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Le processus décisionnel dans la politique étrangère du cameroun: le cas du recours au règlement judiciaire dans le conflit de Bakassi


par Zoulica RANE MKPOUWOUPIEKO
Institut des Relations Internationales du Cameroun/Université de Yaoundé II - Master en Relations Internationales 2011
  

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B. La prudence pragmatique

Dans la poursuite de l'objectif du Cameroun, en l'occurrence le respect nigérian de la « camerounité » de Bakassi, le Président Paul BIYA a fait preuve de prudence et de pragmatisme, éléments figurant parmi ses croyances instrumentales. Par pragmatisme, il a fait recours à l'instance judiciaire qui, au vue des arguments juridiques du Cameroun et la souscription nigériane à la clause facultative de juridiction obligatoire, garantissait le mieux la réussite de l'action politique. Toutefois, ce pragmatisme était prudent car, le Nigeria avait à plusieurs reprises prouvé sa mauvaise foi aux autorités Camerounaises.

En effet, le Président Camerounais qui a occupé depuis 1962 des postes de responsabilité au sommet de l'administration camerounaise, avait sans doute été témoin des diverses démarches de négociation sur les questions frontalières, dont les résultats avaient plus tard été remises en cause par le Nigeria330. Qui plus est le régime du Général Sani ABACHA cherchait depuis le déclenchement du conflit de Bakassi, selon les termes de Jean Pierre FOGUI, à « bluffer » le Cameroun331. Un épisode dudit conflit permet d'illustrer ces propos. En effet, jusqu'en 1991 avant leur modification par les autorités nigérianes, toutes les cartes utilisées chez le voisin occidental du Cameroun, situaient la péninsule de Bakassi en territoire camerounais. En février 1994, lors d'une audience accordée par le Président ABACHA à la Mission de Médiation française, l'Attaché militaire de France a cherché à prouver la vacuité de la thèse nigériane sur la péninsule de Bakassi en dépliant une de ces cartes sur la table. Le Chef de l'Etat nigérian, sans embarras, a réagis en balayant de sa main la totalité de la péninsule de Bakassi et a déclarant avec vigueur, « Tout ceci est à nous »332.

La mauvaise foi apparente des autorités d'Abuja a inspiré une prudence pragmatique au Président Paul BIYA. Instruit par l'expérience, il a préféré un règlement définitif du problème par la C.I.J., c'est-à-dire un règlement prenant clairement à témoin l'opinion publique internationale et la communauté internationale, et exerçant, de ce fait, une plus grande contrainte juridique et morale sur les parties concernées.

329 Message de Voeux du Président Paul BIYA à la Nation, le 31 Décembre 1994.

330 Il convient de relever par exemple que lors de la signature (1975) et de la remise en cause (1978) de l'Accord de Maroua par le Nigeria, et même durant la première grande crise entre le Nigeria et le Cameroun le 16 mai 1981, le Président Paul BIYA était Premier Ministre depuis janvier 1975.

331 Lire au sujet de l'usage nigérian de la « théorie du bluff (ou du poker) » sur le Cameroun, Jean Pierre FOGUI, 2010, op. cit., p. 22.

332 Episode relaté par Jean Pierre FOGUI, 2010, op. cit., p. 22.

Dès lors, il peut être affirmé que le Chef de l'Etat compte parmi les décideurs qui, par leur tempérament ont déterminé le comportement international de leur pays. Ainsi, Me Douala MOUTOME, Ministre de la Justice, Garde des sceaux lors de la prise de décision, et premier Agent du Cameroun lors de la procédure devant la C.I.J., affirme qu' « il fallait être celui qui dirige ce pays, le Président BIYA, pour choisir l'option judiciaire à côté de deux autres : la guerre, ruineuse par ses effets ; ou la conciliation, expérimentée depuis de longues années sans résultats tangibles »333. Le Professeur Maurice KAMTO, co-agent du Cameroun lors de la même procédure, déclare quant à lui que « le Chef de l'Etat c'est quelqu'un d'essentiellement pacifique. Son tempérament l'inclinait vers la recherche d'une solution pacifique »334.

La variable idiosyncratique compte ainsi parmi les facteurs les plus déterminants qui expliquent le processus de prise de décision du Cameroun. Elle pèse plus que les variables gouvernementales et de rôle

Après l'analyse de l'influence des acteurs institutionnels, il convient de ressortir le rôle qu'ont pu jouer la société nationale et l'environnement international sur la prise de décision étudiée.

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333 Interview de Me Douala MOUTOME, Ancien Ministre de la Justice du Cameroun, et premier Agent du Cameroun lors de la procédure devant la C.I.J., réalisé par R. D. LEBOGO NDONGO, in Cameroon tribune N°9161/5360, Spécial BAKASSI, Jeudi 14 Août 2008, p. 51.

334 Entretien avec le Professeur Maurice KAMTO, op. cit.

CHAPITRE IV - LE RÔLE DES VARIABLES SOCIOLOGIQUES

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Les variables sociologiques renvoient dans la présente étude aux variables sociétales et systémiques du paradigme général de ROSENAU. En effet, comme le soulève Jean BARREA, ces deux groupes de variables peuvent offrir les deux grands plans de l'approche sociologique de la décision335. A travers ces variables, l'analyste examine l'influence de l'environnement national et international sur la prise de décision du Cameroun.

Ainsi, sur le plan sociologique, le choix porté par les autorités camerounaises sur la C.I.J. pour le règlement du conflit de Bakassi résulte d'une part, de la prise en compte de considérations d'ordre sociétal (Section I), et d'autre part, de l'influence du milieu international dans lequel le pays se meut (Section II).

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