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La mobilisation de la démarche judiciaire dans le processus de justice transitionnelle en sociétés post-conflit: le cas du Rwanda

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par Claudette Chancelle Marie-Paule BILAMPASSI MOUTSATSI
Université protestante d'Afrique Centrale - Master II en paix et développement 2012
  

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B. Les violations du droit international humanitaire et des droits de l'homme

Les abus et les violations du droit international humanitaire sont au coeur du génocide rwandais et en constituent la conséquence. Suite à la description ci-dessus concernant le génocide au Rwanda, on pourrait simplement constater que le droit international humanitaire, droit qui s'applique dans des situations de conflit armé international ou non international et contenu dans les quatre Conventions de Genève de 194995 et les deux protocoles additionnels de 197796 n'a pas été respecté lors de la guerre civile et du génocide au Rwanda. Le droit

93 Véronique Tadjo, L'ombre d'Imana : Voyages jusqu'au bout du Rwanda, Paris, Actes du Sud, 2000, p. 124

94 Ibidem.

95 Les blessés et malades dans les forces armées en campagne (1ère Convention), les blessés, malades et naufragés des forces armées sur mer (2ème Convention), les prisonniers de guerre (3ème Convention) et les personnes civiles en temps de guerre (4ème Convention). Pour le génocide au Rwanda c'est la quatrième convention qui nous intéresse.

96 En 1977, les Conventions de Genève de 1949 ont été complétées par deux protocoles additionnels sur la protection des victimes de conflits armés internationaux et non internationaux. Toutefois, nous soulignons qu'en 2005, un troisième protocole consacré à la question de l'emblème s'est ajouté. Nous rappelons que le conflit rwandais est non international ; c'est un méso conflit complexe.

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international humanitaire est conçu pour protéger ceux qui ne participent pas ou ne participent plus aux actions hostiles et pour garantir les droits fondamentaux des civils, les victimes et les non-combattants dans un conflit armé.

Au Rwanda, les femmes et les enfants étaient une cible directe des génocidaires pour le meurtre, le viol et la mutilation. Les femmes Tutsis étaient violées systématiquement et mutilées sexuellement comme une arme de génocide. « Dans les camps par exemple, 500 000 femmes victimes ont été violées ; beaucoup furent violées brutalement et à plusieurs reprises, souvent par des hommes qui étaient connus comme séropositifs »97. Ici, l'article 3 commun aux quatre Conventions de Genève applicable aux conflits armés non internationaux qui énonce en quoi consiste un minimum de traitement humain a été violé. En effet, selon cet article, sont et demeurent prohibés, en tout temps et en tout lieu : les atteintes portées à la vie et à l'intégrité corporelle, notamment le meurtre sous toutes ses formes, les mutilations, les traitements cruels, tortures et supplices etc. Malheureusement, les génocidaires torturaient à morts les victimes. La torture et les autres traitements cruels inhumains ou dégradants sont interdits en tout temps et en toutes circonstances, à la fois par le droit international coutumier et par les conventions internationales comme la Convention contre la torture de 1984, les Conventions de Genève et les Protocoles additionnels qui s'y rapportent. Pendant les conflits armés, la torture est considérée comme un crime de guerre, et si elle a lieu dans le cadre d'une attaque généralisée ou systématique contre la population civile, à l'instar du Rwanda, elle est considérée comme un crime contre l'humanité98.

Pendant le génocide au Rwanda, l'un des supplices préférés infligés aux Tutsi était les pieds et les mains coupées. On coupait les tendons des victimes pour les empêcher de s'enfuir ; on les attachait et on les frappait. Elles devaient attendre, sans secours, d'être frappées avec une massue, violées ou tailladées à la machette. Dans le site de génocide de l'Eglise de Nyamata par exemple, se trouve Mukandori, la femme âgée de vingt-cinq ans ligotée et exhumée en 1997. On lui avait ligoté les poignets et on les avait attachés à ses chevilles. Elle a les jambes largement écartées. Son corps est penché sur le côté. On dirait un énorme foetus fossilisé. Elle a été violée. Un pic fut enfoncé dans son vagin. Elle est morte d'un coup de machette à la nuque. Parfois, les victimes étaient jetées vivantes au fond de profondes latrines et des rochers lancés les uns après les autres jusqu'à ce que le silence de la

97 Fresque Gigozi, 2012.

98 Voir la Convention contre la torture de 1984, les Conventions de Genève et les protocoles additionnels qui s'y rapportent.

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mort recouvre enfin leurs cris déchirants. La mort était devenue une fin douloureuse, agonisante, effrayante et humiliante. Les femmes et les enfants n'étaient pas seulement des victimes du génocide mais ils en étaient également des auteurs. Les enfants étaient fréquemment forcés à participer souvent en tuant leurs amis ou leurs voisins. Or l'enrôlement des enfants dans de tels actes est considéré comme crime de guerre.

De plus, parmi tant d'autres éléments, le Droit International Humanitaire fait une distinction entre biens civils et objectifs militaires. Au Rwanda, les actes de violences ont été dirigés contre des biens civils. Les écoles, les églises ont été attaquées ; les populations qui avaient trouvé refuge en ces lieux ont toutes été massacrées ; pourtant elles faisaient partie des personnes qui ne participaient pas aux hostilités : des civils. A Nyarubuye, Kibungo par exemple, l'église, le couvent et l'école de Nyarubuye furent transformés en un lieu de massacre. A peu près 20 000 personnes y ont été tuées99. A Nyamata, Bugesera, 10 000 personnes ont été tuées dans l'église et ses alentours100. Les femmes étaient systématiquement violées et abusées dans l'église pendant le massacre. A Nyangue, 2000 fidèles avaient trouvé abri dans l'église quand l'abbé Seromba donna l'ordre de démolir le bâtiment au bulldozer ; il tua ses propres fidèles dans sa propre église101. A Ntarama, Bugesera, des grenades furent jetées dans l'église102. Les victimes stupéfiées furent taillées en pièce ou fusillées. Ici, les interahamwe n'ont pas pu différencier les populations civiles des combattants du FPR afin d'épargner les civils et leurs biens ce d'autant plus que l'objectif était la destruction totale d'une ethnie. Or, ni la population civile dans son ensemble ni des civils pris individuellement ne doivent faire l'objet d'attaques. Les attaques ne peuvent viser que des objectifs militaires. En gros, la protection des femmes et des enfants qui est un thème relatif aux droits de l'homme n'a pas été respectée de même que la Convention sur la prévention et la répression du crime de génocide adoptée en 1948103 et signé par le Rwanda le 16 avril 1975, entrée en vigueur le 15 juillet 1975 pour le Rwanda.

De même, dans le contexte rwandais, si l'on se réfère à la Déclaration universelle des droits de l'homme, pierre angulaire des normes internationales en matière de droits de

99 Fresque Gigozi, 2012.

100 Idem.

101 Idem.

102 Idem.

103 Après l'Holocauste (1939-1945), les Nations Unies ont introduit une Convention sur la prévention et la répression du crime de Génocide. L'intention était d'empêcher la continuation du génocide, mais la Convention était d'application difficile et elle est restée en grande partie inefficace. L'échec de la communauté internationale d'agir d'une façon opportune et efficace au Rwanda et dans les Balkans doit nécessiter à jamais le renouvellement des efforts pour trouver des mesures préventives plus agissantes.

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l'homme, texte fondateur qui stipule que les droits de l'homme et les libertés fondamentales sont universels et garantis par tous, lors du génocide, ce sont les droits civiques et politiques qui ont été le plus bafoués notamment : le droit à la vie, le droit de ne pas être torturé et surtout le droit d'être protégé de la discrimination. Environ 800 000 personnes trouvèrent la mort dont une majorité de tutsis.

Au sortir du génocide, il fallait à tout prix éradiquer la culture de l'impunité, permettre la poursuite et le jugement des auteurs de génocide et autres crimes contre l'humanité, distinguer dans cet immense chaos les innocents des coupables, rendre justice aux victimes et reconnaître leurs droits, tout en tenant compte de la nécessité de reconstruire la société et de rétablir le dialogue social. Il fallait donc reconnaître le mal, l'exorciser par la justice, par une tentative de justice réelle car, tout crime non puni engendrera d'autres crimes. Après la victoire du Front patriotique rwandais (FPR), le gouvernement a inscrit dans ses priorités la réconciliation et la lutte contre l'impunité, conditions sine qua non de la reconstitution du tissu social déchiré. Le gouvernement s'est demandé quel processus mettre en oeuvre pour reconstruire la société et fonder les bases d'un nouveau vivre ensemble. Ainsi, la démarche judiciaire a joué un rôle important dans le processus de justice transitionnelle au Rwanda en vue de la consolidation et du rétablissement de l'unité des Rwandais qui va de pair avec l'éradication de l'idéologie du génocide. Cette démarche s'est opérée sur trois modèles notamment, les juridictions nationales, les Juridictions Gacaca104 et le Tribunal Pénal International pour le Rwanda.

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