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L'extension des procédures collectives d'appurement du passif aux dirigeants sociaux

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par Stéphan Assako Mebalé
Université de Yaoundé II Cameroun - DEA droit privé option droit des affaires 2005
  

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B - L'assiette des droits des créanciers

110 - Si l'on admet la dualité des masses des créanciers, on peut donc avoir un aperçu de l'assiette des droits des créanciers.

La première masse serait constituée exclusivement des créanciers sociaux, qui ont pour gage le patrimoine de la société. La seconde masse, quant à elle comprenant à la fois les créanciers sociaux et les créanciers personnels du dirigeant , qui ont pour gage commun le patrimoine personnel du dirigeant . En pratique, les deux masses restent distinctes, mais la conséquence de l'extension entraîne une jonction nécessaire du passif du dirigeant avec celui de la personne morale.

Les droits des créanciers se répartissent de la façon suivante : les créanciers sociaux pouvant prétendre à l'actif social mais aussi à l'actif personnel du dirigeant, les créanciers personnels du dirigeant ne pouvant prétendre qu'à l'actif personnel de celui-ci ; ils n'ont aucun droit sur l'actif social .

Cette division des droits des créanciers est la conséquence de la dualité de procédure. A cet égard, le Doyen HOUIN remarque : « il faut en déduire qu'en principe les procédures ouvertes contre la personne morale et contre le dirigeant sont distinctes et ont des masses actives et passives différentes »1(*) .

111- Si l'on admet donc une distinction de masse, on arrive à une situation de concurrence sur le patrimoine personnel du dirigeant, entre les créanciers sociaux et les créanciers personnels du dirigeant. Face au mutisme du législateur communautaire, l'on ne peut manquer de s'interroger sur l'ordre de priorité de paiement, entre les créanciers sociaux et les créanciers personnels du dirigeant. Il en résulte nécessairement un risque de conflits de droit de préférence entre les créanciers personnels du dirigeant et ceux de la personne morale titulaires de privilèges généraux1(*).

La question centrale serait de savoir si les créanciers sociaux, principaux bénéficiaires des fruits de la sanction, peuvent faire jouer leurs privilèges détenus sur le patrimoine de la société, pour avoir la priorité de paiement sur le patrimoine du dirigeant ? En d'autres termes peut-on assister à une extension des privilèges généraux1(*) ?

Saisie de cette difficulté, la cour d'appel d'Aix-en-Provence dans une espèce, affirma que « dans le cas d'ouverture de la procédure collective instituée par l'article 182 de la loi du 25 janvier 1985, aucun texte ne dispose que les créances garanties par un privilège général (...) peuvent être transposées sur le patrimoine du dirigeant social à qui la procédure est étendue ».

La cour d'appel ne faisait que reprendre une solution qu'elle avait elle-même antérieurement énoncée sous l'empire de la loi du 13 juillet 1967, selon laquelle « les privilèges généraux affectant le passif social ne peuvent, étant de droit étroit, s'étendre à un autre patrimoine que celui de la société sans une disposition expresse de la loi qui est muette à cet égard »1(*).

112- À première vue, la position prise par la cour d'appel d'Aix-en-Provence pouvait sembler justifiée. Il est vrai que « tout privilège... doit être strictement restreint dans les cas expressément spécifiés par les actes législatifs qui l'ont établi et qu'il n'est pas permis de l'étendre à d'autre cas par voie analogique »1(*), ce qui a notamment pour conséquence que l'assiette d'un privilège, ne peut pas être étendue au-delà de ce qui a été prévu par le législateur1(*) .

Son arrêt est cependant cassé par la chambre commerciale de la Cour de cassation qui considère qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 1821(*) car, « dès lors que le passif personnel du dirigeant comprend celui de la personne morale, il doit être tenu compte des droits de préférence des créanciers privilégiés de la personne morale dans la procédure collective ouverte contre le dirigeant »1(*).

Cette cassation doit être approuvée car, en dépit des apparences, elle n'est absolument pas en contradiction avec le principe d'interprétation stricte des privilèges.

113- En effet, l'application de ce principe à l'assiette du privilège a seulement pour conséquence, que ne peuvent être compris dans cette assiette que les biens dont le législateur a envisagé qu'ils puissent être grevés par le privilège et, dans le cas des privilèges généraux. Cette définition légale des biens grevés est effectuée par référence à la personne du débiteur de l'obligation : seuls les biens du débiteur sont grevés mais tous les biens de ce débiteur le sont1(*). Or, l'article 189 AUPC a pour effet d'ajouter un nouveau débiteur (le dirigeant social fautif) au débiteur initial (la personne morale).

Dès lors, la conclusion s'impose d'elle-même : si, d'une part la loi affirme que tous les biens du débiteur de telle obligation sont grevés par un privilège général et si, d'autre part la loi énonce également que le dirigeant social fautif devient débiteur de cette obligation, alors les biens de ce dirigeant social sont nécessairement grevés par ledit privilège général1(*) .

Parce que le but du législateur au travers de la sanction de l'article 189 AUPC, est d'offrir un autre répondant aux créanciers sociaux mieux, une garantie supplémentaire, on peut donc conclure que le privilège est une qualité intrinsèque de la créance mise au passif du dirigeant. La garantie peut donc être exercée contre ce dernier, ou contre la société1(*). Il est dès lors parfaitement logique, que la cour de cassation ait admis que les créanciers privilégiés de la personne morale entrent dans la procédure collective de ses dirigeants, en conservant le bénéfice de leur privilège général. Au surplus, ceci est conforme à la notion même de privilège général, si l'on veut bien voir dans celui-ci non pas un droit réel, mais une simple modalité du droit de gage général du créancier, c'est-à-dire une qualité particulière de la créance en vertu de laquelle le créancier échappe à la loi de l'égalité1(*).

114- Toutefois, il faut mentionner que ce droit de gage général bien que s'exerçant sur tous les biens du dirigeant, ne touche nullement le droit de préférence que les créanciers personnels du dirigeant pourrait détenir sur n'importe quel bien particulier du dirigeant . Mais, force est de constater que les créanciers chirographaires personnels du dirigeant se verront devancer par les créanciers sociaux.

Il est donc clair que, la sanction est prioritairement patrimoniale. Mais, l'extension des procédures collectives aux dirigeants, ne limite pas ses effets aux biens du dirigeant, sa situation personnelle est aussi affectée.

* 223 - R. HOUIN, rép. Soc. , 1er édit. , Faillite et règlement judiciaire, n° 382 in fine . cité par ARTZ. L'auteur cite encore des hypothèses oû l'on assiste obligatoirement à la composition de deux masses distinctes, lorsque le dirigeant a été déclaré en redressement judiciaiare ou en liquidation des biens avant la personne morale qu'il contrôlait et lorsque la mesure prise à l'encontre du dirigeant diffère de celle prise à l'encontre de la personne morale.

* 224 - Pour l'énuméraion des privilèges généraux. Voir les articles 106, 107 et 108 AUS.

* 225 - CROCQ (P), La réaffirmation d'un théorème : l'assiette d'un privilège général augmente à proportion de l'extension ou de la quasi extension de la procédure collective du débiteur, Revue trimestrielle de droit civil 1999, p. 436 ; PIEDELIEVRE (S) , Le passif du dirigeant social mis en redressement judiciaire comprend celui de la personne morale, y compris le droit de préférence des créanciers privilégiés , Recueil Dalloz 1999, Sommaires commentés p. 301.

* 226- Aix-en-Provence, 16 juin 1978, D. 1978.IR.455, obs. appr. F. DERRIDA.

* 227 - Req. 18 mai 1831, S. 1831. 1. 221 ; adde L. AYNES et P-Y.GAUTIER, De l'application stricte des privilèges, D. 1994. Chron. 13 et s.

* 228 - V. Cass. Ch. réunies, 16 janv. 1858, S. 1858. 1. 10, concl. DUPIN AINE et note DEVILLENEUVE.

* 229- De l'ancienne loi française du 25 janvier 1985. L'article 189 AUPC est une reprise de cet article.

* 230- V., en ce sens, com. 2 nov. 1993, Bull. civ. IV, n° 379, rendu sous l'empire de l'art 101 de la loi du 13 juillet. 1967, et, sous l'empire de la loi du 25 janv. 1985, com. 6 févr. 1996, Bull. civ, IV, n° 35 ; Rev. Proc. Coll. 1997. 240 et s. obs. appr. P. Canet : JCP 1996. éd .G. I . 3960, obs. crit. PH. PETEL.

* 231 - V. PIERRE CROCQ, ibid .

* 232- Ce raisonnement repose sur un syllogisme et une application de la lettre de la loi à un cas entrant dans les prévisions du législateur. Il ne procède pas d'une analogie qui, elle,se référerait à la ratio legis pour appliquer la loi à une hypothèse présentant des seulement des similitudes avec celle qui a été envisagée de manière expresse par le législateur. Cette distinction entre déduction et induction permet d'affirmer qu'en l'espèce,le principe d'interprétation stricte des privilèges n'es nullement remis en question . V. BERGEL (J-L), Théorie générale du droit, Dalloz 1985, n°246-250. pp. 284-288.

* 233 - PEROCHON et BONHOMME, Entreprises en difficultés, instruments de crédit et de paiement, 3e éd . , n°436, note 54.

* 234 - V . , en ce sens, M . CABRILLAC et CH. MOULY, Droit des sûretés, Litec, 4e éd. 1997 , n°582 .

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore