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L'extension des procédures collectives d'appurement du passif aux dirigeants sociaux

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par Stéphan Assako Mebalé
Université de Yaoundé II Cameroun - DEA droit privé option droit des affaires 2005
  

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B - L'hétérogénéité de la catégorie de dirigeant social

27- L'extension des procédures collectives s'applique à « tout dirigeant »1(*). Il faut se référer à l'article 180 AUPC pour avoir une vision un peu plus claire de la catégorie de dirigeant. En effet, la sanction s'applique, aux « dirigeants personnes physiques ou morales, de droit ou de fait, apparents ou occultes, rémunérés ou non et aux personnes physiques représentants permanents des personnes morales dirigeantes1(*) ». On peut les distinguer soit en fonction de leur état, ou alors, en fonction de leur mode d'accession à la direction. Dans le premier cas, on distinguera les dirigeants personnes physiques des personnes morales (2), et dans le second cas, les dirigeants de droit et de fait (1).

1 - Les dirigeants de droit et de fait

28- Les dirigeants de droit, sont ceux qui ont été régulièrement désignés par l'organe compétent1(*), avec la publicité que requiert le droit des sociétés1(*).

Le lien de causalité, permettant la mise en cause de la responsabilité des dirigeants de droit, découle de la nature même de leur fonction. Il est mis à leur charge, une obligation de moyen, par laquelle ils doivent réaliser l'objet social en y apportant toute leur diligence. Dès lors, la responsabilité de ces derniers pourra être engagée, si on constate que la cessation des paiements de la société peut leur être imputable, du fait des manquements graves tels que ceux décrits à l'article 189 AUPC.

29- Les dirigeants de droit, peuvent être ceux qui sont en fonctions ou retirés. La mise en cause des dirigeants retirés est nécessaire si l'on veut éviter des démissions provoquées par le seul souci d'échapper à une éventuelle responsabilité .Cependant, l'absence de prescription de l'action en extension des procédures collectives est de nature à faire planer, au-dessus de ceux des dirigeants retirés, toute leur vie durant, le spectre d'éventuelle poursuite en extension de la procédure collective ouverte contre la société qu'ils ont eu à diriger. Cet état du droit est caractéristique d'une véritable insécurité juridique.

Il serait souhaitable que l'action se prescrive par trois ans dès l'arrêté définitif de l'état des créances. En effet, dès ce moment, les juges peuvent avoir une visibilité de l'actif et du passif social, et, apprécier la part de la dette sociale mise à la charge du dirigeant fautif proportionnellement à l'impact de son comportement fautif dans la création de l'état de cessation des paiements ou son aggravation.

30- Le législateur OHADA ne définit pas la notion de dirigeant de fait. La doctrine1(*) française approuvée par la jurisprudence a essayé de définir les critères de la direction de fait.

Deux critères sont retenus pour caractériser la direction de fait : l'accomplissement d'une activité de direction, exercée de façon indépendante par la personne en cause, et l'accomplissement d'une activité positive de direction1(*) .

Ainsi, le dirigeant de fait doit être en mesure de décider du sort commercial et financier de l'entreprise, d'imposer ses choix, et de peser de façon déterminante sur la gestion1(*) . Il doit disposer d'un véritable pouvoir de décision1(*).

L'existence du dirigeant de fait est avant tout révélée par son action. On peut même considérer que « c'est l'activité qui crée le dirigeant de fait 1(*)». De nombreuses décisions se réfèrent à l'accomplissement d'une activité positive de direction1(*), ou emploient des formules équivalentes, pour désigner la personne qui a « pris une part active dans la gestion »1(*) .

31- Le terrain de prédilection de la notion de dirigeant de fait est le groupe de sociétés. En effet, à défaut de prouver la qualité de dirigeant de droit de la société mère, la notion de dirigeant de fait est le plus souvent utilisée. Mais, la seule participation, même majoritaire, d'une société dans le capital d'une autre, ne peut suffire à caractériser de sa part, une gestion de fait1(*) . Il ne peut y avoir direction de fait de la société mère, que lorsqu'elle se comporte comme un dirigeant, c'est-à-dire lorsqu'elle exerce, véritablement le pouvoir et s'immisce effectivement dans la gestion1(*) .

32- En droit OHADA, la notion d'immixtion dans la gestion, caractéristique de la gestion de fait, est liée à la notion de contrôle dans les groupes de sociétés. En effet, celui qui contrôle est celui qui détient effectivement le pouvoir de décision. Or, la détention effective du pouvoir de décision est à l'évidence, constitutive de cette « immixtion effective dans la gestion » qui caractérise la direction de fait.

Dans le corpus de l'OHADA, il y'a donc correspondance exacte, entre les notions de contrôle en droit des sociétés, et de direction de fait en droit des procédures collectives. Sachant également que, la détention directe ou indirecte de plus de la moitié des droits de vote, emporte présomption de contrôle, donc présomption de direction de fait, on pourrait conclure que la combinaison de ces textes place le droit positif africain, en opposition avec la jurisprudence française, selon laquelle, la qualité de dirigeant de fait, doit être établie par le demandeur et qu'elle ne saurait se présumer1(*).

Ainsi, le principe incontestable en droit français de l'indépendance juridique de la filiale, par rapport à la société mère, et qui impose aux demandeurs de rapporter la preuve d'une immixtion de la maison mère dans la gestion de sa filiale, est écarté par l'OHADA.

33- On peut aussi s'interroger sur le cas du commanditaire s'immisçant dans la gestion. La loi lui interdit1(*) de passer les actes de gestions externes, même par procuration. En cas de contravention, il est obligé indéfiniment et solidairement avec les associés commandités, pour les dettes et engagements de la société qui dérivent des actes de gestion qu'il a faits1(*).

Il se pose la question de déterminer à quel titre la procédure collective de la société pourrait lui être étendue : est-ce en tant que dirigeant de fait, ou en tant que associé tenu indéfiniment et solidairement du passif social ? Il serait plus logique d'assimiler l'associé commanditaire à un associé tenu indéfiniment et solidairement du passif social, et non en qualité de dirigeant de fait. D'une part, en raison de l'assimilation au commandité, dont l'extension doit se faire au titre des associés et non du dirigeant, d'autre part, en raison du caractère automatique et précoce de l'extension aux associés. Encore, faudrait-il que les actes de gestion externe du commanditaire constituent l'une des fautes graves visées à l'art 189 AUPC.

2 - Les dirigeants personnes physiques et personnes morales

34- Le dirigeant personne physique est, la personne physique qui assure la gestion quotidienne de la société, et qui la représente auprès des tiers. Le législateur a expressément prévu la désignation des dirigeants personnes physiques, dans certaines formes sociales1(*). Il va même jusqu'à faire de cette exigence, une condition dont le non respect pourrait entraîner la nullité de la nomination1(*) .

35- On pourrait se demander si un dirigeant décédé peut être sanctionné par l'extension des procédures collectives. Sur cette question, le législateur communautaire ne souffle mot. Cependant, par deux arrêts, les hauts magistrats français, admettent la possibilité d'ouvrir une procédure collective au titre de sanction, à un dirigeant décédé en cours d'instance1(*), et après son décès1(*). Cependant, les fondements de cette solution ne sont guère explicites1(*).

En effet, dans le premier arrêt, les juges du fond avaient estimé que cette action constituait une sanction devant obéir au principe de la personnalité des peines1(*). Si l'on admet ce raisonnement, la déclaration en redressement judiciaire ou en liquidation des biens des héritiers, sur le fondement d'une faute commise par leur auteur, a quelque chose d'incongru. Car, il n'est en effet aucune raison que les biens personnels des héritiers, servent de gage aux créanciers d'une personne morale, au seul prétexte que le de cujus a commis quelques malhonnêtetés dans sa gestion. Le principe de la personnalité des peines condamne une telle solution.

Mais, si on considère l'action en extension, comme une sanction civile et patrimoniale1(*), et non pénale1(*), le raisonnement sera différent. Car, les effets patrimoniaux de la sanction, pourront être supportés par les héritiers qui auront accepté la succession1(*). Cette solution permet de préserver le principe de la séparation du patrimoine du défunt, de celui des héritiers.

36- Plus intéressant, serait le cas du dirigeant personne morale. Selon l'article 180 AUPC, les sanctions des dirigeants des sociétés en procédures collectives s'appliquent aussi « aux personnes physiques représentants permanents des personnes morales dirigeants ». En effet, de la lecture combinée des articles 180 et 189 AUPC, il apparaît que, en présence d'un dirigeant personne morale, son représentant permanent, personne physique, pourrait se voir étendre la procédure collective1(*).

A y voir de près, deux situations doivent être distinguées. Dans l'hypothèse ou la personne physique représentant permanent du dirigeant personne morale, aurait accompli de son propre chef l'un des faits énumérés par la loi, il est normal de le sanctionner. Cependant, tel ne sera pas le cas, s'il existe un lien de subordination1(*) ou de mandat, entre la personne morale et son représentant personne physique, et s'il s'avère que l'acte posé est indissociable de ce lien. Dans cette hypothèse, l'extension de la procédure collective au représentant permanent ne se justifie pas. En effet, la décision prise par le représentant de la personne morale, serait en fait celle dictée par la personne morale. Par ailleurs, cette sanction pourrait être inutile dans la mesure où le plus souvent, le représentant permanent de la personne morale est un salarié de la société mère. Il serait donc plus équitable, que la sanction atteigne principalement la personne morale, qui a la qualité de dirigeant, et puis accessoirement, son représentant permanent. Encore faudrait-il que son comportement soit jugé fautif au regard de la loi.

* 63 - V. art 189 AUPC.

* 64 - V. chapitre IV du titre II de l'AUPC.

* 65 - Selon les cas, la désignation des dirigeants est le fait des statuts de la société, ou d'un acte postérieur (articles 276 AUSG (SNC), art 298 (SCS), art 323 ( SARL)., parfois il s'agit d'une nomination au sein d'un conseil(art 462 AUSG sur la nomination du PDG, et 484 quant à celle du DG) .

* 66 - SAWADOGO (F), op cit, n° 341. Cette définition se rapproche de celle donnée par la loi française du 26 juillet 1966. Sont des dirigeants de droit « toutes les personnes auxquelles cette loi attribue des pouvoir de gestion et dont la nomination est soumise à publicité ». Le critère de la publicité de la nomination ne semble pas être partagé par monsieur Yves Guyon. En effet, pour lui « ont la qualité de dirigeants de droit tous ceux qui, désignés dans des conditions régulières, ont pour mission de gérer la société sans être les préposés de celle-ci. Peu importe que la désignation ait ou non été publiée » (YVES GUYON op. cit., n° 1389 , Com. 16 févr. 1993, Rev. Soc., 1993, 644, note Y.GUYON. Dans le même sens, il a été décidé en France que le défaut de publicité de la désignation d'une société comme administrateur ne pouvait faire échec à l'application de l'article 99 de la loi du 13 juillet 1967, Cass. Fr., com. 26 janv 1988. Dalloz. 1988. Somm.377, obs. HONORAT). Nous trouvons impropre la définition du Professeur GUYON. Car, s'il est vrai que le dirigeant est celui qui a une compétence à la fois interne et externe, dès lors, la publicité de sa nomination est consubstantielle pour faire de lui un dirigeant social car, il en va de la sécurité juridique des tiers qui traite avec la société par son truchement.

* 67 - RIVES - LANGES (J-L) , La notion de dirigeant de fait, Dalloz 1975, chr VII ; LE-MOUSSIER (N.D) , La responsabilité du dirigeant de fait, Rev sociétés, juillet - septembre 1997, p. 499 et s ; TRICOT (D) , Les critères de la gestion de fait, RD patr,1996, 24 .

* 68 - C'est la jurisprudence qui a fourni des indications plus explicites sur la nature de l'activité du dirigeant de fait. La Cour d'appel de Paris dans un arrêt du 11 juin 1987 semble résumer les éléments de la direction de fait. Elle a retenu « l'immixtion dans les fonctions déterminantes pour la direction générale de l'entreprise, impliquant une participation continue à cette direction et un contrôle effectif et constant de la marche de la société en cause ». Cette définition met l'accent sur l'importance des actes accomplis quant à la conduite de la vie économique et financière de l'entreprise et au sort de celle-ci mais également sur le caractère durable et régulier de cette intervention. Bull. Joly 1987.719.

* 69 - Ce critère de l'indépendance, paraît exclure de la qualification de dirigeant de fait la personne qui se trouve placée dans une situation de subordination, notamment un contrat de travail , en vertu duquel le chef d'entreprise a autorité sur le salarié .

* 70 - Cass. Com. 20 juillet. 1973, Bull. civ.IV, n° 260, p. 233. Aussi , cass. Crim. 13 déc. 1988, Rev. sociétés 1989. 257, note B. Bouloc.

* 71 -La définition de la direction de fait, et l'identification du dirigeant, passe par une analyse de l'activité déployée par la personne susceptible d'être qualifiée de dirigeant de fait. Il s'agit en pratique, d'établir le rôle de dirigeant qu'elle a joué au sein de la société. Voir aussi, D. TRICOT, article préc.

* 72 - Cass.crim. 28 févr. 1983, Les petites affiches ,8 juin 1984, p. 37.

* 73 - Cass. crim. 11 avr 1983, Rév. Sociétés 1983. 817, note W. Jeandidier.

* 74 - Paris, 3e ch, 25 avril 1997, Mockel c/ de thore, Droit des Sociétés 1998, n° 27.

* 75 - La notion est souverainement appréciée par les juges du fond. On peut citer un arrêt ayant regardé une société mère comme un dirigeant de fait de sa filiale soumise à une procédure collective en relevant que le dirigeant de droit de cette filiale avait délégué la gestion sociale à un préposé de la société mère, que la filiale avait embauché des employés de la société mère en leur maintenant leur ancienneté, que la société mère sous-traitait des marchés obtenus par la filiale en lui imposant des prix. Aix-en-provence, 26 mai 1981, Féraud-Prox ès qual. c/ Sté Socomo-Secotub. D. 1983, somm. , p. 60, obs. F. Derrida.

* 76 - Cass. Com. 13 avril 1970, pourvoi n° 68-10. 816, Bull Joly 1970, p. 347.

* 77 - V. art 299 AUSG.

* 78 - Suivant le nombre et la gravité de ces actes, ils peuvent être obligés pour tous les engagements de la société ou pour quelques uns seulement. L'art 300 AUSG précise que les avis et conseils, les actes de contrôle et de surveillance n'engagent pas les associés commanditaires, autrement dit ne constituent pas des actes de gestion externe. V. SAWADOGO supra n° 348.

* 79 - Voir l'art 323 al 1 AUSG « la société à responsabilité limitée est gérée par une ou plusieurs personnes physiques, associées ou non ». Pour la SA avec conseil d'administration voir les articles 462 al 2 ( PDG ), 470 ( DGA), 477 ( PCA),485 ( DG). Même dans la SA avec administrateur général il faudrait penser que celui-ci soit une personne physique et ce d'autant plus que son adjoint l'est (art 510).

* 80 - C'est au sujet de la nomination du PDG. L'article 462 al 2 dispose que : « A peine de nullité de sa nomination, le président-directeur général est une personne physique ».

* 81 - Cass. Com, 21 juin 2005, M. Louis Hirou, mandataire de justice c/ M. Pierre Brouette. Note PHILIPPE ROUSSEL. Revue des sociétés 2006, p. 416.

* 82 - Cass. Com, 21 juin 2005, M. Pierre Xavier Lafon c/ M. Pascal Pimouget. Note PHILIPPE ROUSSEL. Revue des sociétés 2006, p. 416.

* 83 - Dans le premier arrêt les juges se limitent à décider que le décès du dirigeant en cours d'instance n'entraîne pas l'extinction de l'action, tandis que, dans le second arrêt, tout en affirmant que le décès du dirigeant n'empêche pas l'ouverture d'une extension sanction à son encontre, les juges cassent l'arrêt d'appel au motif que les juges du fond avaient ouvert une procédure à l'encontre de la succession du dirigeant,alors que l'indivision successorale est dépourvue de la personnalité morale .

* 84 - Cette analyse peut trouver une justification dans le fait que l'extension des procédures collectives aux dirigeants sociaux prévue à l'article 189 et suivant AUPC, présente assurément le caractère d'une sanction. Si nous ne sommes pas là dans le domaine pénal comme l'a relevé le Professeur SORTAIS, « on en est pas loin si on rappelle les termes du texte en cause ». J-P. SORTAIS, note sous cass. com. 21 juin 2005. Cité par PHILIPPE ROUSSEL, préc.

* 85 - Les auteurs classent cette sanction parmi les sanctions à caractère patrimoniale. Voir SAWADOGO, YVES (G), supra. Aussi, RIPERT (G) et ROBLOT (R) cités par GERMAIN (M) et DELEBECQUE (PH) , Traité de droit commercial, LGDJ, T. 2 , 17e éd., 2004, n°3294.

* 86 - Même si l'intention répressive du législateur est d'autant plus évidente que les situations visées par l'article 189 AUPC sont également des cas de faillite personnelle. G. RIPERT et R. ROBLOT par M. GERMAIN et PH. DELEBECQUE, op. cit ., n°3296.

* 87 - L'action ne peut nullement être poursuivie contre la succession du dirigeant, l'indivision successorale n'ayant pas de personnalité morale.

* 88 - Cette hypothèse devrait être distinguée de celle de confusion de patrimoines entre sociétés. En effet, le législateur OHADA n'a pas prévu ce cas d'extension des procédures collectives, contrairement au législateur français qui l'a prévu expressément.

* 89 - Tel l'existence d'un contrat de travail. Selon l'article 23 al 1 du code du travail camerounais définit le contrat de travail comme étant « une convention par laquelle un travailleur s'engage à mettre son activité professionnelle sous l'autorité et la direction d'un employeur en contrepartie d'une rémunération ».

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote