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Quelle gouvernance des risques majeurs pour une meilleure résilience des territoires?

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par Léo MASSEY
Institut catholique de Paris - Master 2 métiers du politique et de la gouvernance 2012
  

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1-1-1-2 A l'origine de l'action publique face aux risques majeurs, une politique de transition

Nous allons présenter un épisode révélateur de la structuration de l'action publique pour faire face aux risques majeurs. Cet épisode revient sur l'origine de l'apparition de la notion de risques majeurs dans les politiques frangaises. La description que nous allons en faire est tirée d'un article des politologues Genevieve Decrop et Claude Gilbert, datant de 1992, intitulé «L'usage des politiques de transition : le cas des risques majeurs».5

En France, c'est en 1981 que les politiques s'emparent de la notion de «risque majeur». Cela se traduit par la création d'un commissariat à l'étude et à la prévention des risques naturels majeurs par le président de la République Francois Mitterrand au lendemain de son élection. Celui-ci nomme à sa tête Haroun Tazieff, scientifique émérite, pare de la volcanologie frangaise, et personnalité médiatique reconnue. Cet acte semble ainsi indiquer de prime abord un «coup» politique. Cependant, il s'accompagne par la suite d'une décennie de structuration administrative ayant pour objet les risques naturels, ensuite étendus aux risques technologiques, et à la gestion de crises liée à ces risques.

Ce premier élan peut être défini comme une «aventure» politique plutTMt qu'une véritable politique publique telle que les chercheurs la définissent habituellement. En effet, son émergence, sa configuration particuliere, sa morphologie administrative et la quasiimpossibilité d'évaluer ses résultats font de cette gestion des risques majeurs une politique à la marge. Le premier chantier de l'équipe restreinte d'Haroun Tazieff fat la réalisation de l'inventaire des risques naturels et de leur cartographie. La loi du 13 juillet 19826, relative à l'indemnisation des victimes de catastrophes naturelles donna à ce programme toute sa légitimité.

Le décret du 10 avril 1984 transforme le commissariat en une délégation directement rattachée au Premier Ministre. Un budget et des locaux propres lui sont alors dédiés, accompagnés par de nouvelles attributions : «participer à l'elaboration des programmes d'utilisation des moyens de secours nationaux en cas de catastrophes, qu'elle qu'en soit l'origine, de proposer les mesures de coordination interministerielle necessaire» et «de proposer au Premier Ministre les mesures necessaires à l'information du public». Tous les éléments d'une action publique globale de gestion des risques majeurs sont présents dans ce texte. La loi du 22 juillet 1987 reprendra d'ailleurs l'ensemble de ces éléments.

La vision globale de la gestion des risques majeurs n'est pas sans générer des divergences au plus haut niveau de l'Etat, en particulier avec le ministere de l'Industrie. Cependant, il est également intéressant de souligner l'observation bienveillante du ministere de l'Environnement qui voit, de par les catastrophes, ses themes remis à l'ordre du jour. Ainsi, lors de la cohabitation de 1986, le ministere de l'Environnement dirigé par Alain Carignon intégra le secrétariat d'Etat aux risques majeurs. Avec l'intégration de l'objet «risque majeur» dans le ministere de l'Environnement, le rTMle central de Tazieff se

5 Genevieve Decrop et Claude Gilbert, «L'usage des politiques de transition : le cas des risques majeurs», In:Politiques et management public, vol. 11 n° 2, 1993. La modernisation de la gestion publique : les legons de l'expérience - Actes du Cinquieme Colloque International Paris - 26/27 mars 1992 (Deuxieme partie). pp. 143-157.

6 Il est intéressant de noter qu'Haroun Tazieff lui-même avait à l'époque critiqué cette loi. Ses conséquences en termes de déresponsabilisation des citoyens face aux risques naturels constituaient l'argument principal de cette critique. Nous y reviendrons en 2-2-3

termine. Celui-ci tire alors un bilan pessimiste de son passage au gouvernement : «On avait naguere créé (...) un secrétariat d'Etat, mais on l'a fait trépasser alors qu'il n'était qu'un bébé de deux ans à peine. On avait créé une délégation aux risques majeurs, laquelle a presque aussitTMt sombré dans la vanité, le gaspillage et l'inefÞcacité d'une administration courtelinesque».

L'évaluation mitigée qu'il fait de son action peut se traduire ainsi :

- il aura fallu dix ans de batailles de frontieres et de luttes intestines pour faire entrer les risques majeurs dans la pratique administrative.

- le rTMle de l'importation du concept de risques majeurs aura surtout été médiatique.

Malgré ces critiques, le traitement politique de la question des risques naturels et technologiques n'en reste pas là. La notion de risques majeurs est consacrée par la loi du 22 juillet 1987 qui lui donne une légitimité juridique. L'architecture administrative actuelle se dessine alors. Le ministere de l'Environnement, tres impliqué dans la conception de ce texte, se charge de la mise en oeuvre de ses grandes orientations : traduction des risques dans les documents d'urbanisme, et information du public. En plus de la surveillance des établissements classés (exercé depuis 1971 par le ministere de l'Environnement via les DRIR7) est donc conÞée la «surveillance» des élus locaux en matiere de prévention des risques naturels. Pour leur part, le ministere de l'Intérieur et la sécurité civile s'afÞrment dans leur prérogative en matiere de gestion opérationnelle des crises.

L'épisode Tazieff, suivi par le «phagocytage» de la question des risques majeurs par le ministere de l'Environnement constitue une séquence révélatrice de deux transitions caractéristiques. La première est une tentative, presque avortée, de construire une stratégie globale, au sens militaire du terme, de la gouvernance des risques majeurs au sein des administrations. Cette tentative peut être qualiÞée de «politique de transition», qui a plus fait évoluer les esprits et la culture des fonctionnaires qu'elle n'a véritablement changé le mode d'administration des risques majeurs.

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