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L'assomption en Provence au XVIIème siècle.

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par Charlotte Siat
Université d'Aix-Marseille  - Master II Histoire de là¢â‚¬â„¢Art moderne spécialité Art moderne et contemporain 2013
  

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c. Un mode de représentation privilégié ?

Afin de répondre à cette question et après analyse de notre catalogue qui compte vingt-et-une oeuvres, anonymes et attribuées, nous pouvons dégager deux catégories principales de représentations de l'Assomption en Provence. Il convient d'y ajouter les oeuvres qui font figure d'exception dans notre étude et celles où est représenté le commanditaire. Les deux modes de représentations que nous rencontrons se répartissent ainsi : les Assomption à la composition traditionnelle et les Assomption où sont figurés des saints extérieurs à la scène.

La première catégorie, les oeuvres à la composition traditionnelle sont les plus nombreuses, sur vingt et une oeuvre recensées, huit d'entre elles sont concernées. Il s'agit de la représentation de l'Assomption qui est la plus en accord avec les textes, apocryphes mais surtout les écrits issus de la littérature religieuse du XVIIème. Si ce type de composition retranscrit fidèlement les écritures, par les personnages présents et les émotions qu'ils sont supposés ressentir, la séparation des deux registres, le terrestre et le céleste est une tradition strictement picturale. Issu des premières représentations de l'Assomption au Moyen-âge, puis repris par les grands maîtres de la Renaissance italienne, ce schéma de composition perdure ainsi durant tout le grand siècle, et particulièrement en Provence.

Ainsi nous avons placé dans cette catégorie quatre Assomption anonymes et quatre autres attribuées. Ces dernières se composent, dans un ordre chronologique, des oeuvres de Jacques Macadré240, Nicolas Mignard241, Reynaud Levieux242 et Claude Bousquet243 en Provence.

240 Voir p.45.

241 Idem, p.53.

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Pour les oeuvres anonymes, trois se trouvent également en Provence, celles de Grimaud244, d'Aups245, du Luc246, et une dans le Dauphiné au Monêtier-les-Bains247. L'ensemble de ces oeuvres fait figurer les apôtres regroupés autour du tombeau, suivant là aussi les représentations traditionnelles du thème. Nous l'avons déjà souligné, mais seule l'Assomption anonyme de l'église Saint-Pancrace d'Aups déroge à cette règle puisque les apôtres y sont disposés en cercle autour de la sépulture.

Bien que notre catalogue ne soit pas exhaustif, le panel des oeuvres étudiées nous permet toutefois d'observer les tendances qui en découlent, pour tenter de mieux comprendre la production artistique liée au thème en Provence. Ainsi au vu de la majorité des oeuvres reprenant une composition strictement traditionnelle, nous pourrions tirer la conclusion suivante ; l'Assomption bénéficie dans la région d'une résonance particulière au sein du culte des habitants. Ce qui se traduit picturalement par la reprise d'un schéma de représentation coutumier, accessible à tous par une narration qui ne conserve que l'essentiel.

La deuxième catégorie qui regroupe les Assomption où figurent des saints extérieurs à la scène, compte six oeuvres, dont quatre attribuées et deux anonymes. Nous avons là le deuxième type de représentation le plus rencontré lors de notre étude, ce qui est révélateur à plus d'un titre. De manière générale, nous avons vu que les saints sont toujours représentés par deux, à l'exception peut-être de l'oeuvre de Trophime Bigot où le Christ et sainte Anne accueillent la Vierge au ciel. Pour les autres cas, les deux saints sont exclusivement présents dans le registre terrestre. Nous en comptons donc onze au total répartis dans six oeuvres. Lorsque nous nous penchons sur la population de ces saints, la majorité d'entre eux sont issus du premier millénaire : la tendance que nous avions remarquée au cours de cette étude se

242 Idem, p.55.

243 Idem, p.57.

244 Voir p.66.

245 Idem, p.65.

246 Idem p.71.

247 Idem p.70.

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confirme donc. Ainsi huit d'entre eux sont issus des Ier, IIème, IIIème et IVème siècles248, et trois du Moyen-âge249. Le culte de ces saints est donc particulièrement présent en Provence, reflétant une société où les traditions se perpétuent, car comme le souligne Marie-Hélène Froeschlé-Chopard, « tous ces saints (...) renvoient à la première évangélisation »250 et en ce sens « à la première strate du christianisme d'une région »251. Nous pouvons aisément conclure que dans le cas de l'Assomption, l'iconographie participe à maintenir vivantes ces croyances. En effet, la scène de l'Assomption permet de regrouper les deux cultes qui font partie des trois plus populaires dans la région, la Vierge et les saints du premier millénaire. De plus, là encore nous constatons la persistance des croyances du Moyen-âge avec le culte de saint François, sainte Claire et sainte Marguerite, que nous retrouvons dans nos oeuvres dans l'Assomption anonyme d'Ollioules et celle de Laurent Brunier à Visan.

Ces deux premiers modes de représentation majoritaires, la composition traditionnelle et la composition incluant des saints qui ne sont d'ordinaire pas présents, sont le reflet dans les oeuvres dédiées à l'Assomption d'une région aux traditions religieuses fermement ancrées.

Nous trouvons également des compositions incluant le commanditaire : elles sont au nombre de trois ; les oeuvres de François Mimault à Senez252 et Entrevaux253, et l'Assomption anonyme de Guillestre254. Peu nombreuses, elles traduisent souvent la richesse, et / ou le haut rang auxquels appartiennent les commanditaires. C'est le cas pour ces Assomption qui émanent toutes du mécénat religieux avec les évêques de Senez et d'Entrevaux et l'archevêque d'Embrun. Dans ce cas les artistes répondent à une commande dont les

248 Ier siècle : saint Anne, saint Joseph. II et IIIème siècles ; saint Marcellin, saint Christophe. III et IVème siècles ; saint Sébastien, sainte Marguerite.

249 XIIème et XIIIème siècles ; saint François, sainte Claire. XIVème siècle ; saint Roch. Notons toute fois que le culte de saint Joseph fut intégré à la liturgie chrétienne qu'au XVème siècle.

250FROESCHLÉ-CHOPARD, Marie-Hélène, Espace et sacré en Provence (XVIe - XXe siècle), Les Éditions du Cerf, Paris, 1994, p.133.

251 Idem, Idem.

252 Voir p.41.

253 Idem, p.43.

254 Idem, p.66.

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directives iconographiques leurs ont été clairement exposées, lors de la signature du prix fait notamment. Cependant, la notion du lieu de destination de l'oeuvre est également importante et à prendre en compte. En se faisant représenter en spectateur, ou comme chez Mimault à Senez, acteur de la scène, les commanditaires entendent ainsi témoigner leur dévotion. Ces oeuvres exposées aux yeux des fidèles dans les églises pour lesquelles elles ont été réalisées, offrent à tous le témoignage de la grande piété de ces représentants de l'autorité chrétienne.

Enfin, quatre dernières oeuvres n'appartiennent à aucune de ces catégories, et révèlent des exceptions plus rares dans la production artistique liée au thème dans la région. Parmi celles-ci, deux oeuvres présentent une iconographie originale qui n'est vraisemblablement pas très répandue en Provence, il s'agit des Assomption anonymes de Salon-de-Provence255 et de Cavaillon256. Nous l'avons vu seul le groupe de la Vierge avec les anges est représenté. Ce mode de représentation s'inscrit en effet à l'opposé de la composition traditionnelle en deux registres. À Salon le choix du peintre pour cette iconographie a peut-être été dicté par le lieu de destination, qui impliquait une grande distance entre l'oeuvre et le spectateur. Mais le point commun entre l'Assomption de Salon et celle de Cavaillon semble être le fait qu'elles appartiennent toutes deux à un ensemble de plusieurs oeuvres. Dans ce cas la scène, réduite au groupe céleste, devient certainement suffisamment lisible lorsque celle-ci est accompagnée par d'autres oeuvres figurant les épisodes de la vie de la Vierge.

À ces deux toiles nous pouvons ajouter la copie d'après Vouet de Vernègues257 qui dévoile une facette du mécénat en Provence, cependant la commande de copie conforme ne parait pas extrêmement répandue dans la région. Nous pouvons en supposer de même pour les oeuvres commandées à des peintres parisiens. En effet l'Assomption de Philippe de Champaigne258

255 Voir p.66.

256 Idem, p.67.

257 Idem, p.73.

258 Idem, p.58.

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conservée à Saint-Julien-en-Beauchêne est la seule dans notre catalogue qui illustre cette particularité, pour le Dauphiné. Il est d'autant plus étonnant de remarquer que cette commande, qui témoigne très probablement d'une recherche de prestige, émane d'un ordre religieux, les Chartreux, établis au sein d'un si petit village. À ce sujet nous sommes forcés de constater qu'au XVIIème siècle, la diffusion des oeuvres des maîtres de la capitale par la gravure est rapide mais surtout, couvre un large territoire. Cependant, cela ne suffit pas pour affirmer que Paris avait un grand pouvoir d'attraction sur la Provence. Bien qu'elle ne dispose pas XVIIème siècle de grands noms, tels que l'on peut rencontrer dans la capitale, la présence de peintres de talents originaires de la région est incontestable. Nous l'avons vu avec François Mimault ou Reynaud Levieux par exemple. Néanmoins, nous remarquons que la notion de prestige liée à l'artiste est nettement moins marquée que dans un grand centre artistique tel que Paris. La région illustre bien la complexité du passage d'un statut d'artisan à celui d'artiste, car aucune réelle différence n'est faite dans la première moitié du siècle. Les peintres étaient alors intégrés à des corporations de sculpteurs dont le statut était lui aussi associé à celui d'un artisan. Ce que l'on pourrait reconnaitre comme un tournant dans le statut social des peintres s'opère dans la deuxième moitié du siècle, quand est créée à Aix en 1663 la confrérie de Saint Luc, qui avait pour vocation de regrouper plusieurs arts, peinture, sculpteurs ou encore broderie. Cette tardive assimilation du statut de l'artiste dans la société a peut-être contribué à en garder un certain nombre dans l'ombre. Toutefois cette étude permet de rassembler autour du thème de l'Assomption, quelques noms, ou oeuvres anonymes qui rendent compte du vivier de talent dont disposait la région.

En somme, notre catalogue qui regroupe des oeuvres de toute la Provence, du comté Venaissin et du Dauphiné, montre la prédominance du mode de représentation traditionnel dédié à l'Assomption, révélant ainsi l'étroit parallèle entre la production écrite et picturale. Mais surtout, il met en évidence l'aspect particulièrement pieux de la Provence. La région associe

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les croyances universelles aux croyances locales, qui au XVIIème maintiennent un climat mystique dans l'esprit des fidèles. La composition des oeuvres picturales en est le reflet le plus direct : l'Assomption est représentée avant tout pour servir une dévotion bien vivante.

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