulier dans les situations où on procède à une
correction du taux de change, l'ajustement à un impact plus
sérieux sur les dépenses intérieures, y compris celles
effectuées pour les biens non échangeables, ce qui provoque du
chômage. Compte tenu des difficultés inhérentes à la
mobilisation des recettes et à la réduction des salaires, les
corrections prendront vraisemblablement la forme d'un gel des salaires, d'une
hausse de la dette intérieure, ou d'une activation de la planche
à billets, nuisant ainsi sérieusement à la
compétitivité nécessaire pour améliorer l'aptitude
à assurer le service de la dette. La contradiction entre
l'amélioration de la compétitivité et le maintien d'un
budget équilibré est plus sérieuse en conditions
d'endettement public élevé (Dornbusch, 1993). Ainsi, l'existence
d'obligations importantes en matière de service de la dette tend
à perpétuer la surévaluation de la monnaie et les
déficits budgétaires importants.
C'est pour corriger ces effets que la
théorie s'est préoccupée du lien étroit qui existe
entre endettement et performances économiques. Premièrement, le
paiement du service de la dette (dans le présent comme dans le futur)
peut réduire l'investissement (courant et futur) et par la suite la
croissance économique. Pour Peter Wickam « la croissance est
tronquée dans le présent, si le fardeau de la dette affecte le
flux courant de ressources disponibles pour le pays ; dans le futur un
taux élevé de ressources destinées au paiement du service
de la dette décourage l'investissement.» Deuxièmement, le
fardeau de la dette comme paiement de son service ainsi que son
rééchelonnement peut affecter l'environnement politique en
vigueur et pervertir les politiques économiques.
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