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La prise de l'aérodrome de Lille-Marcq par les élus municipaux : des usages et stratégies de légitimation d'un équipement restreint devenu territoire-ressource

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par Vincent PAREIN
Université de Lille 2 - Master 1 de science politique-action publique locale et nationale 2009
  

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II) L'impossible dépassement des communes : logiques contemporaines de l'action publique locale et arbitrages communaux

Notre travail empirique nous a également permis de voir comment l'action publique locale contemporaine se faisait, permettant entre autre de nous positionner au sein des analyses portant sur la territorialisation des politiques publiques locales et les mécanismes qui sont utilisés dans ce cadre profondément renouvelé par les différentes phases de la décentralisation. En outre, le niveau communal, dans le cadre de cette nouvelle donne territoriale, nous semble être le lieu stratégique, celui-ci donnant à voir l'arbitrage final des communes.

A) Un territoire dépassant les communes

1) Logiques d'action publique en partenariat

La littérature scientifique abordant les mutations de l'action publique dans le cadre de la territorialisation permet de voir les principales caractéristiques présentées justifiant cette notion et la mise en avant de « territoires pertinents ». Parmi ces nouvelles tendances, il y aurait notamment une forte logique de travail en partenariats au service d'un territoire spécifique. L'étude d'un aérodrome comme celui de Lille-Marcq nous a permis de mettre effectivement en relief une logique d'action investissant divers acteurs. Au niveau même de l'intercommunalité, dès ses origines, les élus (dont on a vu le rôle prépondérant) ont décidé de travailler avec l'agence de développement et de l'urbanisme de Lille-métropole (ADU) dans une démarche de diagnostic territorial. En effet, l'appropriation d'un territoire est une chose, sa connaissance et le développement d'utilisations futures en est une autre et les élus locaux ont bien intériorisé la nécessité de développer une expertise territoriale spécifique. Il nous semble qu'en l'espèce, cette démarche de partenariat peut s'expliquer par les moyens et ressources limitées disponibles si il était décidé de se cantonner au niveau d'un partenariat entre communes (ou intercommunal). Dès 1998, l'ADU propose un rapport46 à destination des membres du SIGAL présentant l'aérodrome comme « un élément très attractif à la

46 Rapport présenté lors du comité syndical du 14/12/98.

fois sur le plan humain et récréatif ». En l'occurrence, l'analyse des déclarations des élus, antérieures à ce rapport, montre que l'ADU en arrive aux mêmes conclusions que celles envisagées au sein du SIGAL.

Outre cet exemple de partenariat afin de produire une connaissance précise des traits du territoire de l'aérodrome (150 hectares, rappelons-le), le syndicat va passer dès 2000 un contrat reconductible annuellement avec des services de l'État (la direction départementale de l'équipement) afin que ceux-ci assistent l'agent administratif détaché de Bondues (avant l'entrée en fonction des deux permanents) pour l'assistance et la gestion administrative de l'aérodrome. Là encore, nous émettons l'hypothèse que les moyens d'expertise propre étant encore alors limités, il a été décidé de nouer un partenariat avec des services qui ont les moyens humains et techniques manquants aux communes, ce territoire étant nouveau pour des municipalités non préparées à gérer un tel équipement.

Parallèlement à ces quelques exemples de partenariats contractés volontairement par les élus intercommunaux, il ne faut pas oublier que le territoire est avant tout un aérodrome et à ce titre, la direction générale de l'aviation civile est d'emblée apparue comme un partenaire imposé. En effet, si la DGAC a transféré la gestion de l'aérodrome aux quatre communes, elle reste légalement le propriétaire (jusqu'en 2007) et est compétente pour assurer le respect de la réglementation aéronautique47. Ainsi ce partenaire48 de fait sera, tant que la vocation aéronautique du site sera conservée, sera incontournable et son représentant siègera à ce titre dans les groupes de travail du SIGAL, toujours dans un but de constamment rappeler aux élus qu'ils n'ont pas totalement les mains libres pour faire ce qu'ils veulent du site. Peut-être avons-nous ici un exemple significatif de la montée en puissance d'un « État-régulateur »49, qui, depuis les débuts de la décentralisation, tend à certes déléguer de plus en plus de compétences aux collectivités locales mais n'en reste pas moins un acteur-partenaire incontournable pour les élus locaux.

47 Pour avoir un aperçu de la densité de cette codification http://www.sia.aviation-civile.gouv.fr/asp/frameset_fr.asp? m=26

48 Il ne s'agit pas de réifier un service avant tout incarné par des individus; nous simplifions ici à des fin de synthèse.

49 HASSENTEUFEL P., Sociologie politique :l'action publique, A. Colin, 2008, pp. 230-237,pp. 269-272.

Nous avons jusqu'ici évoqué des partenaires publics ou para-publics. Pourtant, s'attarder aujourd'hui sur le fonctionnement des collectivités territoriales permet de mettre au jour l'existence d'une logique de partenariats public-privé. Si des auteurs50 se sont attachés à révéler que les cabinets de consultance privée sont de plus en plus sollicités par les collectivités territoriales dans le but de mener des missions d'évaluation des politiques publiques, nous constatons qu'en amont de cette étape, des acteurs publics locaux tels que des élus font parfois appel aux services d'entreprises privées pour la phase de définition et de propositions de projets territoriaux. Il s'agit là de contribuer, sans émettre de jugement normatif sur la pertinence de cette logique, à une déconstruction d'une opinion de sens-commun relative à l'action publique : celle-ci serait le produit exclusivement d'acteurs et de partenaires publics.

En l'espèce, les élus du SIGAL travaillent avec un cabinet de conseil situé dans la métropole lilloise dans le but de compléter le diagnostic territorial de l'ADU ainsi que pour envisager toutes les hypothèses d'aménagement des espaces non-utilisés de l'aérodrome de Lille-Marcq. Lorsque nous avons demandé à une permanente du syndicat ce qui a motivé cette collaboration public-privé, celle-ci nous a indiqué que cela s'expliquait par le fait que les personnes travaillant dans ce cabinet ont acquis une réelle compétence et expertise dans le montage de projets pour les collectivités, contribuant alors à confirmer notre hypothèse d'une expertise intercommunale perçue par ses membres comme insuffisante ou alors pas assez spécialisée.

Ici aussi, c'est un partenariat souhaité par les élus intercommunaux et soulignons à nouveau leur importance dans la mesure où en tant que commanditaires, ils ont contribué à définir ou plutôt cadrer le travail des salariés du cabinet de conseil (définition d'un cahier des charges).

(source: Cabinet E2I/SIGAL)

50 GAXIE, D., LABORIER Pascale, « Des obstacles à l'évaluation des actions publiques et de quelques pistes pour tenter de les surmonter », in Favre, P., Hayward, J. & Schmeil, Y., (dir.), Etre gouverné. Mélanges en l'honneur de Jean Leca, Paris, 2003, Presses de Science Po : 201-224

Notre exemple au sujet des associations public-privé dans la conduite des politiques publiques semble en tout cas corroborer les contributions scientifiques démontrant la réalité quantitative des logiques de partenariats multi-niveaux (centre-périphérie) et public-privé dans les politiques publiques.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault