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De l'action en réduction des libéralités excessives en droit comparé rwandais et congolais

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par Fabrice KASEREKA MUSAVULI
Université de Goma - Licence 2011
  

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§2. Existence des libéralités excessives

Comme nous l'avons dit précédemment des libéralités excessives existent à cause du non respect de la réserve successorale. Ainsi en franchissant des limites imposées à l'auteur des libéralités, la réserve se fera entamée.

A. Non respect de la réserve

D'après l'auteur français du nom de André BRETON, les règles de réserve sont d'ordre public, 65(*) et par là même elles sont impératives. Ceci tient à ce qu'elle vise à protéger certains successibles contre des libéralités (excessives) du défunt qui peuvent leur être préjudiciables, et évite ainsi que la fortune familiale soit totalement ou en grande partie dilapidée par le de cujus au profit des étrangers à la famille.

Certes, la loi a fixé impérativement le montant de la réserve et toute libéralité consentie sur cette réserve, c'est-à-dire y portant atteinte, est de plano66(*)dite excessive. Toute fois cela vient à dire que même si toute personne capable a le droit de faire les libéralités sur son patrimoine (Art. 31 al. 1 de la loi n°22/99 du 12 Novembre) elle ne peut pas le faire à l'illimité.

B. Les limites imposées à l'auteur des libéralités.

Aux termes de l'art. 31 al. 1 de la loi n° 22/99 du 12 Novembre 1999 sous examen, toute personne a le droit de faire des libéralités sur son patrimoine propre pourvu qu'elles ne dépassent pas la quotité disponible. C'est dans ce sens que le droit pour chaque individu de disposer librement et à titre gratuit de ses biens, trouve sa limite dans l'institution de la réserve, laquelle constitue un droit intangible des héritiers réservataires.

Ainsi la transmission des biens compris dans la réserve s'opère par la volonté de la loi, dès lors le disposant ne peut, par aucune disposition entre vifs ou testamentaires, modifier les conditions légales de cette transmission dans un sens défavorable à l'héritier réservataire : autrement dit, des biens qui constituent la réserve doivent parvenir à cet héritier dans les conditions aussi moins bonnes que s'ils lui étaient transmis de façon purement légale.67(*)

Certainement, la réserve est une limite infranchissable du pouvoir du disposant sous peine de consentir à des libéralités excessives. Ainsi la loi a voulu garantir à certains héritiers proches du défunt appelés héritiers réservataires, un minimum successoral. L'on dirait donc que le pouvoir de la volonté est limité par l'existence des héritiers réservataires.

C. Mécanismes de protection des réservataires contre les libéralités excessives68(*)

Avant l'ouverture de la succession, les héritiers réservataires, voire les tiers peuvent avoir l'intérêt à prendre des mesures conservatoires à l'égard des biens qui composent le patrimoine du de cujus, pour éviter qu'il consente à des libéralités excessives. Pratiquent, ces mesures sont quasi-absentes pour trois raisons majeures.

Premièrement, avant l'ouverture de la succession, la quotité d'héritier réservataire n'est pas encore acquise. Cependant, la situation d'héritier présomptif est plus favorable puisqu'il pourra, dans le futur, faire réduire (c'est-à-dire annuler) les libéralités excessives faites par le de cujus, mais avant cette date, il ne possède, lui aussi, qu'une simple espérance d'héritier mais cette espérance ne lui donne absolument aucun droit.

Tant que la succession n'est pas encore ouverte, le réservataire n'est plus dans la situation d'un héritier présomptif. L'héritier réservataire ne peut pas prendre ou provoquer des mesures conservataires. Le ferait-il, il y aurait alors da sa part pacte sur succession futur prohibé. De même, le réservataire ne peut, avant le décès, critiquer les dispositions susceptibles de porter éventuellement atteinte à sa réserve.

C'est dans ce contexte que dans le jugement R.C. N° 0108/ 07/ TB/ RHGO, le juge a méconnu à la fois le texte et l'esprit de l'art. 49 al.2 en se basant uniquement sur l'art. 31 de la loi n° 22/99 du 12 /11/ 1999, ainsi annulant une donation sous motivation qu'elle dépasse la quotité disponible alors que le déposant est encore en vie.

Ensuite, la prohibition des pactes sur succession future, dont la prohibition est d'ordre public, fut affirmée avec l'insistance du code civil rwandais69(*) livre III en ses art. 29 al. 2 et 277 avec une abondante jurisprudence et doctrine à l'appui. Nous pensons que prétendre éviter les libéralités excessives du vivant de l'auteur, serait une manière d'offenser à celui qui mourra bientôt que de se préoccuper aussi bien d'avantage des biens qu'il laissera plus que de sa vie et de sa santé, et c'est une offense aux héritiers dont on semble mettre en doute, l'honnêteté. L'on serait porté à croire que vouloir protéger la réserve des héritiers du vivant du disposant serait même contraire à la loi par ce que c'est à sa mort que s'ouvre la succession.

Et en dernier lieu, le patrimoine n'est pas fixe, il est mobile et change à tout moment, négativement ou positivement. De cette manière, il est plus difficile de savoir à l'avance la valeur des biens de le de cujus sera pourvu lors de l'ouverture de la succession. Partant de ce constat, il faut indiquer que le seul mécanisme prévu par la loi fut la réduction à posteriori des libéralités qui portent atteinte à la réserve.

La réduction est ordonnée pour sauvegarder les droits des héritiers qui ne doivent pas être victimes de l'esprit de générosité excessif du disposant et il serait plus complet de dire que c'est un droit pour les réservataires. Il est à indiquer qu'en droit rwandais, le législateur a limité les biens à réduire sur les libéralités faites dans trois ans avant l'ouverture de la succession. L'on peut logiquement se demander pourquoi le législateur a bien voulu limiter ce délai à trois ans. A ce propos, le rapport de la commission de l'Assemblée Nationale de Transition (A.N.T) indique que ce délai a été retenu parce qu'il est jugé raisonnable. A notre avis cela permet aussi d'assurer la sécurité du commerce juridique.

Par ailleurs, nous pouvons remarquer que les règles de la réserve héréditaire auraient suffi à protéger les héritiers d'une manière ainsi, s'il n'y avait pas de délai de forclusion de l'action en rétrocession, qui se pose en droit rwandais. A cet égard, la prise de position est de voir dans une prescription de cinq ans un délai raisonnable en la matière, qui permettrait d'une part les réservataires d'exercer l'action en réduction dans un délai moyennement long avec plus de chance de voir leur action aboutir et d'autre part la protection des droits acquis des tiers.

A en dire plus, le droit rwandais organise comme tant d'autres législations l'ordre successoral dans le but que la transmission successorale s'opère de plano, lors du décès du disposant (testateur). Ainsi le classement des successibles se fait par ordre et par degré. Le lien de parenté et de mariage servent à déterminer ces catégories. Il ya quatre ordres : le 1er est l'ordre des descendants, le second est l'ordre des ascendants et collatéraux privilégiés, le troisième est l'ordre des descendants ordinaires et finalement, le 4e est l'ordre des collatéraux ordinaires. Les ascendants privilégiés sot les parents du de cujus, les collatéraux privilégiés sont les frères et soeurs.70(*)

Néanmoins lorsque le défunt laisse un conjoint-situation très fréquente dans la pratique, quels sont les droits successoraux ab intestat de ce conjoint ? Tantôt  le conjoint survivant, recevant en usufruit ne laissera aux parents qu'un droit en nue-propriété sur l'ensemble ou fraction des biens de la succession. Tantôt il partagera la pleine propriété avec les parents.71(*) C'est ainsi le conjoint et les héritiers ne s'excluent pas simultanément en matière de succession.

En fait, le droit à la succession du conjoint est la continuité du devoir d'assistance des époux. Même après son décès, on présume que l'époux voulait faire bénéficier son patrimoine à son conjoint . Le droit a cependant eu le mérite de classer le conjoint parmi les héritiers de la première catégorie, et qui sont de ce fait titulaires de l'action en rétrocession. En revanche, l'art.66 de la loi n°22/99 du 12 Nov. 1999 dispose «  en cas de mariage sous le régime de la séparation des biens, les héritiers viennent à la succession dans l'ordre suivant :

1. Les enfants du de cujus

2. Le père et la mère du défunt

3. Les frères et soeurs consanguins du défunt

4. Les demi-frères et soeurs du défunt

5. Les oncles et tantes paternels et maternelles du défunt ».

C'est vraiment un régime séparatiste, qui ne reconnait nullement la vocation successorale du conjoint survivant. Et l'art. 68 de la même loi de renchérir « la succession de chacun des conjoints mariés sous le régime de la séparation des biens est dévolue, en cas de décès, à ses propres héritiers  dans l'ordre dont la question à l'art. 66 précité ».

Toujours est-il que, en droit rwandais la succession des conjoints mariés sous le régime de la communauté universelle s'effectue de façon suivante (art. 70) :

1. En cas de décès de l'un des époux, l'époux survivant assure l'administration de l'entièreté du patrimoine tout en assurant les devoirs d'éducation des enfants et d'assistance aux parents nécessiteux du de cujus ;

2. Lorsque les deux conjoints décèdent en laissant des enfants, ceux-ci succèdent à l'entièreté du patrimoine mais doivent assister leurs grand pères et grands-mères ; lorsque les enfants ne sont pas consanguins, le patrimoine est divisé en deux, chaque enfant étant appelé à la succession de son parent ;

3. Lorsque les époux décèdent sans laisser d'enfants, le patrimoine est partagé en deux, la moitié étant attribué aux successeurs du mari, et l'autre revenant aux successeurs de la femme ;

4. Lorsque le veuf ou la veuve n'a pas d'enfant avec le de cujus, il lui revient la moitié du patrimoine commun, l'autre moitié étant attribué aux successeurs du de cujus ;

5. Lorsque le veuf ou la veuve ne s'acquitte pas de son devoir d'assistance aux parents nécessiteux du de cujus, le conseil de famille alloue à ces derniers une part de la succession du défunt ;

6. En cas de défaillance de l'époux survivant dans son devoir d'élever les enfants du de cujus, la succession est amputée de ¾ qui sont donnés aux enfants ;

7. L'époux survivant qui n'a plus d'enfant du de cujus à sa charge et qui désire se remarier, rente en propriété de la ½ de la succession, l'autre moitié étant attribué aux successeurs du de cujus ;

8. En cas de remariage de l'époux survivant encore tenu au devoir d'éducation des enfants du de cujus, il rentre en propriété du ¼ de la succession et continue à administrer les ¾ restant pour le compte des enfants ;

9. Lorsque l'époux survivant ne se remarie pas mais donne naissance à un enfant illégitime, la ½ du patrimoine est, au jour où les enfants sont appelés à la succession, dévolue aux enfants du de cujus et l'autre moitié à tous les enfants du veuf ou de la veuve par parts égales sans discrimination entre les légitimes et les illégitimes.

Cette longue énumération donne solution à plusieurs situations dont la succession serait en mal sans issue de sortie.

A tout le moins, la réserve du conjoint survivant est controversée. Dans le régime séparatiste, le conjoint survivant ne pout pas bénéficier de la réserve parce qu'il ne figure pas sur les successibles. Mentionnons-nous toutes fois qu'en droit français, le conjoint survivant n'est pas réservataire, mais plutôt les parents en ligne directe et les ascendants en ligne directe sont des réservataires.

En effet, dans la conception rwandaise, le conjoint et les héritiers ne s'excluent pas mutuellement en matière de succession. En fait, le droit de succession du conjoint est la continuité du devoir d'assistance des époux. Même après son décès, on présume que l'époux voulait faire bénéficier son patrimoine à son conjoint. 72(*)

D. Application de la réduction en droit rwandais

Comme nous avons constaté, la réduction des libéralités excessives entraîne certaines conséquences négatives à l'égard du donataire notamment la perte du bien donné par lui d'une part, mais aussi des avantages à l'égard des héritiers réservataires qui font rentrer dans la masse successorale un bien dont le défunt avait disposé par libéralité alors qu'il dépasse la quotité disponible. 73(*)

En effet, la réduction des libéralités excessives est une action par laquelle un héritier réservataire fait rentrer dans la masse successorale un bien dont le défunt avait disposé par libéralité alors qu'il dépasse la quotité disponible. C'est ainsi que la réduction apparait par conséquent comme une sanction de la réserve. Elle permet en effet aux réservataires de préserver leurs droits qui existent depuis bien de temps mais ne deviennent effectifs qu'avec la mort de leurs auteurs donc à l'ouverture de la succession.

Avant le décès du de cujus, les réservataires n'ont que des droits qu'on peut qualifier d'hypothétiques qui ne leur permettent même pas d'appliquer des mesures conservataires tendant à protéger leurs droits, ni de s'opposer à une mutation résultant d'une libéralité consentie par le de cujus.74(*) Cependant nous, nous pensons que les enfants quand bien héritiers présomptifs peuvent faire opposition à la vente de tous les biens du patrimoine du disposant. Il peuvent dans l'intérêt suprême de la famille intenter du vivant du disposant une action en protection du patrimoine.

Voici un exemple de l'application de la réduction : Soit le de cujus X, il était veuf, il laisse 4 enfants et il avait encore ses père et mère, un frère et une soeur. Sa fortune est évaluée à 50 millions de FRW mais il avait fait des nombreuses libéralités :

1. Une donation à son fils ainé de 5 millions en 1992

2. Un legs à son 2e fils de 6 millions en 1993

3. Une donation à son père de 3 millions en 1994

4. Un legs à un ami de 4 millions en 1994

5. Une donation à sa mère de 3 millions en 1998

6. Une donation à son frère de 4 millions en 1999

Faites la liquidation de la succession sachant que le de cujus est mort en 2000.

Réponse.

1. Formation de la masse de calcul

- Détermination de l'actif brut : 50 millions

- Déduction des dettes : 40 millions c.à.d. 50 000 000 - 10 000 000

- Addition des biens donnés = 40 000000 + ( 5000 000 + 3000 000 + 3 000 000 + 4 000 000) = 55 millions.

2. Imputation des libéralités.

- La Q.D =

- La réserve héréditaire=

- Imputation des libéralités

=11000000 - (

3. Réduction des libéralités excessives

a. 1100000 - 5000000= 6000000

b. 6000000 - 3000000= 3000000

c. 3000000 - 3000000= 0.

* 65 A. BRETON, Op. cit., , p. 174.

* 66 Expression latine signifiant par abréviation aisément, sans difficulté. Lire G. CORNU, Vocabulaire Juridique, Paris, 7e éd., PUF, 2005, p.290.

* 67 A. BRETON, Op. cit., p. 185.

* 68 HABIMANA Pie, Op. cit, p. 30.

* 69 Décret du 30 Juillet 1888 portant code civil livre troisième sur les contrats ou des obligations conventionnelles tel que modifié à ces jours.

* 70 M. IMBLEAU et W. SCHABAS, Op. cit., p.142.

* 71 A. BRETON, Op. cit., p.117.

* 72 M. IMBLEAU et W. A. SCHABAS, Op. cit., p. 143.

* 73 SEKIDENDE FRANCOIS, Op. cit., p.35.

* 74 M. PLANIOL, Op. Cit., p.476.

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote