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Analyse socio-économique des interrelations entre aires protégées et populations locales: cas du parc w/Burkina et du terroir riverain de Kotchari

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par Abdoul Wahab ZOMBRA
Université Polytechnique de Bobo Dioulasso - Ingénieur du développement rural 2008
  

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Chapitre I. : Etude de perception

L'étude de perception s'est basée principalement sur des interviews en focus groups. Au total, 321 personnes se composant en 27 % de chefs d'exploitations, 49 % de femmes et 24 % de jeunes, furent rencontrées dans l'ensemble des cinq villages lors de la phase d'enquête qualitative. Les perceptions que les populations se font du Parc W sont traduites par leur degré de convoitise des différents éléments constitutifs du Parc. Mais avant, il conviendrait de s'attarder un peu sur certaines remarques effectuées lors des enquêtes.

La quiétude des différents groupes rencontrés se trouve troublée dès lors où le mot parc est mentionné. Autrement dit, les riverains du Parc W n'aiment pas parler de ce dernier. En particulier, les activités de chasse et de pêche sont des sujets tabous. Hors mis les villages de Nangbanli et Tchontchonga où les vieux ont exprimé leur besoin en viande sauvage, cette dernière semblait non désirée. Ceci est d'autant plus vrai que seulement 15 % des hommes enquêtés ont reconnu pratiquer les activités de chasse et de pêche ; alors qu'au cours de l'exercice de notation (entre 0 et 10) de ces deux activités selon leur importance, la grande majorité des enquêtés a donné des notes différentes de zéro. Ce qui présage que plus des 15 % des hommes enquêtés pratiquent la chasse.

De plus, des cas de commercialisation illégale de viande sauvage nous ont été rapportés par des personnes ressources. Les villages de Nangbanli, de Lada et de Gnimbwama ont également été indexés par rapport à l'ampleur du phénomène de braconnage. Par ailleurs, la pénétration clandestine dans le Parc semble admise dans la zone. En réalité, au cours de l'enquête qualitative, à la question de savoir quelles difficultés caractérisaient certaines de leurs activités quotidiennes telle que la récolte des Produits forestiers non ligneux (PFNL) et l'artisanat, les premières difficultés citées par la population cible sont les problèmes de saisies, et les excès12 commis par les pisteurs. Ce n'est qu'après que la raréfaction des ressources naturelles dans le terroir villageois est citée. Suite à ces observations, il apparaît évident que la fraude est perçue par les riverains du Parc comme une stratégie qui contribue à garantir leur survie.

12 Il s'agit entre autres des séances de bastonnade et de manoeuvre des personnes appréhendées, et du massacre des caprins en cas d'infraction.

. 1. Perception des chefs d'exploitation

Le Parc constitue pour les populations situées à sa périphérie une contrainte pour leur satisfaction en produits forestiers. Le genre constitue un facteur déterminant de ces besoins. En outre, les besoins en produits forestiers d'un genre donné dépendent des responsabilités ou des activités qui lui sont assignées.

Ainsi, les hommes qui occupent une grande responsabilité dans la construction des maisons et des greniers accordent un grand intérêt à la paille et au bois de construction. Un intérêt non moins important est accordé aux plantes médicinales. Aussi, leurs anciens champs aujourd'hui dans le Parc sont les constituants les plus convoités. Autrement dit, les hommes demandent à ce qu'on leur concède une partie du Parc. Ce phénomène de convoitise de la terre est grandissant à cause des effets combinés de l'augmentation démographique et de la baisse de fertilité des sols.

Après les constituants13 ci-dessus cités du Parc (paille, bois de construction, plantes médicinales, champs), viennent les facteurs de production de l'activité d'élevage à savoir les sources d'eau et les pâturages naturels. Le grand attachement des habitants de Kotchari à l'activité d'élevage, la raréfaction du fourrage et des points d'eau en saison sèche, la presque inexistence de pâturages en saison pluvieuse sont entre autres les déterminants du haut degré de convoitise de ces facteurs de production de l'élevage.

Les autres produits du Parc tels que le charbon pour les forgerons, le gibier, le miel, le pain de singe, les raisins sauvages et le tamarin intéressent dans une moindre mesure cette frange de la population.

.2. Perception des jeunes

La traduction de la perception que les jeunes se font du Parc à travers les éléments convoités ne s'écarte pas trop de celle des chefs d'exploitation. Cet état des choses peut s'expliquer, d'une part, par le fait que les jeunes recherchent souvent des produits forestiers pour leurs pères, et, d'autre part, parce que le plus souvent, n'étant pas loin du statut de chef d'exploitation, ils exercent à peu près les mêmes activités.

13

Il faut tout de même relativiser cet ordre de succession des produits forestiers, car les CE Peul ne mettent rien devant les facteurs de production de l'élevage.

Les particularités au niveau de ce genre sont entre autres, l'intérêt qu'il accorde au pain de singe et au tamarin perçus comme une bonne source de revenu, car atteignant respectivement 20 000 et 3 000 F CFA le sac de 100 Kg, et les solutions qu'ils proposent pour atténuer les effets pervers du Parc sur ses riverains. Ainsi, contrairement aux parents qui souhaitent la restitution d'une partie du Parc, la majorité des jeunes souhaite que des permis de prélèvement leur soient octroyés. Ce constat montre que les jeunes ont mieux intégré l'existence du Parc dans leur vie par rapport aux personnes âgées.

.3. Perception des femmes

Dans le terroir de Kotchari, les femmes ont pour activité principale le ménage. Elles pratiquent également l'agriculture et l'élevage à petite échelle car n'ayant pas droit à la terre. C'est probablement la raison pour laquelle les groupes de femmes rencontrés dans le cadre de cette étude de perception n'ont pas tellement fait ressentir des besoins en terre, en pâturage, ou en eau d'abreuvement du bétail. De même, la paille et le bois d'oeuvre ou de construction ne représentent pas grand-chose à leurs yeux.

En revanche, le bois de chauffe, le pain de singe, le tamarin, les grains de néré pour le soumbala, les tisanes, l'eau de boisson en saison sèche sont les constituants du Parc qui retiennent le plus l'attention de ces femmes. Le principal facteur déterminant de ce phénomène est la raréfaction de ces produits dans les espaces villageois suite à la forte pression exercée sur les ressources naturelles, induite elle-même par l'augmentation de la population. Un autre facteur explicatif de l'engouement des femmes vis-à-vis de ces produits se trouve dans les petites activités génératrices de revenus qu'elles exercent très souvent. Il s'agit entre autres de la production du dolo (la bière du sorgho exigeante en bois et en eau), du commerce de la farine des fruits du baobab, du tamarin et du soumbala.

Chapitre II : Evaluation des impacts 2. 1. Impact socio-économique

Dans le souci d'une meilleure présentation des résultats de l'étude d'impact nous traiterons d'abord, (1) de l'impact relatif au foncier. Ensuite, sera présenté (2) l'impact relatif aux produits forestiers. Enfin, (3) les pratiques adaptatives mises en place par les paysans pour faire face aux conséquences liées à l'existence du Parc seront appréhendées.

2. 1. 1. Impact en relation avec le foncier

Les premiers changements dus à l'existence du Parc sont relatifs à la réduction des espaces villageois et ses conséquences.

Le Parc W a acquis son statut d'aire protégée depuis 1926. A cette époque, la province de la Tapoa se caractérisait par de très faibles densités de population. Ainsi, la délimitation du Parc a donné lieu à des déguerpissements, et les populations concernées se sont vues refoulées. On assiste à l'époque, à une légère augmentation des densités de population, d'une part, et d'autre part, à une amélioration de la cohésion sociale avec des communautés qui, autrefois, étaient très éloignées.

De nos jours, la croissance démographique de la zone d'étude met à nu la réduction de l'espace par le Parc, et cela à travers la raréfaction des ressources naturelles dont la terre.

Les systèmes de production rencontrés dans le terroir de Kotchari sont du type extensif. La restauration de la fertilité des sols dans ces systèmes est assurée par la mise en jachère lorsque la disponibilité en terres cultivables est importante. Cependant, les données du tableau 3 montrent que la pratique de la jachère est en baisse dans les villages enquêtés.

Tableau 3 : Répartition des enquêtés par rapport à l'utilisation de la jachère

 

Pratique de jachère

Statut

Non

Oui

Total

Autochtone
%

96

15

111

86

14

100

Allochtone
%

8

1

9

89

11

100

Total
%

104

16

120

87

13

100

Source : Données de l'enquête

Le tableau ci-dessus est le résultat du croisement des deux variables, statut et adoption de la jachère comme stratégie agricole. Ainsi, outre le fait de donner des informations sur le degré d'adoption de la jachère, le tableau donne des indications sur l'origine des enquêtés. La question de savoir si l'enquêté pratique la jachère ou pas, s'est adressé aux 120 personnes de notre échantillon. Au total, 104 enquêtés dans l'ensemble des villages ne se livrent pas à la pratique, et cela à cause, principalement du manque d'espace cultivable.

Ainsi, la jachère n'est pratiquée que par seulement 13 % des personnes touchées au cours de l'enquête. Ceci dépeint un peu la situation foncière dans laquelle se trouvent les villages riverains du Parc. Au regard des proportions du tableau, il apparaît évident que le statut d'autochtone ou d'allochtone ne constitue pas un facteur déterminent dans la non adoption de la jachère. En effet, respectivement 86 et 89 % des autochtones et allochtones ne pratiquent pas la jachère. Autrement dit, la raréfaction des terres cultivable sévit aussi bien chez les autochtones que chez les allochtones.

Aussi, les ratios superficie de terre disponible sur taille de l'exploitation, consignés dans le tableau ci-dessous, traduisent bien le phénomène de raréfaction de la terre.

Tableau 4 : Répartition des exploitations selon le ratio superficie de terre disponible sur taille de l'exploitation

Village

classes du ratio

] 0; 1]

] 1; 2]

] 3; + [

Total

Gnimbwama
%

9

3

0

12

75

25

0

100

Nangbanli
%

12

0

0

12

100

0

0

100

Lada
%

9

2

1

12

75

16,67

8,33

100

Todouanga
%

9

3

0

12

75

25

0

100

Tchontchonga
%

12

0

0

12

100

0,00

0,00

100

Total
%

51

8

1

60

85

13,33

1,67

100

Source : Données d'enquête

Ce tableau 4 est le fruit du croisement de la variable village, et du ratio, superficie de terre disponible sur taille de l'exploitation. Pour éviter les discontinuités, les ratios exprimés en ha par membre de l'exploitation, ont été regroupés en trois classes. La classe] 2 ; 3] se caractérisant par des fréquences nulles a été ignorer lors de la présentation du tableau.

85 % des exploitations enquêtées disposent de moins d'un hectare (1 ha) par individu et seulement 2 % disposent de plus de trois hectares (3 ha). Ce ratio peut s'avérer impertinent échelle national à cause du fait que tout le monde ne pratique pas l'agriculture. Cependant dans un milieu où l'économie n'est basée que sur les ressources naturelles il peut être considéré comme un bon indicateur de pression sur la terre.

Par ailleurs, au sein des populations enquêtées, la terre n'appartient qu'à l'homme. C'est pourquoi les superficies de terres rapportées au nombre d'hommes dans l'exploitation (Tableau 5) reflètent mieux le phénomène de raréfaction de la terre.

Tableau 5 : Répartition des exploitations selon le ratio superficie de terre disponible sur nombre d'hommes de l'exploitation

Village

Classes du ratio

] 0; 1]

] 1; 2]

] 2; 3]

] 3; + [

Total

Gnimbwama
%

6

2

4

0

12

50

16,67

33,33

0

100

Nangbanli
%

9

3

0

 

12

75

25

0

0

100

Lada
%

7

3

1

1

12

58,33

25,00

8,33

8,33

100

Todouanga
%

5

4

2

1

12

41,67

33,33

16,67

8,33

100

Tchontchonga
%

10

2

0

0

12

83,33

16,67

0

0

100

Total
%

37

14

7

2

60

61,67

23,33

11,67

3,33

100

Source : Données de l'enquête

Le tableau 5 résulte du croisement de la variable village, et du ratio, superficie de terre disponible sur nombre d'homme de l'exploitation. Pour éviter les discontinuités, les ratios exprimés en ha par homme de l'exploitation, ont été regroupés en quatre classes.

Ainsi, dans 62% des exploitations enquêtées, chaque homme dispose de moins d'un hectare de champ qu'il devra repartir équitablement entre ses fils. On assiste donc à une raréfaction croissante des terres cultivables dans la périphérie du W. Cette raréfaction des terres induit deux autres phénomènes que sont la surexploitation des terres disponibles et la forte compétition foncière entre l'agriculture et l'élevage.

Le premier phénomène est à l'origine de processus bien connus à savoir la dégradation des sols, la baisse des rendements agricoles, et partant l'augmentation de la pauvreté. Cependant, les différentes exploitations adoptent de nouvelles stratégies de production pour faire face à ces difficultés (cf. sous-section 2.1.3, p.34).

Le second phénomène, c'est-à-dire la compétition foncière entre l'agriculture et l'élevage se solde comme partout au Burkina par une ascendance de l'activité agricole (cf. photo n°1).

Photo n°1 : Occupation d'espace pastoral par un champ de coton (cliché de l'auteur)

Ceci achève de rendre difficile la pratique de l'activité d'élevage. En effet, la raréfaction des pâturages est plus poussée surtout pendant les campagnes agricoles. Or, en plus du fait que le terroir est une zone de transit et d'accueil pour les transhumants (SAWADOGO, 2004), les populations qui s'y trouvent sont fortement attachées à l'activité d'élevage. Le cheptel à contenir hors des champs est très important, si bien que les conflits éleveurs/agriculteurs sont récurrents. Le phénomène prend de l'ampleur d'année en année et les figures n°1 et 2 traduisent cet état des choses.

Nombre de conflits

350

300

250

200

150

100

50

0

2005-2006 2006-2007 2007-2008

175

Campagnes agricoles

271

298

Cumuls des conflits

Figure n°1 : Evolution des conflits au sein de la population enquêtée.

pourcentage d'enquetes

40%

60%

50%

30%

20%

10%

0%

53

2005-2006 2006-2007 2007-2008

24

13

54

campagnes agricoles

35

33 2932

15

9

8

24

8

8

0

]0; 2] ]2; 4] ]4; 6] ]6; +[

Figure n°2 : Evolution du pourcentage d'enquêtés par rapport au nombre de conflits par campagne

Au regard des figures, au cours des trois dernières campagnes agricoles, le nombre total de conflits pour ce qui est des exploitations enquêtées a connu une hausse régulière, passant de 175 en 2005-2006 à 298 en 2007-2008 (Figure n°1). Plus spécifiquement, le pourcentage d'enquêtés n'ayant pas été impliqués dans un conflit au cours de la même période est passé de 53 à 29 %, tandis que celui des enquêtés ayant été 3 ou 4 fois impliqués ou plus de 6 fois par campagne à pratiquement doublé ; allant de 13 à 24 % (cf. figure n° 2). Par ailleurs, la part des enquêtés ayant été au moins une fois acteurs dans un conflit est passée de 47 % à 71 % au cours des trois campagnes. Cette situation n'est pas de nature à faciliter l'une ou l'autre des deux activités. En réalité, les dégâts causés par le bétail sur les cultures provoquent une baisse des productions végétales. On assiste également à une réduction du cheptel par vente car 49 % des enquêtés vendent souvent leurs animaux pour éviter les dégâts.

Face à ces difficultés, les paysans adoptent un certain nombre de stratégies qui sont entre autres, le pâturage illégal dans le Parc, la réduction du troupeau par vente ou à travers la transhumance, l'utilisation des résidus de culture, la recherche de fourrage. Au nombre des stratégies précitées, il conviendra de s'attarder sur quelques-unes qui peuvent jouer négativement sur l'activité de production animale (cf.2.1.3, p.34).

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