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Le symbole de la paix dans le processus de démocratisation des régimes monolithiques d'Afrique noire. Le cas du Cameroun

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par Fridolin Martial FOKOU
Ecole normale supérieure de l'Université de Yaoundé I - Diplôme de professeur de l'enseignement secondaire général 2ème grade 2012
  

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2- Une crise économique et sociale importante.

Pour comprendre les raisons du mécontentement social et de la crise économique des années 1980 au Cameroun, il faut remonter aux dernières heures de la passation de pouvoir. En effet, comme le déclare l'ancien président Ahmadou Ahidjo au journaliste de la chaine nationale Henri Bandolo, « j'ai laissé un pays fort économiquement et qui fait la fierté de toute l'Afrique. En effet, le Cameroun est un pays stable où tous les indices sont au vert, ce qui augure d'un pays en bonne santé »121(*). Ces mots laissent sans doute entendre que tous les malheurs futurs de l'économie camerounaise devront être mis à l'actif de son successeur. La réponse du chef de l'Etat est sans équivoque. En effet, pour Paul Biya, « toutes les sociétés d'Etat héritées de la période Ahidjo étaient presque toutes en état de déliquescence avancée »122(*).

Ainsi, lorsque la crise économique des années 1980 atteint le Cameroun, au-delà des querelles partisanes, c'est un pays totalement affecté. Les raisons de cette faillite sont imputables aux deux régimes car en fin de compte, « l'un n'est que l'excroissance de l'autre avec toutefois quelques arrondis »123(*). En effet, le Cameroun des années 1980 avait presque tout perdu de sa superbe. Malgré la croissance exceptionnelle des années 1970-1980, « l'économie camerounaise présentait des facteurs de blocage que les statistiques officielles ne faisaient pas ressortir »124(*). De fait, l'agriculture camerounaise, principal socle de son économie est en perte de vitesse. Jean Ngandjeu en a dressé un tableau synthétique de l'état de cette agriculture à cette période :

L'agriculture concerne les trois quarts de l'économie camerounaise. Avant la manne pétrolière, elle contribuait pour plus de 70% aux recettes des devises du pays et alimentait pour près de 40% le budget de l'Etat [...] Or, le pays accuse une tendance à la stagnation et à la baisse [...] Si le Cameroun est 5ème producteur mondial de cacao, sa production stagne depuis plusieurs années. Celle du café Robusta, après avoir le niveau record de 110000 tonnes en 1984-1985, a ralentie, tandis que l'Arabica est en déclin depuis 1980125(*).

Lorsqu'on sait que le tableau dressé ci-dessus affecte en premier lieu les populations locales, on peut dès lors comprendre le contexte social du Cameroun après 1985, lorsque les rumeurs d'entrée au Fond Monétaire International (FMI) se font sentir. Le chef de l'Etat interviendra même pour se fendre de ce que « le Cameroun n'ira pas au FMI »126(*).Mais il fut très vite rattrapé par la réalité et du se résoudre à abdiquer et à prendre le chemin de New York. Voilà la lecture que Dieudonné Oyono en fait de cette décision :

Le 20 Juin 1987, Paul Biya annonçait une série de mesure pour réduire le train de vie de l'Etat. Ce fut le point de départ de l'ajustement structurel [...] Ainsi, comme de nombreux pays africains, le Cameroun est entré dans une ère d'ajustement à travers les fourches caudines des organisations du système de Brettons Wood127(*).

De fait, mettant en application ces mesures, le ministre des finances, monsieur Sadou Hayatou, par une lettre d'intention, sollicite un accord de confirmation de 18 mois portant sur un montant équivalent à 69, 523 millions de DTS128(*).

C'est dans ce contexte que l'année 1989 s'ouvre au Cameroun sous le couvert d'une année-témoin avec notamment les évènements d'Europe de l'Est qui embrase le monde entier comme une foulée de poudre. L'agitation sociale prend alors la forme de la contestation. Les îlots de paix, jusque là préservés, mutatis mutandis, sont au bord du préjudice. Et pour cause, alors que des voix s'élèvent pour réclamer l'ouverture politique, le chef de l'Etat monte au créneau lors d'une déclaration radio télévisée en Avril 1989 et y affirme que « le Cameroun aujourd'hui a un seul problème majeur , la crise économique, tout le reste n'est que manoeuvres de diversions, d'intoxications et de déstabilisations »129(*). Ce fut peut être l'erreur du régime de Yaoundé qui avait cru devoir opposer aux revendications démocratiques, l'idée d'une crise économique. Valentin Ndi Mbarga y cerne certainement l'erreur lorsqu'il écrit que « le président Paul Biya et le RDPC n'anticipent pas. Il ne semble pas se rendre compte que le glas des particularismes et des régimes totalitaires a sonné à travers le monde »130(*).

C'est sans doute cette « maladresse », ajoutée à d'autres facteurs importants comme les « appétits de pouvoirs » manifestés par l'aile progressiste, aussi bien interne qu'externe au parti, qui précipiteront à coup sûr le Cameroun dans l'épopée de la lutte pour la transition politique. Cette lutte sera toutefois gérée avec et selon les modalités peut être pas spécifiquement camerounaises, mais orientée vers la vision globale du monde de l'après guerre froide.

* 121 H. Bandolo, La flamme et la fumée, Yaoundé, SOPECAM, 1985, p. 468.

* 122 Ibid., p.489.

* 123 G. Courade, « Des complexes qui coûtent chers. La priorité agro-industrielle dans l'agriculture camerounaise », Politique Africaine, n°14, Juin 1984, p. 80.

* 124Ibid., p.10.

* 125 J. Ngandjeu, Le Cameroun et la crise. Renaissance ou Blocage ?, Paris, l'Harmattan, 1985, p.50.

* 126 Cameroon Tribune du 22 Mars 1986.

* 127 D. Oyono, Un parcours vital..., pp.124-125.

* 128 DTS signifie Droit de Tirage Spéciaux, système de convertibilité et d'équivalence des monnaies utilisé par les institutions de Brettons Wood. Cela voulait dire que le Cameroun avait besoin d'être renfloué à hauteur de 311 milliards de FCFA.

* 129 Cameroon Tribune du 14 Avril 1989, p.8.

* 130 V. Ndi Mbarga, Ruptures et continuités..., p.132.

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"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway