B. LA QUALITE DE LA RELATION AVEC
L'ART-THÉRAPEUTE ET L'IMPLICATION DU PATIENT SONT LE FONDEMENT D'UN BON
PROCESSUS
B 1. L'art-thérapeute doit répondre aux
attentes du patient : accepter ses limites et modifier son travail par
rapport à lui et à sa condition
L'art thérapeute, surtout dans ses premières
expériences dans ce domaine, risque de diriger son travail d'une
façon artistique selon ses propres goûts et plaisirs
esthétiques. L'aspect thérapeutique, dans ce cas, est
subordonné. Ici, l'art-thérapeute est d'abord un
thérapeute et doit répondre tout d'abord aux exigences des
patients. Ses compétences d'artiste sont subordonnées aux
exigences et aux caractéristiques du patient. C'est bien d'être
humble et pas prétentieux. Mettre à disposition son savoir
artistique et technique au service de l'autre, qui présente des limites,
des défaillances et des déficits. Dans le cas, par exemple, de Mr
E., il s'agit ainsi de renoncer à utiliser l'art dominant pour adopter
ceux associés. Dans la prise en charge de Mme L., il s'agit de
tolérer la frustration de son propre narcissisme et d'accepter de
limiter son travail en adoptant le temps et les capacités de la
patiente.
B.2 Les stratégies et les moyens artistiques
utilisés sont importants, mais le moyen le plus important est la
relation et sa qualité
B.2.1 Une bonne relation renforce l'alliance
thérapeutique
Il est important, dans un processus de soin avec des personnes
Alzheimer, de
redonner au patient une confiance dans l'autre, dans ce cas
vers son thérapeute. L'art-thérapeute a la responsabilité
ainsi d'adopter une attitude empathique, d'écoute et de syntonisation
avec les véritables intentions et moyens d'expression de la personne
prise en charge. Dans la danse, la syntonisation corporelle et la confiance
sont basiques pour un processus d'harmonisation corps/esprit entre les
danseurs ; dans l'expression corporelle pour donner forme aux ressentis.
Établir une relation de sympathie, de syntonie et ainsi donner une
continuité à celle-ci, permet le passage d'une bonne relation
à l'Alliance Thérapeutique, qui est une forme particulière
de relation entre thérapeute et patient basée sur des
éléments qui permettent à tous les deux d'améliorer
la santé du patient-même, grâce à son engagement.
Voilà pourquoi la durée de la relation est
importante: cette relation de confiance exige du temps ; elle grandit
avec le bon épanouissement de la relation et des activités.
B.2.2. Une bonne relation renforce l'engagement du
patient et lui permet de s'exprimer et d'exprimer ses émotions
Une bonne relation est importante aussi pour sa valeur:
reconnaître au patient sa dignité comme être humain
malgré ses conditions de fragilité et de dépendance. Un
ressenti est d'abord un ressenti corporel, puis mental et spirituel. Un bon
ressenti corporel et une agréable stimulation sensorielle sont
déjà des aspects qui favorisent la participation aux
séances. Mais, le besoin de répondre aux appels spirituels est le
bon qui amène à s'engager à faire et à
bien faire pour réaliser quelque chose qui lui plaît (
le beau) sous le regard de l'art-thérapeute. Chez le patient,
un besoin satisfait de se sentir bien et à l'aise avec l'autre, renforce
son estime, sa confiance en lui. L'importance de se sentir à l'aise, de
se sentir apprécié et accueilli par l'autre, facilite la
spontanéité de la personne et du coup lui fait exprimer ses
propres émotions. Un regard et un contact empathique font sortir ainsi
le non dit.
L'importance d'une bonne relation pour l'engagement du patient
à faire a été mis en évidence aussi par des
expériences d'ateliers collectifs à dominante arts plastiques
pour des personnes âgées atteintes de démence de type
Alzheimer et leurs proches, avec l'objectif de favoriser la relation et la
capacité de communication, au-delà des mots, entre les patients
et les autres personnes de sa famille; une forme de communication qui va
s'instaurer entre l'auteur de l'oeuvre réalisée et les autres,
fondé sur la qualité des échanges. Alors, grâce
à ces gratifications extérieures, la personne malade continuera
à produire. On donne, ainsi, la possibilité à la personne
démente de s'exprimer dans son environnement quotidien, de
réaliser seul ou ensemble des objets plaisants, ou, simplement, de
choisir un objet jugé beau et éprouver jouissance de son
rayonnement, en restaurant l'envie d'être et de faire et permettant de
voir le malade et sa pathologie autrement ( Mémoire en ligne
« Art Thérapie-Strasbourg »).
B.2.3 Une bonne relation peut aider à raviver
le regard positif de la personne sur elle- même et à renforcer
l'image de soi
Une rencontre peut naître car la personne apporte des
éléments personnels dans un
échange le plus souvent non verbal. Martha Graham, une
des pionnières de la Modern Dance, fut une des premières
danseuses à mettre en évidence la valeur et l'importance de la
danse dans un cadre relationnel et humain. Le processus d'union entre
art-thérapeute et patient, basé sur une estime et confiance
réciproques, amène la personne atteinte de démence vers
un processus de renforcement de l'image d'elle-même; ainsi l'effet
d'être soutenu par le regard positif de son propre thérapeute
donne de la valeur à ses expressions et du sens à ses ressentis.
C'est la phase 8 de l'Art
Opératoire : « au regard du
monde », un regard qui donne à la personne sa valeur et
ravive le regard positif sur elle-même.
|