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L'assomption en Provence au XVIIème siècle.

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par Charlotte Siat
Université d'Aix-Marseille  - Master II Histoire de là¢â‚¬â„¢Art moderne spécialité Art moderne et contemporain 2013
  

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b. L'Assomption dans les textes du XVIIème siècle.

La fin du XVIème siècle marquée par les guerres de religion puis par une période de paix24, permet au culte marial de s'épanouir après les dommages causés par le protestantisme25.

Ce que l'on appelle la « contre-réformation »26 catholique du début du XVIIème siècle favorise l'exaltation des fêtes liturgiques dédiées à la Vierge, dont l'Assomption. L'Église devait réaffirmer la dévotion à Marie auprès des fidèles, par des processions, des pèlerinages, et une importante solennité lors des fêtes mariales.

Ce redoublement d'efforts fut gratifiant puisque, outre la famille royale, le peuple fut très réactif à l'intensification du culte de la Vierge, culte qui touche notamment de nombreux philosophes et poètes, tels que René Descartes et Pierre Corneille pour ne citer que les plus connus27. Il en est de même parmi les proches de Louis XIII, en la personne du dramaturge Jean Desmarets de Saint-Sorlin, qui traduit l'Office de la Vierge28 en 1645. Plus tard, Pierre Corneille traduit les Louanges à la Vierge29 puis à son tour en 1670 la totalité de l'Office de la Vierge.

Ces ouvrages trouvent un vif succès, en témoignent les rééditions successives : la traduction de Jean Desmarets est par exemple rééditée à deux reprises, en 1647 et en 1674. La dévotion qui entoure le culte de la Vierge et celui de l'Assomption en particulier se mesure plus précisément par l'abondance de la littérature religieuse qui s'y consacre. Ces écrits dès les premières décennies du XVIIème siècle contribuent largement au rayonnement de ce culte et de

24 L'Édit de Nantes fut prononcé le 13 avril 1598 sous le règne d'Henri IV, il amorce une période de paix. En 1685 Louis XIV le révoque avec l'Édit de Fontainebleau (18 octobre 1685).

25 De nombreux sanctuaires consacrés à la Vierge Marie furent détruit par les protestants durant les guerres de religion.

26FLACHAIRE, Charles, La Dévotion à la Vierge dans la littérature catholique au commencement du XVIIe siècle, Ernest Leroux éditeur, Paris, 1916, p.2.

27 Jacqueline Pascal, Thomas Corneille et Pierre Marbeuf ont aussi consacré plusieurs écrits à la Vierge. 28DESMARETS DE SAINT-SORLIN, Jean, L'office de la vierge Marie, mis en vers avec plusieurs autres prières, Paris, 1645.

29 Les Louanges à la Vierge sont attribuées Saint Bonaventure (1217-1274) qui fut docteur de l'Église catholique.

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la fête du 15 Août. Saint François de Sales30 dès 1618 publia un Sermon pour le jour de l'Assomption31. Son discours, comme pour assoir un peu plus le culte catholique, met en avant le parallèle entre l'Immaculée conception et l'Assomption32. Parmi les nombreux ouvrages consacrés à la Vierge, Saint François de Sales se démarque par l'austérité de son écriture, avant tout destinée à faire croître la vertu chez les fidèles. Ce souci d'instruction morale fait aussi écho à un autre type de littérature religieuse qui se développe simultanément, en particulier chez les Jésuites. Ces écrits ont pour vocation de s'adresser aux fidèles en faisant appel à leur imagination et leur sensibilité. En littérature cette tendance se traduit par de nombreuses interprétations allégoriques, souvent accompagnées de démonstrations de tendresse et une dévotion exacerbée. Mais c'est pour ces mêmes raisons que ce courant littéraire trouve aussi aisément un public, la liberté de style employée dans ces ouvrages les rendant particulièrement accessibles.

A l'exact opposé, un courant littéraire religieux empreint de théologie mystique aborde également le culte marial. Ce sont des ouvrages destinés aux plus pieux fidèles, qui cherchent avant tout une piété austère et de ce fait exemplaire. Pour exemple nous pouvons citer le cardinal Pierre de Bérulle33dont les textes mettent en oeuvre un style complexe, que l'on peut qualifier de baroque par la multitude des effets utilisés. Dans le Discours de l'état et des grandeurs de Jésus (...)34, il y aborde l'Assomption en débutant son raisonnement par le lien entre la fin de la vie de Marie et le mystère de l'Incarnation35, duquel découle toute son

30 François de Sales (1567-1622) fut évêque de Genève de 1602 jusqu'à sa mort. Il est le fondateur de l'ordre de la Visitation, et un proche de Louis XIII.

31SALES, François de, Sermon pour le jour de l'Assomption, Paris, 1618.

32 « Il y a quantité de très belles et utiles considérations à faire sur ce sujet ; mais je me restreins à n'en dire que deux : La première est, savoir comment cette glorieuse Vierge reçut Notre-Seigneur dans ses chastes entrailles lorsqu'il descendit du ciel en terre : et l'autre, comment Notre-Seigneur la reçut lors qu'elle quitta la terre pour aller au ciel. », SALES, François de, Sermon pour le jour de l'Assomption, Paris, 1618, p.330.

33 Pierre de Bérulle (1575-1629), fut nommé cardinal en 1627 par le pape Urbain VIII. Il fonde en 1611 la Société de l'Oratoire, pendant français de la Congrégation de l'Oratoire fondée à Rome en 1575.

34BÉRULLE, Pierre de, Discours de l'état et des grandeurs de Jésus, par l'union ineffable de la Divinité avec l'humanité, et de la dépendance et servitude qui lui est due et à sa très-sainte mère, en suite de cet état admirable, A Estiene Éditeur, Paris, 1623.

35 D'après la théologie chrétienne le mystère de l'Incarnation est l'action suivant laquelle le verbe de Dieu se serait matérialisé en Jésus-Christ, sous la forme d'un homme, pour accomplir sa mission salvatrice.

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analyse : la Vierge était prédestinée à recevoir de glorieux privilèges, dont celui de sa montée au ciel.

Nous pouvons associer les écrits de Pierre de Bérulle à ceux du prêtre François Bourgoing36, qui lui aussi dédie un long récit à la Vierge. Bourgoing privilégie cependant un langage moins austère pour davantage exalter l'image même de Marie.37 En s'appuyant sur l'Ascension du Christ, il donne l'explication du triomphe de la Vierge :

« Il38 était semblable et imitait celui de l'Ascension de Jésus son fils, avec ses différences ; l'un s'appelle Ascension, et l'autre Assomption, parce que Jésus ressuscita et monta par sa propre vertu, mais Marie par la puissance de son fils, c'est pourquoi elle a été prise et enlevée au ciel(...) »39

Le début du XVIIème siècle est marqué par cette multitude d'ouvrages consacrés au culte marial, cette littérature participant activement à son progrès et à son épanouissement, dont celui de l'Assomption. Comme nous l'avons précédemment souligné, la volonté de l'Église catholique est avant tout de renouveler la foi et la piété propre au catholicisme, en réaction au protestantisme.

Mais il ne s'agit que d'un élément qui explique une telle abondance d'écrits dédiés à Marie : il ne faut pas oublier de percevoir la manifestation d'un sentiment religieux propre à une époque, au XVIIème siècle.

36 François Bourgoing (1585-1662), s'associe avec six autres prêtres au cardinal Pierre de Bérulle dans la création de la Congrégation de l'Oratoire.

37« Oh chaste et virginal corps de Marie, le plus pur, le plus saint, le plus beau et glorieux du Paradis après celui de Jésus, et par-dessus tous les corps glorifiés des Saints. », BOURGOING, François, Les Vérités et excellences de Jésus Christ N. S. communiquées à sa sainte mère, et aux saints : disposées par méditations sur les mystères et fêtes de la Sainte Vierge & des saints, Paris, 1634, p.39.

38 Le triomphe de l'Assomption de Marie.

39BOURGOING, François, Les Vérités et excellences de Jésus Christ N. S. communiquées à sa sainte mère, et aux saints : disposées par méditations sur les mystères et fêtes de la Sainte Vierge & des saints, Paris, 1634, p.42.

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La vie des fidèles est empreinte d'une atmosphère mystique, particulièrement exacerbée au début du siècle. Les ouvrages religieux ont donc pour mission de livrer aux lecteurs un exemple parfait de piété, mais surtout conforme aux conventions de la société.

Celle-ci va justement être marquée par un évènement décisif dans la tradition du culte de l'Assomption, faisant du Grand Siècle celui de l'apothéose des arts consacrés à la Vierge. En effet c'est en 1638 que l'Assomption devient une fête patronale en France par le voeu de Louis XIII40.

Cette ordonnance prononcée par le roi est intimement liée au contexte historique, mais surtout politique du royaume. Il est important d'en rappeler les grandes lignes afin de comprendre la portée de ce texte.

Après la régence mouvementée de Marie de Médicis41, le début du règne de Louis XIII est marqué par la relation conflictuelle qui le lie à sa mère.

L'entrée, en 1624, de Richelieu42au Conseil, sous l'impulsion de Marie de Médicis, sonne le retour de la lutte contre les protestants mais aussi celle contre la noblesse, alors oublieuse de ses devoirs. Les complots visant le cardinal de Richelieu continuent pourtant à se répandre et visent parfois même le roi.

Au même moment, ce que nous appelons la guerre de Trente Ans a déjà débuté43. La France prend parti dans cette guerre en 1634, au côté des puissances européennes protestantes, malgré la lutte contre les hérétiques alors toujours en vigueur.

Louis XIII et Richelieu entendaient combattre la maison des Habsbourg44, mais la France ne disposait pas d'une armée et d'une marine suffisamment puissantes pour servir ce dessein.

40 Louis XIII (1601-1643) fils d'Henri IV et de Marie de Médicis, fut roi de France de 1610 jusqu'à sa mort.

41 Marie de Médicis fut régente de France de 1610 à 1614, date à laquelle Louis XIII est déclaré majeur.

42 Richelieu fut le ministre de Concini, alors favori de Marie de Médicis. Exilé en Avignon, Richelieu bénéficie du soutien de la mère de Louis XIII pour entrer au Conseil, en tant que premier ministre du roi.

43 La guerre de Trente Ans (1618-1648) oppose l'Eglise catholique romaine (les Habsbourg d'Espagne et le Saint-Empire germanique) aux Etats allemands protestants du Saint-Empire (auxquels se sont alliés les Provinces-Unies et les pays scandinaves).

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C'est en 1636 que Richelieu envoie une lettre à Louis XIII, porteuse des prémices du voeu du roi de 1638, particulièrement décisif dans l'affirmation de l'Assomption au sein des fidèles du XVIIème siècle. Le cardinal présente donc au roi la proposition suivante ;

« Rueil, 19 mai1636. On prie Dieu à Paris, par tous les couvents, pour le succès des armées de votre Majesté. On estime que si elle trouvait bon de faire un voeu à la Vierge avant que ses armées commencent à travailler, il serait bien à propos. On ne prétend pas que ce voeu soit de difficile exécution. Les dévotions qui se font maintenant à Notre-Dame de Paris sont très grandes ; s'il plait à votre Majesté d'y donner une belle lampe et la faire entretenir à perpétuité, ce sera assez et je me charge de faire exécuter sa volonté en ce sujet. Un redoublement de dévotion envers la mère de Dieu ne peut que produire de très bons résultats. »45

Richelieu, dans cette courte lettre, propose au roi de faire un voeu à la Vierge Marie ; pour cela, et probablement afin de lui en faciliter l'exécution, il suggère au roi de faire brûler une lampe en l'honneur de la Vierge, et lui en assure l'entretien par ses soins.

Les mois qui suivent cet échange46, plongent les parisiens dans la tourmente avec l'avancée des troupes Espagnoles en Picardie et la prise de Corbie (dans la Somme) en Août 1636.

Peu de temps après, le cardinal de Richelieu mobilise le peuple de Paris depuis l'hôtel de ville, avec succès puisque les volontaires, les armes et l'argent affluent de toutes parts47.

44 Ou Maison d'Autriche, d'où sont issus les empereurs de l'Empire d'Autriche, du Saint-Empire romain germanique, et plusieurs rois d'Espagne, du milieu du XVème au XVIIIème siècle avec l'Empire austro-hongrois.

45VAULGRENANT, Maurice de, Le voeu de Louis XIII, In: Revue d'histoire de l'Église de France, Tome 24, N°102, 1938, p.49.

46 Le roi Louis XIII répond à la lettre de Richelieu en déclarant que l'idée lui plait, et s'assure de son exécution à deux reprises d'ici à la fin du moi de mai.

47 Maurice Vaulgrenant qualifie cette affluence d'hommes et d'argent de « magnifique élan de patriotisme ». VAULGRENANT, Maurice, Le voeu de Louis XIII, In: Revue d'histoire de l'Église de France, Tome 24, N°102, 1938, p.50.

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L'armée royale française repousse les lignes ennemies et siège devant Corbie, avant la capitulation de la ville en novembre 1636.

Louis XIII, que nous savons très pieux48, remercie Dieu pour cette victoire militaire, et c'est le Père Joseph49 qui le premier suggère au roi de placer son État et sa personne sous la protection de la Sainte Vierge.

L'élaboration du texte qui constituera le voeu de Louis XIII, débute au début de l'année 163750 avec l'aide de Richelieu.

C'est finalement le 10 février 1638 que le roi signe l'ordonnance qui constitue une véritable affirmation du culte de la Vierge et plus particulièrement de l'Assomption. Ci-après, les extraits51 qui nous intéressent pour cette étude :

« A ces causes, nous avons déclaré et déclarons que, prenant la très sainte et très glorieuse Vierge pour protectrice spéciale de notre royaume, nous lui consacrons particulièrement notre personne, notre État, notre couronne et nos sujets, la suppliant de nous vouloir inspirer une sainte conduite et défendre avec tant de soin ce royaume contre l'effort de tous ses ennemis, que, soit qu'il souffre le fléau de la guerre, ou jouisse de la douceur de la paix que nous demandons à Dieu de tout notre coeur, il ne sorte point des voies de la grâce qui conduisent à celles de la gloire ».

D'après ces mots nous pouvons voir ici un peu plus qu'un voeu, mais bel et bien une consécration solennelle de la personne du roi, de son royaume et de ses sujets à la Vierge.

48 Louis XIII a notamment assisté à la pose de la première pierre de Notre-Dame des Victoires, et effectué un pèlerinage à Notre-Dame des Vertus d'Aubervilliers.

49 Le Père Joseph (ou François Leclerc du Tremblay, 1577-1638) est un capucin, fondateur de la congrégation des bénédictines de Notre-Dame du Calvaire (à influence capucine et franciscaine). A partir de 1616 et jusqu'à sa mort il est connu pour faire partie du cercle rapproché de Richelieu. Il lui apporte son soutien (notamment dans la lutte contre le protestantisme), et ses conseils, ce qui l'implique fortement dans la vie diplomatique et politique du royaume.

50 Richelieu travaille à l'élaboration de ce texte, ce qui est confirmé par une lettre de la main de son secrétaire et corrigée par le cardinal.

Archives du ministère des Affaires étrangères, France, 1637, septembre-décembre, fol. 323 ; d'Avenel, Lettres..., t. V, p.908-912.

51 Le texte intégral est reproduit en Annexe 16.

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Plus loin, Louis XIII explicite les engagements qui vont de pair avec cette consécration :

« Nous admonestons le sieur archevêque de Paris et néanmoins lui enjoignons que, tous les ans le jour et fête de l'Assomption, il fasse faire commémoration de notre présente déclaration à la grande messe qui se dira en son église cathédrale et qu'après les vêpres dudit jour, il soit fait une procession en ladite église, à laquelle assisteront toutes les compagnies souveraines et le corps de ville, avec pareille cérémonie que celle qui s'observe aux processions générales les plus solennelles. Ce que nous voulons aussi être fait en toutes les églises tant paroissiales que celles des monastères de la dite ville et des faubourgs, et en toutes les villes, bourgs et villages dudit diocèse de Paris.

Exhortons pareillement tous les archevêques et évêques de notre royaume, et néanmoins leur enjoignons de faire célébrer la même solennité en leurs églises épiscopales et autres églises de leurs diocèses : entendant qu'à ladite cérémonie les cours de parlement et autres compagnies souveraines et les principaux officiers de la ville y soient présents. »52.

Le voeu de Louis XIII scelle en quelque sorte le devenir du culte marial à Paris mais aussi dans toute la province. Cette nouvelle impulsion de dévotion initiée par le roi lui-même se traduit en littérature par une accentuation des excès dans les ouvrages dédiés à la Vierge. Par l'annonce royale, la glorification du personnage de la mère de Dieu ne pouvait que s'intensifier.

Ainsi dans la deuxième moitié du siècle les écrits sont empreints du voeu du Louis XIII mais toujours de mysticisme, propre à cette époque, et qui conditionne l'orientation, le sens même

52 Ce texte est d'une importance fondamentale puisque d'un point de vue législatif il s'agit d'un acte officiel de premier ordre, qui a été enregistré par le Parlement. Il figure donc dans l'ouvrage d'Isambert, le Recueil général des anciennes lois françaises, depuis l'an 420 jusqu'à la Révolution de 1789, t. XXII (mai 1610 -mai 1643), Paris, 1829.

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du récit. Il s'agit avant tout d'interpeler les lecteurs, les fidèles, sans susciter chez eux de la peur car la figure mariale permet de rassurer, par son rôle d'intercession53 .

C'est donc une Assomption aux multiples significations qui émerge : la Vierge, peut-être par le manque de documents pionniers, permet aux auteurs d'adopter une doctrine peu rigoureuse, où l'imagination prend une place conséquente, orientée selon leurs propres convictions. Jeanne de Sainte-Ursule dans le Journal des illustres religieuses de l'ordre de Sainte-Ursule54 prête à la figure de la Vierge de nombreuses attributions, et fait clairement appel à la sensibilité des fidèles par un langage simple :

« Adorable Marie qui êtes la Reine de nos coeurs, et la Maîtresse de nos affections, qui sait si la providence divine ne vous a point élevée à la qualité de Reine, pour vous opposer aux supplices qui menacent votre Nation en un temps si calamiteux. Si vous possédez si glorieusement le titre de Reine des Anges, des hommes, et des Démons, et de tous les Royaumes, permettez que je vous dise, que vous l'êtes singulièrement du Royaume de France, pour nous secourir en un temps si malheureux, auquel nos péchés attirent les vengeances divines sur nos têtes ; en ce temps auquel la vertu gémit de se savoir abattue au pied du vice, lorsqu'elle devrait être victorieuse sur ses efforts. »55 .

Le rôle multiple de la Vierge est à son paroxysme le jour même de son Assomption : cet évènement dans les ouvrages religieux, pérennise en quelque sorte le rayonnement de cette figure mariale. Elle est à la fois Vierge de miséricorde, d'intercession, reine des pêcheurs, des saints et des anges, mère aimante et mère de douleurs56. L'Assomption réunit tous ces états, permettant aux auteurs d'orienter leur texte pour mieux convaincre.

53 « (...) il arrive souvent que ceux que la Justice du Roi de gloire et du Juge souverain pourrait damner, sont délivrés par les intercessions de cette Mère de miséricorde. », CAMBOUNET DE LA MOTHE, Jeanne de (ou Jeanne de Sainte-Ursule), Journal des illustres religieuses de l'ordre de Sainte-Ursule, avec leurs maximes, pratiques spirituelle, monastère de Bourg-en-Bresse, 1684-1690, p.326.

54CAMBOUNET DE LA MOTHE, Jeanne de (ou Jeanne de Sainte-Ursule), Journal des illustres religieuses de l'ordre de Sainte-Ursule, avec leurs maximes, pratiques spirituelle, monastère de Bourg-en-Bresse, 1684-1690. 55Idem, p.326.

56 « Marie est morte par la mort de l'amour, ou bien par la puissante et douce impétuosité du divin amour, qui allait toujours l'attirant à soi, et la séparant d'elle-même : et comme son amour croissait à chaque moment de sa

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Le XVIIème siècle voit donc le rayonnement du culte marial s'intensifier, l'Assomption, en est un élément clé et fondateur, au même titre que l'Annonciation, qui annonce les privilèges dont va bénéficier Marie à sa mort. Pour les fidèles et l'Église, il s'agit de l'aboutissement de la vie terrestre de Marie, mais aussi et avant tout le commencement de sa vie éternelle, son entrée en gloire. Ce passage de l'existence de Marie constitue une source d'écriture inépuisable pour les auteurs et d'inspiration pour les peintres de l'époque. La tradition littéraire, véritable révélateur de l'engouement suscité par l'Assomption, est à associer à la production artistique. Le parallèle entre les deux productions, l'ut pictura poesis révèle le vif succès que rencontre ce thème au XVIIème siècle.

Nous allons donc brièvement retracer la tradition picturale de l'Assomption, pour tenter de dégager la composition traditionnelle en vigueur au Grand Siècle.

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote