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Quelle gouvernance des risques majeurs pour une meilleure résilience des territoires?

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par Léo MASSEY
Institut catholique de Paris - Master 2 métiers du politique et de la gouvernance 2012
  

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1- La résilience des territoires face aux risques majeurs

Tous les jours les médias nous informent d'une nouvelle catastrophe dans le monde ou de la commémoration d'une catastrophe. Inondations, tempêtes, séismes, incendies, et accidents industriels surviennent avec une fréquence et une intensité qui n'a eu de cesse de se développer ces dernières années. Fukushima, Xynthia, Katrina, AZF, Tchernobyl, ... Cette liste non exhaustive de catastrophes nous renvoie tous à des évènements ultramédiatisés ayant eu des conséquences sociales et économiques désastreuses aux échelles locale, nationale et internationale. La question des risques majeurs est caractéristique des sociétés modernes empreintes de technologies sophistiquées, interdépendantes, et de plus en plus fragiles. L'impact négatif croissant des catastrophes, interpelle aujourd'hui plus que jamais l'opinion publique et les décideurs qui la représentent. L'évolution des stratégies déployées face aux risques majeurs sera étudiée en deux temps dans cette première partie.

Le premier temps traitera des liens entre les politiques et les risques majeurs. Nous y exposerons les paradigmes2 en jeu pour la gestion des risques majeurs, leur traduction politique, ainsi que l'anticipation des nouvelles formes de risques majeurs.

Dans un second temps, nous nous intéresserons au concept de résilience des territoires. Nous y exposerons la polysémie de la résilience et les relations qui lient risques majeurs et territoires, puis nous analyserons le contexte international des stratégies de résilience, avant de détailler les qualificatifs qui lui sont associés (organisationnelle, urbaine et territoriale). Nous finirons par un appel pour l'élaboration d'une traduction stratégique de ce concept en France.

1-1 L'action publique et les risques majeurs

1-1-1 Les politiques face aux paradigmes des risques majeurs

Nous allons analyser ci-dessous, les relations qui lient les politiques aux paradigmes des risques majeurs. Ces paradigmes sont présents aux niveaux sémantique, institutionnel, voire juridique. Après l'introduction des termes de Çcatastrophes> et de Çrisques majeurs>, nous présenterons la première politique française intégrant le concept de risques majeurs. Pour finir, nous exposerons les systèmes de légitimités qui déclenchent l'action publique face aux risques majeurs.

1-1-1-1 Les catastrophes et les risques majeurs : quels liens avec les politiques ?

La catastrophe peut se définir comme un évènement brutal entra»nant un nombre de décès important et/ou des dommages économiques de plusieurs centaines de millions d'euros. Deux variables permettent de caractériser une catastrophe : les impacts humains (nombre de victimes) et économiques (montant des dommages).

2 Définition du paradigme que nous retiendrons : ÇEn doctrine économique, choix des problèmes à étudier et des techniques propres à leur étude> ( Larousse.fr)

La notion de catastrophe est bien plus ancienne que le concept de risques majeurs. Les mythes bibliques comme le déluge, sont des témoins de l'intérêt très ancien des hommes pour ces évènements. Longtemps, l'ampleur désastreuse des catastrophes est supposée être le résultat de la volonté divine. Cette perception est toujours présente, en particulier dans des pays peu développés, oil la faiblesse de l'éducation scientifique et l'importance de la religion sont dominantes3.

En France, la séparation de la religion du champ politique de 1905 marque un pas important pour la gestion des catastrophes. Si Dieu n'est plus responsable des désastres naturels et des accidents, alors il nous faut trouver d'autres responsables. Le hasard ? Celui-ci est un bien trop faible argument face aux revendications des populations en quête de sécurité. Les responsables sont ainsi tout désignés : les politiques. La gestion des crises est en effet la mission première du politique. Il doit prendre les décisions dans le but de limiter les catastrophes, afin de garantir l'ordre et la sécurité de l'Etat. Cela est d'autant plus vrai si l'on considère que les crises physiques sont interdépendantes des crises sociétales. Une déclaration de guerre peut aboutir à des milliers de morts, tout autant qu'une famine peut provoquer une guerre civile. C'est ainsi que depuis toujours, même avant les prémisses de l'Etat-providence, les fonctions premières des gouvernements étaient relatives à l'ordre et à la sécurité de l'Etat.

Outre ce lien originel entre les responsables politiques et les catastrophes, il existe un autre lien bien plus pragmatique. Celui-ci correspond à la crise que provoque la catastrophe. Comme toutes les crises, elle entra»ne des changements. Et ces changements sont l'occasion pour les politiques d'imposer leur vision. Ce constat est résumé dans un article récent de Didier Heiderich et Natalie Maroun (experts communication de crise), intitulé «La fabrique de la crise par le politiqueÈ4.

Les auteurs y démontrent que les hommes politiques fabriquent les crises. Ils expliquent ce constat par plusieurs causes. La première est le résultat d'un certain besoin de reconnaissance des élus politiques. En effet, «une bonne gestion de la criseÈ par un élu lui fournira un bilan positif à même de convaincre ses administrés de lui réitérer leur confiance. La seconde cause, plus perceptible, se matérialise par la création de la peur par la crise. Cette peur étant un moteur puissant, elle permet de déclencher des actions qui appara»tront comme légitimes au regard de la gravité de la catastrophe. Le scénario des crises est toujours le même. Il se déroule en trois actes. L'évènement est d'abord hypertrophié. Ensuite l'émotion de l'opinion publique est mobilisée. Enfin, des mesures d'urgence sont annoncées. Ce scénario est soutenu par les médias qui y trouvent tous les ingrédients pour l'élaboration d'un bon sujet. Le public est ainsi amené à passer d'une émotion à une autre sans avoir le temps de recul nécessaire pour se poser des questions de fond sur les catastrophes et le concept de risques majeurs. Nous noterons que ce positionnement de sauveur incarné par les politiques n'est pas étranger au faible sentiment de responsabilité de la population face aux catastrophes. Les liens entre catastrophes, crise et politiques sont donc de deux ordres : la responsabilité que la catastrophe exige des politiques, mais aussi leur possible utilisation à des fins électorales.

3 Andreana Reale, «Acts of God(s): the role of religion in Disaster Risk Reduction', Humanitarian exchange magazine, octobre 2010

4 Didier Heiderich et Natalie Maroun,«La fabrique de la crise par le politique', Libération, le 03/05/2012

Après ces quelques réßexions sur les liens entre catastrophes, crises et politiques, nous souhaitons plus particulièrement mettre en avant la relation de cause à effet entre les risques majeurs et les catastrophes. Voici une définition synthétique de cette relation : une catastrophe matérialise l'avènement d'un ou plusieurs risques majeurs. Un risque majeur se caractérise donc par la probabilité d'occurrence d'un évènement brutal, que l'on pourra qualifier de catastrophique ou de désastreux.

En France, cette notion de risques majeurs est apparue vers la fin des années 70. Elle fut conceptualisée par le chercheur Patrick Lagadec, en référence à certains accidents technologiques (Three Miles Island, Seveso, etc.) ayant eu un fort écho dans les médias. La notion de risque majeur a recouvert également les phénomènes naturels catastrophiques dont les dég%ots considérables avaient suscité une vive émotion dans l'opinion publique. Les risques majeurs sont à opposer aux autres risques, qualifiés de «quotidiens ou de «chroniques, et qui ont une plus forte probabilité d'occurrence. Ainsi les accidents routiers, domestiques ou professionnels, ainsi que les problèmes de santé publique (tabac, alcool et drogues), ne sont pas des «risques majeurs à proprement parler.

Ces «risques chroniques sont caractérisés par une forte probabilité d'occurrence et un impact dispersé dans le temps et l'espace. Et bien qu'ils soient fortement combattus par les politiques, ils jouissent d'une perception plus conciliante auprès de l'opinion publique. En effet, la prise de risque individuelle est ici acceptée en rapport avec les bénéfices qu'elle propose (transport, travail, confort, plaisir). Les risques majeurs sont moins admis car plus complexes. Les «bénéfices des risques majeurs sont moins évidents, et mettent en jeux des prises de risques collectives. En outre, leur matérialisation en catastrophe touche des populations nombreuses dans des intervalles de temps courts. Evidement de nombreux liens existent entre «risques chroniques et «risques majeurs. Dans les accidents technologiques majeurs, les causes peuvent être liées à des incidents ou accidents que l'on qualifiera de «chroniques. Ce fat par exemple l'une des origines de l'explosion, en 1984, de l'usine chimique de Bhopal (Inde). A l'inverse certains accidents majeurs (Tchernobyl, Fukushima) peuvent créer des risques chroniques (radioactivité, pollution des sols et des nappes phréatiques).

Que ce soient des tempêtes, des tsunamis, des incendies, des inondations, ou des accidents nucléaires ou chimiques, les risques majeurs ne sont pas acceptés par la population. Cela est encore plus vrai en ce qui concerne les «nouvelles menaces telles que les pandémies, ou les actes terroristes sur lesquels nous reviendrons.

Ce refus a un impact important dans la fagon dont les politiques traitent les risques majeurs. L'opinion publique, entra»née par les médias, constitue le déterminant de la prise de décision politique. La plupart des lois en matière de risques majeurs ont ainsi une genèse intimement liée à des évènements catastrophiques. C'est le cas des directives européennes «SEVESO, éponymes de l'accident industriel de 1976. C'est également le cas de la loi «Bachelot de 2003 faisant suite à la catastrophe d'AZF de Toulouse en automne 2001.

L'opinion publique ayant déclenchée la mise en avant des problèmes à l'origine des catastrophes, les politiques sont alors amenés à se tourner vers l'expertise. L'expertise est à la fois construite et pilotée par les hauts fonctionnaires de l'Etat. En matière de risques majeurs, cette expertise nécessite une mobilisation transversale des administrations publiques qui est encore aujourd'hui en cours de structuration.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld