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La cour africaine des droits de l'homme et des peuples entre originalités et incertitudes.

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par Mamadou Alpha Kokouma DIALLO
Angers  - Master 1 Droit international et européen 2015
  

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Section II : Vers une restriction de la protection des droits de l'homme en Afrique ?

Comme il vient d'être indiquer précédemment, de reforme à reforme, l'actuelle Cour africaine des droits de l'homme et des peuples sera remplacée par une Section des droits de l'homme et des peuples (Paragraphe I) de la nouvelle Cour. De la Cour à la Section, le risque d'une restriction de la protection des droits de l'homme en Afrique est réel même si la Section des droits de l'homme de la future Cour unique héritera de l'ensemble des compétences actuelles de la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples. Ce qui laisse croire que la succession est tout de même relativement garantie (Paragraphe II).

Paragraphe I : Mise en place d'une Section des droits de l'homme à la place de la Cour

L'article 1er du Protocole de Sharm el-Sheikh dispose que : « Le Protocole relatif à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples portant création de la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples adopté le 10 juin 1998 à Ouagadougou (Burkina Faso) et entré en vigueur le 25 janvier 2004, et le Protocole de la Cour de justice de l'Union Africaine adopté le 11 juillet 2003 à Maputo (Mozambique) sont remplacés par le présent Protocole et le Statut y annexé qui en fait partie intégrante [...] ». L'article 2 du même Protocole ajoute que : « La Cour africaine des droits de l'homme et des peuples et la Cour de justice de l'Union africaine, créées respectivement par le Protocole relatif à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples portant création de la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples et l'acte constitutif de l'Union africaine, sont fusionnées en une Cour unique instituée et dénommée « la Cour africaine de justice et des droits de l'homme ». ».

Au vu de ces deux dispositions, il convient de remarquer que le Protocole de Sharm el-Sheikh abroge les Protocoles de Ouagadougou et de Maputo et se substitue à eux d'une part, et d'autre part, il supprime purement et simplement la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples et la Cour de justice de l'Union africaine qu'il remplace par la Cour africaine de justice et des droits de l'homme. Cette dernière sera donc l'organe judiciaire principal de l'Union africaine131.

131 Voir Statuts, article 2.

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La création de la Cour unique par la fusion des deux autres Cours a initialement donné naissance à deux Sections132 :

- Une section des affaires générales qui correspond à la Cour de justice de l'Union africaine. Cette section ne fera pas l'objet d'un développement dans le cadre de cette présente étude dans la mesure où elle ne traite pas de la question des droits de l'homme. Elle traite entre autres, des questions relatives au règlement des différends entre les Etats africains (à l'image de la C.I.J) d'une part, et d'autre part, celles relatives au contentieux entre l'UA et son personnel (comme la CJUE)133.

- Une Section des droits de l'homme. C'est cette dernière qui remplacera l'actuelle Cour africaine des droits de l'homme et des peuples.

Par ailleurs, à ce stade, il est permis de se demander si c'est cette Section des droits de l'homme de la Cour unique qui constituera la principale juridiction régionale des droits de l'homme en Afrique, à l'instar de la Cour européenne des droits de l'homme et la Cour interaméricaine des droits de l'homme. La réponse est sans ambigüité l'affirmative.

Toutefois, la mise ne place de la Section à la place de la Cour engendre des risques de restriction de la protection des droits de l'homme. Ce risque est d'autant plus élevé que l'Union africaine a récemment élargie le mandat du Protocole de Sharm el-Sheikh aux questions pénales. Cette reforme qui a eu lieu à Malabo (Guinée équatoriale) en juin 2014, a mis en place une troisième Section : la Section du droit international pénal134.

Ce faisant, le risque de restriction de la protection des droits de l'homme réside tout d'abord, dans la cohabitation entre la Section de droit international pénal et la Section des droits de l'homme. Cette cohabitation pourrait porter atteinte à l'efficacité et à la visibilité même de cette dernière.

Ensuite, le Protocole de Malabo vient réduire considérablement le nombre de juges de la Section des droits de l'homme. Selon l'article 10 (2) du Statut annexé au Protocole de Malabo : « La Section des droits de l'homme et des peuples de la Cour est dûment constituée de trois (3) juges ». Cela est un recul majeur non seulement par rapport au Protocole

132 Ibid., article 16.

133 Ibid., article 28. Voir aussi sur cette question MUBIALA Mutoy, « Chronique de droit pénal de l'Union Africaine. L'élargissement du mandat de la Cour africaine de justice et des droits de l'homme aux affaires de droit international pénal », op. cit., p. 750.

134 Voir l'article 6 du Statut annexé au Protocole de Malabo portant amendement au Protocole portant statut de la Cour africaine de justice et des droits de l'homme.

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amendé135 dont le Statut annexé prévoit seize (16) juges pour la Cour - huit (8) juges par Section -, mais aussi quant on sait que la Cour européenne des droits de l'homme se compose d'un nombre de juges égal à celui des Hautes Parties contractantes136 et que la Cour interaméricaine des droits de l'homme se compose également de 7 juges137.

Enfin, l'un des risques de restriction de la protection des droits de l'homme en Afrique avec la mise en place de ladite Section tient au fait que la reforme de Malabo accorde des immunités aux Chefs d'Etat et de gouvernement africains, ainsi qu'aux hauts responsables publics. Toutefois, il convient à ce niveau de préciser que les volets droits de l'homme et droit pénal sont distincts. Et cette distinction tient notamment au fait que la Section pénale est juge des individus et la Section des droits de l'homme est juge des Etats. Même ces deux disciplines sont tout de même complémentaires et intimement liées.

Ces immunités découlent de l'article 46A bis du Statut annexé au Protocole de Malabo qui se lit comme suit : « Aucune procédure pénale n'est engagée ni poursuivie contre un Chef d'Etat ou de gouvernement de l'UA en fonction, ou toute personne agissant ou habilitée à agir en cette qualité ou tout autre haut responsable public en raison de ses fonctions ». En particulier, cette reforme semble être justifiée par deux raisons : d'une part, le conflit entre l'UA et la CPI dû à la « focalisation »138 de cette dernière sur l'Afrique et d'autre part, entre l'UA et l'UE en raison de l'utilisation « abusive »139 par certains Etats membres de l'UE de la compétence universelle à l'égard des africains.

Dans tous les cas, l'octroie de telles immunités aux dirigeants africains bien que ne relevant pas de la question des droits de l'homme et ne s'inscrivant donc pas dans la logique de la Charte africaine, ne va nullement dans le sens d'une volonté de protection effective des droits de l'homme sur le continent africain qui est le théâtre des violations massives des droits de l'homme.

Toutefois, dans la mesure où la Section des droits de l'homme et des peuples de la future Cour unique héritera de l'ensemble des attributions de l'actuelle Cour africaine, nous sommes tentés de croire que la succession sera relativement assurée.

135 Nous faisons allusions au Protocole de Sharm el-Sheikh portant statut de la Cour unique.

136 Voir l'article 20 de la Convention européenne des droits de l'homme.

137 Voir l'article 52 de la Convention américaine des droits de l'homme.

138 Voir MUBIALA Mutoy, « Chronique de droit pénal de l'Union Africaine. L'élargissement du mandat de la

Cour africaine de justice et des droits de l'homme aux affaires de droit international pénal », op. cit., p. 750.

139 Idem.

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus