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Les conditions d'accès à  l'emploi des jeunes diplômés bac plus deux et plus des zones urbaines sensibles de l'agglomération nantaise

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par Jean-Baptiste DROUET
UFR de Sociologie de Nantes - DESS 2005
  

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Entretien Abdel. Source : « Un parrain, un emploi ».BTS : Commerce International. 23ans. La Bottière.

Il semble relativement déçu par sa trajectoire, il se demande si ça valait le coup d'avoir fait des études, d'avoir fait un BTS, parce qu'il connaît plusieurs réponses négatives à la suite de demande ou d'entretiens. Son regard est plutôt pessimiste. Ce n'est pas un pessimisme vis-à-vis de lui-même ou par rapport à son avenir, il a plutôt confiance en lui. C'est davantage un regard pessimiste sur la France, la société française où selon lui, les gens deviennent de plus en plus racistes...et qu'il est de plus en plus difficile de trouver du travail pour quelqu'un issue de l'immigration ou avec un nom à consonance étrangère. Selon lui, la situation ne peut que se dégrader, et il vaut mieux partir à l'étranger ou les mentalités seraient différentes. Il a un regard sur l'histoire, le passé, `ses parents qui ont tous le temps galéré, et se demande pourquoi ça changerait pour les nouvelles générations...au contraire, `le racisme se banalise'. Quelle que part, il admet cette situation, il faut mieux partir ailleurs, `je trouverais, j'ai plein d'amis qui travaillent là-bas...Quand dans l'entreprise de transport, on lui dit qu'au niveau des clients, ce n'est pas possible...il accepte, `le gars a été honnête avec lui', au moins, il n'y a pas eu d'hypocrisie. Et c'est davantage ça qu'il n'admet pas, ce qui est caché, hypocrite, pas dit; pour lui, les réponses qu'on lui a données dans le secteur bancaire n'étaient pas fondées...'c'est louche, c'est bizarre'. Il ne parle pas du manque d'expérience ou d'autres raisons qui ont pu amener des réponses négatives, il ne dit pas non plus franchement que c'est de la discrimination mais il le suggère.

En fait, il est relativement fataliste, pour lui ça ne changera pas, donc ça ne sert pas à grand chose d'en parler, `autant mener sa barque et voir ailleurs si c'est mieux'. Quand je lui précise l'étude, il pense que ça ne sert pas à grand chose, que de toute façon, il n'y pas de solutions.

M : « Quel a été ton parcours scolaire jusqu'au diplôme... »

A : « Au collège, j'ai fait une filière générale, j'ai choisi une première ES ; avec comme spécialité l'anglais renforcé. En terminale, j'ai passé le Bac et je suis allé en Fac de Droit, mais ça ne m'a pas plus ; j'ai préféré ensuite faire un BTS Commerce International ; parce que je voulais perfectionner les langues, et il y avait une nouvelle matière : compta commerce. J'ai passé le BTS en 2003, là je fais une licence-maîtrise avec le CNAM en Commerce International ».

M : « Quand t'es rentré à l'asso, c'était après le BTS... »

A : « Je suis rentré à l'asso en 2004 ; j'étais en recherche d'emploi. Je recherchais en secteur bancaire. J'ai eu quelques entretiens. La licence que je fais, c'est une licence LEA, à la Fac de Nantes, pour maîtriser les langues. L'année prochaine je veux partir en Espagne. Au collège, j'étais à la Noé Lambert, et au lycée, à La Colinière. En première année de Droit, j'étais à la Fac de Nantes et la première année BTS, j'étais au Mans ; la deuxième année BTS, j'étais à Carcouet ».

M : « Dés le lycée, tu avais fait le choix de ta filière... »

A : « En terminal, j'avais déjà fait le choix du BTS, mais c'était trop tard. La première année de Droit, ça me plaisait pas trop, le BTS, c'était un choix personnel...mes frères et mes soeurs, ils ont plus été dans le scientifique...j'ai une soeur à la Fac et l'autre en BTS ».

M : « Tu as toujours été dans le même quartier ? »

A : « Je suis nantais, né à Nantes, et j'ai toujours vécu à la Bottière. Quand je suis sorti du BTS, je voulais continuer les études. Je voulais faire une licence pour pouvoir avoir un niveau de diplôme plus élevé et un meilleur salaire ».

M : « Et dans ta recherche de travail, tu as eu des entretiens d'embauche, comment ça s'est passé ? »

A : « J'ai eu plusieurs entretiens d'embauche, j'ai eu un entretien à Angers pour Groupama ; ils m'ont dit que mon niveau scolaire et mon niveau de qualification étaient trop élevés...j'ai trouvé ça un peu louche. Il y avait trois personnes, ils m'ont fait passer des tests avec des courbes. Autrement, il y eu la BNP, où j'ai rempli un dossier, pareil, pour le poste, mon niveau était trop élevé...le dossier a été renvoyé à Paris mais il n'y avait pas de poste ; ils m'ont dit qu'ils gardaient mon CV sous la main. Je comprends pas trop, c'est leur choix, je veux dire...ils peuvent prendre quelqu'un même si le diplôme est au dessus, ça peut être dans leur intérêt...c'est bizarre ».

M : « Et t'en a eu d'autres...des réponses négatives ? »

A : « Y a eu le Crédit Agricole, là c'est le pire, j'ai envoyé quatre fois mon CV et une lettre de motivation, ils m'ont répondu qu'à la quatrième fois parce qu'ils devaient en avoir marre. J'ai une amie qu'était en BTS avec moi, elle a été prise direct au Crédit Agricole, moi, c'est au bout de quatre mois que j'ai eu une réponse négative...alors que elle, elle était moins bonne en plus ».

M : « Et pendant ta scolarité, ou pendant le BTS, tu avais déjà eu une expérience professionnelle ? »

A : « En BTS, j'ai fait des stages ; j'ai fait un stage à la Société Générale. Je suis aussi allé à un congrès organisé par la Société Générale, à Paris, c'était pour une rencontre avec les jeunes...ils voulaient embaucher...il y avait pas mal de postes. Moi j'ai écrit...mais pareil, niveau trop élevé pour être conseillé...alors que j'avais fait un stage chez eux, pourtant, ils demandaient une formation Bac+2 Commerce ; c'est ce que j'ai, et la demande, c'était juste après le diplôme ».

M : « Et après cette année, tu recommences à chercher du travail ? »

A : « L'année prochaine, je vais aller travailler à l'étranger, en Espagne, à Barcelone ; pour être commercial, la bas...c'est plus facile. Je connais des amis qui sont arabes ou noirs et qui travaillent la bas, c'est plus facile. J'ai plein d'amis qui sont parti la bas...on regarde plus les compétences ».

M : « Donc tu veux pas rester en France... »

A : « Sinon, je vais peut être passer des concours dans la fonction publique. A oui, aussi j'ai postulé pour un poste dans une boîte de transport, près de l'aéroport...là le gars, c'était le patron...il a été direct avec moi...il m'a dit pour bosser dans les bureaux, y a pas de problèmes...mais par rapport aux contacts avec la clientèle, je veux pas trop, il m'a dit...c'est pas pour être méchant, mais avec les clients, c'est pas facile...parce que je suis d'origine arabe, alors...mais c'est son choix, au moins, il a été honnête, il voulait me voir pour me dire ça en face, pas par courrier ».

M « Par rapport aux gens que tu connais, dans ton entourage, la famille ou les amis, tu parles de ta recherche de travail... »

A : « J'ai toujours vécu à La Bottière, mes amis...beaucoup j'étais à la maternelle avec eux. C'est surtout des gens d'origine étrangère...et au BTS, on parlait de ça...de l'embauche. Par rapport à la discrimination, pour certains, ça n'existe pas...c'est parce que...ce sont ceux qui sont français...ils disent que nous voyons le mal partout...mais bon, chacun sa position. Ce qui est pas mal, c'est un pays comme l'Angleterre, là on regarde vraiment les compétences, en France, c'est chaud, en Angleterre, on joue pas sur les provenances ».

M : « Et quand tu postules à une entreprise, tu mets tout...l'adresse, le quartier... »

A : « Sur le CV, j'inscris pas le quartier. Déjà, ils regardent le nom et après, ils regardent le quartier. Mais c'est d'abord le nom...moi mon nom, ça va encore, mais c'est mon prénom. Par contre, je mets toujours une photo. Alors ils regardent le nom et après la photo ».

M : « Et tu as des contraintes par rapport à l'emploi, le secteur géographique par exemple... »

A : « Je suis prêt à bouger à l'étranger, j'ai beaucoup de mobilité, j'ai plein d'amis qui travaillent à l'étranger ».

M : « Mais le métier que tu recherches, tu veux que ça corresponde à ton diplôme... »

A : « Là sur mon parcours scolaire, je suis déçu quand même, des fois je me dis que j'aurais mieux fait de faire un BEP...plutôt que de se prendre la tête avec les diplômes...ça sert pas forcément. Là, si j'ai repris les études avec la licence, c'est surtout pour les langues, pour améliorer le niveau en langues. Sinon, je vais faire ma vie...j'ai des amis, ils ont Bac+2 ou +3 et ils font de l'Intérim ».

M : « Et tes parents, tu en parles avec eux de tes recherches...ou des réponses négatives .»

A : « Mon père est ouvrier et ma mère est sans emploi. Mon père, il a galéré 36ans à l'usine, c'est pour ça, ils voulaient que ces enfants fassent des études pour pas faire le même boulot. Mais de toute façon, on galère quand même...quand ils sont arrivés, ils ont galéré, ça change pas trop. Même à l'usine, il y a de la discrimination, c'est partout. Mes parents, ils sont marocains. Sinon mon frère, il est ingénieur, et mes soeurs, elles sont à Rennes, il y en a une qui est infirmière ».

A : « Moi, je vais partir à Barcelone au mois d'août. Pour les études, j'étais boursier, là aussi, je suis boursier ».

M : « Et dans tes recherches, tu te servais des dispositifs d'aide à l'emploi...l'ANPE, La Mission Locale... »

A : « Par rapport à l'emploi, la Mission Locale, c'est le pire, y a rien, c'est des emplois fictifs...la Mission Locale, ça sert à rien. A l'ANPE, c'est pareil, ça sert à rien, il n'y a jamais d'offres. Je me suis inscrit à l'ANPE de La Bottière, mais les conseillés, ils font rien ; tu t'inscris et voilà, c'est tout. Moi, je faisais mes recherches d'emploi par Internet ou avec la Presse : Ouest-France et l'Expresse...l'Expresse, y a des trucs.

Et sinon, il y a eu l'asso, le parrain, là c'était bien ; le parrain, il me laissait pas tomber, à l'asso, ils te soutiennent, il y a un suivi. Ils m'ont motivé, et autrement, les sites Internet ».

M : « Et par rapport à des gens que tu connais, ça constitue un réseau pour trouver des informations, des possibilités d'embauche, l'entourage, des amis...par connaissance »

A : « Dans mon domaine, dans le Commerce, j'ai pas de réseau, j'ai des amis un peu partout, mais pas dans ma branche. J'ai un ami du BTS qu'est parti en Allemagne. Au BTS, la prof a trouvé du boulot pour dix personnes, mais pas pour moi...je lui avait demandé de l'aide pour le rapport de stage, mais elle m'a pas aidé, elle avait ses chou choux ; pourtant, j'avais de bons résultats...mais c'était toujours...y'a ça qui va pas...mais heureusement, il y avait un soutien des autres élèves ».

A : « Le parrain à l'asso, il m'a aidé à refaire la lettre de motivation, le CV, ça changeait pour les différentes offres, c'était béton après ».

M : « Tu as gardé contact avec certaines personnes du BTS... »

A : « Les gens que j'ai envie de voir, c'est surtout les gens qui travaillent, c'est eux qui peuvent t'aider. Je veux pas voir les pessimistes, ça sert à rien...après, si je pense à ça...j'avance pas. Je crois que c'est une question de temps, mes frères et soeurs ont réussi...alors...à Barcelone, dans le Commerce...ma recherche d'emploi, elle est ciblée. Ma soeur, une fois, elle avait mis sur son CV : nationalité française...normal...et on lui a demandé sa nationalité. Moi je comprends pas...si on est né en France, on est français ».

A : « Ca fait que j'ai cherché du travail pendant sept mois...quand j'étais au Mans, c'était surtout des amis du BTS, ou des copains de copains. A la Bottière, c'est des amis de longue date...mais même si je pars, je garderais contact, c'est pas une rupture, il y a le téléphone. En Espagne, il y a moins de discrimination, on ne regarde pas les origines ou la provenance ».

A : « C'est sur, on a des handicaps...et tout ce qui se passe ailleurs, on nous le reproche...ce qui se passe dans le monde. Déjà quand j'étais petit, les adultes, ils me disaient de retourner dans mon pays. Mais là, depuis le 11 septembre, ça s'est renforcé...et puis, faut regarder les dernières élections...pour moi, ça changera pas...y a pas de solution, et c'est partout, pas que pour le travail...les Boîtes de nuit...partout, et les jeunes aussi. Nos parents, dès qu'ils sont arrivés, ils étaient victimes du racisme, mais c'était encore caché. Maintenant, ça devient normal d'être racistes, et la télé, ça légitime le racisme ».

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