WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La prise de l'aérodrome de Lille-Marcq par les élus municipaux : des usages et stratégies de légitimation d'un équipement restreint devenu territoire-ressource

( Télécharger le fichier original )
par Vincent PAREIN
Université de Lille 2 - Master 1 de science politique-action publique locale et nationale 2009
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

B) La neutralisation communale de l'intercommunal

1) Les conseillers au SIGAL, « envoyés » communaux

L'architecture politico-institutionnelle de l'institution intercommunale a déjà fait l'objet d'études empiriques. En propos introductif, nous avons abordé les travaux du sociologue R. Le Saout à propos de l'intercommunalité. Sa thèse principale est que celle-ci reste un « pouvoir inachevé »30et il propose différents arguments issus de l'observation de l'édifice intercommunal pour l'appuyer. Faisant notre cette démarche d'analyse fine de la machinerie et hiérarchie au sein du syndicat intercommunal, nous avons constaté que dès l'année 2000 (la gestion de l'aérodrome par le SIGAL ayant commencé fin 99), les délégués intercommunaux, à l'unanimité, décident la création de postes ad-hoc, non exigés par les textes législatifs et règlementaires relatifs aux SIVOM : les conseillers techniques. Ces conseillers techniques, dont les attributions officielles n'ont pas été évoquées précisément31, sont au nombre de quatre en indiquant expressément qu'il y en aurait un par

28 Entretien, 20/03/09.

29 GAXIE D., « Stratégies et institutions de l'intercommunalité », in, L'intercommunalité : bilan et perspectives, Paris,CURAP,PUF, 1997.

30 LE SAOUT R, op. Cit.

31 Comité syndical du 16/03/00.

commune. Il ressort que le choix des quatre conseillers n'a pas fait l'objet de longues discussions puisque les délégués intercommunaux ont approuvé à l'unanimité les propositions faites à ce sujet par les quatre maires, tous délégués au SIGAL. Il nous paraît intéressant de souligner que le choix de créer ces postes ainsi que leurs origines respectives (un par ville) n'ont pas été des sujets approfondis durant les comités syndicaux, suscitant plutôt un consensus intercommunal.

Cet état de fait est d'ailleurs, nous semble-t-il, accepté et naturalisé par les fonctionnaires du SIGAL :

« Et le SIGAL a aussi, à l'historique, il y avait un conseiller technique par commune. Chaque commune a mis a disposition soit un technicien ou un personnel administratif à disposition du syndicat. Le syndicat remboursait des indemnités, au début c'était 4 heures par semaine je crois. Et donc là pour l'instant on a encore un conseiller pour Wambrechies, un conseiller pour Marquette, un pour Marcq-en-Baroeul (...) ».

Plus révélateur encore est le discours32 d'un élu de Marcq-en-Baroeul, qui a été vice-président du SIGAL et aujourd'hui conseiller technique (pour Marcq) :

« -MD m'a dit qu'il y avait un conseiller technique par commune.

-Oui ça c'est quand on a mit en place la structure à la création du SIGAL. Il fallait quelqu'un pour tout ce qui est espace vert et compagnie, on a prit le responsable des services techniques de Bondues. Il nous fallait quelqu'un pour le bâtiment, les aspects beaucoup plus techniques donc c'est un cadre de la ville de Marcq qui est venu et qui depuis lundi est directeur du service technique. Sur l'aspect juridique, c'est une juriste de Wambrechies du cabinet de D Janssens et pour Marquette c'est l'ancien directeur des sports de la ville de St-Amand qui travaille à Marquette depuis de nombreuses années maintenant et qui s'occupe... ».

Ces éléments nous permettent de poser l'hypothèse qu'il s'agit pour les exécutifs, emmenés par les maires, de bien affirmer et réaffirmer sur le temps long que l'intercommunalité procède bien des communes, que celle-ci est, autrement dit, l'enfant des quatre villes-mères.

En se focalisant plus attentivement sur les profils de ces envoyés communaux depuis leurs débuts au SIGAL, nous notons qu'il s'agit de profils très spécifiques, leur positions et statuts respectifs étant caractéristiques d'une forte proximité avec les maires des différentes municipalités. En effet, il s'avère que systématiquement, ces envoyés sont des cadres administratifs ou techniques sous la tutelle hiérarchique directe des maires au sein des services municipaux.

La sociologie du pouvoir local a, depuis les débuts de la décentralisation en France, offert un certain

32 Entretien du 9/04/09.

nombre d'études consacrées à la fonction publique territoriale en essayant de mettre en exergue les traits distinctifs par rapport à la fonction publique d'État. Parmi ceux-ci, il a été démontré33 que les cadres territoriaux sont plus politisés que leurs homologues des administrations étatiques. Il y a une logique de « travail en tandem »34 cadres-élus particulièrement saillante dans les communes. Les élus locaux, en effet, sélectionnent leurs cadres et plus proches collaborateurs territoriaux, lesquels se mettent au service d'un projet municipal porté par un maire et sa majorité politique.

Au niveau du SIGAL, les conseillers techniques sont sélectionnés parmi les agents les plus proches des maires. Ainsi, ce sont des directeurs de services techniques , secrétaires de mairie, directeurs de cabinet ou encore directeurs généraux de services que les maires ont proposé aux autres élus pour ces postes au sein de la structure intercommunale. En outre, chacun des conseillers a été adossé dès le début à une des quatre commissions de travail créées (finances, études/projets, environnement/ travaux, urbanisme/relations usagers. Ces commissions ont pour chacune d'entre elles un maire pour président, les conseillers ayant intégré les commissions au sein desquelles se trouvait « leur » maire. La symétrie des positions va encore plus loin : il a été décidé en 2005 de confier à l'ancien directeur général des services de la mairie de Bondues la mission de « management des agents de catégories B et C du SIGAL »35, le maire de Bondues étant le président du syndicat intercommunal.

Ainsi, nous émettons l'hypothèse que la neutralisation de l'intercommunalité par les communes passe par cette logique d'intégration de profils de cadres fidèles aux majorités municipales au sein de l'édifice administratif du SIGAL. Même si les discours des élus ne laissent pas entrevoir une objectivation de cette entreprise de neutralisation par les communes, elle ne transparait pas moins pour peu que l'on procède à une étude détaillée des profils et origines des acteurs investis dans cet aventure intercommunale.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld