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La complémentarité de la justice pénale internationale à  la justice nationale des états dans le cas de la cour pénale internationale

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par Emery NUKURI
Université du Burundi - Licence en Droit 2010
  

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§1 : La saisine de la CPI par un Etat partie.

Comme nous l'avons relevé dans les développements précédents, la CPI est le résultat d'un traité multilatéral. L'application de tout traité dépendant de la bonne volonté des Etats parties, il est indéniable que l'intervention positive des Etats dans le fonctionnement de la CPI est primordiale. La nécessaire intervention des Etats se manifeste dès le début d'une affaire. Les Etats ont en effet la possibilité de déclencher une procédure, en déférant une situation devant la Cour. Mais déjà ici se posent deux questions :

- Lesquels ont cette faculté ?

- Les Etats, ont-ils cependant le droit ou le pouvoir de l'arrêter ?

I. L'applicabilité du régime de consentement préalable en cas de saisine de la CPI par un Etat partie.

Le régime de consentement préalable des Etats à la compétence de la Cour est prévu à l'article 12 du Statut qui pose les conditions préalables à l'exercice de la compétence de la CPI :

«  Dans les cas visés à l'article 13, paragraphes a) ou c), la Cour peut exercer sa compétence si l'un des Etats suivants ou les deux sont Parties au présent Statut ou ont accepté la compétence de la Cour conformément au paragraphe 3 :

a) L'Etat sur le territoire duquel le comportement en cause a eu lieu ou, si le crime a été commis à bord d'un navire ou d'un aéronef, l'Etat du pavillon ou l'État d'immatriculation ;

b) L'Etat dont la personne accusée du crime est un ressortissant »110(*).  

Ainsi, seuls l'Etat partie au Statut et celui ayant reconnu la compétence de la CPI sont autorisés à saisir la CPI, en lui déférant une situation. Nous disons que le régime de consentement préalable à la compétence de la CPI s'applique parce qu'un Etat, pour renvoyer une situation devant la CPI, doit y avoir consenti, soit en adhérant à son Statut, soit en acceptant simplement sa compétence. L'article 12 est une disposition clé en ce qu'elle trace la sphère d'action majeure de la compétence de la CPI111(*).

L'article 12 a été, tout au long des négociations, l'un des plus âprement discuté et surtout, il est, en majeure partie, à l'origine du refus des Etats-Unis de devenir partie au Statut112(*).

II. La faculté de déférer une situation devant la CPI.

L'article 13a) dispose :

« La Cour peut exercer sa compétence à l'égard d'un crime visé à l'article 5, conformément aux dispositions du présent Statut :

a) si une situation dans la quelle un ou plusieurs crimes paraissent avoir été commis est déférée au Procureur par un Etat partie comme prévu à l'article 14 ;(...) »113(*).

Il s'agit pour les Etats de porter plainte devant la CPI. C'est ici la plus importante des prérogatives accordées aux Etats devant la CPI. La saisine de la Cour par un Etat partie est l'hypothèse la plus favorable, surtout lorsque la situation se déroule sur son sol. Dans un tel cas, le principe de complémentarité voudrait que les organes judiciaires de l'Etat puissent conduire des poursuites en vue de rechercher et de juger les responsables des crimes internationaux ou de les extrader vers un Etat qui s'estimerait compétent pour de telles actions, ou encore de les déférer devant la CPI.

Signalons à toutes fins utiles que l'article 14 du Statut qui traite du renvoi d'une situation par un Etat partie n'est pas explicite sur la question de savoir si l'Etat peut renvoyer au Procureur une situation survenue sur son territoire ou sur le territoire d'un Etat tiers. En effet, l'article 14§1 stipule que :

« Tout État Partie peut déférer au Procureur une situation dans laquelle un ou plusieurs des crimes relevant de la compétence de la Cour paraissent avoir été commis, et prier le Procureur d'enquêter sur cette situation en vue de déterminer si une ou plusieurs personnes identifiées devraient être accusées de ces crimes»114(*)

Par conséquent, l'article 14 §1 peut être lu en deux sens :

-Un Etat peut déférer au Procureur une situation survenue sur son propre territoire. C'est le cas de l'Ouganda, de la RDC et de la RCA qui ont saisi, de leur propre chef, le Procureur de la CPI pour les crimes commis sur leurs territoires.

-Un Etat peut déférer au Procureur une situation survenue sur le territoire d'Etat tiers si par exemple, le national d'un Etat partie a commis un des crimes visés à l'article 5 sur le territoire d'un Etat non partie. Il convient de noter que cette possibilité n'a pas, à ce jour, été utilisée mais que le statut ne l'interdit pas115(*).

Les conditions posées à l'article 12 ainsi que l'ambiguïté de l'article 14 risquent d'entraver significativement l'action de la Cour. Si la saisine de la CPI par un Etat partie d'une situation survenue sur le territoire d'un Etat tiers n'apparaît pas comme illusoire, elle ne sera pas moins délicate car l'Etat tiers au Statut n'est pas dans l'obligation de coopérer avec la CPI. Cette saisine sera seulement sûre et efficace pour les conflits internes, dans lesquels par définition l'« Etat du territoire » et l'« Etat de la nationalité » coïncident116(*).

Tout compte fait, il peut se faire que pour plusieurs raisons, l'Etat ne puisse pas remplir son obligation de réprimer les crimes internationaux qui relèvent de sa compétence juridictionnelle. C'est dans cette dernière circonstance que la CPI intervient pour suppléer à l'incapacité ou au manque de volonté de l'Etat. Par la mise en jeu du principe de complémentarité117(*) qui guide son fonctionnement, la CPI peut être saisie par un Etat et connaître du crime en cause118(*). Mais, un Etat qui n'a pas voulu juger ou extrader un criminel, aura-t-il toujours le courage de saisir la CPI ? Ici, les autres sujets légitimés à saisir la CPI que sont le Conseil de sécurité des Nations Unies et le Procureur agissant proprio motu pourront la saisir s'ils le jugent nécessaire.

Néanmoins, le recours à la CPI n'est pas systématique même si une affaire relève de sa compétence. En effet, celle-ci n'est que complémentaire aux juridictions nationales, qui ont la primauté de juridiction sur les crimes commis à l'intérieur des frontières de l'Etat (compétence territoriale) ou en dehors de son territoire (compétence universelle). Mais lorsque la CPI doit intervenir, il est souhaitable qu'elle soit saisie à l'initiative de l'Etat concerné par la situation en cause. De cette manière en effet, sa pleine coopération sera plus facile à obtenir étant donné qu'il aura un intérêt particulier à ce que l'affaire connaisse un dénouement.

C'est ce qu'a voulu exprimer le Procureur de la CPI Luis MORENO OCAMPO dans une interview accordé au New York Times le 2 avril 2006 où il expliquait : « Je suis un Procureur sans Etat - J'en ai une centaine sous ma juridiction et je ne dispose d'aucun policier »119(*). La CPI ne peut donc intervenir et progresser dans ses enquêtes que si les Etats acceptent de coopérer avec elle sur le terrain, notamment par la mise à la disposition de la CPI de certains éléments de leurs services judiciaires et policiers, voire de leurs armées.

Au contraire, la saisine de la CPI par le Procureur agissant proprio motu ou par le Conseil de sécurité sont de nature à entraîner des frustrations dans le chef des Etats concernés. En effet, le caractère supplétif de la saisine par le Procureur ne plaira pas à l'Etat Partie qui protège ses criminels par son manque de volonté. Le caractère contraignant de la saisine par le Conseil de sécurité est encore plus frustrant en ce qu'elle entame la volonté de l'Etat tiers impliqué parce qu'aucun Etat souverain n'apprécie guère d'agir par contrainte ou sous une pression venant d'un autre Etat ou d'un organisme supra-étatique.

Ce pouvoir de saisine ainsi reconnu aux Etats pourrait être la clé du succès futur de la Cour, s'il est employé de bonne foi. Il est avantageux de constater que les 3 premières affaires dont la CPI a été saisie, aient été déférées par des Etats parties agissant sur une initiative volontaire120(*). Mais ici aussi une inquiétude subsiste parce que ces poursuites visent les chefs des mouvements rebelles. Nous pensons raisonnablement qu'aucun Etat ne saisira la CPI s'il faut poursuivre un Chef d'Etat en exercice pour la simple raison que ce dernier, seule personne compétente pour le faire, ne saisira jamais la CPI pour le juger lui-même. En poussant plus loin la réflexion, seul un changement de pouvoir peut permettre cela mais là aussi ce sera la poursuite d'un ex- Chef d'Etat et non d'un Chef d'Etat en exercice.

* 110 Article 12 (2) du Statut de la CPI.

* 111 G. DELLAMORTE, « Les frontières de la compétence de la Cour pénale internationale : observations critiques », in R.I.D.P, Toulouse, Erès, vol.73, 2002, pp.23-57.

* 112 En ce qu'il permet des poursuites en l'absence du consentement de l'Etat de la nationalité de l'accusé, à partir du moment où l'« Etat du territoire » a accepté la compétence de la Cour, et donc expose potentiellement les soldats et le personnel Américain en mission à l'étranger à de telles poursuites. Pour de plus amples développements sur cette argumentation et les réponses qui lui sont opposées, voir Julien DETAIS, Les Etats-Unis et la Cour Pénale Internationale, Droits fondamentaux, n°3, janvier-décembre 2003, pp.31-50.  

* 113 Article 13 al.a du Statut de la CPI.

* 114 Article 14 §1du Statut de la CPI

* 115 Ce qu'il faut savoir sur la Cour pénale internationale, une Fiche de la FIDH, Paris, juillet 2002, p.1,  disponible sur le site internet http;//www.aidh.org/justice/02.install.05html( visité le 5janvier 2009).

* 116Ce qu'il faut savoir sur la Cour pénale internationale, une Fiche de la FIDH, Paris, juillet 2002, p.1. disponible sur le site internet http;//www.aidh.org/justice/02.install.05html( visité le 5janvier 2009).

* 117 Voir les développements relatifs au principe de la complémentarité p.21.

* 118 Encore faut-il que l'affaire soit déclarée recevable par la Cour en vertu des conditions de recevabilité

prévues à l'article 17 du Statut de la CPI.

* 119 New York Time, édition électronique du 3 avril 2006, p.3 cité par B. BIBAS et E. CHICON, op. cit., pp.3-4..

* 120 L'Ouganda, la République démocratique du Congo et la République centrafricaine  - ont déféré à la Cour des situations concernant des faits s'étant déroulés sur leur territoire.

http://www.icc-cpi.int/Menus/Go?id=ff9939c2-8e97-4463-934c-bc8f351ba013&lan=fr-FR (visité le 25.2.2009).

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