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Le processus décisionnel dans la politique étrangère du cameroun: le cas du recours au règlement judiciaire dans le conflit de Bakassi


par Zoulica RANE MKPOUWOUPIEKO
Institut des Relations Internationales du Cameroun/Université de Yaoundé II - Master en Relations Internationales 2011
  

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Section 2 : La variable idiosyncratique

La variable idiosyncratique se rapporte aux qualités particulières qui distinguent un dirigeant des autres par ses choix politiques et son comportement289. En effet, les actes politiques sont marqués par la personnalité de leurs auteurs. Comme expression d'une volonté humaine, la manoeuvre diplomatique, selon Alain PLANTEY, en a les caractères : audace ou timidité, sûreté ou velléité, fermeté ou pusillanimité, ampleur ou médiocrité290.

La figure de certains hommes politiques prend souvent une place décisive dans le rayonnement international d'un pays, ou encore le déclenchement ou l'évolution de certaines guerres. Les exemples d'hommes politiques qui, par leur tempérament ont déterminé l'orientation politique de leur pays sont légion. Mohandas KARAMCHAND GANDHI a eu par son exceptionnel charisme et sa célèbre doctrine de la « résistance passive », un rôle déterminant dans la lutte pour l'indépendance de l'Inde. Ahmed SEKOU TOURE a eu une forte influence sur le rejet par la Guinée, de l'intégration au sein de la Communauté française. Nicolas SARKOZY a été l'artisan du retour de la France dans le commandement intégré de l'OTAN et de son rapprochement avec les USA, après le refroidissement de leurs relations suite au rejet de l'invasion américaine en Irak. Dans le cas d'espèce, Sani ABACHA, homme militaire arrivé au pouvoir par coup d'Etat, a été à l'origine (dans sa quête de légitimité intérieure) du conflit qui fait l'objet de la présente étude.

James ROSENAU réaffirme à cet effet, l'importance des variables idiosyncratiques dans l'analyse de la prise de décision en politique étrangère. Ce facteur, s'il compte dans l'étude de la politique étrangère des pays développés291 est, selon lui, le plus important dans l'explication du comportement international des pays en développement292.

288 Ferry DE KERCKHOVE, 1972, op. cit., p. 512.

289 James N. ROSENAU, 1966, op.cit., p. 43 ; voir également, James N. ROSENAU, 1971, op. cit., p. 108 et suiv.

290 Alain PLANTEY, 2000 op. cit., p. 34.

291 De nombreux auteurs ont par exemple mis en exergue l'importance de la variable cognitive dans l'étude du comportement de l'administration BUSH (Etats-Unis) lors des opérations « Enduring Freedom » en Afghanistan et « Iraqi Freedom » en Irak. Voir par exemple Tanguy STRUYE DE SWIELANDE, « L'influence de la variable cognitive dans le processus décisionnel de l'administration BUSH (2001-2005) », Les Cahiers du RMES, volume IV, numéro 1, 2007.

292 Voir en Annexe 13 le tableau reliant les variables les plus déterminantes par rapport au type de société (page 142).

Aussi est-il nécessaire, dans l'explication du recours au règlement judiciaire, de ressortir l'idiosyncrasie du Président Paul BIYA (Paragraphe 1) et d'étudier la corrélation entre celle-ci et la décision prise (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : L'idiosyncrasie du Chef de l'Etat

La connaissance du passé d'un dirigeant peut permettre de mieux saisir son comportement d'adulte293. En effet, l'expérience née des leçons acquises dans le cadre non seulement familial, spirituel et scolaire, mais aussi, administratif et politique (A), participe à forger le tempérament des hommes d'Etat ; et compte parmi les outils qui permettent d'établir le code opérationnel ou système de croyances politiques desdits hommes (B).

A. L'expérience accumulée

De sa formation (1), le Chef de l'Etat du Cameroun a acquis des valeurs perceptibles dans sa prédilection pour un règlement judiciaire du conflit de Bakassi. En outre, tous les postes de responsabilité qu'il a occupé avant son accession à la magistrature suprême lui ont permis d'avoir une expérience des arcanes du pouvoir (2).

1. La formation reçue

Le Président Paul BIYA est né le 13 février 1933 à Mvomeka'a (Arrondissement de Meyomessala, Département du Dja-et-Lobo, Région du Sud Cameroun). Il est issu d'une famille modeste et pieuse de neuf enfants dont le père, Etienne MVONDO ASSAM, est catéchiste et la mère se nomme Madame MVONDO, née Anastasie EYENGA.

Après ses études primaires à l'école de la Mission Catholique de Nden (Zoétélé), il suit une formation au pré-séminaire Saint Tharcissius d'Edéa (1948-1950), puis au séminaire Saint Joseph d'Akono (1950-1954) où il apprend les vertus de la rigueur et de l'austérité294. Son départ pour une école laïque, le Lycée Général Leclerc, puis pour la France où il poursuivra ses études, n'entameront pas sa culture judéo-chrétienne acquise dans l'enfance. Il obtient une Licence et un Diplôme d'Etudes Supérieures de Droit Public à la Sorbonne. Il est également diplômé de l'Institut d'Etudes Politiques de Paris (plus connu sous le nom de « Sciences Po ») où il décroche un diplôme de Sciences Po, option Relations Internationales, et de l'Institut des Hautes Etudes d'Outre-Mer, où il obtient un diplôme dans la section administrative.

293 Raymond-F HOPKINS et Richard-W MANSBACH, Structure and process in international politics, New York and London, Harper & Row Publishers, 1ère ed., p. 139, cité par NKOBENA Boniface FONTEM, 2008, op cit, p.97.

294 Lire à ce sujet François MATTEI, Le Code Biya, Paris, Balland, 2009, pp. 65-90.

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De sa culture judéo-chrétienne acquise dans l'enfance, le Président Paul BIYA hérite d'une personnalité anti-belliciste. Florent ETOGA, l'un de ses camarades de lycée et d'université, affirme à ce propos retenir chez l'homme un trait constant : « sa répulsion pour tout ce qui est violent : violence physique, violence morale ou violence intellectuelle »295. En termes d'expériences, son parcours professionnel viendra compléter la formation reçue dans le cadre familial et académique.

2. La carrière administrative

Avant son accession à la magistrature suprême, le Président Paul BIYA a occupé pendant près de vingt ans d'importants postes de responsabilité dans l'administration camerounaise. Grâce à ces différents postes, il a acquis une expérience riche et variée.

Il a respectivement servi comme Chargé de mission à PRESICAM (Octobre 1962) ; Directeur du Cabinet du Ministre de l'Education Nationale, de la Jeunesse et de la Culture (janvier 1964) ; Secrétaire Général dans le même Ministère (Juillet 1965) ; Directeur du Cabinet Civil de PRESICAM (Décembre 1967) ; Secrétaire Général et Directeur du Cabinet Civil de PRESICAM (janvier 1968) ; Ministre d'Etat, Secrétaire Général de PRESICAM (Juin 1970) ; et Premier Ministre, du 30 Juin 1975 jusqu'en 1982 lorsque, le 6 novembre, en tant que dauphin constitutionnel296, il devient Président de la République après la démission du Président Ahmadou AHIDJO. Les longues années passées dans l'administration lui ont permis de vite s'adapter à sa stature de Chef de l'Etat. Abdoulaye BABALE, alors Ministre, témoigne que ce qui a marqué les Camerounais, c'est la parfaite maîtrise avec laquelle le nouveau Président de la République a su prendre les choses en main. Il affirme : « Nous avons eu l'impression d'être en face d'un athlète qui s'est très bien préparé. Dès les premières heures, on s'est tout de suite aperçu qu'il maîtrisait parfaitement les rouages de l'Etat et l'ensemble des problèmes qui se posaient à notre pays »297.

Sa carrière politico-administrative lui a permis d'avoir une expérience des arcanes du pouvoir, une maîtrise des problèmes épineux, et une perspicacité à saisir les sentiments humains. Cela lui a également permis d'affiner son point de vue sur les questions brûlantes d'ordre national et international298.

L'expérience accumulée par le Président aussi bien avant qu'après son accession au pouvoir a contribué à la formation de son système de croyances.

295 François MATTEI, 2009, op. cit., p. 40.

296 En vertu de l'amendement constitutionnel issu de la loi N°79/02 du 29 juin 1979.

297 Interview d'Abdoulaye BABALE, ancien Ministre, réalisé par Aimé Francis AMOUGOU, in « Paul Biya, l'homme, l'oeuvre, l'ambition », Cameroon Tribune, Edition spéciale du 06 Novembre 2007, p. 15.

298 NKOBENA Boniface FONTEM, 2008, op cit., p.99.

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