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La problématique de l'eau dans les relations internationales: conflits ou coopérations


par Patient Germain Sewanou
UATM Gasa Formation - Master 2 2014
  

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SECTION II : Le Moyen-Orient comme illustration de la théorie conflictuelle de l'eau

En 1993, Shimon Pèrès, ancien ministre des affaires étrangères israélien affirmait qu'« il est probable que la prochaine guerre dans la région soit déclenchée, non à cause du problème des frontières, mais à cause de la lutte

38 Ibidem

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Présenté par Germain TOÏ (00229 669 958 38, toyigermain@yahoo.fr)

La problématique de l'eau dans les Relations Internationales : conflits ou coopérations

pour le partage des ressources régionales »39. Ce qui met en exergue l'acuité des questions liées aux ressources hydriques au Moyen-Orient.

En effet, le Moyen-Orient est traversé par trois systèmes hydrologiques : le Nil (11 Etats), le Tigre-Euphrate (3 Etats) et le Jourdain (5 Etats). Le Nil (Paragraphe I) et le Jourdain (Paragraphe II) nous offrent les meilleurs exemples pour corroborer la thèse des conflits hydriques.

PARAGRAPHE I: Le NIL : risque de conflit ?

S'étendant sur le territoire de 11 pays différents dans une région particulièrement aride, le bassin du Nil est l'objet de tensions importantes entre les pays riverains. Si l'Egypte, qui est totalement dépendants du Nil pour sa survie est jusqu'à présent parvenu à imposer ses vues dans la gestion du fleuve (A), les pays situés en amont du fleuve font également valoir certaines prétentions qui provoquent la colère de l'Egypte (B).

A) Un fleuve vital pour l'Egypte

Depuis l'Antiquité, la vie des Egyptiens est rythmée par le Nil. L'économie égyptienne est dépendante entièrement du Nil. En effet, l'Egypte, avec ses 84 millions d'habitants, tire du Nil environ 90% de son eau. Le Nil a toujours été exploité par l'Egypte pour développer ses activités. Originellement, le Nil a un fonctionnement hydrologique particulier : le phénomène de crues, déposant sur les zones inondées quantité de limons, a permis à la civilisation égyptienne de développer très tôt des systèmes d'irrigation sur des terres très fertiles.

Face à l'évolution du Soudan vers l'indépendance vis-à-vis de la Grande-Bretagne (indépendance acquise en 1956), le président Nasser décide de construire le barrage d'Assouan en 1956 (il sera inauguré en 1971) pour plusieurs raisons. D'abord, il s'agissait de développer économiquement le pays par la production massive d'hydroélectricité. Ensuite, le but était de régulariser le cours du fleuve et d'éliminer les crues pour constituer un réservoir en cas de sécheresse. Mais la raison principale de cette décision, c'est de sauvegarder les intérêts vitaux du pays, quelle que soit la politique hydraulique du Soudan. La retenue du barrage est gigantesque : 162 milliards de mètres cubes, soit deux fois le volume de la crue annuelle du Nil. Cependant, le volume utile se réduit à

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39 http://www.lesclesdumoyenorient.com/Le-Nil-axe-de developpement.html consulté le 17 mai 2014.

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90 milliards de mètres cubes notamment à cause de l'évaporation importante dans le lac Nasser.

Près des 6/7ème du débit du fleuve arrivant à Assouan (à la frontière entre le Soudan et L'Egypte) proviennent de l'Ethiopie alors que l'Egypte utilise 66% de ce débit. Le Nil est peu pollué car peu utilisé par les pays en amont. Très peu d'industries se concentrent sur les bords du fleuve et les principales sources de pollution proviennent donc des pesticides et engrais utilisés par les agriculteurs égyptiens ainsi que des eaux usées citadines qui y sont rejetées.

Aujourd'hui, 95 % des Egyptiens vivent sur ses rives. Cernée par le désert, sa vallée constitue les seuls 6 % du territoire national cultivable. Dans cette vallée, se concentre toute l'économie égyptienne40.

Une telle dépendance est aggravée par la position géographique de l'Egypte. Située en aval du fleuve, son existence est entre les mains des pays situés en amont. Ce qui amène l'Egypte à tout mettre en oeuvre pour assurer sa sécurité, quitte à pratiquer une politique d'intransigeance sur le Nil.

Cela transparait dans les accords de 1929 et 1959. En effet, pendant longtemps, l'Egypte a perçu le Nil comme un fleuve jailli miraculeusement du désert, et ne pose pas la question de ce qui se passe en amont. Elle commence à s'en préoccuper lorsque les Britanniques commencèrent à exploiter le fleuve dans leurs colonies d'Afrique de l'Est dans les années 1920. En 1929, un

« Accord sur les Eaux du Nil » instaurant un partage des eaux entre l'Egypte et le Soudan britannique, fut signé41. Cet accord prévoyait entre autres :

? Que le flux total du Nil arrivant à Assouan étant de 84 milliards de m3, l'Egypte et le Soudan utiliseront respectivement 48 milliards de m3 et 4 milliards de m3.

? Que les 32 milliards de m3 restants sont à la disposition des Etats en amont.

? Que l'Egypte se réserve le droit de surveiller le flux du Nil dans les pays en amont.

? Que l'Egypte se réserve le droit d'entreprendre des projets sur le Nil sans en avertir les pays en amont.

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40Emeline HASSENFORDER/Benjamin NOURY «Situation hydropolitique de 10 bassins versants transfrontaliers«, Compilation des newsletters Entre Deux Eaux N°1 à 12, septembre 2010, P69-72.

41 Ibidem

Présenté par Germain TOÏ (00229 669 958 38, toyigermain@yahoo.fr)

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? Que l'Egypte possède le droit d'opposer son véto à tout projet de construction qui pourrait affecter ses intérêts.

? Que du 29 janvier au 15 juillet (saison sèche), le Soudan n'a pas le droit d'utiliser les eaux du Nil.

Après l'indépendance du Soudan, un nouvel accord bilatéral est conclu en 1959 entre l'Egypte et le Soudan : la première reçoit 55,5 milliards de m3, le second 22 milliards de m3. Le traité ne fait pas mention des pays en amont, qui le considèrent comme nul et non avenu. Cet accord prévoie également que les besoins combinés des autres pays riverains n'excéderaient pas 1 à 2 milliards de m3 par an et que toute réclamation de leur part serait confrontée à une position égypto-soudanaise unifiée.

Il est clair que dans ces accords, l'Egypte considère le Nil comme une propriété nationale et ainsi s'attribue l'utilisation quasi exclusive des eaux du Nil. Cette politique égyptienne sera à la base de la cristallisation des tensions autour du Nil surtout avec l'Ethiopie qui voit sa population croitre et donc ses besoins en eau s'augmenter.

B) Le Nil : objet de tension entre l'Egypte et les autres Etats du bassin

Les relations entre le Soudan et l'Egypte ne sont pas éminemment conflictuelles, notamment du fait de l'accord du partage des eaux signé en 1959, qui donne un cadre juridique aux relations bilatérales. Des projets communs ont même été lancés, comme la construction du canal de Jonglei en 1983. L'histoire de ce canal est révélatrice du rôle qu'a pu jouer le Nil dans la cristallisation de tensions entre Khartoum et les ex-rebelles du Sud Soudan. Le canal est conçu pour détourner le cours du Nil Blanc en lui faisant éviter la région marécageuse du «Sud», où d'importantes quantités d'eau sont perdues par évaporation.

Mais le canal répond aussi à des enjeux géopolitiques internes au Soudan. Dans le contexte de la lutte contre les séparatistes du Sud du pays, le canal devait aussi constituer une infrastructure de transport permettant à l'armée soudanaise de mieux intervenir au Sud et contrôler la région. Ainsi, lors de la deuxième guerre civile qui embrase le Sud du Soudan (1983 à 2005), les rebelles du Sud mènent des opérations de sabotage sur le chantier du canal dès 1983, ce qui conduit les autorités égyptiennes et soudanaises à abandonner la construction aux deux tiers. L'instabilité politique due à la guerre civile dans le

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Sud a donc freiné les aménagements. A partir des années 2000, des projets sont relancés, notamment grâce aux capitaux chinois.

Avec l'accession à l'indépendance de la République du Soudan du Sud, la donne change. On est en droit de se demander ce que deviendront les projets de barrages planifiés par le gouvernement de Khartoum. Seront-ils poursuivis par celui de Djouba (Sud-Soudan) ? Quelles seront les relations entre les deux Etats frères ? Ceux-ci s'opposeront-ils sur la question de l'eau ? Quelles seront les conséquences sur l'hydropolitique de la région?

Par contre, les relations entre l'Egypte et l'Ethiopie par rapport au Nil sont très belliqueuses. En effet, l'Ethiopie a jusqu'à présent très peu exploité ses ressources hydrauliques, qui contribuent pourtant à 86% des eaux du Nil mesuré en Egypte. A peine 0,3% du débit du Nil bleu et des autres affluents du Nil est exploité par l'Ethiopie. Avec la chute du régime socialiste de Mengistu (19801997)42 puis la fin de la guerre contre l'Erythrée (1998-2001),43 l'Ethiopie a entrepris de nombreux projets pour amorcer son développement.

L'augmentation rapide de la population (environ 73 millions en 2004, 85 millions en 2010, 119 million en 2025 et 173,8 en 2050)44, l'impact des sécheresses accumulées45, ainsi que ces différents projets nécessitent l'exploitation de nouvelles ressources en eau. C'est donc pour répondre à ces besoins que le gouvernement éthiopien a entrepris la construction d'un barrage dénommé « Grande Renaissance »46 sur le Nil bleu. Ce qui a causé la colère de l'Egypte.

En effet, les relations entre ces deux pays concernant le Nil ont toujours été conflictuelles. Le gouvernement éthiopien a toujours rejeté les prétentions de l'Egypte à contrôler l'utilisation des eaux du Nil sur son territoire.

L'Egypte quant à elle milite pour faire reconnaître le statut international du Nil. Auquel cas, l'Ethiopie se devrait de respecter les « droits acquis » de chacun des Etats de la vallée. Cette revendication est vitale pour l'Egypte, étant donné que 86% du débit du Nil à Assouan proviennent d'Ethiopie.

L'Ethiopie, elle, conteste le statut international du Nil, sous prétexte qu'il n'est pas navigable sur toute sa longueur. Dans ce cas, elle pourrait aménager et

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42 http://afriquepluriel.ruwenzori.net/etio-b.htm consulté le 20 Avril 2014

43 http://www.erythree.com/conflit.htm consulté le 20 Avril 2014

44Population Référence Bureau « Fiche de Données sur la population mondiale 2010 », p. 7

45 http://www.unicef.org/french/infobycountry/ethiopia_59887.html consulté le 20 Avril 2014

46 http://www.ambassade-ethiopie-paris.org/le_grand_barrage_de_la_renaissance/index.html consulté le 20 Avril 2014

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exploiter la partie du fleuve qui traverse son territoire sans rendre de comptes. Outre le refus du statut international du fleuve, l'Ethiopie rejette les accords bilatéraux de partage égypto-soudanais de 1929 et 1959.

Le ton est donc monté d'un cran avec le début des travaux de construction du dit barrage (Grande Renaissance) en 2013. L'ex-président égyptien Mohamed MORSI à proférer des menaces à l'encontre de l'Ethiopie. Ses propos « Nous ne ménagerons aucune option pour protéger nos intérêts. Nous ne sommes pas les avocats de la guerre, mais nous ne permettrons jamais que soit mise en péril notre sécurité en matière d'approvisionnement en eau »47 rendent compte des intentions belliqueuses de l'Egypte vis-à-vis de l'Ethiopie. Lors d'une réunion télévisée avec ses partisans islamistes, il fut même question de bombarder le chantier de construction du barrage, ou même de fomenter des troubles en Ethiopie à partir du Soudan ou de l'Erythrée.

Le gouvernement éthiopien prévoirait à plus long terme de mettre en culture 1,5 millions d'ha et de construire 36 barrages. Si tous les projets étaient mis en oeuvre, cela impliquerait une baisse de régime du Nil de 4 à 8 milliards de m3/an. Par conséquent, la guerre est probable entre ces deux pays.

Les pays plus en amont envisagent à leur tour l'exploitation de leurs ressources en eau comme un outil de développement. La Tanzanie envisage de pomper l'eau du lac Victoria pour irriguer 600 000 ha dans les plaines centrales. Le Kenya s'est opposé à l'Egypte en 2003 en déclarant qu'il ne se sentait pas concerné par le traité de 1959. L'Ouganda a fait appel à l'aide israélienne pour mettre sur pieds des projets hydrauliques. Ainsi, les projets se multiplient dans les pays en amont, au grand dam de l'Egypte. Pays situé le plus en aval, c'est elle qui dépend le plus des décisions de ces pays. En 1985, l'ancien ministre égyptien des Affaires étrangères Boutros Boutros-Ghali déclare que « la sécurité nationale de l'Egypte est entre les mains des dix autres pays africains du bassin du Nil »48. L'Egypte voit donc d'un très mauvais oeil les revendications successives des pays en amont pour exploiter les eaux du Nil.

L'Egypte, dont 95% des ressources en eau proviennent du Nil49, est très crispée sur la question : c'est sa sécurité qui est jeu. Il est donc clair que sans une

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Présenté par Germain TOÏ (00229 669 958 38, toyigermain@yahoo.fr)

47Ethiopie : une crise hydro diplomatique avec l'Egypte ?sur http://www.rfi.fr/mfi/2013/06/11; consulté le 14 juin 2013

48 AMIOT Hervé « Eaux et conflits dans le bassin du Jourdain » sur

http://www.lesclesdumoyenorient.com/Eau-et-conflits-dans-le-bassin-du.html consulté le 17 mai 2014

La problématique de l'eau dans les Relations Internationales : conflits ou coopérations

coopération sur les eaux du Nil, il existe une forte probabilité de l'éclatement d'une guerre de l'eau dans cette région.

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