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La libéralisation des prix au Cameroun

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par Pierre Désiré EFFA MESSI
Université de Yaoundé II -  Diplôme d'Etudes Approfondies de droit public  2008
  

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PARAGRAPHE II : LES FONDEMENTS REGIONAUX ET SOUS-

REGIONAUX

Davantage, choix d'une époque, marqué par un monde en redéfinition, que choix d'un système, la solution régionale, certes loin d'être parfaite, constitue le mode par excellence de regroupement des Etats contemporains68. Aussi, la déréglementation des prix se nourrit-elle des textes y relatifs. Elle tire ainsi ses fondements non seulement des objectifs d'harmonisation du droit des affaires en Afrique (A), mais également plus restrictivement de délimitation de l'intégration sous-régionale de la Communauté Economique et Monétaire d'Afrique Centrale (B).

A. LA DEREGLEMENTATION DES PRIX DANS L'HARMONISATION DU DROIT DES AFFAIRES EN AFRIQUE

66 ONDOA (M) « Ajustement structurel... » Op. cit., p.84.

67 Cf. Cameroun, Droits et libertés, Op. cit.,

68 SCHULDER (G), S' unir... »Op. cit. p.27.

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La déréglementation des prix est incontestablement fondée par l'esprit général et la lettre de l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires69. Elle traduit la volonté d'éliminer toutes dispositions normatives entre Etats membres en matière de prix. Cela semble être le sens dégagé autant du traité de l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires que de l'Acte Uniforme relatif aux matières commerciales générales.

1. Le traité OHADA

L'OHADA est un traité conclu entre les pays, une organisation internationale dotée de la personnalité juridique70 instituée par un traité de 1993 à Port Louis (Ile Maurice), traité ayant pris effet en 1995, après les 7 ratifications nécessaires à cet effet71.

Ainsi, le traité a le souci de favoriser la concurrence, d'assurer la sécurité juridique et judiciaire, de stimuler l'investissement, de dynamiser l'intégration régionale par une matérialisation de la libre circulation des personnes, de biens, des services et des capitaux et partant, d'élargir au maximum l'espace économique du marché commun72. Toutes choses qui postulent l'ouverture dudit marché et le démantèlement de la présence étatique.

Dans ce contexte, la recherche de la simplicité implique l'élimination de toute réglementation superflue ou contraire aux objectifs des organisations. La compatibilité entre le traité et ce processus est donc vérifiable. L'originalité du droit OHADA ne peut d'ailleurs militer qu'en faveur de cette assertion73. Le traité OHADA à travers les articles 1 et 2 énumère le commerce parmi ses matières. Ceci se traduit d'ailleurs dans le cadre de l'activation du pouvoir normateur de l'organisation, à côté de son activité consultative en matière d'affaire74. Ce pouvoir législatif semble constituer l'objet même de tout processus de

69 L'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires regroupe principalement 16 pays d'Afrique francophone : le Bénin, le Burkina Faso, le Cameroun, le Congo (Brazzaville), la Côte-d'Ivoire, le Gabon, la Guinée Conakry, la Guinée-Bissau, la Guinée-équatoriale, le Mali, le Niger, la République Centrafricaine, le Sénégal, le Tchad, le Togo et l'Union des Comores, la République Démocratique du Congo, demeure en étude des conditions d'adhésion.

70 POUGOUE (P-G), Présentation générale et procédure en OHADA, PUA, Coll. Droit uniforme, Yaoundé 1998, p.6.

71 PAILUSSEAU (J), « Le droit de l'OHADA, un droit très important et original » in L'OHADA, dix années d'uniformisation du droit des affaires en Afrique, La semaine juridique, Entreprise et affaires n°5, supplément à La semaine juridique n°44 du 28oct 2004, 78e année, JCP, p.1 ; POUGOUE (P-G), Présentation générale et procédure en OHADA, Op. cit., p.97.

72 NYAMA (J-M), Eléments du droit des affaires Cameroun OHADA, Presses de l'UCAC, Yaoundé 2002, p.11 ; FORNERIS (F.X), « Harmonising commercial law in Africa : the OHADA, Juridis périodique, n°47, juillet 2001, p.80.

73 « Le droit de l'OHADA est donc très important, il aussi original à de multiples égards, c'est le droit d'un espace juridique, et non celui d'une union économique et monétaire ; ce n'est non plus le droit d'un Etat fédéral ; c'est un droit unifié et non harmonisé ; c'est un droit essentiellement conçu par la pratique ; ce n'est pas réellement un droit des affaires, mais c'est un droit des activités économiques », PAILUSEAU (J), « Le droit de l'OHADA, un droit très important et original » Op. cit., p.1.

74 POUGOUE (G), Présentation générale et procédure en OHADA, Op. cit., p .11 et suivantes

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libéralisation à l'échelle régionale qui puise ses racines dans l'Acte Uniforme relatif au commerce général.

2. L'Acte Uniforme relatif au Droit commercial général

La présence d'Actes Uniformes semble d'emblée confirmer qu'il convient en réalité de parler plus d'uniformisation, que d'harmonisation du droit des affaires75. Ce sont des actes supranationaux directement applicables et obligatoires dans le droit interne des Etats parties. L'Acte Uniforme relatif au Droit commercial général répond au souci de libéraliser les échanges et les investissements. Cela est perceptible à l'analyse de certaines dispositions dudit acte. Par exemple, l'article 206 du Livre V, relatif à la vente commerciale consacre prioritairement la volonté des parties comme condition de formation du contrat de vente. Ceci apparaît comme une véritable invite au «laisser aller», «laisser faire» des acteurs du marché en matière de prix, préconisant toute possibilité d'ouverture du marché, aussi bien à l'échelle internationale, continentale que sous-régionale.

B. L'ENCADREMENT COMMUNAUTAIRE DE LA

DEREGLEMENTATION DES PRIX

Corollaire d'un processus de crise, suite à l'échec de l'UDEAC76, impératif de la mondialisation, orientation incontournable, l'intégration est un véritable défi dont le Cameroun est conscient77. La Communauté Economique et Monétaire d'Afrique Centrale est la forme la plus expressive et la plus dynamique d'intégration à laquelle le Cameroun adhère78. La Communauté Economique et Monétaire d'Afrique Centrale adhère au système

75 En réalité, malgré l'intitulé, il s'agit plus d'uniformisation que d'harmonisation. L'harmonisation cherche à coordonner des systèmes juridiques différents ou à respecter la sensibilité essentielle d'une législation donnée en vue de réduire les différences pour atteindre les objectifs communautaires. Alors que l'uniformisation, encore appelée unification est plus radicale et aboutit dans une matière juridique donnée à une réglementation unique, identique à tout point pour les Etats concernés. Aucune place n'étant en principe possible pour les différences. Ceci est bien le cas du Droit OHADA. Lire POUGOUE (G), Présentation... Op. cit., p.11 ; PAILUSSEAU (J), « Le droit de l'OHADA... » Op. cit., p.2.

76 L'Union Douanière des Etats d'Afrique Centrale, l'UDEAC est l'organisation prédécesseur de la Communauté Economique et Monétaire d'Afrique Centrale.

77 SCHOULDER (G), S'unir, Op. cit, p.27.

78 La CEMAC est la Communauté Economique et Monétaire d'Afrique Centrale créée le 16 mars 1996, lors du sommet de NDJAMENA (Tchad), suite à l'échec de l'UDEAC, elle regroupe en permanence 6 pays : le Cameroun, le Gabon, la Guinée-équatoriale, le Congo (Brazzaville), le Tchad et la République Centrafricaine. Le traité instituant la CEMAC signé le 16mars 1996 a été ratifié au Cameroun par décret n° 98/274 du 23 octobre 1998 portant ratification des actes constitutifs du traité instituant la CEMAC. Le Cameroun, en l'article 16 de sa charte des investissements réaffirme son adhésion audit traité.

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de l'Organisation Mondiale du Commerce et intègre également la législation de l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires. Ses règles bénéficient du principe de l'immédiateté normative79. Elle poursuit fondamentalement l'objectif de construction d'un marché commun et contribue à l'ouverture totale de l'espace économique communautaire aux Etats ressortissants de la communauté80. Non expressément consacrée cependant, la libéralisation des prix dans le cadre de la communauté découle tant des textes généraux de la Communauté Economique et Monétaire d'Afrique Centrale que d'instruments spécifiquement édictés en matière économique et de commerce.

1. Les textes généraux de la CEMAC en matière économique et commerciale

Il s'agit du traité instituant la Communauté Economique et Monétaire d'Afrique Centrale et des conventions instituant ses institutions spécialisées en matière économique.

Le traité instituant la Communauté Economique et Monétaire d'Afrique Centrale est en réalité peu disert en matière de déréglementation. Ce souci se dégage pourtant de l'analyse de ses objectifs et missions. La mission de la communauté est celle de l'intégration en général des économies des Etats membres81. C'est d'ailleurs l'objectif essentiel dégagé de la Convention de l'Union Economique de l'Afrique Centrale qui affirme la nécessité d'uniformisation des marchés des Etats membres et la condamnation de politiques sectorielles de concurrence dans le but de se conformer au principe d'une économie de marché ouverte et concurrentielle. C'est ce que traduit l'article 2 de ladite convention qui prévoit la création d'un marché commun, fondé sur la libre circulation des biens, des services, des capitaux et

79 Elles sont immédiatement applicables et directement invocables devant le juge interne, en vertu de l'article 21 de l'additif au traité de la Communauté Economique et Monétaire d'Afrique Centrale, relatif au système institutionnel et juridique de la Communauté Economique et Monétaire d'Afrique Centrale. Pour plus d'amples informations, lire Deny Simon, Le système juridique communautaire, PUF, Paris, 1997, 536 p. et ONDOA (M) « L'ajustement structurel ... », Op. cit., p.113. Même s'il faut relever avec le Professeur Alain Didier OLINGA que « la Constitution camerounaise n'offre aucune base juridique pour une telle applicabilité directe ». OLINGA (A.D), « Réflexion sur le Droit international, la hiérarchie des normes et l'office du juge au Cameroun » in « Acte de la journée d'étude du 18 juin 2004 à l'ENAM », Juridis Périodique, n° 63, 16e année, ed. spéciale, juin 2005, pp.10 et suivantes

80 DJEUKOU (J), « La CEMAC, rétrospective et perspective : réflexion sur l'étude récente du Droit communautaire de l'Afrique centrale », Juridis Périodique, n° 47, juillet 2001, pp.106-116 ; AVOM (D), « Le traité CEMAC : nouveau départ pour le processus d'intégration économique en Afrique centrale ? », RJPIC, n°..., mai-août 1999, p.58 ; ATEMENGUE (J.N), « Le droit matériel d'intégration dans la Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale. Une lecture des textes fondamentaux », Juridis Périodique, n°46, Avril, 2001, pp 106-113.

81 L'article 28, alinéa 5 de l'UDEAC, renforcé dans le cadre de la Communauté Economique et Monétaire d'Afrique Centrale préconisait déjà d'ailleurs « la recherche des moyens susceptibles d'aboutir à l'abandon progressive entre les Etats membres des pratiques commerciales restrictives ».

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des personnes. L'article 13, quant à lui, commande l'élimination entre autres « de toute autre mesure d'effets équivalents susceptible d'affecter les transactions entre les Etats membres », y compris donc les mesures nationales d'encadrement des prix. Dans la même logique, l'alinéa 2 de l'article 16 instituant des restrictions au mouvement d'investissement et des capitaux précise que « lesdites restrictions ne doivent constituer ni un moyen de discrimination arbitraire, ni une restriction déguisée au commerce des Etats membres ».

En somme et, bien que n'ayant directement pas un lien avec les prix, la Convention de l'Union Monétaire d'Afrique Centrale, relative aux politiques monétaires de la sous région se fixe pour objectif essentiel la stabilisation des prix à travers la maîtrise des taux de change. En fait, l'existence des institutions spécialisées de l'Union Monétaire d'Afrique Centrale laisse entendre qu'elle préconise une liberté réelle des prix sur le marché. Cet objectif est d'ailleurs l'objet spécifique de textes de la Communauté Economique et Monétaire d'Afrique Centrale, spécialement pris en matière économique et commerciale.

2. Les textes spécifiques de la CEMAC en matière économique et commerciale

La Communauté Economique et Monétaire d'Afrique Centrale est une institution dotée d'une personnalité juridique susceptible de générer du droit dérivé. Sur cette base, des instruments juridiques ont été spécifiquement édictés en matière économique et commerciale afin de favoriser l'intégration communautaire à travers la multiplication des échanges entre les Etats. Il s'agit de règlements dont le premier régit le commerce entre les Etats ; le deuxième, les pratiques déloyales entre les Etats ; et le troisième porte charte des investissements de la Communauté Economique et Monétaire d'Afrique Centrale.

Le règlement n°1/99/UEAC-CM-639 du 25 juin 1999, portant adoption de la réglementation des pratiques commerciales anticoncurrentielles ; et le règlement n°4/99/UEAC-CM-639 du 25 juin 1999, portant réglementation des pratiques étatiques affectant le commerce entre les Etats membres sont consubstantiels quant au fond. Le premier cependant interdit toute pratique de nature à faire obstacle au libre jeu de la concurrence telles que les ententes illicites, les abus de position dominante, les concentrations, qui réduisent

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sensiblement le commerce sur le plan communautaire et qui sont orchestrées par les entreprises. Toutes choses qui obstruent la concurrence sur le marché commun, mais aussi particulièrement la liberté des prix. Aussi a-t-il été institué des organes ou autorités communautaires chargés de l'application du Droit communautaire de la concurrence à titre exclusif. Il convient toutefois de rappeler que ces organes ne peuvent être compétents qu'à condition qu'il y ait eu entrave à la concurrence au niveau communautaire affectant sensiblement le commerce entre les Etats. Encore faudrait-il préciser à partir de quel critère une telle affectation pourrait être considérée comme sensible. En terme d'institutions, il s'agit de l'Organe de Surveillance de la Concurrence (OSC), du Conseil Régional de la Concurrence (CRC), de la Cour arbitrale et même sûrement de la Commission permanente en matière de concurrence et de protection du consommateur bénéficiant tous, bien que relativement, de pouvoir de sanction des pratiques anticoncurrentielles tant des entreprises que des Etats membres.

Le règlement n°4, quant à lui, régit justement les pratiques anticoncurrentielles, c'est-à-dire toute pratique affectant la libre détermination des prix au sein de la communauté, ou encore en constituant l'abus, il préconise « l'abandon progressif entre les Etats membres des pratiques commerciales restrictives »82. Ce règlement distingue les aides compatibles et celles non compatibles avec le marché commun et le préserve contre les effets de monopole légaux afin de garantir la concurrence. L'aide ne pouvant être sanctionnée qu'à condition d'affecter sensiblement la concurrence entre Etats membres.

Heureusement, le règlement n°17/99/CEMAC-020-CM-03 relatif à la Charte des investissements de la Communauté Economique et Monétaire d'Afrique Centrale se révèle être un véritable Droit commun des affaires destinées à améliorer l'environnement institutionnel fiscal et financier des entreprises, sans distinction, en vue de favoriser la croissance et la diversification des économies des pays membres sur la base d'une meilleure définition du rôle de l'Etat et du développement harmonieux du secteur privé à travers les investissements. Elle préconise la reconnaissance du rôle fondamental du secteur privé dans le processus économique et préconise un partenariat actif entre l'Etat, le secteur privé et la société civile qu'elle ne définit cependant pas.

L'article 10 de la Charte des investissements dénonce toute les « pratiques discriminatoires qui font obstacle au libre jeu de la concurrence ». Cet article consacre en

82 KALIEU (Y)... p.84

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filigrane la liberté du commerce et de l'industrie par cette affirmation de la libre concurrence, et donc par ricochet, de la liberté des prix.

La Charte des investissements de la Communauté Economique et Monétaire d'Afrique Centrale apparaît donc comme le texte le plus pertinent fondant la déréglementation, la libéralisation des prix à l'échelle communautaire. Il reste tout de même à déplorer l'absence d'une jurisprudence communautaire consacrant cette liberté comme cela fut le cas en droit comparé, dans l'affaire dite du «tabac, essence livre et du cognac» où le juge européen rappelle que « la fixation du prix d'un produit ou d'un service à un niveau qui ferait obstacle aux importations ou aux exportations est interdite en vertu du traité de Rome ».

En définitive, la libéralisation des prix - ou du moins- l'un de ses aspects, c'est-à-dire leur déréglementation, est fondée sur le plan externe par les règles du libre échange qui se dégage du droit substantiel de l'Organisation Mondiale du Commerce dans toutes ses composantes, mais aussi sur l'ordre juridique communautaire visant à l'échelle régionale, l'harmonisation, mieux, l'unification du droit des affaires. A l'échelle sous-régionale, l'intégration au sein de la Communauté Economique et Monétaire d'Afrique Centrale ne peut qu'être compatible avec un tel processus. Cette déréglementation, ainsi déductivement consacrée, ressemblerait à une simple exhortation si elle ne se traduisait pas plus concrètement dans le cadre de la législation nationale, c'est-à-dire interne.

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams