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Le recours des individus auprès du panel d'inspection de la banque mondiale.

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par Jean-Eric FONKOU CHANOU
Université Yaoundé II-Soa - Master II en Relations Internationales, Filière Diplomatie, Spécialité Contentieux International 2012
  

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§II) L'analyse de la décision du Panel : l'étude des conséquences des violations des droits de l'homme sur la souveraineté et le principe de spécialité

La souveraineté est pour reprendre le Doyen Maurice Kamto citant le Professeur Paul Isoart : « l'expression d'une volonté : celle de rester maître chez soi, mais aussi d'un pouvoir, celui de la nation ... de fixer librement, sans contraintes extérieures, les règles qui déterminent à la fois le comportement de ses gouvernants, et la vie de ceux qui constituent la nation »219(*). La souveraineté de l'Etat exprime la plénitude du pouvoir, de la puissance et Georges Scelle affirme que c'est un pouvoir « illimité et inconditionné ». Mais, à l'aune des expériences des XXème et XXIème siècles, la souveraineté doit désormais céder le pas à des valeurs universelles qui justifient sa limitation et fondent de plus en plus un droit d'ingérence et une responsabilité de protéger. Cette sorte de « dieu-soleil foudroyant » pour reprendre le Professeur Maurice Kamto est aujourd'hui confrontée à l'émergence d'un ordre public international. Quelle lecture peut-on encore faire de la souveraineté de l'Etat dans un monde où la protection des droits humains influence fondamentalement le droit international ? La souveraineté qui n'admet aucune contrainte de l'Etat en droit émanant d'un pouvoir extérieur ou supérieur est-elle indemne face au contrôle qu'effectue le Panel suite au recours des individus ? Pour répondre à cette préoccupation, nous envisagerons deux idées à savoir que le respect des droits humains incombe à l'Etat sauf dérogation à sa compétence (A). Aussi, la BM et le Panel ne bénéficie pas d'une compétence générale en matière des droits de l'homme (B).

A) Le respect des droits humains incombe à l'Etat sauf dérogation à sa compétence

Le principe de compétence de l'Etat en matière de protection des droits humains (1) et l'exception à la compétence de l'Etat en matière de protection des droits humains constitueront les deux axes de notre analyse (2).

1) Le principe de compétence de l'Etat en matière de protection des droits humains

En tant que principal sujet du droit international public, l'Etat est le seul sujet du droit qui possède la souveraineté. Elle est un attribut essentiel de l'Etat et des relations internationales tel qu'il en résulte de la Charte des Nations Unies. L'article 2 Paragraphe 1 de ce texte rappelle fort justement que : « L'organisation est fondée sur le principe de l'égalité souveraine de tous ses membres ». Il en découle dès lors que la souveraineté clamée garantit l'indépendance220(*) dans la mesure où, elle exclut la création d'une autorité supérieure à celle des Etats221(*), et admet le droit d'exercer à l'exclusion de toutes autres entités, sur un territoire les fonctions étatiques. Ainsi, l'Etat souverain a l'exclusivité et la plénitude de choisir son système politique économique, social, culturel, de légiférer, de mener des activités d'intérêt général, de conclure des traités, de développer des relations diplomatiques, et surtout en ce qui nous concerne dans ce travail, le droit veiller à la protection des droits humains sur son territoire.

Cette conception absolutiste de la souveraineté peut neutraliser, du moins contrecarrer l'action du Panel, car, l'Etat demeure en raison de sa compétence territoriale, investi d'importants pouvoirs en matière de protection des droits humains.

Cependant, du fait de l'approche contemporaine du « domaine réservé »222(*) de l'Etat, le mécanisme du recours auprès du Panel peut s'exercer sans risque de voir la souveraineté s'ériger en obstacle à la protection des droits humains.

2) L'exception à la compétence de l'Etat en matière des droits de l'homme

L'interprétation stricte des limitations à la souveraineté des Etats est un principe posé par la Cour permanente de justice internationale dans l'affaire du lotus (1927) qui opposait la France à la Turquie : « Les limitations de l'indépendance des Etats ne se présument pas ». De même, dans l'affaire des essais nucléaires dans le Pacifique (1974), la CIJ réaffirma sa position traditionnelle : « Lorsque des Etats font des déclarations qui limitent leur liberté d'action future une interprétation restrictive s'impose».

Si la souveraineté signifie le pouvoir de l'Etat de décider lui-même, sans être soumis en droit à un pouvoir extérieur et supérieur elle ne dispense pas l'Etat de respecter ses propres engagements et le droit international. C'est dans ce sens qu'on est passé du domaine réservé par nature qui reconnaissait à l'Etat la responsabilité de déterminer les matières réservées à sa liberté totale, à une approche contemporaine du domaine réservé, laquelle affirme le rôle décisif du droit international pour fixer le domaine de compétence « exclusive »des Etats223(*). En bref, la souveraineté n'est nullement contradictoire avec l'existence du droit international auquel elle est indissolublement liée224(*).

Les droits de l'Homme fournissent un exemple du caractère relatif du domaine réservé et partant de la souveraineté. En effet, si l'on se réfère au Professeur R.-J. Dupuy, «les droits de l'homme sont patrimoine commun de l'humanité »225(*) et rendent de plus en plus illusoires le recours au domaine réservé de l'Etat. « Certes, nous ne vivons pas dans une société internationale apaisée et policée: des horreurs s'y commettent chaque jour et des pratiques que l'on peut parfaitement considérer comme répréhensibles et moralement condamnables y sont tolérées tout en ne se heurtant pas à des objections de nature juridique. Il n'empêche qu'au terme d'une lente évolution, qui n'est pas allée sans à coups, l'humanité s'est mise à adhérer à un minimum - oh, encore un strict minimum! - de valeurs communes qui sont à l'origine d'un ordre public international, encore très embryonnaire, mais dont l'existence n'en est pas moins indiscutable. C'est cette idée que traduit la notion de jus cogens, définie par le très fameux article 53 de la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969 »226(*).

Les normes internationales relatives aux droits de l'homme sont-elles des normes de jus cogens ? La CIJ, dans le célèbre obiter dictum de son arrêt de 1970 dans l'affaire de la Barcelona Traction, consacre la notion d'obligations erga omnes227(*). Ce sont des obligations, à propos desquelles, « vu l'importance des droits en cause, tous les États peuvent être considérés comme ayant un intérêt juridique à ce que ces droits soient protégés »228(*) ; parmi celles-ci, l'interdiction du génocide et les atteintes aux droits fondamentaux de la personne notamment l'esclavage et la discrimination raciale. Pour la Cour, dans cet arrêt, lesdites obligations sont en réalité celles qui découlent de normes impératives du droit international général229(*).

Au regard de la nature de norme de jus cogens des droits de l'homme, on doit se demander si le Panel a le droit d'étendre son contrôle au respect des droits de l'homme en général sans violer la souveraineté des Etats ? A cette question, la réponse logique est que le Panel ne viole pas la souveraineté des Etats lorsqu'il opère un contrôle du respect des droits de l'homme dans l'Etat bénéficiaire. Cette réponse se fonde sur l'argument selon lequel les droits de l'homme sont des normes impératives de droit international qui pour certaines ont une origine conventionnelle et pour d'autres, coutumière. En tant qu'instance de contrôle des droits de l'homme, le Panel dispose du droit de veiller au respect de ces normes. Mais la difficulté majeure naît du fait que sa compétence est limitée par le principe de spécialité auquel est subordonné toute OI et organes de cette entité.

* 219 Université de Nice-Sophia Antipolis. Institut du droit de la paix et du développement, Mélanges en l'honneur du Doyen Paul ISOART, Pedone, 1996, cité par M. NGUELE ABADA, « Conditionnalité et souveraineté », Colloque de la Chaire UNESCO pour les droits de l'homme et l'éthique de la coopération internationale, op. cit., p. 37.

* 220 L'arbitre Max Huber dans l'affaire de l'île de palmas avait affirmé que : « la souveraineté dans les relations entre Etats signifie l'indépendance ». Cf. C.P.A., 4 avril 1928, R.S.A., II, p. 838.

* 221 Il existe à cet effet une absence de toute subordination organique des Etats à d'autres sujets de droit international, qu'il s'agisse d'Etats ou d'OI, lesquelles ne peuvent en aucun cas prétendre constituer une structure organique supérieure aux Etats (Cf. avis de la CIJ de 1949 dans l'affaire de la réparation des dommages subis par les Nations Unies où la Cour a notamment affirmé que l'ONU « n'était ni un Etat ni un super Etat »).

* 222 Cette approche contemporaine est relevée dans un article de la CDI qui énonce que le domaine réservé est tributaire de l'évolution du droit international. Le critère matériel affirmant l'existence d'un domaine réservé par nature s'est avéré limité à cause de son ambigüité et de son caractère arbitraire. Il faut souligner à cet effet que le Pacte de la SDN (art. 15) et la Charte de l'ONU (art. 2§7) consacre cette vision moderne du domaine réservé.

* 223 Cf. Avis n°4 du 7 février 1923, C.P.J.I., Décrets de nationalité en Tunisie et au Maroc, série B, n°4, p.23-24 ; Arrêts de la CIJ dans les affaires Interhandel, (Rec. 1959, p. 24), Nottebohm (Rec. 1955, p. 20-21), du droit de passage en territoire indien (Rec. 1960, p. 33). La CPJI affirme dans cet Avis que « la question de savoir si une certaine matière entre ou n'entre pas dans le domaine exclusif de l'Etat est une question essentiellement relative : elle dépend du développement des rapports internationaux ». Il ressort de ceci que le contenu du domaine réservé dépend des nécessités de la vie internationale telles qu'elles s'expriment par le développement du droit international positif que celui-ci soit écrit ou non écrit et en fonction bien entendu de son interprétation par le juge ou par l'arbitre.

* 224 A. PELLET, « La mise en oeuvre des normes internationales des droits de l'homme - Souveraineté du droit contre souveraineté de l'État? » in CEDIN, La France et les droits de l'Homme, Paris, Montchrestien, 1990, p. 127 (pp. 101-140).  L'auteur y affirme que « la souveraineté, c'est le pouvoir soumis au droit ».

* 225 R.- J. DUPUY, La clôture du système international. La cité terrestre, Paris, PUF, 1989, pp. 113-114 cité par F. AUMOND, L'humanité dans l'oeuvre de René Jean DUPUY, Mémoire DEA en Droit international Public, Université d'Angers, 2005, p. 49. Liens www.droits-fondamentaux.org, consulté le 04 décembre 2011.

* 226 V. A. PELLET, « Cours Général : Le Droit international entre souveraineté et communauté internationale - La formation du droit international », Anuário Brasileiro de Direito Internacional, vol. II, 2007, pp. 12-74. Lien, www.alainpellet.fr, consulté le 09 décembre 2011. Selon cet art. 59 :« Est nul tout traité qui, au moment de sa conclusion, est en conflit avec une norme impérative du droit international général. Aux fins de la présente convention, une norme impérative du droit international général est une norme acceptée et reconnue par la communauté internationale des États dans son ensemble, en tant que norme à laquelle aucune dérogation n'est permise et qui ne peut être modifiée que par une nouvelle norme du droit international général ayant le même caractère».

* 227 Les obligations erga omnes sont celles qui sont opposables à l'égard de tous.

* 228 CIJ., Rec. 1970, p. 32.

* 229 A. PELLET, Cours général., op. cit. L'auteur énonce pour argument le dictum de la CIJ selon laquelle «Une distinction essentielle doit (...) être établie entre les obligations des États envers la communauté internationale dans son ensemble et celles qui naissent vis-à-vis d'un autre État dans le cadre de la protection diplomatique. Par leur nature même, les premières concernent tous les États. Vu l'importance des droits en cause, tous les États peuvent être considérés comme ayant un intérêt juridique à ce que ces droits soient protégés; les obligations dont il s'agit sont des obligations erga omnes».En d'autres termes on est dans le cas des normes obligations erga omnes qui sont également normes de jus cogens. Mais, il existe des obligations erga omnes qui ne sont pas des normes de jus cogens.

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