WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La présomption d'innocence en cas d'infractions flagrantes en droit procédural congolais


par Dominique Mutongo Hamisi
Université Officielle de Bukavu  - Graduat 2020
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

CHAPITRE PREMIER : APERÇUSUR LE PRINCIPE DE LA PRESOMPTION D'INNOCENCE

VII. SECTION 1. ANALYSE CONCEPTUELLE ET PORTEE DU PRINCIPE

Avant de développer le sujet à fond, il s'avère important voire nécessaire de jeter un faisceau lumineux sur le principe de la présomption pour mieux saisir ce sujet au tour duquel portent nos recherches et examens afin de permettre aux lecteurs de le saisir davantage. Ainsi il sera question de démontrer dans ce travail à qui profite le principe sous examen et dans la mesure du possible évaluer si ce droit ne peut aller jusqu'à enfreindre les droits des tiers (§2), mais avant d'y arriver l'important serait de comprendre avec plus de précision quelques notions rudimentaires ralliées à ce principe (§1).

§1. ENONCE, CONTENU ET FONDEMENT DU PRINCIPE

A. ENONCE DU PRINCIPE

Préparée par le mouvement d'idée du XVIIIe siècle, la présomption d'innocence a été exprimée avec force dans l'art. 9 de la DUDH et des citoyens du 04 août 1789 et encore dans l'article 11 de la DUDH du 10 décembre 1948, avec une formule célèbre qui d'ailleurs lie étroitement l'innocence présumée et la protection de la liberté individuelle au cours du procès pénal19(*).

Ce principe est composé de deux mots: présomption et innocence. Ainsi nous allons parler de la présomption comme étant « une supposition, ou un jugement fondé sur des simples indices de supposition ». L'innocence veut dire quant à elle «l'absence de culpabilité, ou la pureté d'une personne qui ignore le mal». En formant ces deux mots, la présomption d'innocence peut être définie comme une supposition de l'absence de culpabilité.

En matière pénale, il est un principe selon lequel on soutient que toute personne poursuivie est considérée comme innocente des faits lui reprochés, tant qu'elle n'a pas été déclarée coupable par un jugement coulé en force des choses jugées d'une juridiction compétente légalement établie. Mais il y a une écharde qui touche à la liberté reconnue aux citoyens, celle de la détention préventive (qui s'énonce comme une véritable présomption de culpabilité) et celle du droit de la défense. Certes, les solutions du législateur ne peuvent être que de trouver des compromis entre les droits fondamentaux des citoyens et la défense.

Apres avoir parlé de son énoncé et les concepts qui constituent l'intitulé de ce principe, exposons, à cet effet, son contenu.

B. CONTENU DU PRINCIPE20(*)

L'affirmation selon laquelle tout homme est présumé innocent jusqu'à ce que sa culpabilité ait été établie par un jugement définitif, protège le citoyen contre la puissance publique et a valeur de droit fondamental. Ainsi, la présomption d'innocence est d'abordun principe à la foisconstitutionnel et conventionnel (1°), en suite une règle de preuve selon laquelle il appartient aux parties poursuivantes de prouver la culpabilité de la personne poursuivie. Mais il convient de souligner aussi que la présomption d'innocence est une règle de fond (2°), l'expression d'un véritable droit pour toute personne, qui s'impose au législateur, aux autorités publiques et même au juge.

1°) LA PRESOMPTION D'INNOCENCE : Un principe à la foisconstitutionnel et conventionnel

La constitution actuelle de la RDC, pose à son article 17 alinéa 9 le principe de la présomption d'innocence en ces termes : « Toute personne accusée d'une infraction est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été établie par un jugement définitif.» Parce que trouvant son fondement dans la constitution qui est la loi suprême de notre pays, la R.D.C., ce principe doit être respecté par toutes les autorités de l'Etat et par ceux qui peuvent y porter atteinte au bénéfice non seulement de l'accusé ou du justiciable mais, de tout individu, même n'ayant pas ces qualités dès lors qu'un seul indice de soupçon peut être conçu dans son chef. Le législateur comme le juge ont donc l'ardente obligation de s'y conformer.

Il est un principe conventionnel parce que d'après Serge Guichard, ce principe est dû à « toute personne accusée21(*) ». L'accusation se définissant comme « la notification officielle, émanant de l'autorité compétente, du reproche d'avoir accompli une infraction pénale22(*). », la présomption d'innocence retrouve son sens en ce qu'il y a un lien de droit existant entre la personne accusée et les parties poursuivantes, lequel lien fait naître des droits et obligations à charge de chacune des parties où, sous la main de l'autorité judiciaire, elles sont toutes chargées de s'exécuter.

2°) LA PRESOMPTION D'INNOCENCE : Règle de preuve etrègle de fond

La présomption d'innocence est d'abord une règle de preuve, puisqu'il appartient à la partie poursuivante de prouver la culpabilité de la personne poursuivie. Ce qui n'interdit pas dans des cas exceptionnels de présomption de responsabilité pénale, à la personne poursuivie d'apporter ses propres preuves aussi longtemps que ces dernières auront pour impact de la mise de sa responsabilité hors cause (elle y a même un intérêt certain, même si elle a par ailleurs le droit de se taire).

Mais la présomption d'innocence est aussi une règle de fond, l'expression d'un véritable droit subjectif pour toute personne qui s'impose à tous et surtout plus au législateur (a) et à toute autorité publique chargée des poursuites(b).

a) Respect de la présomption d'innocence par le législateur

Le respect de la présomption d'innocence s'impose d'abord au législateur. Le législateur, depuis les siècles passés est tenu d'observer dans sa façon d'édicter des règles juridiques, des mesures respectant des libertés individuelles compte tenu de la protection que l'opinion générale et les lois préexistantes confèrent à ces libertés. Il ne peut donc en aucun cas constituer un obstacle, après jugement définitif, ni à la réhabilitation ni à l'action en révision devant toute juridiction compétente tendant à faire établir l'innocence du condamné.

La constitution de la R.D.C., à son article 17 alinéa 1 dispose : « La liberté individuelle est garantie. Elle est la règle, la détention l'exception». Cette affirmation est transpercée par la volonté du constituant congolais de réaffirmer l'attachement des droits et libertés individuelles à l'existence d'un Etat de droit23(*). Par ce faire, la présomption d'innocence étant une émanation directe des libertés individuelles, elle est alors un carcan qui tient le législateur dans tout le processus d'élaboration des textes légaux.

b) Respect de la présomption d'innocence par toute autorité publique : Le droit à un juge

La jurisprudence a progressivement étendu le respect de la présomption d'innocence à toute autorité publique, au-delà des juges même lorsque cette autorité n'est pas un juge ou un tribunal. Concrètement, cela signifie que le juge pénal a l'exclusivité de juger de l'innocence de quelqu'un et, éventuellement d'anéantir la présomption d'innocence24(*). Seul un tribunal peut renverser la présomption d'innocence en condamnant une personne après un procès conforme aux principes directeurs du procès pénal, que nous aurons à étudier dans la section suivante. La conséquence en est qu'aucune personne, même pas une autorité publique, ne doit porter atteinte, par des propos tenus publiquement par exemple, à l'innocence de quelqu'un, même en dehors de tout procès25(*).

3°) LES CONSEQUENCES DU PRINCIPE DE LA PRESOMPTIOND'INNOCENCE SUR LA CHARGE DE LA PREUVE

Le mécanisme est parfaitement décrit dans ses étapes successives, à savoir la charge de la preuve puis les conséquences qu'il faut en tirer lorsqu'elle n'est pas établie.

1. Le demandeur (Accusateur : ministère public et partie civile, lors qu'elle s'est constituée26(*)) doit faire la preuve de l'existence matérielle de l'infraction de la personne qu'il poursuit (imputabilité et culpabilité)27(*).

En matière pénale tel qu'en droit civil, les mêmes principes sont d'application quant à la charge de la preuve : « Actori incumbit probatio » i.e.la charge de la preuve incombe au demandeur ; « Reus in excipiendo fit actor »i.e.la personne poursuivie doit faire preuve de ses moyens de défense.

2. En cas d'absence ou d'insuffisance des preuves, le doute profite à l'accusé/au prévenu (in dubio pro reo28(*)). Par conséquent l'inculpé qui se borne à nier l'existence du délit ousa culpabilité, n'a aucune preuve à fournir de sa négation, puisqu'il est protégépar la présomption d'innocence29(*).

Pendant que Claude LOMBOIS souligne que l'adage in dubio pro reo est une technique qui donne aupoursuivi le privilège procédural attaché à la position du défendeur selon lequel, il faut prouver à tout prix contrelui, si non le doute lui profite30(*) ; Jean-Jacques TAISNE considère quant à lui que l'adage in dubio pro reo est présenté par la doctrinedominante comme une conséquence de la présomption d'innocence alors qu'il en est la source :c'est parce que tout individu dont la culpabilitén'est pas évidente, bénéficie du doute sous formed'un acquittement, et non d'un simple sursis à statuer, que l'on peut dire que son innocence estprésumée31(*).

C. FONDEMENT

La présomption d'innocence est un principesoutenu par plusieurs instruments juridiques, tant nationaux qu'internationaux. Il tire son fondement d'abord dans la constitution de la RDC du 18 février 2006 tel que modifiée et complétée à ce jour, en tant que loi fondamentale du Congo, en suite dans d'autres textes nationaux et internationaux tels que le code de procédure pénale, l'Ordonnance-Loi 78-001 du 24 février 1978 relative à la répression des infractions flagrantes, la déclaration universelle des droits de l'homme et des citoyens du 04 août 1789, la déclaration universelle des droits de l'homme du 10 décembre 1948, ...

Ainsi, conformément à l'article 17 in fine de la constitution du 18 février 2006 telle que modifiée et complétée à ce jour, et l'article 11 de la DUDH, toute personne accusée d'une infraction est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été établie par un jugement définitif.

La portée de la présomption d'innocence déborde aujourd'hui la seule procédure pénale. Le droit pénal et la procédure pénale reposent sur certains principes, comme par exemple celui de la légalité des délits et des peines.

Ce principe que nous qualifions de normativité ou de textualité des délits et des peines est consacré en République démocratique du Congo par l'article 1er du code pénal qui dispose : « Nulle infraction ne peut être punie de peines quin'étaient par portées par la loi avant que l'infraction fut commise.»

En plus, ce principe légaliste est internationalement consacré. C'est le cas de la DUDH en ses articles 8 et 9 qui disposent : « Toute personne a droit à un recours effectif devant les juridictions nationales compétentes contre les actes violant les droits fondamentaux qui lui sont reconnus par la constitution ou par la loi. Nul ne peut être arbitrairement arrêté, détenu ni exilé. »

Le criminaliste FEUERBACH l'a résumé par la formule « Nullum crimen,
nulla poena sine lege32(*) » au 19e siècle, que nous traduisons en ces termes : « Pas decrime, pas de peine sans la loi ». Plusieurs autres auteurs ont soutenu sa pensée savante bien qu'ils la trouvaient incomplète.

C'est ainsi que, Roger MERLE et André VITU ont considéré que cette formule ne visait que le droit pénal de fond (qui gère les crimes et les peines), alors que ce principe de légalité s'applique également à la procédure, au droit pénal de forme. Pour ce faire, ces deux auteurs ont complété la formule en ces termes : « Nullum crimen, nulla poena, nullum judicium sine lege.33(*) »

D'après ce principe seuls peuvent faire l'objet d'une condamnation pénale les faits déjà définis et sanctionnés par le législateur au moment où l'accusé a commis son acte, et seules peuvent leur être appliquées les peines édictées à ce moment déjà par le législateur. L'infraction doit donc être portée par une norme pénale qui peut être une loi ou une convention, et sous d'autres cieux même un arrêté.

Ainsi le principe de la présomption d'innocence au sein de toutes ces étapes, en droit pénal et en droit de procédure pénale est basé sur la protection des droits et libertés individuelles. Il est temps de s'interroger sur qui en sont alors les bénéficiaires.

* 19Voir art. 11 de la DUDH du 10 décembre 1948.

* 20 On trouve exposée la définition de la présomption d'innocence aussi bien dans le PIDCP (art. 14, §2) que dans la CEDH (art. 6, §2) et dans la Charte des droits fondamentaux de l'UE (art. 48, §1). On le trouve aussi dans la Convention américaine relative aux droits de l'homme (art. 8, §2), dans la CADHP (article 7, §1) et dans la constitution congolaise du 18 février 2006 (art. 17 in fine).

* 21Serge Guichard Jacques Buisson, Procédure pénale, Paris Lexis Nexis SA, 8ème éd., 2012, p. 154.

* 22Thiery Vincent, La présomption d'innocence, Pr. Dekeuwer-Défossez, 2000, p.14.

* 23 Constitution de la RDC du 18 février 2006, exposés des motifs, in J.O de RDC, 47ème année, no Spécial, p. 5.

* 24MONTESQUIEU D., L'esprit des Lois, Livre XII, Chap.2, Paris, Éd. Gallimard, 1995, p. 190.

* 25Un procès est un litige opposant deux ou plusieurs parties soumises à une juridiction, laquelle peut être soit une cour ou soit un tribunal. A l'issue du procès, une décision est rendue.

* 26DONNEDIEU de VABRES, Traité de droit criminel et de législation pénalecomparée, Paris, 1938, n°1212, p. 715.

* 27 BELIVEAU Pierre et Martin VAULAIRE, Principes de preuve et de procédure pénale, Cowan ville, Yvon Blais, 5e éd., 1998, p. 271.

* 28DONNE DIEU de VABRES, Traité de droit criminel et de législationpénale comparée, Paris, 1938, n°1213, p. 716.

* 29Georges VIDAL, Cours de droit criminel et de science pénitentiaire, inédit,n°716, p.757.

* 30Claude LOMBOIS, La présomption d'innocence, in « Pouvoirs », 1990, Paris, n°55, p.88.

* 31Jean-Jacques TAISNE, La présomption d'innocence : mythe ou réalité, Mémoire pour l'obtention du D.E.S de Sciences Criminelles, Université de Lille II, n° 23, 1973, p. 12.

* 32 « Pas de crime ni de peine sans loi ».

* 33 « Pas de crime,pas de peine ni de procédure sans loi ».

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore