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Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais.


par Philippe Roméo AMBI
Université de Yaoundé 2 - Master 2 2015
  

Disponible en mode multipage

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Mémoire présenté et soutenu par AMBI PHILIPPE ROMEO Page i

Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

AVERTISSEMENT

La Faculté des Sciences Juridiques et Politiques de l'Université de Yaoundé II-Soa n'entend donner aucune approbation, ni improbation aux opinions émises dans les mémoires. Celles-ci doivent être considérées comme propres à leurs auteurs.

Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

DEDICACES

A mes parents,

· Mr. HAROUNA OUSMANOU

· Mr. EFFA OWONA BARNABE

· Mme HAROUNA ASSALA KALTOUMI

· Mme EFFA MONGOLOGUE ASSALA BRIGITTE

Mémoire présenté et soutenu par AMBI PHILIPPE ROMEO Page ii

Mémoire présenté et soutenu par AMBI PHILIPPE ROMEO Page iii

Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

REMERCIEMENTS

Sans le soutien de plusieurs personnes, le point final de ce mémoire ne se serait jamais pointé. Je tiens à remercier chaleureusement mon directeur de recherche, le docteur GUESSELE ISSEME LIONNEL PIERRE, votre gentillesse, votre rigueur intellectuelle et vos conseils, toujours si justes et à point nommé, m'ont accompagnée tout au long de cette aventure. Mille fois merci!

Il arrive parfois que les mots ne soient pas assez forts pour exprimer notre reconnaissance et notre gratitude. Je souhaite également remercier mes ami(e)s pour leur présence tout au long de ce travail. Un merci particulier à BIMELI Antoine, EKO'O MEZANG Gina, ELLA ANGO Laurince, DOUIMO Martial, MENZEPOH Perrin, GADIMA Evrad, LABI Hubert, EYEBE NOA Juliette et surtout BELA Flore et BELA Salomé, pour leurs mots d'encouragement, leurs conseils, leur aide documentaire et les discussions enrichissantes qui ont alimentés et nourri ma réflexion.

Je ne saurai jamais assez remercier mes frères TSIMI Marcel, HAPSATOU OMOLOMA HAROUNA, HASSANA, BITOMA Benjamin et MONOMBOCK Mariette sans eux, les moments les plus difficiles n'auraient jamais été surmontés. Je ne saurai oublier de remercier mon grand-père, feu ASSALA François et sa femme EBILTIGUE BOYEGA, leur travail n'aura pas été vain.

Merci à l'ensemble de la promotion de 2014-2015 de Master II, plus particulièrement à mes camarades en Droit Public, pour leur solidarité et leur esprit de partage.

Merci à tout le corps enseignant de l'Université de Yaoundé II-Soa, pour leurs contributions scientifiques.

Merci à mon pays !

Mémoire présenté et soutenu par AMBI PHILIPPE ROMEO Page iv

Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS

AJDA. Actualité Juridique de Droit Administratif

C.A.A. Cour Administrative d'Appel

C.C.A. Conseil du Contentieux Administratif

C.E. Conseil d'Etat

C.F.J Cour Fédérale de Justice

C.S/C.A Cour Suprême/ Chambre Administrative

Chap. Chapitre

Chron. Chronique

DFDHC. Déclaration Française des Droits de l'Homme et du Citoyen

Ed. Edition

GAJA Grand Arrêts de la Jurisprudence Administrative

Ibid. Même endroit

In. Dans

LGDJ Librairie générale de droit et de jurisprudence

PUA Presse Universitaire d'Afrique

PUF. Presse Universitaire de France

PUL. Presse Universitaire Libre

P. Page

RDA. Revue de droit administratif

Mémoire présenté et soutenu par AMBI PHILIPPE ROMEO Page v

Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

RDP. Revue de droit public

S. Suivant

SGFP. Statut général de la fonction publique

T.E Tribunal d'Etat

U.Y. Université de Yaoundé

Vol. Volume

Mémoire présenté et soutenu par AMBI PHILIPPE ROMEO Page vi

Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

SOMMAIRE

AVERTISSEMENT i

DEDICACES ii

REMERCIEMENTS iii

LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS iv

SOMMAIRE vi

RESUME viii

ABTRACT ix

INTRODUCTION 1

PREMIERE PARTIE : LES OBLIGATIONS DE SOLIDARITE AU CORPS 22

CHAPITRE1 : LES OBLIGATIONS DE SOLIDARITE DANS L'ETHIQUE DU

CORPS 24

SECTION I : L'INTERDICTION DE RECOURIR AUX PERSONNES EXTERIEURES ET

D'ABUSER DE SA QUALITE 26

SECTION II : L'OBLIGATION DE DESINTERESSEMENT DU FONCTIONNAIRE 34

CHAPITRE 2 : LES OBLIGATIONS DE SOLIDARITE DANS LA DISCIPLINE DU CORPS

48

SECTION I : L'OBLIGATION DE PORT DE L'UNIFORME 49

SECTION II : LES INTERDICTIONS D'EXERCICE DE CERTAINS DROITS

POLITIQUES ET COLLECTIFS. 60

DEUXIEME PARTIE : LES OBLIGATIONS DE RESPONSABILITE DU SERVICE. 71

Mémoire présenté et soutenu par AMBI PHILIPPE ROMEO Page vii

Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

CHAPITRE I : L'OBLIGATION DE SERVIR. 76

SECTION I : L'OBLIGATION DE SE CONSACRER A SES FONCTIONS. 75

SECTION II: L'OBLIGATION D'OBEISSANCE HIERARCHIQUE. 85

CHAPITRE II : LES OBLIGATIONS DE CONFIDENTIALITE. 95

SECTION I : L'OBLIGATION DE RESERVE. 96

SECTION II : LES OBLIGATIONS DE DISCRETION PROFESSIONNELLE ET DE

SECRET PROFESSIONNEL. 105

CONCLUSION GENERALE. 118

ANNNEXES 122

BIBLIOGRAPHIE 123

TABLE DES MATIERES 129

Mémoire présenté et soutenu par AMBI PHILIPPE ROMEO Page viii

Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

RESUME

Pour reprendre les termes de M.BRETON, l'administration est le bras séculier du gouvernement. Il s'agit de l'exécutif en action. Pour remplir ses missions d'intérêt général, l'administration fait usage de plusieurs ressources, parmi lesquelles, les ressources humaines. Lorsqu'un agent de l'administration a un emploi permanent et est titularisé dans un grade dans la hiérarchie, on dit qu'il a la qualité de fonctionnaire. Si le fonctionnaire a des droits, ce dernier comme tous les autres agents de l'administration a également des obligations en contrepartie, qui ont fait l'objet de notre étude.

Au Cameroun, les obligations du fonctionnaire sont nombreuses. Nous les avons regroupées en deux catégories : les obligations de solidarité au corps, qui sont spécifiques à certains corps et figurent pour la majorité dans des statuts spéciaux et les obligations de responsabilité du service, qui sont dans le statut général de la fonction publique, et sont communes à tous les fonctionnaires. Cette opération, nous a permis de constater que certaines obligations étaient sujettes au non-respect. A titre d'illustration, nous avons le non-respect de l'obligation de désintéressement qui implique l'interdiction d'obtenir des gains privés (corruption) et d'utiliser l'argent public à des fins personnelles (détournement des deniers publics).

« Si on connaissait les règles, on aurait plus le temps de les enfreindre ». Cette affirmation de GOETHE montre à suffisance l'importance pour nous d'avoir répondu à la question de savoir, quelles sont les obligations du fonctionnaire ? Ceci ne constitue pas une panacée au non-respect des obligations du fonctionnaire, mais ce pourrait être un placebo pour l'efficacité de l'administration, atout selon le président Paul BIYA pour l'émergence à l'horizon 2035.

Mémoire présenté et soutenu par AMBI PHILIPPE ROMEO Page ix

Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

ABTRACT

In the words of M.BRETON, administration is the secular arm of the government. This is the executive action. To fulfill its missions of general interest, the administration made use of several resources including the human resources. When a government official has a permanent job and is tenured in a grade in the hierarchy, is said to have the official. If the officer has rights, it like every other administration officials also have obligations in return, which were the subject of our study.

In Cameroon, the obligations of officials are numerous. We have grouped into two categories: solidarity obligations to the body, which are specific to certain body and appear for the majority in special statutes and service liability obligations, which are in the general status of the public service, and are common to all public servants. This allowed us to see that certain obligations were subject to non-compliance. As an illustration, we have the non-compliance with the obligation of disinterestedness which implies the prohibition to obtain private gains (corruption) and to use public money for personal use (misuse of public funds).

"If we knew the rules, the time we would have more break them." This statement of Goethe shows sufficiently important for us to have answered the question, what are the obligations of officials? This is not a panacea to the non-compliance of the official, but it could be a placebo for the efficient administration, asset according to President Paul BIYA to the emergence 2035.

INTRODUCTION

GENERALE

Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

Mémoire présenté et soutenu par AMBI PHILIPPE ROMEO Page 1

Mémoire présenté et soutenu par AMBI PHILIPPE ROMEO Page 2

Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

L'administration publique pour fonctionner a besoin d'un personnel qui aura la charge de lui permettre d'accomplir ses missions. Cette administration est définie par le vocabulaire juridique comme la « fonction de l'Etat qui consiste, sous l'autorité du gouvernement, à assurer l'exécution des lois et le fonctionnement continu des services publics »1 Elle est donc importante aussi bien que le personnel dont elle a besoin pour fonctionner ; Michel DEBRE, homme politique français (1912-1996), parlant de l'importance de ladite administration dans l'Etat remarque, « l'administration...exécute les décisions du pouvoir. Mais quelle erreur de voir qu'il `agit seulement de la routine de services I Pour bien exécuter, il faut choisir les moyens, les adapter aux difficultés rencontrées ou simplement aux circonstances ; il faut s'inquiéter sans relâche des perfectionnements qui sont toujours possibles afin que l'exécution soit toujours meilleure : travail de patience et de volonté ».2L'ensemble du personnel de l'administration, la totalité des personnes travaillant pour l'administration constitue la fonction publique.

L'administration étant le bras séculier du gouvernement3, son fonctionnement est encadré par un certain nombre d'instruments juridiques4. C'est ainsi que ces instruments juridiques organisent les carrières des différents agents de l'administration et par conséquent celle des fonctionnaires. La carrière du fonctionnaire est organisée de son recrutement à sa cessation d'activité en passant par la fixation de ses droits et surtout de ses obligations qui nous intéressent ici.

L'Etat a donc tenu à fixer des obligations que son personnel est censé respecter afin de rendre l'action de son personnel efficace et éviter par-là même la vacuité de son service. C'est sans doute pour montrer l'encadrement spécial de la conduite du fonctionnaire que le Professeur HAURIOU a affirmé que le statut du fonctionnaire est construit autour de l'idée que celui-ci est un citoyen spécial5, soumis à des obligations qui ne sont point celles des autres citoyens6 .

Bien que d'origine occidentale, la fonction publique n'est pas étrangère aux Etats africains en général et au Cameroun en particulier. En effet, le personnel de la fonction publique

1Cornu (G), vocabulaire juridique,9e édition, PUF, Paris,2011

2 Débré (M) , Commissaire de la République, chargé de mission pour la réforme de la fonction publique.

La réforme de la fonction publique

Cahiers français, n° 34, 5 octobre 1945, p. 14-18

Exposé présenté à une conférence de presse au ministère de l'information : objets de la réforme, création des IEP,

de l'ENA, CHEA ...

3 BBRETON (M), droit de la fonction publique des Etats d'Afrique francophone, EDICEF, 1990, p 19 4Voir les différents statuts de la fonction publique.

5 AUBY(J.M), DUCOS-ADER, droit administratif, la fonction publique, les biens publics, les travaux publics, 4e éd, Dalloz, Paris, 1997. P 184

6 BLAYS (P), « Les obligations du fonctionnaire en dehors de son service », Dalloz, 1954, Chron.- XVIII, p. 105

Mémoire présenté et soutenu par AMBI PHILIPPE ROMEO Page 3

Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

camerounaise est encadré par un statut depuis 1966, à en croire le décret de la même année portant statut général de la fonction publique fédérale7.A partir de cette illustration, il est donc un truisme les fonctionnaires camerounais ont des obligations à respecter pour une fonction publique plus adaptée aux défis que le pays doit relever pour son émergence à l'horizon 2035. Le président de la république8, parlant des jeunes fonctionnaires par exemple a incité ces derniers à être des modèles dans leurs services (bureaux) ; une pareille incitation sous-entend un respect de leurs obligations par ces derniers.

Une étude menée sur « les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais », pourrait également trouver ici une place non négligeable dans l'optique de confirmer cet état des choses.

L'analyse introductive qu'il convient de mener sur ce sujet de recherche, s'articule autour de deux points essentiels. Il s'agit d'une part de situer le cadre de l'étude (Section I), et d'autre part de déterminer son objet et sa méthode (Section II).

SECTION I : LE CADRE DE L'ÉTUDE

Une étude scientifique a vocation être circonscrite, située. A travers cette action, il s`agit de préciser l'origine mais aussi le sens des concepts qui forment l'intitulé du sujet. Cette opération de précision du sens des concepts consiste en une définition des concepts dont l'importance est de les rendre plus appréhensibles9.C'est donc cette opération de définition des concepts et de précision de leurs sens selon le concept qui constituera notre travail dans ce cadre de l'étude.

Pour réaliser cette opération, nous traiterons du cadre conceptuel de l'étude(I) avant de nous intéresser au cadre spatio-temporel de cette étude(II).

I- LE CADRE CONCEPTUEL DE L'ETUDE

Dans cette articulation, il s'agira pour nous de donner les différentes définitions des concepts sur les plans littéraires et juridiques. Dans cette optique, nous donnerons les sens des expressions suivantes : les obligations du fonctionnaire (A) et droit de la fonction publique camerounais (B).

7 Décret n°66-DF-53 du 3 mars 1966 portant statut général de la fonction publique fédérale.

8 Discours du président Paul Biya du 10 février 2016 adressé à la jeunesse.

9 Selon Jean Louis Bergel, «la définition d'un concept dont l'importance en droit romain, dans le Digeste, était déjà très grande, consiste à donner le sens du mot qui le désigne d'après les éléments qui le constituent.

Mémoire présenté et soutenu par AMBI PHILIPPE ROMEO Page 4

Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

A- les obligations du fonctionnaire

L'expression « obligation du fonctionnaire » sera abordée comme précédemment dit dans les sens littéraire et juridique. Nous traiterons séparément les mots qui constituent cette expression.

1- le concept d'obligation

Le mot « obligation » vient du latin obligatio, de oligare (composé du préfixe ob et de ligare qui signifie « lier ») : obliger, lier par une loi, un ordre, un accord, un service. Le dictionnaire universel10définit l'obligation d'abord comme ce qui est imposé par la loi, la morale ou les circonstances (satisfaire à ses obligations familiales et professionnelles. ex. Etre dans l'obligation de déménager. Ensuite comme un lien astreignant à effectuer une prestation ou à s'abstenir d'un acte déterminé (obligation alimentaire entre parents par exemple.). Enfin ce dictionnaire définit l'obligation en tant que valeur mobilière négociable qui donne droit à des intérêts. Cette dernière définition qui vient du domaine des finances montre à quel point ce terme est polysémique, ce qui crée la nécessité pour un meilleur recadrage de nous intéresser à sa définition juridique.

Sur le plan juridique, le terme obligation est également défini de plusieurs manières : en droit commercial, il est défini comme un titre négociable émis par une société de capitaux qui emprunte un capital important, généralement à long terme et divise sa dette en un grand nombre de coupures11. Dans un sens restreint, le terme obligation est synonyme de dette. Au sens large, c'est un lien de droit entre deux ou plusieurs personnes en vertu duquel l'une des parties, le créancier peut contraindre l'autre, le débiteur, à exécuter une prestation. Le vocabulaire juridique12 va dans le même sens en définissant l'obligation comme synonyme de devoir.

Michel Virally13 dans son article « phénomène juridique » parle l'obligation comme l'élément sur lequel l'accent est ordinairement mis avec le plus de force, de façon assez légitime. Selon lui, celle-ci se présente sous deux formes distinctes, négative et positive : celle de l'interdit, qui prohibe un comportement déterminé (laisser une voiture en stationnement, par exemple), et celle du prescrit, qui enjoint, au contraire, un comportement déterminé (circuler d'un certain côté de la chaussée). Toutes deux relèvent cependant de la même catégorie de

10 Dictionnaire universel, 4e édition, EDICEF, Aout 2007.

11 Lexique des termes juridiques,18e édition, Dalloz, 2011

12 Cornu (G), vocabulaire juridique, 9e édition, PUF, 2011 13Virally (M), « phénomène juridique »

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Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

l'impératif ou, si on les considère du point de vue de celui qui leur est soumis, du devoir : ce sont les deux contenus possibles d'un devoir.

C'est cette définition de Michel Virally de l'obligation que nous utiliserons dans notre analyse. Comme dans notre sujet, il s'agit des obligations du fonctionnaire, la définition du concept de fonctionnaire s'impose.

2- le concept de fonctionnaire

Le terme « fonctionnaire » vient du mot fonction qui lui-même vient du latin « functio » qui signifie accomplissement, exécution, s'acquitter de. Le Robert14 définit le fonctionnaire comme une personne qui a un emploi permanent dans une administration publique. Cette définition n'est pas différente de celle que donne le dictionnaire universel.

En droit, la définition est plus précise. Le dictionnaire de droit administratif le définit au sens large comme synonyme d'agent public. Au sens strict, retenu en droit administratif, les fonctionnaires ne sont qu'une catégorie d'agents publics ; le Conseil d'Etat a dégagé les critères du fonctionnaire avant que les relais ne soient pris par le législateur dans les statuts successifs de la fonction publique. Le fonctionnaire est une personne nommée qui est vis-à-vis de l'administration dans une situation statutaire et réglementaire. Il occupe un emploi permanent à titre permanent. Ce qui n'implique pas forcément travail à temps complet, des possibilités de travail à temps partiel étant prévues par le statut général de la fonction publique ; il est titularisé dans un grade de la hiérarchie des administrations centrales, des services déconcentrés en dépendant ou des établissements public de l'Etat, des collectivités locales ou des établissements publics en relevant de la hiérarchie administrative dans les établissements publics hospitaliers énumérés par la loi15.

Jean Gatsi16 va dans le même sens et ajoute que le terme « fonctionnaire » désigne également tout magistrat, tout préposé ou commis de l'Etat ou toute autre personne morale de droit public, d'une société d'Etat ou d'économie mixte, un officier public ministériel, tout militaire des forces armées ou de la gendarmerie, tout agent de la sureté nationale ou de l'administration pénitentiaire, toute personne chargée même occasionnellement d'un service public, d'une mission ,d'une mission ou d'un mandat public, agissant à l'occasion de l'exercice de ses fonctions. Cette dernière définition de Gatsi apparait très inclusive. Nous nous en tiendrons donc dans le but de maintenir une rigueur terminologique dans notre devoir à la définition issue de notre statut général de la fonction publique selon lequel, « est considérée

14Dictionnaire Le Robert de poche, 2012

15 Vang Lang(A) et Gondouin (G), dictionnaire de droit administratif, 6e édition, Sirey, 2011, P.201 16Gatsi (J), Nouveau dictionnaire juridique, 2e édition, PUL, 2010

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Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

comme fonctionnaire, toute personne qui occupe un poste de travail permanent et est titularisée dans un cadre de la hiérarchie des administrations de l'Etat »17.

Ces obligations du fonctionnaire dans le cadre de notre étude sont circonscrites en droit de la fonction publique camerounais ; d'où l'utilité de la définition de l'expression « droit de la fonction publique camerounais ».

B-le droit de la fonction publique camerounais

Dans cette expression, nous définirons le terme « droit »(1) et l'expression « fonction publique »(2) afin de déduire la signification de toute l'expression(3).

1- le droit

Le terme droit vient du latin « directum », neutre pris substantivement de l'adjectif « directus » : ce qui est en ligne droite, direct, sans détour, droit. Dans les dictionnaires littéraires, il est défini tantôt comme la faculté d'accomplir une action, de jouir d'une chose, d'y prétendre, de l'exiger, ou plutôt comme l'ensemble des règles qui régissent les rapports entre les hommes18.Le Robert de poche le défini d'une part comme ce que chacun peut exiger, ce qui est permis selon une règle morale, sociale, d'autre part comme des règles juridiques en vigueur dans un Etatà la coutume, à des lois , à des jurisprudences. Cette dernière définition se rapproche du sens juridique du terme.

Sur le plan juridique, le lexique des termes juridiques tantôt comme une prérogative attribuée à un individu dans son intérêt lui permettant de jouir d'une chose, d'une valeur ou d'exiger d'autrui une prestation : c'est le droit subjectif, ou plutôt comme l'ensemble des règles régissant la vie en société et sanctionnées par la puissance publique : c'est le droit objectif. Le vocabulaire des termes juridiques va dans le même sens en définissant le droit objectif comme l'« ensemble de règles de conduite socialement édictées et sanctionnées, qui s'imposent aux membres de la société.».

Dans notre sujet, le terme droit sera compris dans son sens objectif. Que dire de l'expression « fonction publique » ?

2- la fonction publique

Avant de définir l'expression fonction publique, il convient de présenter succinctement ses origines françaises en Afrique francophone.

17 Voir article 3 du statut général de la fonction publique, décret n°94/199 du 07 octobre 1994 modifié et complété par le décret n°2000 /287 du 12 octobre 2000.

18 Dictionnaire universel, 4e édition, Aout 2007

Mémoire présenté et soutenu par AMBI PHILIPPE ROMEO Page 7

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a- la genèse française de la fonction publique

Les origines de la fonction publique en France remontent au moyen-âge19.

Au Moyen-Âge, le besoin d'une administration et d'agents à son service - ancêtre de la fonction publique - commence à se manifester avec l'affirmation de la mainmise du roi sur le territoire, au détriment des seigneurs, et la progression de la construction de l'État monarchique. Ce mouvement s'accélère sous le règne de Philippe le Bel (1285 - 1314). Les légistes du roi, formés au droit romain, jouent un rôle central dans cette administration. Sous l'Ancien Régime, le nombre des agents augmente, mais cette « fonction publique » demeure très hétérogène et il n'existe pas de statut. Il faut néanmoins distinguer deux groupes au sein de ces agents publics : les officiers et les commissaires.

L'office, à l'origine, désigne toute fonction confiée par le roi à un particulier rémunéré par des gages et des taxations attachées à chacune des opérations qu'il accomplit. Mais à la fin du XVe siècle/début du XVIe, il devient un objet de commerce entre particuliers : c'est la vénalité des offices. En 1604, l'édit de la paulette consacre le caractère patrimonial et héréditaire des offices contre le versement d'un droit annuel et d'un droit de mutation à l'État. Pour renflouer ses caisses, le roi multiplie alors les offices, mais perd du même coup le contrôle sur ces officiers.

La création des commissaires, dont les intendants de justice, police et finances font partie, a donc eu pour but de rétablir la pleine autorité du roi sur ses agents. Le roi dispose en effet d'un pouvoir discrétionnaire de nomination et de révocation sur les commissaires, qui ne sont pas propriétaires de leur charge. Leur fonction est temporaire et limitée. Les intendants occupent une place croissante dans l'administration du royaume aux XVIIe et XVIIIe siècles.

Enfin, les agents publics de l'Ancien Régime connaissent déjà une hiérarchisation entre une « haute fonction publique » et une fonction publique d'exécution.

Sous la Révolution20, les effectifs de l'administration gonflent, que ce soit dans les ministères ou, sur le plan local, dans les services chargés d'équiper et de ravitailler les armées. Par ailleurs, on remarque une relative stabilité du personnel administratif. Ainsi, les

19Le Moyen-Âge et l'Ancien régime : les lointaines origines de la fonction publique. 20La Révolution et le XIXe siècle : l'évolution vers une véritable fonction publique

Mémoire présenté et soutenu par AMBI PHILIPPE ROMEO Page 8

Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

administrateurs territoriaux ont pour la plupart été formés sous l'Ancien Régime, ont administré les anciennes provinces et conservent leurs fonctions en raison de leur expérience.

Pendant la période napoléonienne, la fonction publique est tout d'abord largement réorganisée et se professionnalise. Les grades et les emplois sont définis de manière plus précise, de même que le système présidant à l'avancement. Les horaires de travail deviennent stricts.

Demeure néanmoins une forte hétérogénéité des agents publics. La haute fonction publique est de facto réservée aux notables et à leurs enfants, le recrutement s'effectuant par cooptation au sein des mêmes milieux. Pour les fonctionnaires des catégories inférieures, le recrutement s'opère dans les milieux modestes, avec des possibilités d'avancement limitées.

Tout au long du XIXe siècle, le pouvoir place le territoire français sous une stricte tutelle administrative, ce qui se traduit par une fonctionnarisation accrue des services publics. Ce phénomène explique l'accroissement constant des effectifs. Parallèlement, apparaît l'idée que les fonctionnaires doivent être à la fois mieux formés et mieux sélectionnés.

Le premier souci des républicains, dès la fin des années 1870, est de s'assurer des sentiments favorables des fonctionnaires à l'égard de la République. C'est à une forme d'« épuration » que l'on assiste pendant les premières années de la IIIe République. Dans le même temps, dans un contexte de forte instabilité ministérielle, les hauts fonctionnaires deviennent les meilleurs garants de la continuité de la vie nationale.

L'extension des compétences étatiques est concomitante d'importantes évolutions au sein de la fonction publique. C'est notamment à cette époque que la hiérarchie au sein de chaque département ministériel (directeur, sous-directeurs, chefs de bureau, sous-chefs de bureau et rédacteurs) se cristallise, au moins jusqu'à la Libération.

La question de la formation et du recrutement se pose toujours. En 1848, Hippolyte Carnot, ministre de l'Instruction publique, fonda une École d'administration pour former la haute fonction publique. Son existence est brève mais l'idée rejaillit sous la IIIe République avec en 1876, à nouveau la création d'une école nationale d'administration, projet qui échoue finalement. Parallèlement, en 1872, le journaliste Émile Boutmy créé l'École libre des sciences politiques, qui a pour principale vocation la préparation des concours administratifs. Mais Jules Ferry ne réussit pas à la nationaliser en 1881.

D'autres évolutions révèlent les grandes tendances de la société française. Au tout début du XXe siècle, les femmes font une entrée remarquée dans les ministères. D'ailleurs, à partir

Mémoire présenté et soutenu par AMBI PHILIPPE ROMEO Page 9

Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

de 1919, les concours de rédacteurs sont ouverts aux femmes. Il faut également noter la syndicalisation croissante de facto des fonctionnaires, à une époque où le droit syndical ne leur était pas reconnu et le droit de grève strictement interdit.

Alors qu'a pris son essor, à la fin des années 1930, le débat essentiel sur la nécessité d'un statut général de la fonction publique, c'est finalement le gouvernement de Vichy qui publie, par la loi du 14 septembre 1941, le tout premier statut général des fonctionnaires fortement hostile à la grève et insistant sur les devoirs des fonctionnaires.

À la Libération, une épuration de l'administration a lieu, suivie d'un mouvement de réforme de la fonction publique marqué par deux avancées : la création de l'École nationale d'administration (ENA) par l'ordonnance du 9 octobre 1945 et l'adoption du premier statut général républicain des fonctionnaires défini par la loi du 19 octobre 1946. Ce texte a été voté à l'unanimité par l'Assemblée constituante et préparée par Maurice Thorez, alors vice-président du conseil communiste chargé de la fonction publique. Le droit syndical et le droit de grève sont alors officiellement reconnus aux fonctionnaires.

La IVe République met en application ce nouveau statut, puis un nouveau statut intervient avec l'avènement de la Ve République. Il s'agit seulement de tirer les conséquences de la nouvelle répartition entre le domaine de la loi et du règlement établie par l'article 34 de la Constitution du 4 octobre 1958. Tel est l'objet de l'ordonnance du 4 février 1959.

Enfin, l'alternance politique de 1981 débouche sur une nouvelle modification du statut général de la fonction publique, qui se compose lui-même de plusieurs textes : la loi du 13 juillet 1983 relative aux droits et obligations des fonctionnaires, qui s'applique à tous les fonctionnaires, suivie par trois textes concernant respectivement la fonction publique de l'État (loi du 11 janvier 1984), la fonction publique territoriale (loi du 26 janvier 1984) et la fonction publique hospitalière (loi du 9 janvier 1986).

Les évolutions de fond à retenir sur cette longue période sont au nombre de deux. D'abord, l'accroissement du nombre de fonctionnaires a perduré, notamment sous les effets de la décentralisation à partir de 1982. Par ailleurs, la relation entre fonction publique et politique a évolué. On parle d'une « fonctionnarisation de la politique ». En effet, depuis le début des années 1960, il est fréquent que des membres de la haute fonction publique réussissent une carrière politique au plus haut niveau. Ainsi, pour ne citer que quelques exemples : Valéry Giscard d'Estaing, Jacques Chirac, Laurent Fabius, Alain Juppé, Lionel Jospin, Dominique de Villepin, François Hollande sont tous anciens élèves de l'ENA.21

21 Voir : http://www.vie-publique.fr/decouverte-institutions/institutions/approfondissements/histoire-fonction-publique.html

Mémoire présenté et soutenu par AMBI PHILIPPE ROMEO Page 10

Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

La fonction publique, tout comme les autres institutions européennes va être transposée en Afrique en général et au Cameroun en particulier par le biais de la colonisation.C'est ainsi qu'à l'instar de l'ENA française, nous avons l'ENAM au Cameroun, école chargée de former les fonctionnaires. Vu l'importance de la fonction publique dans la vie de l'Etat, une définition de cette notion nous sera d'un grand apport dans la compréhension de notre sujet.

b- définition de la fonction publique

Le dictionnaire universel définit la fonction publique comme l' « ensemble des charges exercées par les agents de la puissance publique ; ensemble des fonctionnaires »22. Le Robert de poche ne fait pas mieux lorsqu'il désigne la fonction publique comme la «situation de l'agent d'un service public »23 . Ces définitions littéraires apparaissent non satisfaisantes, d'où la nécessité d'une définition juridique.

Sur le plan juridique, la fonction peut être définie de plusieurs points de vue :

-Du point de vue organique, « La fonction publique de l'État est constituée par l'ensemble des postes de travail correspondant à des niveaux de classification différents. Elle est organisée en corps, cadres, grades et catégories »24.Jean Gatsi va dans le même lorsqu'il définit la fonction publique de l'Etat comme un « ensemble des postes de travail correspondant à des niveaux de classification différents »25.D'un point de vue organique, plus restrictif, qui retient l'attention du juriste : « la fonction publique regroupe l'ensemble de personnes qui ont été nommées dans un emploi civil permanent et ont été titularisées dans un grade d'un corps, cadre d'emploi ou emploi de la hiérarchie administrative de l'Etat, des collectivités territoriales, et des établissements publics à caractère administratif qui dépendent de l'Etat ou de ses collectivités, ainsi que des établissements hospitaliers définis par la loi »26. Cette définition restrictive omet certains organes de la fonction publique tels les fonctionnaires de la sureté nationale, les militaires qui sont au Cameroun des agents de la fonction publique.

-Du point de vue, la fonction publique désigne un régime juridique applicable à une catégorie d'agent publics.Le fonctionnaire est, vis-à-vis de l'Administration, dans une « situation statutaire et réglementaire»27.

Direction de l'information légale et administrative (c) 2013

22 Dictionnaire universel, 4e édition, EDICEF, Aout 2007

23 Le Robert de poche 2012

24 Article 3 du statut général de la Fonction publique, décret n°94/199 du 07 octobre 1994 modifié et complété par le décret n°2004/287 du 12 octobre 2000.

25Gatsi (J), Nouveau Dictionnaire Juridique, 2e édition, PUL, 2010.

26BANDET (P), Les fonctions publiques de A à Z, Dictionnaire commenté, p. 249. 27Owona (J), Droit de la fonction publique camerounaise, l' Harmattan, 2011, P. 8

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Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

-Du point de vue matériel Enfin, la Fonction publique peut tout simplement vouloir dire participation permanente et à titre professionnel à l'action des personnesmorales publiques de l'État et des collectivités décentralisées28. «Est considérée comme fonctionnaire toute personne qui occupe un poste de travail permanent »29dans un cadre de la hiérarchie desadministrations de l'État. Après la définition du terme « droit » et de l'expression « fonction publique », il ne nous reste plus qu'à déduire le sens contextuel le l'expression « droit de la fonction publique ».

3-le sens contextuel de droit de la fonction publique

De par les définitions précédentes, le droit de la fonction publique signifie au sens large : l'ensemble des règles juridiques qui régissent « l'ensemble des personnes à la disposition des gouvernants pour faire fonctionner les services publics ».

Stricto sensu, le droit de la fonction publique est l'ensemble des règles juridiques « l'ensemble des personnels occupant à titre professionnel un emploi salarié dans les services des personnes publiques, sont soumises à un statut de droit public ».30Une fois le cadre conceptuel précisé, il nous revient maintenant de définir le cadre spatio-temporel de l'étude.

II- LE CADRE SPATIO-TEMPOREL DE L'ETUDE

Dans cette articulation, il s'agira pour nous de circonscrire ou de délimiter notre étude sur les plans géographique (A) et temporel(B).

A- Le cadre géographique de l'étude

Dans notre étude prendrons en compte le droit de la fonction publique d'autres pays(1) que nous confronterons avec le nôtre, c'est-à-dire celui du Cameroun(2)

1- les autres pays du cadre géographique

Nous entendons ici par autres pays, des pays francophones dont le droit sera confronté au nôtre et vice-versa. Parmi ces pays figure en première place des pays de la métropole comme on les a souvent appelés en histoire, dont la France occupera une place prépondérante. A côté de la France, nous ajouterons un peu de droit de la fonction publique belge et en dehors de la métropole, utiliserons parfois le droit québécois, ceci, afin de rendre notre analyse plus consistante et surtout plus efficiente. Ce choix n'est pas hasardeux ou même plus précisément

28 Ibid.

29Voir article 3 du statut général de la Fonction publique.

30Chapus (R), Droit administratif général 2, Tome 2, 15e édition, Montchrestien, 2001, pp 282-303.

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fortuit car il est guidé par le fait que, comme nous l'avons précédemment dit, c'est de la métropole que dérive le droit des ex-colonies dont le Cameroun fait partie ;pour reprendre les propos René Guy Kouassigan : « l'Afrique offre l'image d'une projection de la France sous les tropiques »31. Pour ce qui est du Québec, son utilité est du fait que les échanges avec notre pays sont de plus en plus grand surtout que des offres d'emplois et académiques sont de plus en plus importants, d'où l'importance d'y prêter attention. A côté des pays de la métropole, notre travail s'étendra à certains pays africains.

Les africains dont nous parlons ici, sont des pays une histoire pas identique à celle du Cameroun mais proche tout de même. Il s'agit des pays ayant subi une occupation française pendant la période de la colonisation. Pour être plus clair et précis, il s'agit des pays d'Afrique noire francophone. C'est ainsi que nous nous intéresserons à certains pays d'Afrique équatoriale française32comme le Cameroun y a été rattaché après la défaite allemande durant la première guerre mondiale. Nous jetterons également notre dévolu sur certains pays d'Afrique occidentale française33car ayant des vestiges du passage des français. Au-delà de ces pays, notre champ géographique d'étude de prédilection reste le Cameroun.

2- Le Cameroun

Par-delà tous les droits auxquels nous ferons appel dans notre analyse, le droit de la fonction publique camerounais reste et demeurera notre préoccupation principale. Et comme le territoire camerounais constitue son réceptacle, ce territoire constitue donc notre champ géographique de prédilection.Il est évident que l'automie interne du cameroun a entrainé une autonomie du droit camerounais34 d'où les divergences que nous verrons de temps à autre par rapport au droit français. De même, la fonction publique qui fait l'objet de notre étude est la fonction publique de l'Etat car contrairement au cas français où il existe trois fonctions publiques (la fonction publique de l'Etat, la fonction publique des collectivités territoriales et la fonction publique hospitalière), la fonction publique est unique. Après avoir fixé le cadre géographique de notre étude, il revient de poursuivre logiquement par la présentation du cadre temporel.

31Kouassigan (R.G), « quelle est ma loi ? », cité par le Dr Mgarga Nyatte, cours de droit administratif approfondi 2013-2014 de master I, UY II (FSJP).

32 Afrique centrale et plus précisément les membres de la CEMAC.

33 Aujourd'hui Afrique de l'ouest, les membres de la CEDEAO.

34 ONDOA (M), Introduction historique au droit camerounais : la formation initiale. Eléments pour une théorie de l'autonomie des droits africains. EDLK, p30 et s

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Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

B- Le cadre temporel de l'étude

Le cadre temporel ici fait référence à la circonscription dans le temps de notre étude. Pour nous y atteler, nous verrons comme cela a été le cas pour la France, la genèse de la fonction publique au Cameroun(1) avant de fixer le cadre temporel de notre proprement dit(2).

1- La genèse de la fonction publique au Cameroun

Au Cameroun, l'origine de la fonction publique remonte à l'époque coloniale. Comme précédemment dit, l'apparition ou plus précisément la mise en place de la fonction publique en Afrique est l'oeuvre de la colonisation. Selon le Pr Joseph Owona35, le colonisateur allemand avait déjà mis un accent sur la formation des camerounais destinés à le seconder activement. En 1913, il existait plusieurs écoles spécialisées dont les écoles d'infirmiers de Buea et de Victoria. La première école d'agriculture du pays s'ouvre en 1910.

Au début de la colonisation française, le personnel africain, auxiliaire précieux pour l'administration et les entreprises privées coloniales, était formé à l'Ecole primaire supérieure de Yaoundé comportant trois(03) ans d'études et préparant aux carrières de moniteurs de l'enseignement, de fonctionnaires de services centraux, de postiers, d'infirmiers et de moniteurs agricoles. Cet embryon de fonction publique va connaitre un essor avec l'accession à l'autonomie et à l'indépendance. Les effectifs, c'est-à-dire le personnel de cette fonction publique, vont augmenter au fil du temps jusqu'aux années 80-90, période pendant laquelle les programmes d'ajustement structurel imposés aux Etats africains par les institutions financières mondiales36 (Banque mondiale et Fond monétaire international), vont conduire à une grande réduction du personnel car, il était question de l'adapter au contexte de « crise économique » sévère qui rendait « impossible le paiement régulier du traitement des fonctionnaires» 37. Ce personnel va croitre à nouveau à partir de 2001 à nos jours, selon les études statistiques du Pr Owona. Après ce bref rappel historique de la mise en place de la fonction publique camerounaise et de son évolution, il convient de fixer le cadre temporel proprement dit.

35Owona (J), Droit de la fonction publique camerounaise, l' Harmattan, Paris, 2011

36 Comme le Cameroun qui a connu trois programmes d'ajustement structurel (le PAS I a été cofinancé par la Banque Mondiale en 1989, le PAS II avait assisté le pays pour atteindre le point de décision de l'initiative PPTE en octobre 2000, le PAS III visait à atteindre le point d'achèvement. Celui-ci a finalement été atteint en avril 2006.), bon nombre d'Etats africains ont subi ces programmes également : le Sénégal et le Togo en ont connu quatre (04) , la Côte d'ivoire et la République Centrafricaine en ont connu trois (03) comme le Cameroun. Cf. cours de politique et réglementation économiques du Pr Abanda Anicet, master I, UY II.

37 KAMTO(M) « Regard sur le nouveau statut général de la fonction publique », chronique juridique Lex Lata N°002. 28 octobre 1994, p 8-12

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Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

2- Le cadre temporel de l'étude proprement dit

En effet, pour une meilleure compréhension de notre étude sur les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais, il est nécessaire de voir l'évolution de ces obligations dans le temps. C'est dans cette optique que nous fixerons pour point de départ de notre étude la date de l'obtention de son autonomie par le Cameroun, c'est-à-dire à partir de 1958, avec notamment la loi n°58-84 du 22 juillet 1958 fixant le statut général des fonctionnaires de l'Etat du Cameroun. En effet, c'est cette date(1958) à nos jours que se situe notre étude. Une fois notre cadre temporel ainsi précisé, il ne nous reste plus qu'à nous pencher sur l'objet et la méthode de l'étude.

SECTION II : L'OBJET ET LA METHODE DE L'ETUDE

L'analyse des obligations du fonctionnaire en droit de droit de la fonction publique camerounais conduit à la définition desdites obligations. Cette définition consistera à expliquer ce que sont ces obligations, dans le but de les déterminer avec plus de précisions possibles. Pour y parvenir, des précisions doivent justement être faites sur ce qui est retenu comme objet d'étude (I), et la méthode adéquate pour conduire notre étude (II).

I- L'OBJET DE L'ETUDE

Une étude menée sur les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais ne peut être bien conduite que si l'on comprend bien le sens contextuel du terme obligation. C'est justement ce sens contextuel unique qui orientera notre analyse. La nécessité de construire une problématique (A) et l'exposé de l'intérêt de l'étude (B) s'impose donc pour que l'on soit en accord avec l'exigence méthodologique de la fixation exacte de l'objet d'étude.

A- La problématique de l'étude

Dans cette articulation de notre travail, c'est l'exposé de la problématique (1) qui nous permettra de dégager l'hypothèse générale de l'étude (2).

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Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

1- L'exposé de la problématique

Il n'est un secret pour personne que l'orientation à donner à une étude scientifique ne s'effectue pas fortuitement. Au contraire, elle nécessite une certaine rigueur et une rigueur certaine. A la lecture de notre sujet, on constate qu'il s'agit de définir et plus clairement d'énumérer les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais. Dans ce sens, la problématique ou la question principale à laquelle il va falloir répondre tout au long de ce travail est celle de savoir : quelles sont les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais ?Pour mieux comprendre cette question, il faut partir du postulat que les fonctionnaires camerounais comme tous les autres citoyens ont des devoirs qu'il mérite ici de préciser et même d'évaluer par la confrontation avec ceux des fonctionnaires des pays qui entrent dans notre cadre géographique. De cette problématique se dégage une hypothèse générale.

2- L'hypothèse générale de l'étude

Avant de formuler cette hypothèse, il est important de préciser que les normes juridiques ne sont pas les seules à définir des obligations. La norme morale et diverses normes sociales, que l'on désigne souvent par l'expression vague de moeurs ou d'usages font de même. Dès lors, le juriste a besoin de découvrir le critère qui lui permettra de distinguer l'obligation juridique de toutes les autres. Ce critère semble être la sanction de la violation par la puissance publique ou l'appareil étatique ; contrairement à l'obligation morale dont la violation est sanctionnée par la conscience de l'auteur de ladite violation. Il convient de préciser ici et maintenant que c'est de l'obligation juridique qu'il est question dans notre problématique.

Parlant donc d'obligation juridique, il faut encore préciser que nous ne prendrons pas en compte le sens qui est donné à ce terme en droit commercial, en tant que titre négociable émis par une société de capitaux qui emprunte un capital important, généralement à long terme et divise sa dette en un grand nombre de coupures38, bien que ce soit une définition juridique.

Nous définirons les obligations du fonctionnaire en nous en tenant aux deux sens négatif et positif que retient Michel Virally39. Dans le sens négatif, les obligations du fonctionnaire seront comprises comme un ensemble de prohibitions ou d'interdictions faites au fonctionnaire par les instruments juridiques ; il s'agit donc dans cette première conception des obligations de ne pas faire ou d'abstention. Dans le second sens, c'est-à-dire, dans le sens positif du terme, il

38 Lexique des termes juridiques, 18e édition, 2011

39Virally (M), « Phénomène juridique », RDP et SP , 1982.

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s'agit au contraire d'un ensemble de prescriptions faites par le droit positif au fonctionnaire ; il s'agit donc dans cette conception des obligations de faire ou prescriptions. Cette hypothèse apporte comme première réponse que les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais sont un ensemble d'interdictions et de prescriptions. Quel est donc l'intérêt de l'étude ?

B- L'intérêt de l'étude

L'utilité de cette étude se justifie par la détermination de son intérêt. L'intérêt d'étudier les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais tient à l'observation des textes qui régissent ledit fonctionnaire. Cet intérêt peut être perçu tant sur le plan purement théorique(1) que sur le plan essentiellement pratique (2).

1- L'intérêt théorique de l'étude

Sur le plan théorique, la multiplicité des textes40 régissant l'action et le comportement des agents de l'administration41 et plus précisément de la fonction publique justifie le choix de cette étude. En effet, pour définir les obligations du fonctionnaire, et vu la multiplicité des corps de la fonction publique, une étude rigoureuse du droit en vigueur s'impose quand on sait par exemple que l'article 1er alinéa 3 du code de travail camerounais42, citant les corps exclus de son champ d'application omet par exemple de citer le corps des fonctionnaires de greffes qui est régi par un statut spécial43. Pareille omission pourrait faire croire que ce corps de fonctionnaires est régi par le code du travail. Ainsi, notre étude apportera plus précision sur la qualité de fonctionnaire et les devoirs du fonctionnaire. C'est dans ce cadre sans doute que se trouve l'intérêt théorique de cette étude car il faut l'avouer, une confusion de statut entre corps entrainerait une mauvaise procédure en cas de contentieux (par exemple si l'on croit que le

40 L'existence au Cameroun d'une multiplicité de textes : le statut général, les statuts particuliers et même des statuts spéciaux.

41 Article 11.- Sous réserve des textes particuliers, des décrets du Président de la

République fixent les statuts particuliers ou spéciaux des divers corps de fonctionnaires régis par le présent décret.

42 Article 1er alinéa 3 du code de travail « 3) Sont exclus du champ d'application de la présente loi les personnels régis par :

· le statut général de la fonction publique ;

· le statut de la magistrature ;

· le statut général des militaires ;

· le statut spécial de la sûreté nationale

· le statut spécial de l'administration pénitentiaire ;

· les dispositions particulières applicables aux auxiliaires d'administration;

43 Décret n°2011/020 du 04/02/2011 portant statut spécial des fonctionnaires des greffes

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Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

corps des greffes par exemple est régi par le code de travail, on pourrait saisir le juge judiciaire au lieu du juge administratif44 dont la compétence est consacré de par la qualité de fonctionnaire des greffiers.). Après la présentation de l'importance théorique, il est temps de nous pencher sur l'intérêt pratique de l'étude.

2- L'intérêt pratique de l'étude

L'intérêt pratique de l'étude est l'utilité concrète de celle-ci. En effet, selon la définition sociologique de l'Etat, celui-ci est composé d'un territoire, d'une population et d'un gouvernement. Il faut donc une interaction entre la population et le gouvernement afin que l'Etat fonctionne mieux. Dans cette interaction, la population possède un certain nombre de droits exigibles à l'Etat et reconnus par la loi ; par exemple, l'Etat assure à tous les citoyens les conditions nécessaire à leur développement45. L'Etat et plus précisément le gouvernement remplit ces prestations qui lui sont exigibles par l'intermédiaire de l'administration46 dont une bonne partie des agents est constituée de fonctionnaires.

L'intérêt pratique de cette étude sur les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais est encore plus visible au regard de la vie de l'administration en général et du fonctionnaire en particulier. En effet, lorsqu'on écoute les communiqués radio-presses rappelant à certains fonctionnaires de regagner leurs postes qui restent vacants, une redéfinition des obligations des fonctionnaires s'impose d'elle-même. L'existence du principe de continuité du service public justifie encore plus la rigueur dont il faut faire preuve face à cette vacuité qui paralyse l'action administrative47. Ces remarques justifient l'intérêt pratique ou encore l'utilité de cette étude et par la même occasion, la fin de la circonscription de l'objet de l'étude. Il est par conséquent temps pour nous de parler de la méthode de l'étude.

44 Cf. Arrêt Blanco 1873, où l'incompétence des parlements (tribunaux judiciaires) est réaffirmée par le tribunal des conflits.

45 Voir préambule de la constitution camerounaise du 18 janvier 1996.

46 HONGLA-MOMHA, Déontologie Administrative en Afrique, Paris, l'Harmattan 1993, P.17 :

« L'administration publique est...l'institution privilégiée pour la mise en oeuvre des multiples missions du gouvernement. » Dans le cadre de la souveraineté royale, l'administration est appelée « service d'administration» et a pour rôle, à part le fonctionnement de la cour royale, la gestion des finances, de l'armée et de la justice. Cf. LEGOHÉREL, Histoire du droit public. pp.56-60.

47 Voir Projet de ode d'éthique de l'administration publique camerounaise, Article 11.- L'agent public est tenu : de déployer tous ses efforts pour offrir à l'usager un service public de qualité. A cet effet, il doit être : disponible, diligent, courtois, dévoué, impartial et neutre dans l'exercice de ses fonctions.

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Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

II- La méthode de l'étude

Selon René Descartes, la méthode est une « marche rationnelle de l'esprit pour arriver à la connaissance ou à la démonstration de la vérité »48. Le professeur Maurice Kamto parlera plus tard de la démarche méthodologique en ces termes : « la démarche méthodologique conditionne le travail scientifique car la méthode éclaire les hypothèses et détermine les conclusions »49. En bref, la méthode est un système ou un ensemble de procédés utilisés dans le but d'obtenir un certain résultat (dans les domaines scientifiques et techniques). Dans notre travail, la démarche scientifique principale sera la démarche juridique (A). Nous ferons également appel à des méthodes non juridiques (B) pour appuyer notre analyse.

A- La démarche juridique.

En réalité, les méthodes utilisées dans les études portant sur le droit sont au nombre de deux. Encrées dans la tradition juridique, elles ont été « esquissées par le professeur Eisenmann dans ses différents cours de doctorat, à savoir la dogmatique et la casuistique »50. C'est compte tenu de ces propos du Pr Charles Eisenmann que nous parlerons de la méthode exégétique(1) et la casuistique(2).

1- La méthode exégétique

La méthode exégétique qui consiste à faire des analyses sur la base de textes et écrits est la première méthode retenue. Elle est utilisée parce que cette étude concerne les obligations du fonctionnaire qui dans leur généralité sont contenues des textes. L'exégèse sera donc la méthode juridique prédominante dans ce travail. Cela se justifie par le fait qu'au Cameroun, la constitution, la loi, les textes de valeur législative et les textes réglementaires constituent les principales sources du droit de la fonction publique51. L'ensemble des textes qui régissent les obligations du fonctionnaire est donc évoqué ici. Il convient de relever d'emblée qu'il n'est pas question de prendre au hasard les textes à interpréter. Un choix doit être opéré en fonction des situations en cause, pour identifier le ou les textes essentiels et en ressortir la substance.

Pour découvrir la règle applicable à une situation précise, le sens et la portée que le législateur a attribuée au texte doivent être restitués. Ceci constitue la méthode exégétique pure,

48 Descartes (R), Discours de la méthode, 1637.

49KAMTO (M), Pouvoir et Droit en Afrique noire, essai sur les fondements du constitutionnalisme en Afrique noire francophone, LGDJ 1987, P.47

50 Voir : NLEP (R.G), L'administration publique camerounaise, p.8, cité par AbaneEngolo (P.E), Thèse de doctorat sur « l'application de la légalité par l'administration au Cameroun ».

51 OWONA (J), Droit administratif spécial de la république du Cameroun, EDICEF, 1985.

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qui réduit la tâche du juriste à un commentaire de la loi, article par article52.Lorsque le texte semble obscur ou incomplet, son sens doit être dégagé en recherchant quelle a été ou quelle aurait été la volonté du législateur, si son attention avait été attirée sur le point de la difficulté en cause. Pour cela, il faut chercher dans les travaux préparatoires qui sont publiés et qui comportent un exposé de motifs, des rapports de l'auteur (s'il s'agit d'un texte réglementaire du Président de la république ou du premier ministre) ou des auteurs du texte (autres textes réglementaires et textes législatifs). Nous renforcerons cette méthode à l'aide de la casuistique.

2- La casuistique

La casuistique constitue la deuxième méthode juridique à laquelle nous ferons appel dans notre travail. Cette méthode « s'intéresse davantage au droit positif, au droit réellement en vigueur. Ce faisant, elle se penche sur la manière dont le droit est appliqué par les différentes parties prenantes : l'administration d'une part, les cours et tribunaux, d'autre part »53. En réalité, aucune étude en droit ne peut plus être menée aujourd'hui en ignorance de la jurisprudence, appréhendée en général comme des décisions de justices rendues par un juge. Une étude menée sur les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais ne pourrait donc pas faire exception à cet état de choses.

Il est en effet unanimement admis aujourd'hui que le juge n'est plus comme une formule très ancienne le qualifiait « la bouche de la loi ». Désormais, « c'est à lui que revient, volens nolens, la charge fondamentale de l'édification du système juridique : c'est le juge, en effet, qui interprète, comble les lacunes, donne un contenu aux procédures et aux règles, c'est à ce niveau que le droit se forge dans les profondeurs... »54. La casuistique apparait d'un apport considérable dans le cadre de notre étude, l'affaire BABA YOUSSOUFA de la cour fédérale de justice du 16 octobre 1968 sur la détermination de la qualité de fonctionnaire en est une illustration55 .

Dans le cadre de l'étude des obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais, on ne peut certes se passer de la méthode juridique, mais celle-ci ne peut à elle seule faire le contour de toute la question. C'est pourquoi nous allons également faire appel à des méthodes accessoires.

52Bergel (J.L), Théorie du droit, 5e édition, Dalloz, 2012

53NLEP (R.G), L'administration publique camerounaise..., op.cit., p.18

54Bockel(A), Droit administratif, Nouvelles éditions africaines, CREDILA DAKAR, 1978, P 34. 55 Cf. CFJ-A6, arrêt n°9 du 16 octobre 1968

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Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

B- Les méthodes additives à la méthode juridique

Les méthodes accessoires sont nombreuses. Parmi elles figurent les méthodes politique, économique, sociologique, historique et comparative. Dans notre analyse, nous ferons appel à seulement deux d'entre elle : la méthode historique (1) et la méthode comparative (2).

1- La méthode historique

La méthode historique, comme son nom l'indique est généralement appliquée dans les travaux des chercheurs en histoire. L'histoire emploie plusieurs méthodes au nombre desquelles figure les chroniques (histoires), comptes rendus historiographiques retraçant chronologiquement certains événements de l'histoire d'une nation, d'une lignée de souverains ou d'une institution, et qui sont généralement rédigées par des personnages contemporains des faits qu'ils évoquent.

Selon une affirmation du Professeur Louis-Paul Ngongo, dans l'avant-propos de son ouvrage intitulé, Histoire des institutions et des faits sociaux du Cameroun, on doit être « soucieux de comprendre le Cameroun d'aujourd'hui à partir du Cameroun d'hier »56. Lorsqu'est situé le sujet de recherche dans cette même logique, on admet qu'il faut également comprendre qu'à travers la méthode historique, nous verrons l'évolution dans le temps des obligations du fonctionnaire. Cela mettra en évidence les grands changements qui ont été effectués dans ce domaine si tant il y'en a eus. Pour accomplir de manière plus satisfaisante notre étude sur les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais, on ne saurait se passer de la méthode comparative.

2- La méthode comparative

La méthode comparative apparait à première vue comme une méthode de confrontation des différents droits. Elle permettrait aux Etats africains d'enrichir leurs droits chaque fois qu'une formule de droit étranger apparait meilleure et adaptée aux valeurs de la société ou de l'Etat qui décide de puiser dans le droit étranger. La preuve est souvent reprise des solutions des juridictions françaises57 par les juges africains.

La comparaison peut également mettre en évidence les originalités de certains droits par rapport à d'autres ; à titre d'exemple, le droit administratif français est fondamentalement jurisprudentiel tandis que le droit administratif camerounais est à majorité textuel. A propos ces

56Ngongo (L-P), Histoire des institutions et des faits sociaux du Cameroun, Paris, Berger-Levrault, Tome 1, 1987, P 1, cité par Guesselé Isseme (L.P) in, Thèse de doctorat : L'apport de la cours suprême au droit administratif camerounais

57 La reprise des solutions de la Cour de cassation et du Conseil d'Etat en Afrique noire francophone.

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Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

traits d'originalité, Il faut dire qu'au fur et « à mesure que les principes juridiques évoluent et s'étalonnent de par le monde, les États jaloux de leurs prérogatives prennent quelques distances. Le « droit » semble alors un bon moyen de marquer son territoire, d'offrir une résistance à un éventuel agresseur ou prétendant au trône et, en dernière analyse, de conserver ses particularismes »58.C'est ainsi qu'il est possible qu'on retrouve des divergences dans lesobligations entre fonctionnaires camerounais et français ou même entre fonctionnaires camerounais, gabonais, sénégalais et malien.

La comparaison ne se limite pas à une confrontation entre droits de différents pays. Elle peut également s'opérer entre droit public et droit privé. On pourrait confronter par exemples les obligations du fonctionnaire avec celles du travailleur et voir s'il existe, au-delà de la différence de leurs traitements, une différence dans leurs obligations ; si oui, quelles sont ces différences. En cela se résume l'importance de la méthode comparative dans notre étude sur les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais.

De par cette démarche, à la question de savoir quelles sont les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais, il sera apporté comme réponse dans une première partie:

-Les obligations de solidarité au corps ;

Puis dans une seconde partie :

-Les obligations de responsabilité du service.

58Seroussi (R), Introduction au droit comparé, Paris, Dunod, 2e éd., 2003, p.1-2, cité par Guesselé Isseme (L.P) Ibid.

PREMIERE PARTIE :

LES OBLIGATIONS DE

SOLIDARITE AU CORPS

Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

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Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

Le corps est l'ensemble de fonctionnaires exerçant une fonction spécifique dans un secteur déterminé et régi par les mêmes dispositions réglementaires59 . Les obligations de solidarité au corps sont donc celles qui sont issu de l'appartenance du fonctionnaire à un corps particulier. En d'autres termes, c'est l'appartenance au corps qui crée ces obligations car si le fonctionnaire ne faisait pas partie dudit corps, ces obligations ne seraient pas les siennes. La solidarité dont il est question ici n'est pas synonyme de la solidarité en droit civil60 , elle se rapproche par contre de la solidarité des membres d'un syndicat qui apparait au sein d'une équipe dirigeante ,une communauté de vues, d'actions et de destin unissant, au moins à l'égard des tiers ,les membres du groupe61.

Il apparait donc que les fonctionnaires d'un même corps sont solidaires dans leurs obligations, c'est-à-dire qu'il y a une dépendance entre ces derniers puisqu'ils sont liés également par des intérêts communs. Ces obligations peuvent être regroupées en deux catégories. C'est ainsi que nous avons une solidarité dans l'éthique du corps et une solidarité dans la discipline du corps. C'est dans cet ordre d'idées que nous traiterons des obligations de solidarité dans l'éthique du corps (chapitre 1) pour nous pencher plus tard sur les obligations de solidarité dans la discipline du corps (chapitre 2).

59 Voir article 5 du statut général de la fonction publique camerounais

60 C'est-à-dire solidarité passive et active. Dans le premier cas, le créancier peut demander à l'un des débiteurs solidaire de payer l'intégralité de sa créance, sauf recours entre les débiteurs et dans le second, l'un des créanciers d'un même débiteur peut exiger le paiement de la totalité de la dette sans avoir reçu mandat des autres.

61Cornu (G), ibid.

CHAPITRE I : LES OBLIGATIONS DE SOLIDARITE DANS L'ETHIQUE DU CORPS

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L'importance de l'éthique de l'administration publique a engagé l'attention des spécialistes, des agences donatrices et des fonctionnaires. En effet, la préoccupation afférente à l'éthique dans la fonction publique est devenue une question de taille aussi bien dans les pays développés que ceux en voie de développement pour un certain nombre de raisons. Tout d'abord, la réputation et le succès d'un gouvernement dépendent de la conduite des fonctionnaires publiques et de ce que pense le public de la conduite des responsables. Par conséquent, il est d'une importance capitale que les fonctionnaires agissent avec intégrité. Il est impératif que chaque fonctionnaire, lorsqu'il accepte un emploi public, comprenne qu'il doit exécuter une tâche spéciale, juste et impartiale dans ses relations avec le public. L'intérêt personnel des fonctionnaires doit être en toutes circonstances subordonné à l'intérêt public, et notamment dans les circonstances où la possibilité d'un conflit d'intérêt est susceptible de devenir un dilemme d'éthique. Les activités privées des fonctionnaires doivent se caractériser par des normes élevées telles, qu'elles ne devraient pas entacher leurs postes et discréditer le gouvernement selon Chapman62. Deuxièmement et plus important encore, comme le rappelait le Dr. Joseph R.A. AYEE 63Professeur en Administration Publique : « un service public conforme à "l'éthique" est une composante importante d'une bonne gouvernance (une nécessité pour des prêts étrangers) préconisée par les institutions de Bretton Woods et autres donateurs sans lesquels le développement ne peut se produire dans les pays en voie de développement ». En d'autres termes, pour disposer d'institutions de fonction publique efficaces et effectives et de ressources publiques, la promotion de l'intégrité nationale est essentielle et

62Chapman (R.A.) "L'Ethique dans la Fonction Publique", Edimbourg, Presse de l'Université d'Edimbourg, ed.1993.

63 Dr. R.A. AYEE(J), Professeur en Administration Publique « La Fonction publique en Afrique : Ethique » Rabat ,1998

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cruciale. C'est pourquoi, figurent parmi les obligations du fonctionnaire, des obligations liées à l'éthique ; et qui plus est des obligations de solidarités liées à l'éthique du corps.

Certaines obligations de solidarité au corps du fonctionnaire sont liées à l'éthique du corps. Le fonctionnaire comme tout citoyen a une conduite à respecter. L'éthique est définie sur le plan littéral comme la science de la morale, l'ensemble des conceptions morales de quelqu'un, d'une culture, d'un milieu64 ; cette définition littéraire reste plus ou moins vague. Ce ne sont que les mots d'Henri Bergson65 qui donne une présomption de contrainte à la morale, quand il parle de la morale et de la religion en ces termes saisissants : «chacune de ces habitudes d'obéir exerce une pression sur notre volonté. Nous pouvons nous y soustraire, mais nous sommes alors tirés vers elle, ramenés à elle, comme le pendule écarté de la verticale ». Mais, cette définition apparait insatisfaisante dans la compréhension de notre sujet. C'est pourquoi une définition juridique s'impose. Juridiquement, l'éthique est l'ensemble de principes et valeurs guidant des comportements sociaux et professionnels et inspirant des règles déontologiques(codes de bonne conduite, de déontologie, ou de bonnes pratiques) ou juridiques(lois bioéthiques)66.

Dans tous les cas, il n'existe pas de définition convenue du terme "Ethique". Certains l'ont même assimilée à la morale. La différence entre "la morale" et "I' Ethique" réside dans le fait que la morale est liée à la conduite personnelle de l'individu, ses devoirs moraux et son respect des règles conventionnelles. L'éthique se réfère aux principes de base de l'action juste et les règles de la conduite selon Chapman67. Le terme éthique peut faire référence aux caractéristiques morales, qu'elles soient présentes ou absentes; ainsi, un administrateur ou un système administratif est dit moral ou manquant de probité. Parfois, nous recherchons des valeurs particulières, telles l'honnêteté ou le professionnalisme, mais souvent nous recherchons simplement une sorte de conscience morale. Le terme éthique peut se référer, en même terme, à quelque chose de différent, dénotant un ensemble de caractéristiques assumées être présentes et susceptibles de prendre différentes formes. Dans ce sens, les organisations sont toujours morales; elles ne diffèrent que dans les éthiques qu'elles représentent. Un fonctionnaire pourrait être considéré comme manquant de probité si il ou elle s'écarte des normes morales de l'organisation, alors que l'organisation ou l'institution, dans sa totalité, ne pourrait être

64 Dictionnaire Le Robert, ibid.

65Bergson(H), les Deux Sources de la morale et de la religion, p. 2

66 Cornu(G), vocabulaire juridique, PUF, Paris, 2011.

67 Chapman (R.A.) "L'Ethique dans la Fonction Publique", Edimbourg, Presse de l'Université d'Edimbourg éd. 1993.

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considérée ainsi68. Ils ne diffèrent que dans les éthiques qu'ils représentent. Ce qui est intéressant c'est de savoir comment un administrateur et/ou un responsable peut être considéré comme ayant une conduite morale au sein d'un système ou une organisation dont les mécanismes opérationnels manquent de probité. Ceci est une source importante des dilemmes d'éthique des responsables du secteur public aussi bien dans les pays développés, que dans ceux en voie de développement. De ces définitions, il découle que les obligations de solidarité dans l'éthique du corps sont des règles qui régissent la conduite des fonctionnaires du corps dans son intégralité. En conséquence, aucun fonctionnaire ne peut en être délié quelques soient les motifs qu'il puisse évoquer pour justifier leur violation.

En réalité, ces obligations sont plus proches des considérations morales que les autres obligations du fonctionnaire .Ces obligations consistent en des interdictions ou des privations qui nécessitent l'abstinence du fonctionnaire qui appartient au corps concerné. Il s'agit ici de la conception de l'obligation-prohibition selon Michel Virally69 dans son article sur le phénomène juridique. En effet, lorsqu'on recense ces obligations, elles peuvent être mises dans la catégorie de l'obligation de ne pas faire et dans notre cas, ces obligations naissent de l'appartenance du fonctionnaire au corps.

Il convient tout de même de préciser que ces obligations sont des obligations juridiques pour le fonctionnaire. En effet, bien que ces obligations puissent être morales pour certains fonctionnaires, elles sont juridiques pour le fonctionnaire car elles sont consacrées par des textes juridiques et la sanction de leur violation est étatique et non une sanction intérieure70. Ainsi les règles de conduite qui constituent les obligations de solidarité dans l'éthique du corps du fonctionnaire peuvent être divisées en deux : nous avons d'une part l'interdiction de recourir aux personnes extérieures et d'abuser de sa qualité (section I) et l'obligation de désintéressement (section II)

SECTION I : L'INTERDICTION DE RECOURIR AUX PERSONNES EXTERIEURES ET D'ABUSER DE SA QUALITE

Appartenant aux obligations des corps des forces de l'ordre interdiction ou prohibition a pour effet de préserver l'intégrité du corps. Cette préservation de l'intégrité est tant interne qu'externe. Sur le plan interne, elle préserve l'intégrité du corps car les membres dudit corps

68Rohr, (J.) L'Ethique pour les Bureaucrates, New York, Marcel LI Dekker 1978.

69Virally (M), ibid.

70Bergel (J-L), Théorie générale de l'Etat, ibid. «... Kant, niant le fondement métaphysique de toutes les morales transcendantes, tire la règle morale de la volonté autonome des hommes. Ainsi, selon lui, la morale ne procède que de « la voix intérieure » de chacun et non d'un commandement extérieur, alors que le droit est une règle de vie dégagée et appliquée sous la contrainte sociale.

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doivent protéger leur corps par le respect de l'interdiction. Sur le plan externe, elle protège l'intégrité du corps vis-à-vis des personnes extérieures. Pour une meilleure compréhension de cette interdiction, il convient de prendre séparément d'une part l'interdiction de recourir aux personnes extérieures et d'autre part l'interdiction d'abuser de sa qualité.

Ces deux obligations sont en réalité particulières car elles ne sont explicitement affirmées que dans les statuts particuliers de certains corps. Cela ne signifie pas pour autant qu'elles ont moins de valeur ou d'obligatoriété71 dans les autres corps ; c'est juste que qu'elles ne sont qu'implicitement déductibles du texte. C'est dans l'optique de faciliter la compréhension de ces obligations que nous traiterons de l'interdiction de recourir aux personnes extérieures (paragraphe I) et de l'interdiction d'abuser de sa qualité (paragraphe II)

PARAGRAPHE I : L'INTERDICTION DE RECOURIR AUX PERSONNES EXTERIEURES

Le corps est tellement important dans la fonction publique qu'il est protégé des personnes extérieures que le règlement interdit de faire appel à ces personnes. En effet, le statut spécial du corps des fonctionnaires de la sûreté nationale72 a formulé clairement cette interdiction. Cette obligation qui consiste en une interdiction mérite une explication plus ample.

Les personnes extérieures dont il est question ici ne sont pas uniquement les simples citoyens mais également les fonctionnaires des autres corps, les autres agents publics, les contractuels de l'administration. Il s'agit en fait de toute personne extérieure au corps dans le règlement duquel est formulée l'interdiction. Le statut spécial du corps des fonctionnaires de la sûreté nationale camerounais dispose en son article 21 alinéa 6 73 qu' « il est interdit au fonctionnaire de la sûreté nationale de recourir à des personnes extérieures au service pour solliciter des avantages de quelque nature que ce soit auprès de sa hiérarchie. Il est par conséquent soumis au strict respect de la voie hiérarchique. ». Afin de préciser les termes de cette interdiction, il convient de délimiter l'interdiction (A) avant de parler de la prescription de la voie hiérarchique (B).

71 Selon le vocabulaire juridique de Gérard Cornu, il s'agit de la : «qualité de ce qui est obligatoire ; pouvoir d'obliger inhérent à la règle de droit ».

72 Décret n°2012/539 du 19 novembre 2012 portant statut spécial du corps des fonctionnaires de la sûreté nationale

73 Article21 du Décret n°2012/539, ibid.

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A -Délimitation de l'interdiction

La délimitation est l'action qui consiste à fixer les frontières ou les limites d'une chose74 . L'interdiction de recourir aux personnes extérieures comme toute autre interdiction est limitée à des choses particulières. En effet cette interdiction que l'on retrouve chez les fonctionnaires des forces de l'ordre n'est pas totale. Pour accomplir leurs missions75, les forces de police par exemples dans le but d'appréhender les délinquants procèdent à des enquêtes et font souvent appel à des experts76 , actions qui incitent à recourir à des personnes extérieures au corps. C'est dans le but d'éviter toute confusion qu'il convient préciser le but prohibé(1) avant nous au lieu de la prohibition(2).

1 -Le but prohibé : solliciter des avantages

L'obligation dont il est question ici consiste en prohibition de recourir aux personnes extérieures pour solliciter des avantages. En effet, cela signifie a contrario que lorsqu'un fonctionnaire sollicite un avantage, c'est au corps auquel il appartient qu'il doit faire recours. Cela nécessite donc non seulement l'existence d'une éthique au sein du corps mais également son respect par les membres du corps, condition de son effectivité. L'article 21 alinéa 2 du statut spécial77 va jusqu'à parler de l'exercice de la fonction avec intégrité.

74 Dictionnaire le robert, ibid.

75Article 21 alinéa 1 du Décret n°2012 /539 : « le fonctionnaire de la sûreté nationale a l'obligation de servir les institutions de la république et d'apporter aide et protection aux citoyens »

76Voir le code de procédure pénale camerounais : Article 92 -- (1)

a) L'officier de police judiciaire peut, au cours d'une enquête, entendre toute personne dont les déclarations lui paraissent utiles à la manifestation de la vérité.

b) La personne convoquée est tenue de comparaître et de déposer; si elle ne comparaît pas, l'officier de police judiciaire en informe le Procureur de la République qui peut décerner contre elle mandat d'amener. Cette personne est conduite devant ce magistrat.

(2) L'officier de police judiciaire peut :

- procéder à des perquisitions, visites domiciliaires et saisies dans les conditions prévues aux articles 93 à 100 ;

- procéder à la garde à vue dans les conditions prévues aux articles 119 et suivants ;

- requérir tout expert et éventuellement toute personne susceptible de l'assister pendant une opération déterminée;

- requérir par écrit, avec effet immédiat, tout passage dans tout véhicule ou moyen de transport maritime, ferroviaire, terrestre ou aérien, public ou privé. L'original de la réquisition doit être laissé au transporteur. 77 Décret n°2012/539, ibid.

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Au Gabon, contrairement au Cameroun, cette interdiction figure dans le statut général de la fonction publique. En effet, la loi n°1/2005 du 04 février 2005 portant statut général de la fonction publique du Gabon dispose en son article 44 qu' « Il est interdit à tout agent public:

- de solliciter ou de recevoir, directement ou par personne interposée, en raison de ses fonctions, des dons, promesses, gratifications ou avantages quelconques afin d'accomplir ou de s'abstenir d'accomplir un acte de sa fonction ».

Toutefois, pour ne pas créer de confusion entre cette obligation et l'obligation de désintéressement, il convient de préciser le lieu de la prohibition.

2-Le lieu de la prohibition

Les avantages dont la sollicitation sont interdits sont ceux que le fonctionnaire solliciterait au sein de sa hiérarchie par des personnes extérieures. En effet, cette obligation de solidarité dans l'éthique du corps permet de protéger le corps des personnes extérieures. De plus, dans les corps des forces de l'ordre à l'instar du corps des fonctionnaires de la sûreté nationale dont la fonction est de protéger la population, il est nécessaire qu'il y ait une telle solidarité dans l'éthique afin de solidifier le corps.

En outre, les fonctionnaires des forces de l'ordre doivent servir avec honneur et fidélité, il est nécessaire de protéger le corps des personnes extérieures. En Suisse par exemple, la protection du corps peut être déduite du serment des militaires en service actif : « Je jure de servir la Confédération suisse de toutes mes forces ; de défendre courageusement les droits et la liberté du peuple suisse ; de remplir mon devoir, au prix de ma vie s'il le faut ; de rester fidèle à ma troupe et à mes camarades ; de respecter les règles du droit des gens en tant de guerre. »78. Afin de protéger le corps, le règlement privilégie la voie hiérarchique.

B-La prescription de la voie hiérarchique

L'interdiction de recourir aux personnes extérieures pour solliciter des avantages protège comme précédemment dit le corps. Pour renforcer cette protection, le droit a voulu que le fonctionnaire s'en remette au corps en prescrivant le recours à la voie hiérarchique lorsque ce dernier solliciterait un avantage de quelque nature que ce soit au sein de sa hiérarchie. Il ressort donc qu'il s'agit d'une démarche complémentaire à l'obligation d'obéissance hiérarchique(1) qui permet le traitement interne des sollicitations(2).

78 Article 8 du règlement de service04 de l'armée suisse.

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1-Une démarche complémentaire à l'obligation d'obéissance hiérarchique

En prescrivant la hiérarchique aux fonctionnaires qui solliciteraient des avantages, le statut spécial complète l'obligation d'obéissance hiérarchique du fonctionnaire non seulement en renforçant les pouvoirs du supérieure hiérarchique comme l'unique pourvoyeur d'avantages à ses subalternes, mais également en faisant que la hiérarchie ne soit plus comme une machine dont la seule mission serait de donner des ordres. La hiérarchie devient aussi un lieu où les fonctionnaires vont poser leurs doléances d'où la nécessité de traiter les sollicitations par ladite hiérarchie.

2-Une démarche entrainant le traitement interne des doléances

Cette obligation de solidarité dans l'éthique du corps entraine par la prescription de la voie hiérarchique un traitement interne des doléances des fonctionnaires du corps. Par le respect de l'interdiction de recourir aux personnes extérieures, les fonctionnaires du corps entretiennent des liens de solidarité sans lesquels le corps auquel ils appartiennent évoluerait dans un climat d'immoralité et de manque de fiabilité, ce qui affaiblirait le corps.

PARAGRAPHE II : L'INTERDICTION D'ABUSER DE SA QUALITE

Dans leurs missions de service public, les fonctionnaires sont tenus de ne pas abuser de leur qualité. Comme l'interdiction de recourir aux personnes extérieures pour solliciter des avantages, l'interdiction d'abuser de sa qualité n'est expressément formulée dans les statuts des corps des forces de l'ordre. Il convient, dans le souci faciliter la compréhension cette obligation de solidarité dans l'éthique du corps, de s'intéresser à la période de l'interdiction (A) avant de présenter les abus dont il est question (B).

A-La période de l'interdiction

La période de l'interdiction est le temps pendant lequel dure l'interdiction. En effet, le droit a comme pour toutes les autres obligations, réglementé cette dernière. Le décret portant statut spécial du corps des fonctionnaires de l'administration pénitentiaire 79 dispose en son article 31 qu' « aucun fonctionnaire de l'administration pénitentiaire ne doit user de sa

79 Décret n°2010/365 du 29 novembre 2010 ibid.

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qualité, de son emploi ou des attributs de sa fonction... ». La période de l'interdiction s'étend de la période du service (1) à la période d'après le service (2).

1-L'interdiction pendant le service

Les fonctionnaires des corps des forces de l'ordre étant les outils de la contrainte étatique, le droit exige de ces derniers de ne pas abuser de leur qualité. Le décret80 portant statut spécial du corps des fonctionnaires de la sûreté nationale est plus explicite là-dessus ; son article 28 dispose en effet qu' « il est interdit au fonctionnaire de la sûreté nationale en service...d'abuser de sa qualité, de son emploi ou des attributs de sa fonction... ». C'est dans le ce sens que l'article 21 du même décret prescrit l'exercice de leurs fonctions par les fonctionnaires avec « intégrité ».

Ainsi, pendant toute la durée de son service, le fonctionnaire est tenu d'exercer ses fonctions sans en abuser. Cette interdiction n'est pas inhérente aux fonctionnaires des forces de l'ordre du fait de la nature de leurs missions. En effet, il y a des siècles de cela, Montesquieu81 attirait déjà l'attention à propos des pouvoirs en ces termes : « tout homme qui détient le pouvoir est porté à en abuser... ». Il apparait donc que cette obligation dure pendant toute la durée du service du fonctionnaire. Il convient tout de même de noter que cette interdiction a été étendue après le service.

2-L'interdiction après et en dehors du service

Même après le service, le fonctionnaire ne perd pas sa qualité ; c'est sans doute pour cette raison que le statut spécial des fonctionnaires de la sûreté nationale 82a étendu l'interdiction en dehors du service. C'est dans ce sens que l'article 28 dudit décret dispose qu' : « il est interdit aux fonctionnaires de la sûreté nationale en service ou non, abuser de sa qualité... ». Il s'agit en fait d'une mesure préventive de la part du législateur qui vise à protéger les citoyens des abus probables des forces de l'ordre. Cette interdiction d'abuser de sa qualité en dehors du service faite par le statut au fonctionnaire des forces de l'ordre prend plus de pertinence lorsqu'on sait que l'article 26 du statut spécial précédemment cité prévoit l'intervention des policiers de leur propre initiative en ces termes : « Dans le cas où le fonctionnaire de la sûreté nationale intervient de sa propre initiative ou lorsqu'il est requis en dehors des horaires de

80 Décret n°2012/539, ibid.

81 Montesquieu (C), Esprit des lois, éditions Edouard Laboulaye Garnier Frères, 1875

82 Décret n°2012/539, ibid.

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service, il est considéré comme étant de service. ».Après avoir parlé de la période de l'interdiction, il convient de s'intéresser aux abus dont il est question.

B-Les actes constitutifs d'abus

Les statuts prévoient une liste d'actes dont les buts constituent des abus sont par conséquent prohibés. Il s'agit des abus en vue d'obtenir un avantage, de faire des collectes, d'exercer une pression. C'est dans cet ordre d'idées que nous traiterons des actes en vue d'obtenir des avantages (1) et des actes consistant en l'exercice de pression sur les tiers (2).

1-Les actes en vue d'obtenir des avantages

Les fonctionnaires des forces de l'ordre, tout comme les autres fonctionnaires, ne peuvent abuser de sa qualité en vue d'obtenir des avantages. En effet, l'article 28 du décret n°2001/06583 dispose qu' « il est interdit au fonctionnaire de la sûreté nationale en service ou non d'abuser de sa qualité, de son emploi ou des attributs de sa fonction en vue de : -obtenir ou tenter d'obtenir un avantage de quelque nature que ce soit ; -de faire toutes collectes, démarches auprès des particuliers, commerçants, industriels ou sociétés, à l'effet de recueillir des dons en espèce ou en nature... ».Ainsi, peu importe l'excuse, tout abus de la part du fonctionnaire en vue de l'obtention d'un avantage constitue une violation de cette interdiction.

En outre, le décret du 29 novembre 2010 84 interdit également aux fonctionnaires de l'administration pénitentiaire d'abuser de leur qualité en vue d'obtenir des avantages. La lecture de l'article 31 soumet toute tentative d'obtenir des avantages à une autorisation hiérarchique. Il convient de noter que le Cameroun est l'un des rares pays où cette interdiction est clairement formulée car les autres se contentent seulement de formuler l'obligation de désintéressement. Dans la plupart des statuts de la fonction publique, il est juste exigé aux fonctionnaires de se comporter en honnête citoyen. Cette obligation de solidarité dans l'éthique du corps explicitement formulée a un pouvoir plus étendu que sa formulation implicite qu'on pourrait tirer des exigences morales faites, dont le fonctionnaire est débiteur de par sa qualité, ce d'autant plus l'absence de formulation explicite pourrait faire croire à son inexistence. Le fonctionnaire, dans le respect de l'éthique du corps ne peut légitimement obtenir des avantages que par deux voies : la voie légale, c'est-à-dire lorsque cela est prévu par un texte ; et la voie

83 Décret portant statut spécial des fonctionnaires de la sûreté nationale, ibid.

84 Décret portant statut spécial des fonctionnaires de l'administration pénitentiaire, ARTICLE 58. « - Aucun fonctionnaire de l'Administration Pénitentiaire ne doit user de sa qualité, de son emploi ou des attributs de sa fonction en vue :

- d'obtenir ou de tenter d'obtenir l'octroi d'un avantage de quelque nature que ce soit ;

- d'entreprendre sans autorisation de ses supérieurs hiérarchiques des demandes ayant pour objet l'obtention d'une faveur personnelle ; », ibid.

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hiérarchique, c'est-à- dire avec l'accord du supérieure hiérarchique. L'autre acte constitutif d'abus est l'exercice de pression sur les tiers.

2- L'exercice de pressions et de contraintes sur les tiers

L'exercice de pressions et de contraintes sur les tiers est prohibé par l'éthique du corps. En effet, les fonctionnaires des forces de l'ordre étant chargés de la sécurité des citoyens, il leur est interdit d'abuser de leur qualité. Le statut spécial des fonctionnaires de l'administration pénitentiaire85 est clair là-dessus ; son article 31 dispose qu'« aucun fonctionnaire de l'Administration Pénitentiaire ne doit user de sa qualité, de son emploi ou des attributs de sa fonction en vue - d'obtenir ou de tenter d'obtenir l'octroi d'un avantage de quelque nature que ce soit ;- d'entreprendre sans autorisation de ses supérieurs hiérarchiques des demandes ayant pour objet l'obtention d'une faveur personnelle ;- d'exercer une pression ou une contrainte quelconque sur des tiers. ». Ce statut n'est pas le seul car celui des fonctionnaires de la sûreté nationale réitère cette interdiction en ce qui concerne les fonctionnaires qui appartiennent à ce corps86. L'interrogation que cela soulève est celle de savoir, quels sont les actes qui peuvent être qualifiés de pression ?

Les statuts juridiques ne définissent pas les actes constitutifs de pression. Les lexiques des termes juridiques n'en font guère mieux car ils ne définissent pas le concept de pression ; ce qui conduit à s'en remettre à la définition qu'offre les outils littéraires. Selon le dictionnaire le Robert87, pression est synonyme d' « influence », il s`agit d'une action persistante qui tend à contraindre. Le Grand Robert va dans le même sens en définissant la pression comme une «action insistante qui tend à contraindre. ».Le droit considère, de par ces définitions, comme acte de pression, tout acte consistant à influencer un tiers. Comme précisé plus haut, cette interdiction est une particularité camerounaise car partout ailleurs, le droit se contente de formuler l'obligation de désintéressement du fonctionnaire.

85 Décret n°2010/365 du 29 novembre 2010, ibid.

86 Décret n°2012/539 du 19 novembre 2012 ; article 28 « il est interdit aux fonctionnaires de la sûreté nationale en service ou non, d'abuser de sa qualité, de son emploi ou de ses attributs en vue de ...d'exercer de quelques manière que ce soit une pression ou une contrainte quelconque sur les tiers ».

87 Le Robert de poche 2012

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SECTION II : L'OBLIGATION DE DESINTERESSEMENT DU

FONCTIONNAIRE

L'obligation de désintéressement fait partie des obligations de solidarité dans l'éthique du corps. Le fonctionnaire est donc tenu d'exercer ses fonctions avec désintéressement. Le désintéressement est le détachement de tout intérêt personnel. Sur le plan juridique, le vocabulaire juridique donne deux sens au désintéressement : le premier sens du désintéressement est celui qui définit le désintéressement comme l' « action de donner satisfaction à un prétendant de droit (ce qui éteint son intérêt à agir ou à réclamer). Ex. le désintéressement des créanciers par le paiement de ce qui leur est dû ; le désintéressement de la victime par la réparation du préjudice qu'elle a subi ». Dans le second sens, le désintéressement y est défini comme la «qualité (vertu) consistant à ne pas s'attacher à son intérêt personnel ; plus spécialement, devoir, pour un agent public, de ne pas se laisser détourner, par son intérêt personnel, de la poursuite de l'intérêt public qu'implique sa fonction... »88 . De ces deux sens, seul le sens administratif, c'est-à-dire le second sens, sera retenu dans la compréhension de notre travail.

Au Cameroun, le statut général de la fonction publique89dispose clairement en son article 38 que :« L'obligation de désintéressement interdit au fonctionnaire d'avoir, dans une entreprise ou dans un secteur soumis à son contrôle direct ou en relation avec lui, par lui-même ou par interposée ou sous quelque dénomination que ce soit, des intérêts de nature à compromettre ou à restreindre son indépendance. ». Il apparait que cette obligation de solidarité dans l'éthique du corps, a pour fonction de protéger les intérêts de l'administration. Cela est d'autant plus justifié que déjà en 1958, cette obligation était formulée par le droit en vigueur. En effet, la loi fixant le statut général des fonctionnaires du Cameroun90 disposait en son article 9 qu' « il est interdit à tout fonctionnaire régi par le présent statut : a) d'avoir quelle que soit sa position...des intérêts de nature à compromettre son indépendance... ».De par une observation simple, on note une évolution historique due à l'importance de cette obligation car, en plus « des intérêts de nature à compromettre l'indépendance du fonctionnaire », l'on a ajouté « les intérêts qui pourraient, ne serait-ce que restreindre

88 Cornu(G), vocabulaire juridique, ibid.

89 Décret n° 94/199 du 07 octobre 1994 portant Statut général de la Fonction Publique de l'Etat, modifié et complété par le décret n° 2000/287 du 12octobre 2000

90 Loi n°58-84 du 22 juillet 1958 fixant le statut général des fonctionnaires du Cameroun

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l'indépendance du fonctionnaire ». Pour comprendre mieux cette obligation, il sied d'analyser en premier lieu la consistance de l'interdiction d'avoir des intérêts (paragraphe I) avant de s'intéresser en second lieu au but de l'interdiction et ses implications (paragraphe II).

PARAGRAPHE I : LA CONSISTANCE DE L'OBLIGATION :

L'INTERDICTION D'AVOIR DES INTERETS.

L'obligation de désintéressement est une obligation de solidarité dans l'éthique du corps qui interdit au fonctionnaire d'avoir des intérêts dans des entreprises qui sont sous le contrôle du corps auquel il appartient , ceci afin d'éviter toute irrégularité dans l'exercice de ses fonctions. Cette obligation est la jonction entre l'obligation de consacrer exclusivement aux fonctions, l'obligation de moralité du non-cumul d'activités. C'est pour cette raison que nous allons nous appesantir sur le secteur concerné par l'interdiction(A) et sur les personnes visées par l'interdiction(B).

A-Le secteur concerné par l'interdiction

Comme toute prohibition, l'obligation de désintéressement n'est pas totale. C''est ainsi que le droit en vigueur délimite le domaine de l'interdiction. Il s'agit des entreprises qui sont sous le contrôle du corps dont appartient le fonctionnaire. Le décret limite l'interdiction aux entreprises ou dans un secteur soumis à son contrôle direct ou en relation avec lui(1) et cela quelle que soit sa position statutaire(2).

1-les entreprises sous le contrôle ou en relation avec le fonctionnaire.

L'obligation de désintéressement du fonctionnaire touche toutes les entreprises qui sont non seulement sous son contrôle direct mais également celles qui sont en relation avec lui, c'est-à-dire en relation avec l'administration à laquelle il appartient. Ce qui signifie a contrario que le fonctionnaire peut avoir des intérêts dans tout autre secteur ou entreprises, à la seule condition qu'elle ne soit pas sous son contrôle direct ou en relation avec lui dans ses tâches administratives. Cette interdiction faite au fonctionnaire d'avoir des intérêts dans les entreprises de son secteur ou sous son contrôle direct permet de lier les mains du fonctionnaire dans la mesure où il ne peut commettre une violation du droit en vigueur afin de préserver ses intérêts privés.

Cette obligation a beaucoup d'affinités avec l'obligation de bonne gestion qui prescrit une séparation de l'ordonnateur et du comptable, car elle permet de préserver les intérêts de l'administration. Elle est conforme à la maxime latine: « aliquis non debet esse judex in

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propria causa, quia non potest esse judex et pars » qui signifie : « personne ne doit être juge de sa propre cause, parce qu'on ne peut être juge et partie. ». Cela est d'autant plus vrai que si un fonctionnaire était amené à contrôler une entreprise où il a des intérêts, il serait quasiment impossible qu'il dénonce des irrégularités s'il en trouvait quelques-unes car il serait amené à juger ses propres intérêts.

C'est à titre préventif que le code pénal camerounais 91prévoit des sanctions en cas de prise d'intérêt. Ainsi, l'article 135 du code pénal camerounais dispose qu' : « (1) Est puni d'un emprisonnement d'un à cinq ans et d'une amende de 200.000 à 2.000.000 de francs, tout fonctionnaire ou agent public qui, directement ou indirectement, prend ou reçoit un intérêt : a) dans les actes ou adjudications soumis à son avis ou dont il avait la surveillance, le contrôle, l'administration ou la passation ; b) dans les entreprises privées, les coopératives, les sociétés d'économie mixte ou participation financière de l'Etat, les régies, les concessions soumises à sa surveillance ou à son contrôle ; c) dans les marchés ou contrats passés au nom de l'Etat ou d'une collectivité publique, avec une personne physique ou morale ; d) dans une affaire pour laquelle il est chargé d'ordonnancer le paiement ou d'opérer la liquidation. (2) Les dispositions du présent article sont applicables aux anciens fonctionnaires tels que définis à l'article 131 du présent Code qui, dans les cinq ans à compter de la cessation de leurs fonctions par suite de démission, destitution, congé, mise en disponibilité ou à la retraite, ou pour tout autre cause, prennent un intérêt quelconque dans les actes, opérations ou entreprises susvisées et précédemment soumis à leur surveillance, contrôle, administration ou dont ils assuraient le paiement ou la liquidation » Cette obligation de solidarité dans l'éthique du corps n'est pas une particularité camerounaise ; on la retrouve dans la quasi-totalité des Etats francophones.

En Afrique francophone pour commencer, la plupart des statuts de la fonction publique reprennent presque mots pour mots la législation française en matière de fonction publique ; et ce, que l'on soit en Afrique de l'ouest ou en Afrique centrale. A titre d'illustration, en Afrique de l'ouest, si l'on s'intéresse aux statuts de la fonction publique du Sénégal92, du Mali93 , la Côte d'ivoire 94et la Guinée95 pour citer que ces quatre exemples formulent cette obligation dans le but de protéger les intérêts de l'administration. Il en est de même pour les états d'Afrique

91 Loi n°67-LF-1 du 12 juin 1967

92 Article 10 de Loi n°61-33 du 15 juin 1961 relative au statut général des fonctionnaires au Sénégal. Réactualisée version 2005.

93 Article 11 de la Loi n°02-053 DU 16 décembre 2002 portant statut général des fonctionnaires au Mali

94 Article 24 de la Loi n° 92-570 du 11 septembre 1992 portant statut général de la Fonction Publique en Côte d'ivoire

95 Article 22 de Loi L 2001 028 du 31 décembre 2001 portant statut général des fonctionnaires en Guinée.

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centrale qui dans le même objectif de protéger l'administration des violations de ses agents, formulent cette obligation préventive qui limite l'action de ses agents.

En France, pour finir, la loi portant droits et obligations des fonctionnaires96 prévoyait déjà que sauf dérogation, le fonctionnaire ne peut prendre, par lui-même ou par personne interposée, dans une entreprise soumise au contrôle de l'administration à laquelle il appartient ou avec laquelle il est en relation, des intérêts de nature à compromettre son indépendance. Il convient tout de même de noter, dans un devoir de mémoire que : bien avant la loi portant droits et obligations des fonctionnaires, l'obligation de désintéressement figurait déjà dans l'ordonnance de 1302 de Philippe le Bel. De même, l'article 25-I, du titre premier la loi du 2 février 200797 dispose que les fonctionnaires ne peuvent prendre « par eux-mêmes ou par personne interposée, dans une entreprise soumise au contrôle de l'administration à laquelle ils appartiennent ou en relation avec cette dernière, des intérêts de nature à compromettre leur indépendance ». L'arrêt CE, 1996, Sté Lambda98 étend l'obligation à toutes les positions statutaires de la fonction publique, l'obligation de désintéressement étant auparavant mal respectée dans la haute fonction publique, annulant un décret présidentiel nommant un inspecteur des finances en détachement au poste de sous-gouverneur du Crédit foncier de France. Ce qui signifie que cette obligation continue quelle que soit la position statutaire du fonctionnaire.

2-L'obligation de désintéressement et la position statutaire du fonctionnaire

Avant de parler de la relation entre l'obligation de désintéressement et la position statutaire, il convient de préciser ce qu'on entend par position statutaire. En effet, l'article 50 du statut général de la fonction publique camerounais99 définit la position statutaire du fonctionnaire en ces termes : « (1) La position du fonctionnaire décrit sa situation administrative précise à un moment donné de sa carrière par rapport à un poste de travail. (2) Le fonctionnaire est placé dans l'une des positions suivantes : - l'activité ; - le détachement ; - la disponibilité.(3) Le fonctionnaire stagiaire ne peut être placé qu'en position d'activité. Toutefois, il peut être détaché pour exercer des fonctions publiques électives ou de membre du gouvernement. ». Il convient, ici et maintenant de préciser que, de ces trois positions, seules la deuxième et la troisième, c'est-à-dire le détachement et la

96 Loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et devoirs des fonctionnaires en France.

97 Loi du 2 février 2007 portant modernisation de la fonction publique.

98 C.E. 6 décembre 1996 société Lambda

99 Décret n° 94/199 du 07 octobre 1994 portant Statut Général de la Fonction Publique de l'Etat modifié et complété par le décret n° 2000/287 du 12octobre 2000

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disponibilité feront l'objet de notre étude de par leur apport jurisprudentiel sur l'obligation de désintéressement.

En tant qu'obligation de solidarité dans l'éthique du corps, l'obligation de désintéressement pose problème face aux positions de détachement et de disponibilité car dans ces positions statutaires, le fonctionnaire est placé hors de son corps. C'est dans la nécessité d'apporter une réponse à ce problème, qu'il convient de définir d'abord les positions de détachement et de disponibilité. Le statut général de la fonction publique camerounais100 définit le détachement en son article 70 comme : « la position du fonctionnaire placé temporairement hors de son poste de travail pour servir auprès : - d'une institution publique prévue par la Constitution, la loi ou par un acte réglementaire ; - des collectivités publiques locales ou des entreprises, organismes publics ou parapublics ; - des entreprises privées nationales ; - des organismes privés d'intérêt général ou de caractère associatif assurant des missions d'intérêt général. ; - des organisations internationales ou des organisations non gouvernementales. (2) Le fonctionnaire peut également être détaché d'office pour exercer les fonctions de membre du gouvernement, des fonctions publiques électives ou un mandat syndical.». Selon le Professeur Joseph Owona101 , la position de détachement reste différente de la position « hors cadre »de la fonction publique française où le fonctionnaire est totalement assujetti aux règles de son nouveau corps. Cela se justifie par le fait que le fonctionnaire en détachement est certes placé hors de son corps, toutefois il continue de bénéficier du droit à l'avancement et à la pension de retraite de son corps d'origine ; on constate donc une sorte de double dépendance du fonctionnaire en détachement.

Quant à la position de disponibilité, elle est définie par le statut général de la fonction publique en son article 81 « - (1) La disponibilité est la position du fonctionnaire qui, placé temporairement hors de son cadre, cesse de bénéficier pour la durée de cette position, de ses droits à la rémunération, à l'avancement et à pension. (2) La disponibilité est prononcée par arrêté du Ministre en charge de l'Administration d'origine du fonctionnaire concerné. Le Ministre chargé de la Fonction Publique et cas échéant, le Ministre utilisateur en sont informés. (3) Par dérogation aux dispositions du (2) précédent, la disponibilité des fonctionnaires appartenant au corps de l'Administration générale est prononcé par arrêté du Ministre chargé de la fonction publique, après avis du Ministre utilisateur ». Le fonctionnaire mis en disponibilité n'étant pas en activité, il apparait qu'il ne

100 Décret n° 94/199 du 07 octobre 1994 portant Statut Général de la Fonction Publique de l'Etat modifié et complété par le décret n° 2000/287 du 12octobre 2000.

101Owona (J), Droit de la fonction publique camerounaise, l'Harmattan, 2011.

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peut avoir de pouvoir de contrôle ; c'est pourquoi nous allons nous intéresser uniquement à la position de détachement.

Pour répondre à notre interrogation sur l'influence de la position statutaire sur l'obligation de désintéressement, il convient de dire que même en position de détachement, cette obligation subsiste. Dans un arrêt102 qui a eu un certain retentissement et qui a provoqué l'émoi dans la haute fonction publique, le Conseil d'Etat a conféré une portée relativement large à l'obligation de désintéressement en précisant que celle-ci s'imposait au fonctionnaire quelle que soit sa position statutaire. En l'espèce, et pour la première fois, le juge administratif suprême a annulé le décret pris par le président de la république, nommant M. Beauffret, inspecteur des finances, au poste de sous-gouverneur du Crédit foncier France (société anonyme dont le capital est détenu à hauteur de 80% par des investisseurs privés). En effet, pour le Conseil d'Etat, ce fonctionnaire en détachement, ne pouvait pas être nommé à ce poste dans la mesure où ses fonctions de chef du service des affaires monétaires et financières à la direction du Trésor l'ont amené à exercer un contrôle direct sur l'entreprise concernée. Il en résulte que sa nomination le place dans une position illégale au regard de l'obligation de désintéressement.

L'arrêt Lambda n'est pas sans précédent. En 1969 déjà, le Conseil d'Etat avait annulé l'arrêté interministériel nommant un inspecteur d'une direction régionale de sécurité sociale directeur d'une caisse primaire sur laquelle il avait exercé un contrôle direct. Toutefois, la solution consacrée en 1996 revêt une ampleur sans commune mesure avec l'arrêt de 1969 puisque le Conseil d'Etat, qui a statué uniquement sur le terrain de la légalité (M. Beauffret n'avait pas commis le délit de prise illégale de d'intérêts et son intégrité personnelle n'était pas en cause), a créé du droit en adoptant une position de principe sur les conditions de légalité du « pantouflage ». La Cour administrative de Nantes a appliqué la logique de l'arrêt Lambda dans la fonction publique territoriale en jugeant illégal le détachement projeté du Directeur général des services techniques d'une commune dans une Société Anonyme (S.A.) au motif que l'intéressé était « amené à émettre des avis sur les autorisations d'urbanisme accordées par le maire et à contrôler le respect des prescriptions par de telles autorisations ».Il devient donc un truisme que l'obligation de désintéressement reste opposable au fonctionnaire même si ce dernier est en détachement dans l'institution en question ; et surtout d'après la jurisprudence française, il ne peut avoir détachement régulier si le fonctionnaire dans son corps de provenance avait un contrôle sur l'entreprise où il est en détachement ; ce d'autant plus que l'alinéa 2 de l'article9 du statut général de la fonction publique sénégalais103 dispose que : « Tout

102 C.E. ass. 6 décembre 1996, société Lambda, ibid.

103 Loi n°61-33 du 15 juin 1961 relative au statut général des fonctionnaires au Sénégal.

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fonctionnaire en activité, en détachement ou dans une position assimilée qui contrevient à l'interdiction visée à l'alinéa précédent, est passible de révocation après consultation du conseil de discipline. ». Une fois que nous connaissons les entreprises ou le secteur touché par l'interdiction, il nous revient nous intéresser aux personnes touchées par l'interdiction.

B-Les personnes visées par l'interdiction

Le statut général de la fonction publique en son article 38 dispose que : « L'obligation de désintéressement interdit au fonctionnaire d'avoir, dans une entreprise ou dans un secteur soumis à son contrôle direct ou en relation avec lui, par lui-même ou par interposée ou sous quelque dénomination que ce soit, des intérêts de nature à compromettre ou à restreindre son indépendance.». Vu que dans notre raisonnement sur le secteur touché par l'interdiction, nous nous sommes également intéressés au fonctionnaire, il n'est plus un mystère pour quiconque que l'interdiction frappe tout fonctionnaire faisant partie du corps qui contrôle l'entreprise ou le secteur concerné. Il nous reste maintenant de nous intéresser à l'expression « personne interposée ». Le droit camerounais ne dit pas ce que l'on entend par personne interposée. L'on peut donc entendre par cette expression toute personne qui gèrerait les intérêts du fonctionnaire dans une entreprise sous le contrôle du corps ou de l'entreprise à laquelle appartient le fonctionnaire.

A priori, d'après l'interprétation de la plupart des législations en matière de fonction publique l'obligation de désintéressement concerne également le conjoint du fonctionnaire ; ce qui laisse présumer que le droit entend par personne interposée, le conjoint du fonctionnaire. A titre d'illustration, l'article 24 alinéa du statut général de la fonction publique ivoirien104dispose que : « Lorsque le conjoint d'un fonctionnaire exerce à titre professionnel une activité privée lucrative, déclaration doit en être faite à l'Administration ou service dont relève le fonctionnaire. L'autorité compétente prend, s'il y a lieu, les mesures propres à sauvegarder les intérêts de l'Etat. ». C'est dans le même sens qu'Emmanuel Aubin105 disait que « le respect de l'obligation de désintéressement suppose également que le conjoint du fonctionnaire exerçant une activité professionnelle privée, déclare ladite activité à l'administration afin de lui permettre de prendre des mesures propres à sauvegarder les intérêts du service. ». Plus proche de nous, le statut général de la fonction publique tchadien106dispose en son article 19 qu' « Il est interdit au fonctionnaire d'avoir par lui-même ou par personnes interposées,

Réactualisée version 2005, ibid.

104LOI n° 92 LOI n° 92-570 du 11 septembre 1992 portant statut général de la Fonction Publique

105 Aubin(E), Memento de droit de la fonction publique, 3e édition, 2007

106 Loi 01-017 du 31 décembre 2001 portant statut général de la fonction publique.

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sous quelque dénomination que ce soit, des intérêts de nature à compromettre son indépendance dans une entreprise soumise au contrôle de son administration ou en relation avec celle-ci. L'administration prend, s'il y a lieu, les mesures propres à sauvegarder les intérêts du service. ». A partir de ces législations, il apparait donc que le droit entend par personne interposée le conjoint du fonctionnaire en premier lieu. Par extension, nous pouvons ajouter dans cette expression, toute personne travaillant en association ou pour le compte du fonctionnaire. Après avoir parlé du secteur et des personnes touchés par l'interdiction, il convient de s'intéresser au but et aux implications de l'interdiction.

PARAGRAPHE II : LE BUT ET LES IMPLICATIONS DE L'OBLIGATION DE DESINTERESSEMENT.

L'obligation de désintéressement comme nous l'avons précédemment remarqué vise à préserver les intérêts de l'administration. Il faut également faire remarquer qu'elle préserve aussi le fonctionnaire et son corps dans l'exécution des tâches qui lui sont confiées. Selon le statut de la fonction publique, il s'agit des intérêts de nature à « compromettre ou à restreindre son indépendance »107. Pour la compréhension de notre travail, nous allons commencer par définir ce que nous entendons par « indépendance » afin de circonscrire le concept dans notre sujet.

Le concept « indépendance » signifie sur le plan littéraire, « l'Etat d'une personne ou d'une collectivité indépendante ; refus de toute de toute sujétion »108. Le grand Robert va dans le même sens en définissant l'indépendance comme la « situation d'un organe ou d'une collectivité qui n'est pas soumis à un autre organe ou à une autre collectivité ». Sur le plan juridique, il s'agit de la « situation d'une collectivité non subordonnée à une collectivité étrangère ; ne pas confondre avec autonomie » ; pour un travailleur professionnel, il s'agit de la « situation de celui qui n'est pas lié par un contrat de travail »109 . Une fois que nous avons défini le concept d'indépendance, il convient préciser la nature de l'indépendance en question (A) avant de nous intéresser aux implications de l'obligation de désintéressement (B).

A-Le but de l'obligation de désintéressement : préserver l'indépendance du

fonctionnaire.

Dans tous les statuts de la fonction publique, il est interdit aux fonctionnaires de prendre par eux-mêmes ou par personne interposée des intérêts dans un secteur ou dans une entreprise de nature à compromettre leur indépendance. Le statut général de la fonction publique au

107 Article 38 du statut général de la fonction publique camerounais.

108 Dictionnaire universel, 4e édition, EDICEF, 2007

109 Cornu (G), vocabulaire juridique, ibid.

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Cameroun est encore plus prévenant car contrairement aux autres législations en matière de fonction publique, il ne se limite pas aux « intérêts de nature à compromettre l'indépendance »du fonctionnaire car l'article 38 ajoute aux intérêts de nature à compromettre son indépendance, « les intérêts de nature à restreindre l'indépendance » seulement. L'indépendance du fonctionnaire dont il est question, est l'indépendance dans la prise de décision (1) et l'indépendance dans l'exécution des décisions (2).

1-L'indépendance dans la prise des décisions

Selon l'adage « nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude », il apparait évident qu'un fonctionnaire qui a des intérêts dans une entreprise ne peut être impartial, lorsqu'il s'agit de prendre des décisions. Selon l'article 9 du statut général de la fonction publique, « les fonctionnaires sont répartis en quatre (4) catégories désignées dans l'ordre hiérarchique décroissant par les lettres A, B, C, et D. - Les postes de travail de la catégorie A correspondent aux fonctions de conception, de direction, d'évaluation ou de contrôle. - Les postes de travail de la catégorie B correspondent aux fonctions de préparation d'élaboration et d'application... »110. Les catégories de fonctionnaires A et B sont donc ceux qui sont sensés prendre des décisions. Pour préserver leur indépendance dans la prise de décisions, le droit recommande alors qu'ils n'aient pas d'intérêts dans les entreprises sous le contrôle de leur corps afin que les décisions qu'ils prennent, soient prises avec probité.

Ainsi, il est nécessaire pour que le fonctionnaire reste intègre et garde sa dignité qu'il n'ait pas d'intérêts dans les entreprises sous son contrôle. Cela permet non seulement qu'il respecte l'éthique qui s'applique à son corps mais également qu'il ne viole pas les règles statutaires qui lui sont applicables. Son comportement doit donc être exempt de toute fraude et conforme aux normes en vigueur. Le fonctionnaire ne doit pas seulement être indépendant dans la prise de décision, il faut également qu'il soit indépendant dans l'exécution des décisions qui lui sont confiées.

2-L'indépendance dans l'exécution des décisions

Les deux dernières catégories de fonctionnaires, c'est-à-dire les catégories C et D sont celles qui sont chargées d'exécuter les décisions des supérieurs hiérarchiques, comme dispose l'Article 9 « - (1) les fonctionnaires sont répartis en quatre (4) catégories désignées dans

110 Décret n° 94/199 du 07 octobre 1994 portant Statut général de la Fonction Publique de l'Etat modifié et complété par le décret n° 2000/287 du 12octobre 2000

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l'ordre hiérarchique décroissant par les lettres A , B, C, et D...- Les postes de travail de la catégorie C correspondent à des tâches d'exécution spécialisée. - Les postes de travail de la catégorie D correspondent à des tâches d'exécution courante ou de grande subordination. (2) Les statuts spéciaux ou particuliers fixent le classement de chaque cadre dans l'une de ces catégories ».Au-delà de l'obligation d'obéissance hiérarchique qui oblige le fonctionnaire à exécuter les ordres à lui donnés, l'obligation de désintéressement vise à préserver l'indépendance du fonctionnaire dans l'exécution des décisions, afin de garantir l'efficacité de l'action de son administration. Pour arriver à préserver cette indépendance du fonctionnaire, l'obligation de désintéressement interdit donc au fonctionnaire d'avoir lesdits intérêts. En fait, l'obligation de désintéressement est plus large que celle qui interdit d'emplois dans la mesure où elle interdit au fonctionnaire des agissement de nature à compromettre son indépendance. Dans un arrêt Conseil d'Etat, le juge a estimé que tel n'était pas le cas d'un contremaitre principal dans un centre de cure médicale qui a pris une participation dans une société dont l'objet consistait à exploiter un hôtel-résidence111. De fait, l'établissement public dans lequel était employé le fonctionnaire concerné n'exerçait aucun contrôle ni aucune relation avec l'hôtel. Le fonctionnaire ne pouvait donc être regardé comme ayant pris des intérêts dans une entreprise soumise au contrôle de l'administration. Au-delà du but préserver l'indépendance du fonctionnaire, quels sont les implications de l'obligation de désintéressement ?

B -Les implications de l'obligation de désintéressement.

Le désintéressement qui est recommandé au fonctionnaire, suppose le détachement de tout intérêt. Tout agent de la fonction publique doit garder une certaine dignité, c'est à dire le respect de soi, par un comportement correct, dans tous les rapports avec les usagers, les supérieurs hiérarchiques, les collègues de service et les subordonnés. L'agent est tenu d'éviter toute expression indigne. Ce comportement général va jusqu'à l'habillement. Ainsi, l'agent de la fonction publique doit être désintéressé. Il lui est interdit de prendre ou recevoir quelque intérêt que ce soit dans les actes ou entreprises dont il a l'administration ou le contrôle. La loi sanctionne sévèrement le délit d'ingérence112 et les faits contraires à la probité et à l'honneur. L'agent est donc tenu à une obligation de moralité. Dans cette mouvance de comportement éthique, l'obligation de désintéressement implique donc que le fonctionnaire n'obtienne pas de

111 Conseil Etat, 3 juin 1994, centre de cure médicale de pignelin.

112 L'article L 432-13 sanctionne la violation constitutive du délit de prise illégale d'intérêts (délit d'ingérence dans l'ancien code pénal français)

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gains privé dans l'exercice de ses fonctions (1) et qu'il n'utilise pas l'argent public à des fins personnelles (2).

1-L'interdiction d'obtenir des gains privés

L'obligation de désintéressement implique une interdiction d'obtenir des gains privés. En fait, cette interdiction concerne des gains ou des avantages que le fonctionnaire serait amené à solliciter de la part des particuliers pour accomplir ou s'abstenir d'accomplir un acte de sa fonction. Le statut général de la fonction publique camerounais ne prévoit pas cette interdiction d'obtenir des gains privés. Cela ne signifie pas pour autant que le droit camerounais ne réprime pas les fonctionnaires qui seraient auteurs de ces actes car le code pénal camerounais qualifie cette pratique de « corruption ». Pour être plus clair, l'article 134 du code pénal camerounais113 dispose que : « (1) Est puni d'un emprisonnement de cinq à dix ans et d'une amende de 200.000 à 2.000.000 de francs, tout fonctionnaire ou agent public qui, pour lui-même ou pour un tiers, sollicite, agrée ou reçoit des offres, promesses, dons ou présents pour faire, s'abstenir de faire ou ajourner un acte de sa fonction. (2) L'emprisonnement est de 1 à 5 ans et l'amende de 100.000 à 1.000.000 de francs si l'acte n'entrait pas dans les attributions de la personne corrompue, mais a été cependant facilité par sa fonction. (3) Est puni des peines prévues à l'alinéa 2 précédent, tout fonctionnaire ou agent public qui sollicite ou accepte une rétribution en espèce ou en nature pour lui-même ou pour un tiers, en rémunération d'un acte déjà accompli ou une abstention passée. ».

Dans une publication parue dans la revue juridis périodique n° 75, juillet /Aout 2008, le professeur Bernard Raymond Guimdo fait remarquer dans l'articulation consacrée à la prévention de la corruption pendant la carrière du fonctionnaire que « si le fonctionnaire a des droits, il a aussi des obligations, qui en sont la contrepartie. C'est ainsi qu'entre autres obligations, il est tenu de se consacrer au service à lui confié « en toutes circonstances avec diligence, probité, respect de la chose publique et sens de responsabilité »et avec « désintéressement ». Il est donc tenu à une obligation de moralité ; autrement dit à une obligation de bonnes moeurs ».114

En droit étranger, cette interdiction d'obtenir des gains privés qu'implique l'obligation de désintéressement figure dans le statut général de la fonction publique. C'est le cas au Gabon où

113 Loi n°67-LF-1 du 12 juin 1967. Dans le cas de la corruption, il a été greffé la loi n° 77-23 du 6 décembre

1977 au code pénal. Pour l'explication, dans le but camerounais d'unification du droit, le législateur camerounais a regroupé tous les textes en matière pénale pour former le code pénal camerounais.

114Guimdo Dongmo (B.R), « la corruption dans le droit de la fonction publique : le cas du Cameroun, juridis périodique n°75, P61.

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le statut général des fonctionnaires dispose en son article 44 qu' « Il est interdit à tout agent public : - de solliciter ou de recevoir, directement ou par personne interposée, en raison de ses fonctions, des dons, promesses, gratifications ou avantages quelconque afin d'accomplir ou de s'abstenir d'accomplir un acte de sa fonction; - d'avoir des activités de nature à compromettre son indépendance ou à réduire son rendement professionnel; - de tenir des propos, de se livrer à des actes ou comportements contraires à l'éthique ou de nature à perturber le fonctionnement du service »115. De même, le statut général de la fonction publique sénégalais dispose également en son article 10 que : « il est interdit, à tout fonctionnaire, de solliciter ou d'accepter, en échange de l'exécution du service, soit directement, soit indirectement, soit par personne interposée, des usagers du service public, des dons ou prêts, en nature ou en espèce, des services gratuits ou à tarif minoré, ou quelque avantage que ce soit »116. En plus de l'interdiction d'obtenir des gains privés, l'obligation de désintéressement implique également l'interdiction d'utiliser l'argent public à des fins personnelles

2-L'interdiction d'utiliser l'argent public à des fins personnelles

L'obligation de désintéressement a d'abord pour but de préserver les intérêts de l'administration. C'est pour cette raison qu'elle implique que le fonctionnaire n'utilise pas les deniers publics dans son intérêt ou à des fins personnelles. Il s'agit d'une exigence de moralité d'une très grande valeur. C'est dans ce sens que Daniel-Rops affirme qu'« un homme n'est pleinement affirmé que dans un certain désintéressement. Ce mot s'entend de façons diverses : mais il ne s'agit pas de démissionner du monde et de s'abriter dans la trop célèbre tour d'ivoire. De celui qui tend trop avidement vers les biens de ce monde des doigts crochus, la langue populaire dit qu'il est intéressé : c'est le désintéressement, le contraire de cet intérêt, qui est vraiment une haute valeur de l'homme »117.Là encore l'objectif est double : protéger l'agent public des différents pouvoirs susceptibles de s'exercer sur lui et l'empêcher d'abuser des prérogatives qui lui sont confiées. L'agent public ne saurait mettre en contradiction son intérêt personnel et celui de la collectivité qu'il sert118. L'obligation de désintéressement, composante du devoir de probité, exclut en premier lieu l'utilisation des moyens du service à des fins privées, mais ouvre surtout le vaste champ de la corruption : elle se traduit par de

115Loi N°001/2005 du 4 février 2005, portant Statut Général de la Fonction Publique au Gabon

116 Loi n°61-33 du 15 juin 1961 relative au statut général des fonctionnaires.

Réactualisée version 2005.

117Daniel-Rops, Ce qui meurt..., v, p. 183.

118Principe exposé dans un avis du Conseil d'Etat du 17 février 1954.

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nombreux délits assortis de lourdes sanctions pénales visant tout autant l'agent public que celui qui tenterait de le corrompre119

Dans le même sens, le code pénal camerounais condamne le détournement des fonds publics. C'est dans cette logique que l'article 184 dispose que « (1) Quiconque par quelque moyen que ce soit obtient ou retient frauduleusement quelque bien que ce soit, mobilier ou immobilier, appartenant, destiné ou confié à l'Etat fédéral ou fédéré, à une coopérative, collectivité ou établissement, ou publics ou soumis à la tutelle administrative de l'Etat ou dont l'Etat détient directement ou indirectement la majorité du capital, est puni : a) Au cas où la valeur de ces biens excède 500.000 francs, d'un emprisonnement à vie ; b) Au cas où cette valeur est supérieure à 100.000 francs et inférieure ou égale à 500.000 francs, d'un emprisonnement de quinze à vingt ans ; c) Au cas où cette valeur est égale ou inférieure à 100.000 francs, d'un emprisonnement de cinq à dix ans et d'une amende de 50.000 à 500.000 francs. (2) Les peines édictées ci-dessus ne peuvent être réduites par admission de circonstances atténuantes respectivement au-dessous de dix, cinq ou de deux ans et le sursis ne peut en aucun cas être accordé. (3) Dans les cas prévus à l'article 87 (2) du présent Code le minimum de la peine est respectivement de cinq ans, de deux ans et d'un an et le sursis ne peut être accordé sauf excuse atténuante de minorité. (4) La confiscation prévue par l'article 35 du présent code est obligatoirement prononcée ainsi que les déchéances de l'article 30 pendant cinq ans au moins et dix ans au plus. (5) La publication de la décision doit être ordonnée. (6) Le présent article n'est pas applicable aux détournements et recels d'effets militaires visés aux codes de justice militaire ». Il apparait donc que cette interdiction ne concerne pas seulement l'argent public mais également tous les biens publics meubles et immeubles.

En définitive, les obligations de solidarité dans l'éthique du corps visent à faire du fonctionnaire un homme honnête sur qui, non seulement l'administration peut compter mais également les administrés. Le fonctionnaire doit être un exemple de moralité comme l'a formulé le juge dans l'affaire Mikoma Albert c/ Administration du territoire120 sous le motif « qu'en effet, un fonctionnaire se doit de garder en toutes circonstances un comportement digne et honorable être un exemple pour tous ses concitoyens ». C'est ainsi qu'il ne peut solliciter des

119 Ensemble de délits énumérés dans le nouveau code pénal français (art. 432-10 et suivants) : concussion, corruption

passive et trafic d'influence, prise illégale d'intérêt, délit d'ingérence, atteintes à la liberté d'accès et à l'égalité des candidats dans les marchés publics et les délégations de service public, la soustraction ou le détournement de biens. Particulièrement lourdes, les sanctions pénales peuvent de surcroît être complétées par des sanctions disciplinaires

120 Arrêt n°263/ CCA du 27 novembre 1953

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avantages des personnes privées, qu'il ne peut abuser de sa qualité. Il doit servir avec désintéressement afin de servir l'intérêt de l'administration. De plus, il doit respecter les obligations de la discipline du corps.

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LES OBLIGATIONS DE SOLIDARITE DANS LA DISCIPLINE DU CORPS

CHAPITRE II :

Toute société pour bien fonctionner a besoin de règles pour définir la conduite de ses membres. Le corps étant comme une société, pour bien fonctionner, ses membres doivent non seulement se comporter selon une éthique mais également respecter une certaine discipline. Les obligations de solidarité dans la discipline du corps créent une dépendance mutuelle des membres dont seule la cohésion vis-à-vis de la discipline assure le bon fonctionnement du corps et par là même une efficacité du service public. Sachant déjà ce que signifient les concepts

d' « obligation » et de « solidarité (comportement qui implique pour chacun la responsabilité totale d'un engagement commun) ».

La discipline est définie comme une règle de conduite d'un groupe, une règle de conduite que quelqu'un impose121. Le dictionnaire universel définit la discipline comme l' « ensemble des règles de conduite imposées aux membres d'une collectivité pour assurer le bon fonctionnement de l'organisation sociale ; obéissance à ces règles. »122. Sur le plan juridique, la discipline est définie comme le « pouvoir disciplinaire »123 . Il apparait que cette définition est insatisfaisante ; c'est pourquoi, nous prendrons une définition plus claire. La discipline est

l' « ensemble des règles et devoirs imposés aux membres d'un corps ou d'une profession, ou attachés à l'exercice d'une fonction et dont le régime de sanction est autonome tant en ce qui concerne les instances compétentes et la procédure que la définition des infractions et la nature des peines »124 . Après cette définition, il découle une question : quelles sont les obligations de solidarité dans la discipline au corps ?

Avant de répondre à cette question, il convient de faire remarquer que la discipline est au coeur de la volonté des autorités camerounais comme la prévoit l'article 34 du statut général de la fonction publique125en ces termes : « (1) Le fonctionnaire est tenu d'assurer

121 Dictionnaire le Robert de poche, 2012

122 Dictionnaire universel, EDICEF, 2007.

123 Lexique des termes juridiques, 18e édition, Dalloz, 2011, P 134.

124 Cornu (G), vocabulaire juridique, Ibid.

125Décret n°94/199 du 7 octobre 1994 potant statut général de la fonction publique.

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personnellement le service public à lui confier et de s'y consacrer en toute circonstance avec diligence, probité, respect de la chose publique et sens de responsabilité. » ; ce qui implique de la discipline. Pour répondre à cette question, nous aborderons en premier lieu, l'obligation de port de l'uniforme (section I) et en second lieu, l'interdiction d'exercer certains droits politiques et collectifs (section II).

SECTION I : L'OBLIGATION DE PORT DE L'UNIFORME

L'obligation de port de l'uniforme est une obligation particulière car elle ne figure pas dans le statut général de la fonction publique126mais plutôt dans des statuts particuliers. En effet, bien que les fonctionnaires doivent en toutes circonstances honneur et dignité, il ne leur est pas du tout exigé de porter un uniforme pendant la durée du service. En fait, il est juste exigé aux agents de l'administration, fonctionnaires et même contractuels, un habillement décent, qui reflète le niveau de la profession127. Afin de mieux comprendre cette obligation, il convient de définir ce que l'on entend par uniforme afin d'éviter toute confusion.

Selon le Robert de poche, un « uniforme » est costume militaire réglementaire ; un vêtement déterminé d'un groupe. L'adjectif uniforme dont provient le nom uniforme signifie ce qui présente des éléments tous semblables ; dont les parties sont ou paraissent toutes identiques. La définition littéraire la plus satisfaisante est sans doute celle du dictionnaire universel. L'uniforme y est défini comme « un costume dont le modèle, la couleur, le tissu son rigoureusement fixés et qui est imposé aux militaires, aux employés de certaines administrations, aux élèves de certains établissements. Il convient de préciser ici et maintenant que nous ne nous attarderons pas dans le cadre de notre travail sur l'uniforme que portent les élèves. Avant de parler de l'obligation de port de l'uniforme proprement dite, il convient de faire un bref rappel historique de l'origine du port de l'uniforme dans la fonction publique.

À partir de la fin du XVe siècle, l'affirmation du pouvoir royal, mais aussi le souci des grands capitaines de mettre en valeur leurs unités, coïncide avec l'apparition des premiers uniformes, de couleur voyante, qui sont adoptés aussi bien par les milices communales que par les gardes écossais de Charles VII ou par ceux de Charles le Téméraire. Dès 1480, les mercenaires suisses portent un uniforme composé d'un pourpoint court, d'une culotte collante à crevés et à bouffants et d'un vaste chapeau à plumes. Cette tenue exerce une influence

126Décret n° 94/199 du 07 octobre 1994 portant Statut général de la Fonction Publique de l'Etat modifié et complété par le décret n° 2000/287 du 12octobre 2000

127 CS/CA, jugement n° 64 du 30 Août 1984, KEBE PAUL C/ Etat du Cameroun ( en l'espèce, le sieur Kebe Paul, assistant à l'université a vu son contrat non renouvelé pour insuffisance académique et comportement non conforme à la déontologie universitaire).

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importante sur le dessin des uniformes qui sont adoptés dans plusieurs pays, avant que les modes nationales n'imposent des différenciations.

C'est sous le règne de Louis XIV que le ministre Louvois rend obligatoire l'uniforme et en fixe minutieusement les détails ; dès lors, l'uniforme s'applique non seulement aux corps d'élite, mais également aux fantassins et aux mercenaires. Au milieu du siècle, le costume français se compose d'une ample tunique portée sur un long gilet à manches. Devenue plus ajustée, cette tunique prend le nom de justaucorps. Les coiffures et les accessoires permettent de distinguer les différents corps. La Seconde Guerre mondiale engendre de nouvelles modifications dans l'uniforme de l'armée de terre, avec l'introduction, sur le modèle américain, du double casque et du battle-dress, qui parachève l'évolution de l'uniforme, de plus en plus éloigné du costume civil. Aujourd'hui, les militaires portent au combat un treillis camouflé « centre Europe », comme la plupart des armées du monde.

Après ce rappel, il convient de s'intéresser à l'obligation de port de l'uniforme du fonctionnaire proprement dit. A titre de précision, avant d'entrer dans le vif du sujet, il faut dire qu'il s'agit d'une obligation qui concerne uniquement certains corps de fonctionnaires ; c'est pourquoi elle ne figure pas dans le statut général de la fonction publique mais dans les statuts des corps particuliers. C'est dans cette logique que nous parlerons de l'obligation de port des costumes dans les corps de la justice (paragraphe I) et l'astreinte du port de l'uniforme dans les corps des forces de l'ordre (paragraphe II).

PARAGRAPHE I : L'OBLIGATION DE PORT DES COSTUMES DANS LES CORPS DE LA JUSTICE.

Parmi les corps qui sont tenus de respecter cette obligation, figure les deux principaux corps de fonctionnaires de la justice que sont les magistrats et les greffiers. Ce sont deux corps essentiels pour le bon fonctionnement de la justice. L'absence de l'un comme de l'autre paralyserait la continuité du service public de la justice. Nous allons donc traiter de l'obligation de port de costumes dans le corps de la magistrature (A) et dans le corps des greffes (B).

A-L' obligation de port des costumes dans le corps de la magistrature.

Avant de parler de cette obligation de port des costumes du corps de la magistrature, il convient de présenter, comme il s'agit de discipline du corps, quelles sont les fautes

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disciplinaires du magistrat. Selon l'article 46 du statut de la magistrature128, « Constitue une faute disciplinaire imputable à un magistrat : - tout acte contraire au serment du magistrat129 ; - tout manquement à l'honneur, à la dignité et aux bonnes moeurs ; - tout manquement aux devoirs de son état ; - tout manquement résultant de l'insuffisance professionnelle ». Cela signifie a contrario qu'en dehors de l'obligation de port des costumes, le magistrat a pour obligations disciplinaires de respecter son serment130, d'être à la hauteur sur le plan professionnel et de ne pas manquer à l'honneur, à la dignité et aux bonnes moeurs. Pour revenir enfin à l'obligation de port de l'uniforme, il faut noter que selon le statut de la magistrature131, le port des costumes est réservé exclusivement aux magistrats (1) et que ce port est prohibé aux auditeurs de justice (2).

1-Le port du costume exclusivement réservé aux magistrats.

Les magistrats, que ce soit ceux du parquet (ministère public) ou ceux du siège (les juges) sont tenus lors de l'exercice de leurs fonctions, respectivement d'émettre des opinions par le moyen des conclusions qui permettent de rendre le droit132 et de prononcer le jugement133, de

128 Décret n°95/048 DU 8 mars 1995, portant statut de la magistrature

129 Voir l'article 23 du statut de la magistrature « Dès son intégration dans la magistrature et avant qu'il n'accomplisse tout acte de ses fonctions, le magistrat prête le serment dont la formule suit :

« Moi .................., je jure devant Dieu et devant les hommes de servir honnêtement le peuple de la

République du Cameroun en ma qualité de magistrat, de rendre justice avec impartialité à toute personne, conformément aux lois, règlements et coutumes du peuple camerounais, sans crainte ni faveur, ni rancune, de garder le secret des délibérations et de me conduire en tout, partout et toujours en digne et loyal magistrat. » Le serment n'est pas renouvelable »

130 Hors du Cameroun, en côte d'ivoire par exemple, Le magistrat prête serment deux fois tout au long de sa carrière. Une

première fois en tant qu'auditeur de justice et une deuxième fois en tant que magistrat. En effet l'article 8 alinéa 1er du statut dispose que « tout magistrat lors de sa nomination à son premier poste et avant l'entrée en fonction prête serment. »

La formule de serment de magistrat est quelque peu différente de celle de l'auditeur de justice. Elle s'exprime en ces termes : « je jure de bien et fidèlement remplir mes fonctions et de me conduire en tout, comme un digne et loyal magistrat. »

131 Article 20 décret n°95/048 DU 8 mars 1995, portant statut de la magistrature « 1) Le costume d'audience des magistrats et attachés de justice est fixé par arrêté du ministre de la justice. 2) Les auditeurs de justice ne portent pas de costume d'audience».

132 C'est la magistrature debout. Ceux qui exercent cette fonction se tiennent toujours debout lorsqu'ils prennent la parole à l'audience. Elle consiste à engager des poursuites pénales contre tous ceux qui commettent des infractions et à les conduire devant la justice. Pour ce faire, les magistrats du parquet reçoivent les plaintes et les dénonciations et travaille en collaboration avec les services de police et de gendarmerie auxquels il donne des instructions. Au cours d'un procès c'est eux qui soutiennent l'accusation et demande l'application de la peine. Les postes dans les fonctions du parquet sont ceux de substitut du procureur de la république de deuxième classe, substitut du procureur de la république de première classe, procureur de la république adjoint et procureur de la république. L'auditeur de justice qui commence sa carrière en cette fonction est nommé substitut du procureur de deuxième classe. Les autres postes ne lui seront accessibles qu'après un certain nombre d'année de carrière. Les magistrats du parquet ne sont pas indépendants. Ils obéissent à leurs supérieurs hiérarchiques dont ils doivent appliquer les instructions. Ils sont placés sous l'autorité directe du garde des sceaux ministre de la justice.

133 Elle est celle des magistrats qui reste assis sur leurs sièges durant une audience et qui dirigent les débats entre les parties. Elle consiste à juger une affaire à partir des preuves recueillies et des arguments développés par chacune des parties

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mettre leurs costumes d'audience conformément à la réglementation en vigueur. Au Cameroun, l'article 20 du statut de la magistrature fait preuve de parcimonie sur la question du port des costumes ; il se contente de disposer que « le costume d'audience des magistrats et attachés de justice est fixé par arrêté du ministre de la justice... ».

En Côte-d'Ivoire par contre le statut de la magistrature a été un peu plus explicite. En effet, selon ce statut, Les magistrats sont astreints à l'audience au port d'un costume c'est-à-dire une tenue qu'ils arborent pour prendre part aux audiences des juridictions. On distingue à cet effet deux types de costumes :- Le costume des audiences ordinaires ;- Le costume des audiences solennelles.

Pour ce qui est du costume des audiences ordinaires, il faut d'abord préciser que les audiences ordinaires sont généralement celles au cours desquelles les affaires sont jugées. Le costume de circonstance dans ce cas est la toge noire à grande manche avec simarre noire et ceinture noire, toque noire bordée de velours noir ornée d'un galon d'argent, cravate tombante de baptiste blanche plissée et une épitoge de fourrure blanche (article 18 alinéa 1 du décret de 1998).

En ce qui concerne le costume des audiences solennelles, il s'agit des audiences de cérémonie par exemple les audiences de prestation de serment, d'installation de magistrat, et audiences de rentrée judiciaire. Le costume porté dans ces occasions est la toge de couleur rouge avec simarre de soie noire, ceinture de soie aux couleurs ivoiriennes avec frange de soie et une toque de velours noire (article18 alinéa 2). Quoi qu'il en soit, que ce soit au Cameroun, en France ou en Côte d'ivoire, les magistrats ont l'obligation de port du costume. Toutefois, selon l'article 20 du statut de la magistrature camerounais134, ce port du costume est prohibé aux auditeurs de justice.

2-L'interdiction du port du costume faite aux auditeurs de justice.

Les auditeurs de justice sont des magistrats en formation135. Au Cameroun, les auditeurs de justice ne sont pas du tout liés par l'obligation de port de costume. Il faut même dire que le statut de la magistrature leur interdit le port du costume d'audience lorsqu'il dispose clairement

134 Décret n°95/048 DU 8 mars 1995, portant statut de la magistrature.

135 Les auditeurs de justice sont repartis pour leur stage sur l'ensemble des tribunaux de premières instances et sections détachées du territoire national. La répartition est faite par ordre de mérite sur la base du classement de la première année et selon les nécessités du stage. Le stage se déroule dans les

différents secteurs du tribunal à savoir au service du procureur de la république ou parquet, celui du président du tribunal que l'on appelle le siège et au greffe de la juridiction. Le stage se déroule dans ces différents services suivant un calendrier préalablement établi par l'institut. La durée minimum de temps est de trois mois par service. Les auditeurs de justice participent également aux audiences publiques. A la fin de stage, une note leur est attribuée.

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que : « les auditeurs de justice ne portent pas de costume d'audience ». Il en résulte donc que les auditeurs de justice, bien qu'étant des futurs magistrats ne peuvent pendant leurs stages arborer les costumes d'audience des magistrats professionnels.

De ce qui précède, il apparait que le statut de la magistrature veille éviter toute confusion entre les professionnels de la justice que sont les magistrats déjà en activité et ceux qui aspirent à devenir magistrat, c'est-à-dire les élèves-magistrats que sont les auditeurs de justice. En dehors des magistrats qui constituent l'un des corps de fonctionnaires de la justice qui ont l'obligation de port du costume, nous avons également le corps des greffes.

B-L' obligation de port de costume du corps des greffes.

Le corps des greffes est un corps très important pour le bon fonctionnement de la justice. En fait, sans la participation du corps de greffes, l'administration juridictionnelle serait neutralisée. Afin de mieux appréhender l'obligation de port de costume des fonctionnaires de ce corps, il convient de présenter ses attributions (1) avant traiter de l'obligation de port de costume proprement dite (2).

1-Présentation des attributions du corps de greffes.

Le greffier est avant tout un collaborateur du magistrat sous l'autorité duquel il exerce sa fonction. Il dispose d'attributions juridictionnelles et administratives.

Pour ce qui est des attributions juridictionnelles, Il s'agit des tâches qu'il accomplit dans le cadre des procédures judiciaires. A ce titre, le greffier est chargé d'assister le juge dans l'exercice de ses fonctions et de dresser tout acte constatant cet exercice. Ainsi le greffier rédige des procès-verbaux, des convocations, des notifications etc. il délivre en outre copie des décisions rendues par les juges. Enfin il participe au procès au cours duquel il tient la plume. Selon le grade le greffier peut occuper dans l'appareil judiciaire divers emplois. Ainsi un administrateur des services judiciaires peut être nommé greffier en chef du tribunal de la cour d'appel. L'attaché des services judiciaires peut être lui greffier en chef adjoint. Pour tous les autres et notamment pour les secrétaires c'est l'emploi de greffier ordinaire.

Les greffiers peuvent également exercer des tâches administratives. Ils peuvent par exemple diriger les secrétariats des présidents des tribunaux de première instance et des procureurs de la république. Cette fonction est dévolue à ceux qui ont le grade de secrétaire des services judiciaires. Quant aux greffiers qui ont le grade d'attachés des services judiciaires, ils peuvent diriger les secrétariats du premier président de la cour d'appel et du procureur général. Les greffiers administrateurs eux assurent l'inspection des greffes.

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Plusieurs incompatibilités et interdictions concerne l'exercice de la profession du greffier. La première est que le greffier ne peut participer aux travaux d'un organisme ou d'une commission extra judiciaire sans une autorisation préalable du ministre de la justice. La seconde contrainte vient de ce que le greffier ne peut siéger à la même audience qu'un magistrat qui est son conjoint, un parent ou un allié en ligne directe ou en ligne collatérale jusqu'au troisième degré. Il ne peut pas assister un magistrat dans l'accomplissement de certains actes pour les mêmes raisons. La troisième contrainte est que le greffier ne peut pas siéger à une audience ou assister le juge à une procédure concernant ses propres intérêts ou ceux de son épouse, de ses parents ou de ses alliés en ligne directe ou en ligne collatérale jusqu'au troisième degré. Il ne peut le faire également lorsqu'il s'agit des intérêts des personnes dont il est le représentant légal ou le mandataire. Enfin, le greffier ne peuvent se rendre acquéreur de droits litigieux qui font l'objet de procès devant la juridiction dans laquelle il est affectée136. Après cette présentation des attributions des fonctionnaires des greffes, il convient de traiter de l'obligation de port du costume proprement dite.

2-L'obligation de port de costume proprement dite.

Pour remplir les obligations qui sont les leurs, les fonctionnaires de greffes doivent pendant l'audience arborer leurs robes. En fait, cette obligation ne se limite pas pendant les audiences, elle s'étend aux cérémonies officielles. Selon l'article 84 du statut de la magistrature, « le fonctionnaire des Greffes est astreint au port de la robe lors des audiences et à l'occasion de certaines cérémonies solennelles»137. Le port du costume pendant l'audience concerne les attributions du greffier pendant le procès. Le port du costume pendant les cérémonies solennelles est celui où le greffier assiste ou même participe par exemple à l'audience solennelle de la rentrée de la cours suprême. En plus des corps de fonctionnaires de la justice, d'autres corps de fonctionnaires ont l'obligation de port de l'uniforme ; il s'agit des corps de fonctionnaires des forces de l'ordre.

136 Voir article 86 du statut spécial des greffiers : « il est interdit à tout fonctionnaire des Greffes régi par le

présent statut d'exercer ses fonctions :

- dans une affaire ou son conjoint, un parent ou un allié jusqu'au second degré est impliqué ;

- dans une affaire ou ses intérêts sont en jeu ;

- lorsque son conjoint fait partie de la composition du tribunal ».

137 Décret n°2011/020 du 04 février 2011 portant statut spécial des fonctionnaires de greffes.

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PARAGRAPHE II : L'ASTREINTE DE PORT DE L'UNIFORME DANS LES CORPS DE FORCES DE L'ORDRE.

L'obligation de port de l'uniforme est une obligation inhérente aux forces de l'ordre, qu'elles soient du ministère de la défense ou de la sûreté nationale. En fait, au tout début, les armées portaient des costumes. L'on est donc passé des costumes de guerre aux uniformes de combat. Il s'agit d'une obligation de solidarité dans la discipline du corps qui a une importance capitale tant les forces de l'ordre sont identifiées par leurs uniformes appelés communément tenues. Cela est d'autant plus important que le fonctionnaire ne peut se délier de cette obligation qu'en respectant les règles en vigueur. Il est toutefois nécessaire de noter que cette obligation comme les autres a des limites. C'est dans cette logique que pour appréhender cette obligation, nous parlerons de la période de l'astreinte (A) et de la fin de l'astreinte (B).

A-La période de port de l'uniforme.

La période de port de l'uniforme est celle pendant laquelle le fonctionnaire ne peut se délier de l'obligation de port den l'uniforme. Cette obligation lui est imposée pour les nécessités du service et surtout pour l'identification du corps auquel il appartient. Pour plus de précision, il convient de dire que l'obligation de port de l'uniforme s'impose au fonctionnaire pendant la durée du service (1) et également pendant les cérémonies solennelles (2).

1-Le port de l'uniforme pendant le service.

L'obligation de port de l'uniforme s'impose aux fonctionnaires des corps des forces de l'ordre. Selon l'article 11 du code de déontologie des fonctionnaires de la sûreté nationale138, le fonctionnaire de la sûreté nationale est astreint au port de l'uniforme assorti des attributions de grade et du badge d'identification. L'alinéa 2 du même article139 dispose qu' : « en service, l'uniforme constitue la règle, la tenue civile, l'exception ». Il surgit alors la question de la durée du port de l'uniforme dans ce corps de fonctionnaires car ces fonctionnaires peuvent intervenir de leur propre initiative ou requis en dehors du service et dans ce cas, ils sont considérés comme étant en service140. L'on peut donc en conclure que l'obligation de port de l'uniforme pèse sur le fonctionnaire pendant la durée de son activité professionnelle au sein de l'administration dans laquelle il est en service141.

138 Décret n°2012/546 du 19 novembre 2012 portant code de déontologie des fonctionnaires de la sûreté nationale.

139 Article 11 du décret n°2012/546 du 19 novembre 2012 portant code de déontologie des fonctionnaires de la sûreté nationale

140 Article 26 du décret n°2012/539 du 19 novembre 2012 portant statut spécial du corps des fonctionnaires de la sûreté nationale.

141 Article 6 du décret n°2012/546 du 19 novembre 2012 portant code de déontologie des fonctionnaires de la sûreté nationale : « le fonctionnaire de la sûreté nationale est de service 24 heures sur 24 ».

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De plus, selon le code de déontologie suscité, cet uniforme permet d'identifier l'agent des forces de l'ordre. Vu qu'il y a plusieurs corps qui maintiennent l'ordre, cette obligation s'impose à tous ces corps. Cet ainsi qu'on la retrouve dans le statut des fonctionnaires de l'administration pénitentiaire ; l'article 27 alinéa 2 dudit statut142dispose que : « le port de l'uniforme est obligatoire pendant le service ». Cette obligation est également opposable aux militaires.

En France, les corps des forces de l'ordre sont également soumis à cette obligation de port de l'uniforme. L'article R. 434-15 du code de déontologie de la police nationale et de la gendarmerie nationale que : « Port de la tenue. Le policier ou le gendarme exerce ses fonctions en uniforme. Il peut être dérogé à ce principe selon les règles propres à chaque force ». De même, l'arrêté du 22 juillet 1996 143disposait déjà que : « les fonctionnaires actifs de la police nationale en tenue d'uniforme... ». C'est également le cas en ce qui concerne les militaires car la loi n°96-029 du 6 décembre 1996 dispose en son article 13 que « le port de l'uniforme militaire est obligatoire pendant le service sauf à l'occasion de certaines circonstances fixées par voie règlementaire. La nature, la composition et le port de l'uniforme sont fixés par décret ». L'obligation de port de l'uniforme qui s'impose aux corps des forces de l'ordre ne se limite pas à la période de service, elle s'étend aux cérémonies solennelles.

2-L'obligation de port de l'uniforme pendant les cérémonies officielles.

Les cérémonies solennelles sont des formalités observées dans certaines occasions importantes de la vie sociales, qui sont célébrées publiquement ou des cérémonies qui se font avec beaucoup d'apparat. Toutefois, toute cérémonie solennelle n'est pas pour autant officielle car des particuliers tout comme les autorités publiques peuvent organiser des cérémonies solennelles. La cérémonie est dite officielle lorsqu'elle émane d'une autorité constituée.

En ce qui concerne les corps des forces de l'ordre, on parle beaucoup plus dans le langage courant de parade militaire. On retrouve ces parades lors des défilés militaires, lors des cérémonies d'avancement des fonctionnaires des corps de forces de l'ordre dans leurs différents grades. Pour ces différentes occasions, les fonctionnaires des forces de l'ordre ont l'obligation de porter leurs uniformes. Cette obligation de solidarité dans la discipline du corps figure dans le du décret n°2012/546 du 19 novembre 2012 portant code de déontologie des fonctionnaires de la sûreté nationale. En effet, ce décret, proscrivant le port de l'uniforme aux fonctionnaires

142 Décret n°2010/365 du 29 novembre 2010 portant statut spécial du corps des fonctionnaires de l'Administration Pénitentiaire.

143 Arrêté du 22 juillet 1996 portant règlement général d'emploi de la police nationale française.

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de la sûreté nationale en retraite, leur permet d'arborer ledit uniforme uniquement pendant les cérémonies officielles à caractère national comme le prévoit l'alinéa 3 de l'article 11 dudit code : « ... fonctionnaire de la sûreté nationale appelé à faire valoir ses droits à la retraite ne peut revêtir l'uniforme qu'à l'occasion des cérémonies officielles à caractère national. ». De même, en ce qui concerne les fonctionnaires de l'administration pénitentiaire, le statut régissant leur corps144 comporte cette obligation. En effet, l'article 55 du décret du 27 mars 1992 dispose que : « Les fonctionnaires de l'Administration Pénitentiaire sont astreints à une obéissance hiérarchique immédiate et à l'observation la plus rigoureuse de la discipline. 2) le port de l'uniforme est obligatoire pendant le service et les cérémonies officielles ». Il apparait donc qu'en dehors du service, les fonctionnaires appartenant aux corps des forces de l'ordre doivent également porter obligatoirement leurs uniformes pendant les cérémonies officielles. Si l'obligation de port de l'uniforme s'impose aux fonctionnaires des forces de l'ordre en dehors du service, c'est-à-dire lors des cérémonies officielles, quand prend-t-elle fin ?

B-LA FIN DE L'ATREINTE DE PORT DE L'UNIFORME DANS LES CORPS DES FORCES DE L'ORDRE.

L'obligation de solidarité dans la discipline du corps que constitue l'obligation de port de l'uniforme prend fin dans certaines circonstances. Dans ces circonstances, l'obligation de port de l'uniforme ne s'impose pas ou plus au fonctionnaire. Le fonctionnaire des forces de l'ordre devient dans ces circonstances comme les autres fonctionnaires, c'est-à-dire les fonctionnaires des administrations autres que celles des corps de forces de l'ordre. L'astreinte de port de l'uniforme prend en dehors de la période de service du fonctionnaire (1) et par autorisation spéciale (2).

1-La fin de l'astreinte en dehors de la période de service.

L'astreinte de port de l'uniforme du fonctionnaire faisant partie d'un corps des forces de l'ordre n'est pas perpétuelle. En dehors du service, le fonctionnaire des forces de l'ordre n'est plus lié par l'obligation de port de l'uniforme, dans certaines circonstances, il leur est même proscrit de porter cet uniforme. Cela est d'autant plus important que parmi leurs obligations de solidarité dans l'éthique du corps, les fonctionnaires des corps des forces de l'ordre sont tenus de ne pas abuser de leur qualité. Au Cameroun, cette proscription est clairement formulée dans

144Décret n°2010/365 du 29 novembre 2010 portant statut spécial du corps des fonctionnaires de l'Administration Pénitentiaire

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le code de déontologie des fonctionnaires de la sûreté nationale145. En fait, l'article 11 du code de déontologie dispose que : « le port de l'uniforme est proscrit pendant les congés et les permissions d'absence ». De ce qui précède, l'on peut subodorer qu'il est interdit aux fonctionnaires appartenant aux corps des forces de police d'arborer leurs uniformes pendant les périodes où ils ne sont pas en service au profit de leur administration ou simplement pendant leur repos.

En France, il apparait également que les fonctionnaires des forces de l'ordre ne sont pas toujours tenus de porter l'uniforme. L'obligation de port de l'uniforme y est également limitée. Pour commencer, le code de déontologie de la police nationale et de la gendarmerie nationale dispose en son article R.434-15 dispose que : « le policier ou le gendarme exerce ses fonctions en uniforme. Il peut être dérogé à ce principe selon les règles propres à chaque force... ».Pour continuer, la loi n°96-029 portant statut des militaires146dispose en son article 13 que : « le port de l'uniforme militaire est obligatoire pendant le service sauf à l'occasion des circonstances fixées par voie réglementaire... ».Pour finir, le règlement général d'emploi de la police nationale147 dispose en son article 113-1 que : « les fonctionnaires actifs de la police nationale exercent leurs missions en tenue d'uniforme sous réserve des dispositions transitoires prévues aux articles 24 des décrets n°95-656 et n°95-657 du 9 mai 1995 portant statuts particuliers des corps de commandements et d'encadrement et de maitrise et d'application de la police nationale ». Cela signifie a contrario que les fonctionnaires inactifs, vu qu'ils n'exercent aucune mission, ne sont pas liés par l'obligation de port de l'uniforme. L'article 1134 est encore plus claire lorsqu'il dispose que : « hors les conditions normales d'exercice de leurs fonctions, les personnels actifs de la police nationale ne peuvent revêtir l'uniforme que dans les cas et dans les conditions fixés dans les règlements intérieurs ou après autorisation expresse du chef de service ». De cet article, il apparait qu'il est proscrit aux personnels de la police française de porter l'uniforme en dehors des conditions normales d'exercice de leurs fonctions ; ce qui signifie a pari que pendant cette période ils n'ont pas d'obligation e port de l'uniforme a fortiori, le port de cette tenue en pareille circonstance est soumis à l'autorisation du supérieur hiérarchique. En plus de la période en dehors du service, le fonctionnaire des forces de l'ordre peut être délié de l'obligation de port de l'uniforme par autorisation spéciale.

145Article 11 du décret n°2012/546 du 19 novembre 2012 portant code de déontologie des fonctionnaires de la sûreté nationale

146 Loi n°96-029 du 6 décembre 1996 portant statut général des militaires.

147 Arrêté du 22 juillet 1996 portant règlement général d'emploi de la police nationale.

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2-La fin de l'astreinte du port de l'uniforme par autorisation spéciale et détachement.

De par ce qui précède, il est apparu que les fonctionnaires des corps des forces de l'ordre sont déliés de l'obligation de port de l'uniforme en dehors du service. Toutefois même pendant le service, ces fonctionnaires peuvent être déliés de cette obligation. Ce qui signifie en d'autres termes qu'ils peuvent exercer leurs missions en civile comme le signale le code de déontologie des fonctionnaires de la sûreté nationale148. En effet, l'article 11 alinéa dudit code dispose qu' : « en service, l'uniforme constitue la règle et la tenue civile, l'exception ». Il ressort que le décret fixant les règles de déontologie du personnel des forces de police prévoit la possibilité qu'un fonctionnaire appartenant à ce corps puisse exercer ses fonctions sans uniforme. Il convient de préciser avant tout que cette modalité d'exercice des fonctions est soumise à une autorisation préalable.

L'exercice des missions qui sont confiées aux fonctionnaires corps des forces de l'ordre sans l'uniforme est soumis à l'autorisation préalable du supérieur hiérarchique. C'est ce sens qu'au Benin, la loi n°2015-20 portant statut spécial des personnels des forces de sécurité publique et assimilées149 dispose en son article 7 que : «Le port d'arme est reconnu aux personnels de chacune des composantes des forces de sécurité publique et assimilées. Ils sont astreints au port de l'uniforme. Toutefois, ils peuvent en être dispensés par l'autorité hiérarchique pour certaines missions particulières ». De même, l'article 113-3 du règlement général d'emploi de la police nationale française150dispose que : « lors des opérations de police, à défaut d'être revêtus de leur uniforme, les fonctionnaires de police doivent être porteurs, de façon visible, de l'un des moyens matériels d'identification dont ils sont dotés. Ils ne peuvent en être dispensés que sur instructions expresses de l'autorité commandant l'opération ». De ce qui précède, il apparait que pendant le service le fonctionnaire des forces de l'ordre doit arborer son uniforme et l'enlever après le service. Toutefois, ce dernier peut être dispensé du port de l'uniforme sur autorisation ou même sur ordre du supérieur hiérarchique. C'est souvent le cas dans des opérations d'infiltration. L'obligation de port de l'uniforme n'est pas la seule obligation de solidarité dans la discipline du corps. En dehors de cette prescription disciplinaire, il y a des prohibitions qui s'imposent de par la discipline du corps : il s'agit des interdictions d'exercice de certains droits politiques et collectifs.

148 Décret n°2012/546 du 19 novembre 2012 portant code de déontologie des fonctionnaires de la sûreté nationale

149 Loi n° 2015-20 du 02 avril 2015 portant statut spécial des personnels des forces de sécurité publique et assimilées.

150Arrêté du 22 juillet 1996 portant règlement général d'emploi de la police nationale

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SECTION II : LES INTERDICTIONS D'EXERCICE DE CERTAINS DROITS POLITIQUES ET COLLECTIFS.

Les obligations de solidarité dans la discipline du corps comme toutes les autres obligations entrainent chez les fonctionnaires qui en sont débiteurs une perte de certaines libertés. C'est ainsi que parmi ces dernières figurent des obligations qui consistent en la perte de certains droits. La discipline comme précédemment dit est un ensemble de règles de conduite imposées aux membres d'une collectivité pour assurer le bon fonctionnement de l'organisation sociale151.Dans le cas d'espèce, cette collectivité, c'est le corps auquel appartient le fonctionnaire. Par conséquent, cette deuxième catégorie d'obligations de solidarité dans la discipline du corps est nécessaire pour le bon fonctionnement du corps. Il convient de noter que cette catégorie est particulière sur plusieurs points.

Elle est particulière d'abord parce qu'elle est constituée d'obligations qui ne figurent pas dans le statut général de la fonction publique152, on ne les retrouve que dans les statuts particuliers de certains corps de fonctionnaire. Ensuite, ces obligations sont citées dans le statut général de la fonction publique non pas en tant qu'obligations comme précédemment dit mais plutôt en tant que droits du fonctionnaire. Ce qui signifie que les fonctionnaires dont le statut ne les prévoient pas en tant qu'obligations mais plutôt en tant que droits jouissent de ces dernières, tandis que les autres en sont débiteurs153 . Enfin, ces obligations sont encore particulières dans la mesure où elles constituent à première vue des atteintes à des droits constitutionnellement garantis154. Ces interdictions d'exercice de certains droits politiques et collectifs frappent plusieurs droits ; c'est dans cette optique que nous parlerons de l'interdiction d'exercice des droits politique et syndical (paragraphe I) et de l'interdiction du droit de grève (paragraphe II).

PARAGRAPHE I : L'INTERDICTION DES DROITS POLITIQUE ET

SYNDICAL

L'interdiction d'exercice des droits politique et syndical comme son nom l'indique fait partie des obligations-prohibition. Il s'agit des obligations qui s'imposent uniquement à certains corps et plus précisément aux fonctionnaires des corps des forces de l'ordre. Ainsi les

151 Dictionnaire universel, 18e édition, EDICEF, 2008.

152 Décret n° 94/199 du 07 octobre 1994 portant Statut général de la fonction publique de l'Etat modifié et complété par le décret n° 2000/287 du 12 octobre 2000.

153 Les fonctionnaires appartenant aux corps dont le statut prohibe l'exercice de ces droits.

154 Voir préambule de la constitution camerounaise du 18 janvier 1996.

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fonctionnaires des forces de ne jouissent pas de tous les droits dont les autres fonctionnaires sont bénéficiaires comme l'indique l'article 3 de la loi française portant statut général des militaires155 en ces termes : « Les militaires jouissent de tous les droits et libertés reconnus aux citoyens. Toutefois, l'exercice de certains d'entre eux est soit interdit, soit restreint dans les conditions fixées par la présente loi ». De ce qui précède, il est un truisme que certains droits sont interdits d'exercice ou bien leur exercice est restreint pour les fonctionnaires des corps des forces de l'ordre. Pour mieux appréhender ces interdictions, nous traiterons séparément de l'interdiction d'adhésion aux partis politiques (A) avant de nous intéresser à l'interdiction d'adhésion aux associations syndicales (B).

A-L' interdiction d'adhésion aux partis politiques

L'interdiction d'adhérer aux partis politiques est une interdiction qui ne fait pas l'unanimité dans les statuts des corps de fonctionnaires où elle est formulée. Dans certains, cette interdiction est plus stricte, tandis que dans d'autres, il s'agit non pas d'un droit dont l'exercice est complètement restreint mais plutôt d'un droit simplement réduit restreint. Dans l'optique de montrer ces divergences entre les droits camerounais et étrangers, il convient d'expliquer au préalable ce que l'on entend par droits politiques (1) avant de traiter de l'interdiction proprement dite (2).

1-Explication des concepts de droits politiques.

Les droits politiques peuvent être appréhendés comme l'ensemble des prérogatives à caractère politiques dont les citoyens sont bénéficiaires et qui sont opposables à l'Etat. On y trouve le droit d'adhérer à une association ou formation politique, le droit d'être électeur et éligible. Il s'agit en d'autres termes du pouvoir de prendre part à la vie politique de son pays en tant qu'acteur soit en présentant sa candidature aux élections (présidentielles, parlementaires ou municipales), soit en choisissant librement ses dirigeant par le vote156. Après cette brève explication de la consistance des droits politiques garantis aux citoyens, et par la même occasion aux fonctionnaires, il convient de s'intéresser à l'interdiction proprement dite.

155 Loi n° 2005-270 du 24 mars 2005 portant statut général des militaires

156 Voir par exemple l'article 6 de la constitution camerounaise du 18 janvier 1996 : « le président de la république est élu au suffrage universel direct, égal et secret, à la majorité des suffrages exprimés... ». Ceci est un exemple de la garantie constitutionnelle de la possibilité de participation à la vie politique du pays qui appartient à tous les citoyens qui remplissent les conditions légales; soit en étant candidat et dans le cas d'espèce, aspirant à la fonction présidentielle, soit en tant qu'électeur lors du suffrage.

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2-L'interdiction d'exercice des droits politiques proprement dite.

Comme précédemment dit, les fonctionnaires jouissent de tous leurs droits politiques à l'exception de certains corps. Le statut général de la fonction publique157bien que n'interdisant pas l'exercice de ses droits lui-même, prévoit tout de même cette interdiction dans d'autres statuts. En effet, l'article 21 de ce statut dispose que : « (1) Le fonctionnaire jouit des droits et libertés reconnus au citoyen. Il l'exerce dans le cadre des lois et règlements en vigueur. (2) Il peut notamment adhérer à une association politique ou culturelle, à un syndicat professionnel légalement reconnu vu d'assurer la représentation et la défense de ses intérêts de carrière. (3) Il est tenu d'exercer ses droits dans le respect de l'autorité de l'Etat et de l'ordre public. Toutefois, certaines fonctions exigeant de leur titulaire un loyalisme aux institutions de la République ou une neutralité politique absolue font l'objet d'un texte particulier ». Les textes particuliers auxquels le statut général fait allusion sont les statuts régissant les différents corps des forces de l'ordre.

Au Cameroun, il s'agit d'une interdiction stricte car les différents statuts particuliers ne se contentent pas de restreindre l'adhésion aux associations et formations politiques aux fonctionnaires de ces corps ; les statuts interdisent tout simplement l'exercice de ces droits. A titre d'exemple, le code de déontologie des fonctionnaires de la sûreté nationale158 dispose en son article 19 que : « (1) le fonctionnaire de la sûreté nationale est apolitique. Hors les cas prévus par la règlementation en vigueur, il ne peut prendre part aux réunions et manifestations à caractère politique...(2) Il lui est en outre interdit d'adhérer à des groupements ou associations à caractère politique... ». De même, le statut spécial des fonctionnaires de l'administration pénitentiaire159 interdit à ces derniers l'exercice des droits politiques et plus précisément d'adhérer aux associations et formations politiques. L'article 26 dudit statut dispose que: «les fonctionnaires de l'Administration Pénitentiaire sont tenus d'exercer leurs fonctions avec loyalisme, efficacité et désintéressement dans le respect des lois et règlement en vigueur... Il ne peut ni militer ni adhérer à un parti politique ». Il apparait donc à partir de l'analyse de ces instruments juridiques que l'interdiction d'exercice des droits politiques est grande dans ces corps au Cameroun.

Ailleurs, et en France pour commencer, bien que les militaires soient interdits d'adhérer aux partis politiques, ils restent éligibles. C'est dans ce sens que la loi française portant statut

157 Décret n° 94/199 du 07 octobre 1994 portant Statut général de la fonction publique de l'Etat modifié et complété par le décret n° 2000/287 du 12 octobre 2000.

158Décret n°2012/546 du 19 novembre 2012 portant code de déontologie des fonctionnaires de la sûreté nationale 159 Décret n°2010/365 du éç novembre 2010 portant statut spécial du corps des fonctionnaires de l'Administration Pénitentiaire.

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général des militaires160 dispose en son article 5 que : « Il est interdit aux militaires en activité de service d'adhérer à des groupements ou associations à caractère politique. Sous réserve des inéligibilités prévues par la loi, les militaires peuvent être candidats à toute fonction publique élective ; dans ce cas, l'interdiction d'adhésion à un parti politique prévue par le premier alinéa du présent article est suspendue pour la durée de la campagne électorale. En cas d'élection et d'acceptation du mandat, cette suspension est prolongée pour la durée du mandat. Les militaires qui sont élus et qui acceptent leur mandat sont placés dans la position de détachement prévue à l'article 51 ».

En Afrique de l'ouest pour finir, et au Benin pour plus précisément, la loi régissant les personnels de la sécurité publique161 va dans le même sens que la loi portant statut général des militaires en France car elle n'interdit pas complètement aux personnels des forces de sécurité publique d'exercer leurs droits politiques, elle se contente juste de les restreindre. En effet, l'article 31 de cette loi dispose que : «les fonctionnaires des forces de sécurité publique et assimilées jouissent de tous les droits civils, civiques et politiques dans les limites des dispositions relatives à leurs obligations particulières. Ils ont le droit de vote mais ne sont éligibles que dans les conditions prévues par la Constitution, les lois et règlements ». De ce qui précède, on note une nette différence dans l'interdiction d'exercice des droits politiques entre les fonctionnaires des corps particuliers des forces de l'ordre camerounais et ceux d'autres pays. Il apparait donc que la discipline de ces corps est plus stricte au Cameroun. Qu'en est-il de l'interdiction d'adhésion aux associations syndicales ?

B-L' interdiction d'adhésion aux associations syndicales.

L'interdiction d'adhésion aux associations syndicales comme la précédente interdiction est une obligation qui concerne certains corps uniquement (les fonctionnaires des corps des forces de l'ordre) car comme partout ailleurs, la liberté syndicale est garantie au Cameroun. Avant de traiter de l'interdiction d'adhésion aux associations syndicales proprement (2) dite, nous allons d'abord conformément au schéma précédent expliquer les concepts de droit syndical (1).

1-Explication des concepts de droit syndical.

Un syndicat est une association de personnes ayant pour but la protection d'intérêts communs, spécialement dans le domaine salarial162. Sur le plan juridique, il s'agit d'un

160 Loi n°2005-270 du 24 mars 2005 portant statut général des militaires.

161 Loi n° 2015-20 portant statut spécial des personnels des forces de sécurité publique et assimilées

162 Dictionnaire universel, 18e édition, EDICEF, 2008.

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groupement de personnes exerçant la même profession, des métiers similaires ou des professions connexes, en vue de la défense de leurs intérêts professionnels163 . Le droit syndical est garanti aux fonctionnaires qui peuvent créer librement des organisations syndicales, y adhérer et y exercer des mandats .Ces organisations peuvent ester en justice, se pourvoir devant les juridictions compétentes contre les actes réglementaires concernant le statut du personnel et contre les décisions individuelles portant atteinte aux intérêts collectifs des fonctionnaires. Les syndicats de fonctionnaires ont qualité pour conduire au niveau national avec le Gouvernement des négociations préalables à la détermination de l'évolution des rémunérations et pour débattre avec les autorités chargées de la gestion, aux différents niveaux, des questions relatives aux conditions et à l'organisation du travail. Dans les corps où l'exercice de ce droit est interdit, les fonctionnaires ne peuvent en bénéficier. Cette situation est différente selon qu'on se trouve au Cameroun ou en dehors du Cameroun d'où la nécessité de traiter de l'interdiction proprement dite.

2-L'interdiction d'adhésion des fonctionnaires des forces de l'ordre aux associations syndicales.

L'interdiction d'adhésion des fonctionnaires des forces de l'ordre aux associations syndicales n'existe pas dans tous les pays qui entrent dans notre cadre géographique. Ce qui amène à y voir une différence une fois encore dans la discipline selon que l'on est dans un pays ou dans un autre. Au Cameroun pour commencer, l'interdiction frappe tous les corps des forces de l'ordre. A titre d'illustration, le décret portant statut spécial du corps des fonctionnaires de la sûreté nationale164 dispose en son article 29 qu' : « il est interdit au fonctionnaire de la sûreté nationale en activité d'adhérer à des groupements ou associations à caractère politique ou syndical ». Le code de déontologie des fonctionnaires165 du même corps va dans le même sens lorsqu'il dispose en son article 19 qu' « il lui est en outre interdit d'adhérer à des groupements ou associations à caractère politique ou syndical ».

En France pour continuer, la discipline est relativement souple en matière de liberté syndicale car les fonctionnaires du corps de la police possèdent le droit syndical. En effet, le

163 Cornu (G), vocabulaire juridique, PUF, 2011.

164 Décret n°2012/539 du 19 novembre 2012 portant statut spécial du corps des fonctionnaires de la sûreté nationale.

165 Décret n°2012/546 du 19 novembre 2012 portant code de déontologie des fonctionnaires de la sûreté nationale.

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règlement général d'emploi de la police nationale166 prévoit ce droit syndical comme le dispose son article 113-46 en ces termes : « l'exercice du droit syndical s'exerce dans le respect des dispositions législatives relatives à la protection du secret professionnel et du secret de l'enquête et de l'instruction, ainsi que dans le cadre des dispositions prévues par le décret n°82-447 du 28 mai 1982 relatif à l'exercice du droit syndical dans la fonction publique et de sa circulaire ministérielle d'application et du décret n°86-592 du 18 mars 1986 portant code de déontologie de la police nationale, notamment en son article 11 ». On constate donc que contrairement au Cameroun où les fonctionnaires de la sûreté nationale ne peuvent adhérer aux associations syndicales, les policiers français jouissent de ce droit.

En Afrique de l'ouest pour finir, certains pays francophones suivent l'exemple du modèle français. C'est ainsi qu'au Mali, la loi portant statut des fonctionnaires de la police nationale167garantit la liberté syndicale aux fonctionnaires de la police nationale. En effet, l'article 34 dispose que : « les fonctionnaires de police jouissent du droit syndical. Les organisations syndicales de la Police Nationale peuvent ester en justice devant toute juridiction. Outre la formalité du dépôt légal, toute organisation syndicale de fonctionnaires de police est tenue d'effectuer, dans les deux mois de sa création, le dépôt de ses statuts et de la liste de ses administrateurs auprès du Ministre chargé de la sécurité et du Directeur Général de la Police Nationale. Pour les organisations syndicales déjà existantes, la communication des statuts devra être effectuée auprès des mêmes autorités dans les deux mois qui suivent la publication de la présente loi. Toute modification des statuts et de la composition des bureaux devra être communiquée dans les mêmes conditions ». De même, au Benin, la loi portant statut spécial des forces de sécurité publique168 dispose en son article 32 que : « les fonctionnaires des forces de sécurité publique et assimilées jouissent de la liberté syndicale, d'opinion, de croyances philosophiques, religieuses et politiques. La jouissance de ces droits s'exerce en conformité avec l'obligation de réserve imposée par leur état de fonctionnaire des forces de sécurité publique et assimilées et ne doit, en aucun cas, porter atteinte à l'exécution du service public d'urgence et à l'intérêt général. L'Etat assure les conditions matérielles nécessaires à la jouissance de ces droits ». Ceci va également à contrepied de du droit camerounais. Une question se pose, qu'en est-il de l'interdiction de droit de grève ?

166 Arrêté du 22 juillet 1996 portant règlement général d'emploi de la police nationale.

167 Loi n°02-056/DU 16 décembre 2002 portant statut des fonctionnaires de la police nationale.

168 Loi n° 2015-20 portant statut spécial des personnels des forces de sécurité publique et assimilées

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PARAGRAPHE II : L'INTERDICTION DU DROIT DE GREVE

Le droit de grève comme les droits politique et syndical est un droit qui est un droit garanti aux fonctionnaires. Seule la discipline de certains corps comme les corps des forces de l'ordre fait naître l'obligation de ne pas l'exercer. Ce qui précède amène à voir en cette obligation, une prohibition. Ainsi, en France, en application de la jurisprudence du Conseil d'Etat, 2 grandes catégories d'agents peuvent se voir ordonner de demeurer à leur poste en cas de grève : les personnels d'autorité qui participent à l'action gouvernementale et les agents assurant le fonctionnement des services indispensables à l'action gouvernementale, à la garantie de la sécurité physique des personnes ou à la conservation des installations et du matériel. Les limitations du droit de grève (mise en place d'un service minimum) sont effectuées par le pouvoir règlementaire sous le contrôle du juge administratif. Pour mieux appréhender cette obligation, nous parlerons de la consistance de l'interdiction (A) et les motifs de l'interdiction (B).

A-La consistance de l'interdiction du droit de grève.

Pour mieux comprendre l'interdiction du droit de grève, il convient de commencer par une définition du concept de grève. La grève est la cessation de travail concertée pour la défense d'intérêts communs à un groupe professionnel, à des salariés169. Sur le plan juridique, il s'agit d'une interruption concertée et collective du travail par des salariés afin d'assurer le succès de leurs revendications (chez les agents contractuels, elle suspend le contrat de travail sans le rompre, sauf faute lourde imputable au salarié)170. Au Cameroun, cette interdiction ne concerne pas seulement la grève (1) mais également ses corollaires (2).

1-L'interdiction du droit de grève proprement dit.

L'interdiction du droit de grève pour être mieux comprise doit être distinguée de la limitation du droit de grève. En France, certains corps de fonctionnaires ont n'ont pas d'interdiction d'exercer le droit de grève mais cet exerce est plutôt limité. C'est ainsi qu'on peut citer à titre d'illustration, les fonctionnaires du secteur sanitaire : à l'hôpital, la protestation a toutes les chances d'être symbolique puisque les personnels déclarés grévistes peuvent être réquisitionnés pour garantir la continuité des soins, les étudiants internes aussi peuvent être mis à contribution depuis le décret du 20 juin 1961 ; autre exemple, dans l'audiovisuel public : ces fonctionnaires sont tenus d'organiser un service minimum côté

169 Dictionnaire universel, 18e édition, EDICEF, 2008.

170 Cornu (G), vocabulaire juridique, PUF, 2011.

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rédaction « comprenant notamment les informations nationales et régionales » pendant la grève, indique la loi du 30 septembre 1986 sur la communication audiovisuelle.

Pour ce qui est de l'interdiction d'exercice du droit de grève proprement dite, elle concerne les corps des fonctionnaires de la sûreté nationale, de l'administration pénitentiaire etc...En effet, le décret portant statut spécial du corps des fonctionnaires de la sûreté nationale171dispose en son article 31 que «l'exercice du droit de grève est incompatible avec la qualité de fonctionnaire de la sûreté nationale ». De même, en France, la loi portant statut général des militaires172 dispose en son article 6 que : « l'exercice du droit de grève est incompatible avec l'état militaire. L'existence de groupements professionnels militaires à caractère syndical ainsi que l'adhésion des militaires en activité de service à des groupements professionnels sont incompatibles avec les règles de la discipline militaire. Il appartient au chef, à tous les échelons, de veiller aux intérêts de ses subordonnés et de rendre compte, par la voie hiérarchique, de tout problème de caractère général qui parviendrait à sa connaissance ». Pour ce qui est des fonctionnaires de police, la loi du 29 septembre 1948 précise que : toute cessation concertée du service...pourra être sanctionnée » ; par conséquent, ces fonctionnaires ne peuvent se mettre en grève.

En outre, en Afrique de l'ouest et au Bénin où tous les fonctionnaires de la sécurité publique jouissent de la liberté syndicale, le droit de grève n'y est pas reconnu à ces fonctionnaires comme le dispose la loi en ces termes : «les fonctionnaires des forces de sécurité publique et assimilées sont tenus d'assurer leurs missions en toute circonstance et ne peuvent exercer le droit de grève »173. De même en Côte d'ivoire, pour ce qui est du corps des magistrats, au terme de l'article 16 alinéa 3 du statut de la magistrature : « est également interdit au magistrat toute action concerté de nature à arrêter ou entraver le fonctionnement des juridictions ».Il résulte de cet article que les magistrats n'ont pas le droit de grève. Ils ne peuvent par une action concertée décider d'arrêter le travail. Cette interdiction du droit de grève contient implicitement celle de constituer en syndicat puisque le droit de grève est l'un des moyens d'action de revendication des syndicats. Cependant, avec l'avènement de la nouvelle constitution ivoirienne du 1eraoût 2000 qui reconnait ce droit à tout travailleur, les magistrats peuvent également pour des revendications professionnelles arrêter le travail tout en conservant un service minimum. On voit qu'ils vont dans le même sens que le Cameroun.

171 Décret n°2012/539 du 19 novembre 2012 portant statut spécial du corps des fonctionnaires de la sûreté nationale.

172 Loi n°2005-270 du 24 mars 2005 portant statut général des militaires.

173 Article 25 de la loi n° 2015-20 portant statut spécial des personnels des forces de sécurité publique et assimilées.

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Au Mali par contre, la loi permet aux fonctionnaires de police de se mettre en grève, bien qu'elle soit limitée : «le droit de grève est garanti aux fonctionnaires de police. Toutefois, pour les besoins de sûreté et de continuité de l'Etat, il ne peut s'exercer dans les services de police ci-après :- les unités d'intervention chargées du maintien d'ordre, de la protection des hautes personnalités et la brigade anti-criminalité ;- les unités de circulation routière ;- les services de transmissions et télécommunications ;- les services spécialisés de renseignements généraux ; - les unités de police des frontières. L'exercice du droit de grève ne peut en aucun cas s'étendre aux élèves des centres de formation et aux stagiaires de la Police Nationale »174 . Au Cameroun, l'interdiction touche même les corollaires de la grève.

2-L'interdiction des corollaires de la grève.

En fait, le droit camerounais est tellement préventif et prône la stricte discipline au point où il interdit explicitement les corollaires de la grève, contrairement aux autres législations qui la font implicitement ou se contentent simplement de formuler l'obligation d'obéissance hiérarchique pour éviter les corollaires de la grève. Le statut particulier des fonctionnaires de l'administration pénitentiaire par exemple dispose que : « les fonctionnaires de l'Administration Pénitentiaire ne peuvent se mettre en grève; de même tout soulèvement et mutinerie est interdit »175. On entend par mutinerie, tout mouvement de révolte qui consiste à cesser d'obéir aux ordres et à entreprendre une action insurrectionnelle. Le soulèvement quant à lui est un mouvement de rébellion. On comprend dont que la discipline dans ces corps est également liée à l'obligation d'obéissance hiérarchique. Il revient maintenant à chercher les motifs de ces interdictions.

B-Les motifs des interdictions.

Les motifs de ces interdictions sont liés à la profession qu'exerce le corps de fonctionnaire en question. En effet, deux raisons majeures permettent de justifier ces interdictions qui font partie des obligations de solidarité dans la discipline du corps. Nous avons d'une part la nécessité de continuité du service public (1) et d'autre nous avons des raisons d'ordre public (2).

174 Article 36 d la loi n°02-056/DU 16 décembre 2002 portant statut des fonctionnaires de la police nationale.

175 Article 26 alinéa 6 du décret n°2010/365 du 29 novembre 2010 portant statut spécial du corps des fonctionnaires de l'Administration Pénitentiaire.

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1-La nécessité de continuité du service public.

L'un des principes du service public consiste dans l'assurance de sa continuité. L'obligation d'assurer un service public continu est maintenue en cas de grève. L'administration doit pouvoir assurer, en cas de grève, la continuité des missions du service public indispensables à la satisfaction des besoins essentiels des usagers et de la puissance publique. L'exercice du droit de grève peut être limité par la loi pour certaines catégories d'agents publics, ils sont alors privés de manière permanente du droit de grève. En France par exemple nous avons les compagnies républicaines de sécurité, les militaires, les magistrats de l'ordre judiciaire, les personnels des services de l'administration pénitentiaire. Le principe de continuité du service public est à l'origine de cette interdiction. En effet, l'idée est que la discontinuité nuirait à la vie en société. Par conséquent, toute méconnaissance de cette obligation entraine une sanction disciplinaire en raison du manquement à cette obligation. A côté de cette raison de continuité du service public, il y a des raisons d'ordre public.

2-Les motifs d'ordre public.

Avant de présenter les motifs dont il est question, il convient de commencer par définir le concept d'ordre public. L'ordre public est, pour un pays donné, à un moment donné, l'état social dans lequel la paix, la tranquillité et la sécurité publique ne sont pas troublées. Au sein d'un ordre juridique, ce sont des termes servant à caractériser certaines règles qui s'imposent avec une force particulière et par extension à désigner l'ensemble de règles qui présentent ce caractère176.

Le maintien de l'ordre public fait partie des obligations des fonctionnaires des corps des forces de l'ordre ; ce qui fait que la grève en tant que cessation d'activité mettrait un terme à l'activité de maintien de l'ordre public. C'est dans ce sens et dans le but de préciser quelles sont les missions des fonctionnaires des corps des forces de l'ordre que le décret portant statut spécial des fonctionnaires de la sûreté nationale177 par exemple dispose en son article 34 que : « le fonctionnaire de la sûreté nationale concourt au maintien de l'ordre public, il a le devoir d'intervenir de sa propre initiative pour porter aide et assistance à toute personne en danger et pour empêcher tout acte ou agissement de nature à troubler l'ordre public... ». De même, l'article 21 du même décret dispose que : « le fonctionnaire de la sûreté nationale doit en tout temps, qu'il soit en service ou non, s'abstenir de tout acte, geste, parole ou manifestation quelconque de nature à ...ou à troubler l'ordre public ». Une grève des personnels des forces de l'ordre entrainerait un désordre total car l'appareil de répression de la

176 Cornu (G), vocabulaire juridique, PUF, 2011.

177 Décret n°2001/065 du 12 mars 2001 portant statut spécial du corps des fonctionnaires de la sûreté nationale.

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puissance public serait inactif ; une augmentation de la criminalité, un désordre en milieu carcéral et peut-être même des attaques terroristes. C'est sans doute pour cette raison que statut général des militaires français178 dispose en son article 6 que : «l'exercice du droit de grève est incompatible avec l'état militaire... ». Ceci montre à perfection que la grève paralyserait l'activité de maintien de l'ordre public.

En somme, il était question pour nous de parler des obligations de solidarité dans la discipline du corps. Dans cette opération, nous avons trouvé parmi ces obligations deux catégories dans le sens de la définition qu'offre Michel Virally dans son article intitulé « le phénomène juridique ». Ainsi ces deux catégories sont évidemment celle sous la forme positive, c'est-à-dire le prescrit qui enjoint, dans le cas d'espèce au fonctionnaire faisant partie du corps, le port de l'uniforme et dans certains cas même le port d'arme et celles sous la forme négative, c'est-à-dire les interdictions que les interdictions d'adhérer à des groupements et associations à caractère politique ou syndical et l'interdiction du droit de grève. Cela nous a permis de constater que la discipline de ces corps était souvent plus stricte au Cameroun que dans d'autre, et parfois même, la législation étrangère était contraire à celle du Cameroun, ce qui justifie l'adage latin : ubi societas ibi jus. La réglementation camerounaise est donc particulière à cause des particularités de la société camerounaise, ce qui entraine donc des différences dans les obligations de solidarité du corps.

178 Loi n° 2005-270 du 24 mars 2005 portant statut général des militaires

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CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE

En définitive, il s'est agi pour nous de recenser dans cette articulation, les obligations de solidarité au corps. Nous les avons regroupées en deux catégories : les obligations de solidarité dans l'éthique du corps, c'est-à-dire celles qui ont trait aux principes de base de l'action juste et les règles de la conduite179 et les obligations de solidarité dans la discipline du corps, c'est-à-dire celles qui ont trait à l'ensemble des règles et devoirs imposés aux membres d'un corps ou d'une profession, ou attachés à l'exercice d'une fonction180 . L'on a pu constater qu'il s'agissait d'obligations particulières ou même spécifiques car elles sont liées à l'appartenance du fonctionnaire au corps181 qui est débiteur de l'obligation. Ainsi le fonctionnaire qui n'appartient pas au corps en question n'est pas lié par l'obligation. C'est dans ce sens que l'administration ne peut exiger à un fonctionnaire de l'enseignement secondaire par exemple de porter un uniforme car il n'est pas régi par le statut particulier qui exige cette prestation. Ce qu'il faut retenir, c'est que le corps et plus précisément l'appartenance à celui-ci est à l'origine de ces obligations. Les fonctionnaires dudit corps doivent donc être solidaires dans la prestation de ces obligations non seulement parce qu'ils en sont tous débiteur mais également pour bon fonctionnement du corps et plus encore de la société à laquelle ils appartiennent. Ce qui implique donc pour chacun des membres du corps la responsabilité totale d'un engagement commun, une dépendance mutuelle d'intérêts. A côté de ces obligations de solidarité au corps qu'on peut qualifier de spécifiques du fait de leurs caractéristiques propres et exclusives, les fonctionnaires camerounais ont également des obligations à caractère général que sont les obligations de responsabilité du service.

179 Chapman, (R.A.) "L'Ethique dans la Fonction Publique", Presse de l'Université d'Edimbourg, Edimbourg éd. 1993

180 Cornu (G), vocabulaire juridique, PUF, 2011.

181 Article 5 (nouveau) du statut général de la fonction publique camerounais : « Le corps est l'ensemble des fonctionnaires exerçant une fonction spécifique dans un secteur d'activité déterminé et régi par les mêmes dispositions réglementaires ».

DEUXIEME PARTIE :

LES OBLIGATIONS DE

RESPONSABILITE DU

SERVICE

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Les obligations du fonctionnaire, comme précédemment dit dans notre analyse, impliquent également une responsabilité du fonctionnaire du service qui lui est confié. C'est dans ce sens que nous traiterons dans cette seconde partie de notre analyse aux obligations de responsabilité du service.

Le service ici, n'est pas synonyme de faveur ou d'aide mais plutôt l'ensemble des devoirs envers l'Etat, la société182. Il s'agit du service public, c'est-à-dire, toute activité destinée à satisfaire un besoin d'intérêt général et qui en tant que telle, doit être assurée ou contrôlée par l'administration, parce que la satisfaction continue de ce besoin ne peut être garantie que par elle. Ces termes désignent également un ensemble organisé de moyens matériels et humains mis en oeuvre par l'Etat ou une collectivité publique, en vue de l'exécution de ses tâches183. Cette dernière définition du service public est synonyme d'administration au sens formel, c'est pourquoi dans notre travail, nous parlerons du service en tant qu'activité, en tant que tâche.

Le terme « responsabilité » comme celui de « service » est polysémique en littérature tout comme en droit. En droit constitutionnel, il fait référence par exemple dans un régime parlementaire, à l'obligation faite à l'ensemble, au gouvernement de démissionner quand le parlement lui retire sa confiance. Notre travail se situant dans la sphère du droit administratif, nous ne retiendrons pas cette définition. En fait, le terme responsabilité dérive de responsable, qui lui-même dérive du latin responsus, participe passé de respondere qui signifie : se porter garant, répondre. Dans un sens général en droit, la responsabilité est l'obligation de répondre d'un dommage devant la justice et d'en assumer les conséquences civiles, pénales, disciplinaires etc.184Dans le cas d'espèce, le fonctionnaire se porte garant des tâches qui lui sont confiées. Après cette définition des concepts, une question mérite d'être posée pour appréhender cette seconde articulation de notre analyse : quelles sont les obligations de responsabilité du service? Les obligations de responsabilité du service peuvent être regroupées en deux catégories : l'obligation de servir (chapitre 1) et des obligations de confidentialité (chapitre 2).

182 Dictionnaire le Robert de poche, 2011.

183 Lexique des termes juridiques, 18e édition, Dalloz, 2011.

184 Cornu (G), vocabulaire juridique, PUF, 2011.

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CHAPITRE I :

L'OBLIGATION DE SERVIR

L'obligation de servir est, on peut le dire, la première obligation des agents de l'Etat. Ces derniers sont censés exécuter des missions de service public185. Pour cela, ils doivent servir l'intérêt général. Au Cameroun, elle est affirmée clairement pour la première fois par le décret portant statut de la fonction publique fédale186 qui l'a formulée e son article 31 en ces termes : « Appartenir à la fonction publique fédérale est une charge et un honneur, non pas un droit ou un privilège. En conséquence, les fonctionnaires fédéraux sont soumis à l'obligation de servir les intérêts généraux de la république fédérale du Cameroun et de consacrer à cette tâche, la totalité de leurs activités professionnelles. Ils doivent exercer leurs fonctions avec loyalisme, diligence et efficacité, impartialité et désintéressement dans le respect des règles constitutionnelles et l'obéissance aux lois et règlements en vigueur. Ils bénéficient de la protection des lois et notamment de celles prévues par la législation pénale ». Son amélioration dans la formulation n'a pas pour autant conduit à sa disparition car elle constitue la source de toutes les autres obligations du fonctionnaire.

La durée du service varie selon qu'il s'agit d'un fonctionnaire civil ou d'un fonctionnaire appartenant à un corps des forces armées. De toutes les façons, les fonctionnaires sont recrutés pour servir l'intérêt général. Un fonctionnaire pourrait dire que l'intérêt général est pour lui une notion vague, une notion réservée aux philosophes et aux idéologues. Il aura raison dans une certaine mesure. Une approche marxiste, par exemple, montrerait sans trop de difficultés que l'intérêt général est défini par une oligarchie qui d'abord fait primer ses intérêts avant ceux du plus grand nombre. L'intérêt général se réduit alors à une simple tentative de "justification idéologique" des politiques publiques. Cette question intéresse le citoyen qu'est aussi un

185 Mission de service public : notion dégagée par la jurisprudence du conseil d'Etat dans la première moitié du 20e siècle, mais d'appellation récente, et dont on trouve des manifestations aussi bien, par exemple en matière de travaux publics, de fonction publique que de contrats administratifs ou d'actes unilatéraux. Cette qualification est décernée de manière prétorienne par le juge à des activités présentant un caractère d'intérêt général, assumées même par des organismes privé ou des particuliers (lexique des termes juridiques, bis).

186 Décret n°66/DF/53 du 03 février 1966 portant statut général de la fonction publique fédérale.

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fonctionnaire. Mais, et pour faire vite, elle ne concerne pas le fonctionnaire es qualité. Le juriste dira que l'intérêt général est une véritable notion juridique, c'est-à-dire "un point de rencontre entre une réalité sociale et un régime juridique"187. Une fois devenu une notion juridique, l'intérêt général s'impose au fonctionnaire.

Dans sa mission de servir l'intérêt général, le fonctionnaire a non seulement l'obligation de se consacrer à ses fonctions (section I) mais également l'obligation d'obéissance hiérarchique (section II).

SECTION I : L'OBLIGATION DE SE CONSACRER A SES FONCTIONS.

L'obligation de se consacrer à ses fonctions débouche sur le principe de l'exclusion de tout cumul d'activités professionnelles : c'est surtout au cumul d'un emploi public avec une activité privée lucrative que ce rapporte la réglementation des cumuls (paragraphe II). Il convient de faire remarquer que l'obligation de se consacrer à ses fonctions implique avant toute chose, l'exercice personnel et continu de ses fonctions (paragraphe I).

PARAGRAPHE I : L'EXERCICE PERSONNEL ET CONTINU DES

FONCTIONS.

L'exercice personnel de ses fonctions par le fonctionnaire signifie l'occupation de l'emploi auquel il est affecté et nommé. Il doit exercer ses fonctions de manière continue et personnelle. L'agent est tenu d'exercer les tâches qui découlent de son emploi. Il doit être présent à son service, respecter les horaires fixés et exercer effectivement le service. L'exercice personnel de ses fonctions par le fonctionnaire a pour seule exception, l'autorisation légale de délégation. C'est dans cette logique que nous traiterons de la consistance de l'exercice personnel (A) et exclusif des fonctions (B).

A-L'exercice personnel de son emploi par le fonctionnaire.

« Tout fonctionnaire quelque soit son grade dans la hiérarchie est responsable de l'exécution des tâches qui lui sont confiées... », disposait déjà le statut général de la fonction publique fédérale188. Ceci montre que l'obligation d'exercice personnel des fonctions existait déjà chez le fonctionnaire camerounais depuis un demi-siècle aujourd'hui. Cette obligation qui est d'une importance capitale pour l'activité administrative a été réaffirmée chez le

187Conseil d'État, Rapport public 1999, L'intérêt général, éd. La Documentation française 1999, p. 271 188 Décret n°66/DF/53 du 03 février 1966 portant statut général de la fonction publique fédérale.

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fonctionnaire camerounais par le statut général actuellement en vigueur (1). Toutefois, il est possible que le titulaire du poste délègue ses compétences selon les procédures de la réglementation en vigueur(2).

1-La règle : l'exercice personnel des fonctions.

Au Cameroun, tout fonctionnaire doit exercer personnellement ses fonctions. La réglementation est claire là-dessus. En effet, le statut général de la fonction publique dispose en son article 36 que : « le fonctionnaire est tenu d'assurer personnellement le service public à lui confier et de s'y consacrer en toute circonstance avec diligence, probité, respect de la chose publique et sens de responsabilité... »189.Ainsi, l'exercice des fonctions par le fonctionnaire apparait comme un contrat intuitu personae entre l'administration et le fonctionnaire. Cela doit être dû au fait que les fonctionnaires suivent une formation professionnelle après leur admission par concours dans la fonction publique. De cela, il découle que le fonctionnaire ne confier l'exercice de ses fonctions à un tiers car ce dernier serait incompétent, n'ayant pas suivi la formation permettant d'exercer de telles fonctions. De plus, le fonctionnaire perçoit une rémunération pour l'exercice de ses fonctions, ce qui fait en sorte qu'il est tenu de servir personnellement l'administration en contrepartie de ladite rémunération. Il est à noter que le Cameroun n'est pas le seul pays à imposer cette obligation au fonctionnaire ; cette obligation figure dans la plupart des pays francophones.

En France, pour commencer, selon es articles 12 et 28 de la loi N° 83-634 du 13 juillet 1983190, la nomination dans un grade ne peut avoir d'autre objet que de pourvoir à un emploi vacant et de permettre à son bénéficiaire d'exercer les fonctions correspondantes ; la rémunération respectant la règle du service fait. Il en ressort pour tout fonctionnaire une obligation de servir renforcée par l'article 28 de la même loi qui énonce que tout fonctionnaire, quelque soit son rang dans la hiérarchie, est responsable de l'exécution des tâches qui lui sont confiées. En Afrique centrale, pour continuer, le statut général de la fonction publique gabonais191 va dans le même sens que la loi française, lorsque son article 42 dispose que : « l'agent public est tenu : - de remplir personnellement les charges de son emploi, sans préjudice des délégations consenties conformément à la réglementation en vigueur... ». Le législateur tchadien ne fait pas mieux, lorsque le statut général de la fonction publique tchadien dispose en son article 20 que : « tout fonctionnaire est tenu d'être présent et ponctuel à son

189 Décret n° 94/199 DU 07 OCTOBRE 1994 portant statut général de la fonction publique de l'Etat modifié et complété par le décret n° 2000/287 DU 12 octobre 2000

190 Loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, portant droits et obligations des fonctionnaires, dite Loi Le Pors

191 Loi n°001/2005 du 4 février 2005, portant Statut général de la Fonction publique

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poste de travail, d'assurer par lui-même les tâches qui lui sont confiées et de respecter toutes les obligations que lui impose l'exercice de ses fonctions »192. En Afrique de l'ouest pour finir, les fonctionnaires sont tenus comme leurs homologue français et d'Afrique centrale à exercer personnellement leurs fonctions. A titre d'exemple, le statut général de la fonction publique malien dispose que : « Le fonctionnaire a le devoir d'occuper le poste qui lui est confié. Il est tenu de respecter ponctuellement l'horaire de travail et d'accomplir personnellement et avec assiduité toutes les obligations que lui impose l'exercice de ses fonctions »193.Le Sénégal va dans le même sens. Toutefois, il peut arriver que le titulaire de la compétence ne soit pas celui qui l'exerce. Cette situation se produit de manière régulière en cas de délégation.

2-L'exception : la délégation de compétence.

La délégation est un processus qui consiste pour le titulaire de la compétence de confier son exercice à une autre personne. Selon le vocabulaire juridique, il s'agit de l'opération parfois permise par le droit par laquelle le titulaire de la fonction (ou plus rarement, l'autorité qui le contrôle) en transfère l'exercice à une autre personne194 . La délégation de compétence dont il est question ici, a un double visage car on y distingue la délégation de pouvoirs et la délégation de signature.

La délégation de pouvoirs est un transfert à une autorité délégataire désignée par sa fonction d'une compétence que le délégant ne pourra plus exercer tant que la délégation n'aura pas été rapportée195. Dans la délégation des pouvoirs, le délégataire agit es-calite (au titre de l'autorité administrative désormais titulaire de la compétence) et les actes qu'il prend, engagent sa personne. Autrement dit, lorsqu'il prend une décision, c'est sa personne qui est engagée et non celle du délégant. La délégation de signature quant à elle est, celle qui, investissant personnellement un délégataire, n'entraine pas le dessaisissement du délégant (ce dernier pouvant continuer à prendre lui-même les décisions dans les matières, objet de la délégation)196. En matière de délégation de signature, le délégataire agit intuitu personae, c'est-à-dire qu'il décide en lieu, place et nom du délégant. Ce n'est donc pas sa personne qui est engagée mais plutôt celle du délégant. C'est la raison pour laquelle, sa signature est précédée de la mention « par ordre et délégation ». La délégation de signature et la délégation de pouvoirs ont des caractères communs qui sont les suivants :

192 Voir loi 01-017 2001-12-31 PR portant statut général de la fonction publique

193 Voir articles 12 et 13 de la Loi n°02-053 DU 16 décembre 2002 portant statut général des fonctionnaires.

194 Cornu (G), vocabulaire juridique, PUF, 2011.

195 Cornu (G), ibid.

196 Cornu (G), ibid.

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-Une délégation ne se fait pas arbitrairement car elle doit être prévue par un texte, c'est-à-dire pas de délégation sans texte d'habilitation préalable ;

-la délégation doit être partielle, expresse et faire l'objet de publicité. Dans les deux types de délégation, c'est la situation dans laquelle le titulaire de la compétence transfère momentanément et partiellement ses attributions à une autre autorité à l'effet de contourner son absence au service et personnellement, il doit les exercer de façon continue.

B-L'exercice continu des fonctions.

Parmi les principes du service public, figure le principe de continuité du service public. Ainsi, l'administration exerçant une mission d'intérêt général, cette dernière ne doit pas connaitre des périodes de vacuité, ce qui nuirait énormément aux usagers du service public. Le fonctionnaire est donc tenu d'exercer ses fonctions de façon continu afin d'assurer le fonctionnement régulier du service. C'est dans ce but que le Cameroun comme les autres Etats, exige à ses fonctionnaires de servir de façon continu. Toutefois, la continuité du service dans les administrations camerounaises fait partie des faiblesses de ladite administration à cause du non-respect de cette obligation. C'est dans cette optique que nous traiterons de la consistance du principe de continuité (1) avant de nous intéresser à ces violations au Cameroun(2).

1-La consistance du principe de continuité.

Le principe de continuité du service public est l'un des plus importants à côté de la gratuité, de la neutralité et de la laïcité. La continuité est le caractère de ce qui n'est pas interrompu dans le temps197. En France, contrairement au Cameroun, la continuité est un principe à valeur constitutionnelle soutenu par l'idée selon laquelle le service ne s'interrompt pas, sous réserve de l'exercice du droit de grève, lui-même principe à valeur constitutionnelle. La continuité est le fonctionnement ponctuel et régulier du service public, qui s'apprécie par rapport à l'objet du service. Elle sous-tend tout un ensemble d'obligations professionnelles198: obligation d'assurer à titre exclusif et personnel sa fonction, obligation d'assurer le libre accès au service public, etc. Le principe de continuité se justifie par la continuité de l'État qu'il convient de préserver à tout prix. L'évocation de la continuité sert donc traditionnellement d'abord l'Etat et les gestionnaires des services publics, lesquels l'opposent selon les hypothèses

197 Dictionnaire le Robert de poche, édition 2012.

198Voir Taillefait (A), Déontologie et responsabilité disciplinaire, précité ; Fortier (Ch.), Le défi de la continuité du service public de l'éducation nationale : assurer les remplacements, revue L'actualité juridique droit administratif 2006, p. 1822

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aux agents ou aux usagers. La présentation est usuelle et l'idée est d'ailleurs si bien implantée qu'elle justifie également une attitude restrictive du juge sur le terrain de l'indemnisation pour faits de grève constituant une rupture de continuité du service public. En France l'aspiration des citoyens à la continuité des services publics est en effet exploitée, voire instrumentalisée par la puissance publique dans le cadre du débat récurrent sur le droit de grève des fonctionnaires et du service minimum. Il s'est même concrétisé dans deux lois successives visant à instaurer un « service minimum », d'abord dans les transports publics199, puis pour l'accueil dans les écoles. Au Cameroun, cette exigence du service minimum en cas de grève existe également mais ce qui attire l'attention, c'est le non respect du principe de continuité dans notre pays.

2-Le principe de continuité au Cameroun face aux retards et absentéisme.

Nous l'avons dit précédemment que lorsque le titulaire de la compétence est absent, il peut déléguer, si la règlementation le permet, ses fonctions à une autre autorité cela dans le but d'assurer la continuité du service public et éviter par là la vacuité dudit service. Le problème au Cameroun est que l'on a constaté tout d'abord que pour certains fonctionnaires, le retard est devenu la règle. Il y a des administrations où certains fonctionnaires ouvrent leurs bureaux aux environs de dix heures et exigent comme tous les autres (les fonctionnaires ponctuels) de prendre leur pause à treize heures. De même, l'autre constat est que certains sont souvent absents à leurs postes sans explications. Les communiqués radio-presse en témoignent.

L'on peut attribuer ce non-respect d'abord au système d'évaluation qui selon l'article 43 : « (1) Le supérieur hiérarchique compétent est tenu d'évaluer objectivement les personnels placés sous sa direction et son autorité. (2) Constitue une faute disciplinaire, le fait pour lui : - de s'abstenir d'évaluer ses collaborateurs ; - de les évaluer avec légèreté ou mauvaise foi »200. L'on peut dire que les supérieurs évalueraient leurs subordonnés avec légèreté vu que les absences inexpliquées perdurent. Ensuite l'absence d'une commission de contrôle qui s'assurerait que les fonctionnaires remplissent réellement leurs obligations peut également être évoquée. Et, pour que cette commission soit efficace, il faut qu'elle effectue, comme le fait l'administration fiscale, des visites inopinées. Enfin, le modèle de fiche d'évaluation ne serait pas encore pleinement opérationnel. Faute de mieux, la notation classique

199 Loi n° 2007-1224 du 21 août 2007 sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs.

200Décret n° 94/199 du 07 octobre 1994 portant Statut général de la Fonction publique de l'Etat modifié et complété par le décret n° 2000/287 du 12octobre 2000.

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continuerait à être pratiquée201. L'on espère qu'avec le nouveau système d'évaluation annoncé et qui serait déjà opérationnel au ministère de la fonction publique, son expansion aux autres structures publiques permettra de mettre fin à ce phénomène d'absentéisme et de retards. Le fonctionnaire n'est pas seulement tenu de servir personnellement, il est également tenu de servir exclusivement l'administration.

PARAGRAPHE II : L'EXERCICE EXCLUSIF DES FONCTIONS.

L'obligation de se consacrer à ses fonctions débouche directement sur le principe de l'exclusion de tout cumul d'activités professionnelles. C'est surtout au cumul d'un emploi public avec une activité privée lucrative que se rapporte la règlementation des cumuls. Un tel cumul est particulièrement susceptible de mettre à mal l'obligation de se consacrer à ses fonctions202. Toutefois, il faut préciser que l'interdiction de cumul n'est pas absolue. C'est dans cet ordre d'idée que nous nous intéresseront au principe d'interdiction des cumuls (A) avant de parler des différentes dérogations au principe (B).

A-Le principe d'interdiction des cumuls.

L'agent ne doit se consacrer qu'à sa fonction, il ne peut cumuler sa fonction ni avec un emploi privé ni avec une autre activité publique. Il est tenu d'assurer correctement son service. Afin d'éviter la « maladie du deuxième métier »203 , le premier devoir de celui-ci est d'assurer la primauté de l'intérêt général. Primauté de l'intérêt général sur les intérêts particuliers, sur les intérêts corporatistes, sur l'intérêt personnel. Le juge administratif a affirmé, dès 1926 qu'il appartenait à l'administration de veiller à ce que les fonctionnaires s'acquittent correctement et intégralement de leurs fonctions et notamment ne se livres pas à des opérations commerciales. En fait, le principe d'interdiction des cumuls ne concerne pas seulement le cumul d'une fonction publique avec une activité privée lucrative (1) mais également le cumul des pensions (2).

1-L'interdiction du cumul d'une fonction publique et d'une activité privée lucrative.

L'exercice exclusif des fonctions conformément au sens de l'adjectif « exclusif » empêche le fonctionnaire d'exercer une fonction ou une activité autre que celle que lui a confiée l'administration publique. En plus de cela, il doit assurer correctement cette fonction ; c'est pourquoi il ne doit pas avoir des intérêts de nature à compromettre son indépendance. La

201 Voir Tekam, fonction publique camerounaise, cité par Owona (J) in droit de la fonction publique camerounaise, l'Harmattan, 2011.

202 Voir Chapus (R), droit administratif général, tome 2, 15e édition, Montchrestien, 2001.

203 Vigouroux (Ch.), déontologie des fonctions publiques, Dalloz, "Connaissance du droit", 1995, p. 71 et s.

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règlementation étend l'interdiction au conjoint du fonctionnaire. C'est pour cette raison que l'article 37 du statut général de la fonction publique dispose que : « (1).- Il est interdit à tout fonctionnaire régi par le présent statut : a) d'avoir dans une entreprise ou dans un secteur soumis à son contrôle direct ou en relation avec lui, par lui-même ou par personne interposée et sous quelque dénomination que ce soit, des intérêts de nature à compromettre ou à restreindre son indépendance ; b) d'exercer, à titre personnel, une activité privée lucrative... (2) Lorsque le conjoint exerce à titre professionnel une activité privée lucrative, déclaration doit en être faite par le fonctionnaire au Ministre dont il relève. L'Administration prend, s'il y a lieu, les mesures propres à sauvegarder les intérêts du service ».

Ailleurs, en France plus précisément, les pouvoirs publics ont dès 1936, dans un contexte économique fortement marqué par le chômage, la règle du non-cumul afin de « prévenir le risque de non-dévouement exclusif au service »204. Le décret du 29 octobre 1936 relatif au cumul de retraites, de rémunérations et de fonctions modifié par la loi du 23 février 1963 est, en effet venu poser le principe d'interdiction, pour les fonctionnaires, des cumuls afin de dégager sur le marché du travail le grand nombre d'emplois. Jean Colin souligne, à juste titre que « dans l'exercice d'une activité privée, le fonctionnaire peut être tenté de faire passer son intérêt professionnel privé avant l'intérêt général du service dont il a la charge ». Aujourd'hui, l'article 25-1205, alinéa 1er du statut, modifié par l'article 20 de la loi de modernisation de la fonction publique dispose que « les fonctionnaires consacrent l'intégralité de leur activité professionnelle aux tâches qui leur sont confiées. Ils ne peuvent exercer à titre professionnel une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit ».

L'interdiction de cumul se justifie pleinement. Dans son rapport de 1999 sur le cumul d'activités et de rémunérations des agents publics, le Conseil d'Etat a rappelé que l'interdiction légale poursuivait trois objectifs : en premier lieu, assurer la bonne exécution du service public par l'assurance d'une disponibilité des agents ; en second lieu, contribuer à lutter contre le chômage en évitant que les agents publics qui, par définition, occupent déjà un emploi, n'exercent une activité qui pourrait être exercée par une personne privée d'emploi ; en troisième lieu, éviter la concurrence déloyale que pourraient porter certains agents publics, notamment les techniciens, à l'activité de certaines professions privées . La formule signifie, en premier lieu, que le fonctionnaire doit travailler à titre exclusif pour la collectivité publique qui l'emploie, pendant le temps de travail qui lui est imparti. En conséquence, il doit être présent

204 Voir Chapus (R), droit administratif général, tome 2, 15e édition, Montchrestien, 2001.

205 Article 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires

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sur son lieu de travail et rendre compte de ses activités. Cette obligation le soumet inévitablement au contrôle de sa hiérarchie, même pendant un congé de maladie206. Le fonctionnaire ne doit pas délaisser sa mission pour s'investir dans une entreprise privée. Ainsi, un inspecteur de police ne peut créer une pizzeria avec un prête-nom, engager du personnel et gérer l'établissement au détriment de la qualité de son travail207. L'interdiction ne se limite pas au cumul des fonctions, elle s'étend au cumul des pensions.

2-L'interdiction du cumul des pensions.

Au Cameroun, cette interdiction concerne les pensions versées par les personnes publiques aux fonctionnaires retraités. En effet, le cumul de deux ou plusieurs pensions de retraite, ou de l'une d'elles avec une rémunération versée par l'Etat, les collectivités et établissements publics avec toutes les indemnités perçues à l'exercice d'une fonction élective, est interdite au-delà de cinq fois le minimum vital, exception faite de la pension d'invalidité. Si cette limite est dépassée, la réduction est effectuée sur la pension de la retraite. Par conséquent, déclaration doit être faite au ministre des finances de l'embauche à un titre quelconque d'un pensionné de l'Etat par toute collectivité, tout service public ou parapublic qui le rémunère. De même, obligation est faite au fonctionnaire retraité de présenter chaque année civile, un certificat de fonction ou de non fonction établi par les autorités compétentes. En outre, restitution des sommes indûment perçues sans préjudice des sanctions pénales, et radiation des fraudeurs du grand livre des pensions208. L'interdiction existe également en France.

En France notamment, l'interdiction est tout à fait particulière. En effet, les articles L. 84 et suivants du code des pensions civiles et militaires encadrent le cumul d'une pension retraite avec des rémunérations d'activité. Les militaires sont souvent concernés par le rapport de 1999 du Conseil d'Etat en raison de leur départ à la retraite avancé par rapport aux autres fonctionnaires. Si le fonctionnaire retraité exerce une activité libérale qu'il ne peut cumuler avec sa pension, il est tenu de restituer les sommes indues, versées au titre de celle-ci209. En pareille hypothèse, le juge administratif doit déterminer si l'organisme au sein duquel le fonctionnaire percevant une pension exerce une activité libérale appartient à la liste des services ou organismes figurant à l'article 84 du code précité210. Le principe de l'interdiction des cumuls n'étant pas absolu, ce dernier comporte des dérogations.

206 Voir C.E 8 octobre 1990, Ville de Toulouse c/ Mirguet et TC 2 décembre 1991, «Mme Paolucci», Req. n° 2682.

207 CAA Lyon 3 octobre 1997, «Mme Yana», Req. n°94LY01823.

208 Voir Owona (J), droit de la fonction publique camerounaise, l'Harmattan, 2011.

209 Voir Aubin (E), mémento- droit de la fonction publique, 3e édition, 2007.

210 C.E. 20 juin 1997, De Larminat ; C.E. 4 juillet 1997, Urvoy ; C.E. 28 décembre 1992, Sarraute.

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B-Les dérogations au principe de l'interdiction des cumuls.

Le principe d'interdiction du cumul d'une fonction publique et d'une activité privée est objet de plusieurs dérogations parmi lesquelles la production d'oeuvres littéraires et scientifiques. En effet, l'histoire a montré le caractère opportun de cette dérogation car bon nombre de fonctionnaires sont de grands écrivains à l'exemple de Ferdinand Oyono, auteur du vieux nègre et la médaille, qui était également un haut fonctionnaire. Il convient tout de même de préciser ici et maintenant que les dérogations peuvent diverger d'un pays à l'autre. C'est pour cette raison qu'il convient de traiter des dérogations au non-cumul au Cameroun (1) avant de voir les dérogations à ce principe en droit français (2).

1-Les dérogations au principe de non-cumul au Cameroun.

Au Cameroun, le statut général 1994 de la fonction publique camerounaise ne retient pas la règle expresse du cumul. Toutefois, il entreprend de préciser quelles sont les activités qui ne font pas l'objet de l'interdiction du cumul d'une fonction publique et d'une activité privée lucrative. C'est à cet effet que l'article 37 dudit statut dispose que : « ...Cette interdiction ne s'applique pas à la production rurale, à la production d'oeuvre scientifique, littéraires ou artistiques aux enseignements donnés à titre complémentaire ou de vacataire... ». Le principe de l'interdiction soumet également à la déclaration des activités du conjoint comme précédemment dit et cite les activités qui sont exempts de la nécessité d'être déclarées. C'est à ce titre que le même article 37211 dispose que : « Le défaut de déclaration de telles activités constitue une faute professionnelle. Sont, toutefois, exempts de l'obligation de déclaration : a) Les prises de participation dans le capital des sociétés anonymes, des sociétés parapubliques privatisées ; b) Les prises de participation dans les activités à la production rurale, d'oeuvres scientifiques, littéraires ou artistiques ; c) Les enseignants donnés à titre complémentaire ou de vacataire. (3) Les modalités d'exercice des activités privées lucratives par les fonctionnaires sont fixées par décret du Premier Ministre ».Les dérogations sont les mêmes en droit français avec toutefois quelques particularités.

2-Les dérogations au principe en droit français.

En France, les fonctionnaires ne peuvent exercer à titre professionnel une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit. Ils peuvent toutefois être autorisés à exercer à titre accessoire, une activité, lucrative ou non, auprès d'une personne ou d'un organisme public ou

211 Article 37 du décret n° 94/199 du 07 octobre 1994 portant Statut général de la Fonction publique de l'Etat modifié et complété par le décret n° 2000/287 du 12octobre 2000.

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privé, dès lors que cette activité est compatible avec les fonctions qui leur sont confiées et n'affecte pas leur exercice. Le statut général de la fonction publique y prévoit quatre séries d'exceptions au principe de l'interdiction du cumul d'activités qui concerne principalement, dans les faits, les emplois supérieurs des trois fonctions publiques.

Il s'agit en premier lieu du fait que les fonctionnaires peuvent produire des oeuvres scientifiques, littéraires et artistiques et percevoir les droits d'auteurs afférents sans que l'on puisse leur opposer les dispositions du statut général. Il s'agit des activités pour lesquelles une autorisation préalable de cumul n'est pas requise : production d'oeuvres scientifiques, littéraires et artistiques. La jurisprudence exige que la production en cause ne soit pas accomplie pour le compte d'un employeur, c'est-à-dire qu'elle soit « autonome ». Si tel n'est pas le cas, l'autorisation doit être refusée212.

En deuxième lieu, les fonctionnaires peuvent fournir des prestations intellectuelles (consultations, expertises ou enseignements) qui sont regroupées sous le vocable de « consultance »213 . Celles-ci doivent être effectuées sur la demande d'une autorité administrative ou judiciaire ou sur autorisation du chef de service. Elles ne peuvent être dirigées contre une personne publique Les activités en question doivent toutefois concerner un domaine « ressortissant à leur compétence »214 . Un policier ne peut par exemple pas, enseigner le ski à titre lucratif215. Le judo ne peut également être enseigné, contre rémunération, par un militaire216.

En troisième lieu, les membres des corps enseignants, techniques ou scientifiques dont surtout, parmi eux, les enseignants-chercheurs peuvent exercer des professions libérales découlant de leurs fonctions. L'activité d'avocat est, ainsi, compatible avec celle d'enseignant-chercheur en droit avec toutefois une limite. Dans une telle hypothèse, un professeur de droit ou un maître de conférences ne peut plaider, le cas échéant, devant une juridiction étrangère ou internationale contre l'administration d'Etat ou locale.

En quatrième lieu, l'article 20 de la loi Sapin du 3 janvier 2001, relative à la résorption de l'emploi précaire et la modernisation du recrutement dans la fonction publique a créé une nouvelle exception à l'interdiction du cumul qui concerne exclusivement les « Berkaniens ». Le fonctionnaire peut également gérer librement son patrimoine personnel, familial et détenir

212 C.E. 28 septembre 1988, «Lemennicier», R. 316

213 Article 3 du décret-loi du 29 octobre 1936.

214 Article 7 du décret-loi du 29 octobre 1936.

215 C.E. 4 mars 1994, Coutellier.

216 C.E. 22 mai 1992, Giacona.

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librement des parts sociales. Le Conseil d'Etat autorisait déjà ce cumul (Avis CE 1949). L'obligation de servir a pour corollaire, l'obligation d'obéissance hiérarchique.

SECTION II: L'OBLIGATION D'OBEISSANCE HIERARCHIQUE.

L'administration centrale à laquelle appartient la fonction publique camerounaise, est organisée, comme toutes les autres administrations, de façon pyramidale. C'est dans ce sens que l'article 9 alinéa 1er du statut général de la fonction publique dispose que : «les fonctionnaires sont répartis en quatre (4) catégories désignées dans l'ordre hiérarchique décroissant par les lettres A, B, C, et D. - Les postes de travail de la catégorie A correspondent aux fonctions de conception, de direction, d'évaluation ou de contrôle.- Les postes de travail de la catégorie B correspondent aux fonctions de préparation, d'élaboration et d'application. - Les postes de travail de la catégorie C correspondent à des taches d'exécution spécialisée. - Les postes de travail de la catégorie D correspondent à des taches d'exécution courante ou de grande subordination. Pour qu'une telle organisation fonctionne bien, il est nécessaire que les subordonnées obéissent à leurs supérieurs hiérarchiques ». Pour qu'une telle organisation fonctionne bien, il est nécessaire que le fonctionnaire subordonné obéisse aux ordres que lui donne son supérieur hiérarchique (paragraphe I) mais il y a des circonstances où le subordonné est tenu de ne pas exécuter l'ordre du supérieur hiérarchique, ce qui fait naître pour le premier un devoir de désobéissance (paragraphe II).

PARAGRAPHE I: L'OBLIGATION D'OBEISSANCE HIERARCHIQUE PROPREMENT DITE.

L'organisation hiérarchisée de la fonction publique fait naître une relation de supérieur à subordonné qui est régie par l'obligation d'obéissance du dernier aux ordres du premier. L'obéissance est un fait ou action d'obéir, c'est-à-dire l'action de se soumettre à quelqu'un en se conformant à ce qu'il ordonne ou défend217. Il s'agit de soumettre à l'autorité de quelqu'un. Toute sa vie l'être humain apprend à obéir : que cela soit au sein de sa famille, dans le milieu scolaire, puis dans le monde du travail, la conformité à la norme sociale est fondamentale pour se développer et appartenir à un groupe. Obéir aux règles est une attitude indispensable pour la survie de la société car les comportements déviants peuvent entraîner l'éclosion de zones de non droit. Dans la fonction publique, la norme est particulièrement importante de part les missions d'intérêt général. Pour appréhender cette obligation, nous parlerons de la consistance

217 Dictionnaire le Robert de poche, 2011.

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de cette obligation (A) avant de nous intéresser aux conséquences du non respect de cette obligation (B).

A-La consistance de l'obligation d'obéissance hiérarchique.

L'administration attend des fonctionnaires: dévouement, désintérêt financier et soumission, on contrepartie d'une sécurité de l'emploi. Ainsi, cette soumission doit être une qualité du fonctionnaire et est parfaitement explicitée par le décret du 1er avril 1933 sur le statut des militaires : « les ordres doivent être exécutés sans hésitation, ni murmure ». L'obligation d'obéissance hiérarchique a deux volets qui créent des responsabilités à l'égard du non seulement subalterne (1) mais également à l'égard du supérieur hiérarchique (2).

1-Les responsabilités du subordonné issues l'obéissance hiérarchique.

L'obligation d'obéissance hiérarchique entraine subordination du fonctionnaire de rang inférieur. Engoncé dans le cocon de la hiérarchie, le fonctionnaire choisit le paravent confortable de l'anonymat et le parapluie satisfaisant de l'irresponsabilité. Grâce au principe de subordination, assuré de la cohésion dans le service, il se met à l'abri des pressions et des passions, confortant ses illusions d'autonomie et d'indépendance. Le fonctionnaire se laisse diriger, signifiant par l'absence d'initiatives et par le silence consentant sa soumission aux ordres, et par là, son souci de la discipline, gage d'un bon fonctionnement du service218. L'obéissance est alors l'expression d'une conscience de la subordination inhérente au système d'administration publique219 - légitimant ainsi le pouvoir de commandement, et non la force de domination, que détient toute autorité220.

Toutefois, le subordonné n'est pas totalement protégé par le parapluie de l'irresponsabilité. Cela se justifie par le fait qu'il est responsable des tâches qui lui sont confiées. C'est dans ce sens que 39 du statut général de la fonction publique221 dispose que « tout fonctionnaire est responsable de l'exécution des tâches qui lui sont confiées. A ce titre, il est tenu d'obéir aux instructions individuelles ou générales données par son supérieur hiérarchique dans le cadre du service, conformément aux lois et règlements en vigueur... ».

218 Voir Koubi (G), le for intérieur du fonctionnaire, P. 239.

219 Lochak (D.), "Le sens hiérarchique "in Psychologie et science administrative, C.U.R.A.P.P., P.U.F. 1985, pp. 147

220 Les supérieurs hiérarchiques peuvent être sanctionnés pour leur "manque d'autorité" :C.E. 26 juillet 1985 N. Joly, rec.244, cond .M. Rouxin A.J.D.A. 1985, pp. 734, rarement pour "autoritarisme":C.E. 5 juillet 1985 M. M... rec.223;ils le sont aussi pour "abus d'autorité" : cf.art.6 modifié du titre 1 SGFP- cf.loi n°91179 du 2 novembre 1992, J.O., 4 novembre 1992, à propos du "harcèlement sexuel".

221 Décret n° 94/199 du 07 octobre 1994 portant statut général de la fonction publique de l'Etat modifié et complété par le décret n° 2000/287 du 12octobre 2000.

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En France, l'article 28 de la loi du 13 juillet 1983, le devoir d'obéissance est ainsi formulé: « le fonctionnaire doit se conformer aux instructions de son supérieur hiérarchique »222. L'agent public doit obéir aux ordres et donc respecter sa hiérarchie. Ce devoir d'obéissance est renforcé par un devoir de réserve qui exige du fonctionnaire un comportement loyal, digne de bonnes moeurs, neutre et modéré : ce qui peut faire penser que l'on rentre dans la fonction publique comme on rentre dans les ordres religieux tant ces principes font référence aux valeurs judéo-chrétiennes de notre société. Le fonctionnaire est certes responsable des tâches qui lui sont confiées mais cela ne retire pas la responsabilité du supérieur, auteur des ordres.

2-Les responsabilités du supérieur hiérarchique issues de l'obligation d'obéissance.

Au Cameroun, la réglementation bien que posant le principe de responsabilité du subordonné pour les tâches qui lui sont confiées, ne privilégie pas pour autant, le supérieur hiérarchique. En effet, ce dernier demeure responsables des ordres qu'il donne, le subordonné n'est responsable que de l'exécution des tâches ; c'est-à-dire qu'il obéit juste au supérieur sans être responsable des conséquences de l'ordre sauf faute personnelle de sa part. C'est dans ce sens que l'alinéa 2 de l'article 39 précité dispose qu' «il n'est dégagé d'aucune des responsabilités qui lui incombent du fait de l'action de ceux qui sont placés sous ses ordres, son autorité ou son contrôle, sauf cas de faute personnelle commise par ces derniers ». De ceci, il découle que le supérieur hiérarchique a un devoir de passer les ordres qu'il donne au crible de l'éthique afin que ceux-ci n'entrainent pas sa responsabilité.

Le décret portant Code de déontologie des fonctionnaires de la sûreté nationale est encore plus clair en ce qui concerne les obligations du supérieur hiérarchique. Ainsi bien que les subordonnés lui doivent obéissance, ce dernier doit pour sa part, prêcher par l'exemple. C'est à ce titre que l'article 12 dudit code dispose que : «(1) le supérieur hiérarchique répond de la bonne application des instructions, ainsi que de la légalité des mesures prescrites et du contrôle de leur exécution. (2) Il doit prêcher par l'exemple en cultivant notamment :- la maîtrise de soit, le sens de la justice, la tolérance ; -la courtoisie, la fermeté, l'objectivité, l'impartialité ; - la probité et la rectitude morale »223. L'article 13 du même code poursuit en ces termes : « le supérieur hiérarchique est responsable des ordres qu'il donne, de leur exécution et de leurs conséquences. Il sert d'exemple à ses subordonnés à travers son action, sa rectitude morale, sa tenue vestimentaire et ses relations interprofessionnelles ».

222 Loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires

223 Décret n°2012/546 du 19 novembre 2012 portant Code de déontologie des fonctionnaires de la sûreté nationale.

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Ailleurs, en France par exemple, c'est le même état des choses. Le supérieur hiérarchique est responsable des tâches qu'il a confiées. En application des dispositions de l'article 28 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, tout agent public est sous les ordres de son chef de service et doit remplir la mission qui lui est confiée. « Tout fonctionnaire, quel que soit son rang dans la hiérarchie, est responsable de l'exécution des taches qui lui sont confiées. Il doit se conformer aux instructions de son supérieur hiérarchique, sauf dans le cas où l'ordre donné est manifestement illégal et de nature à compromettre gravement un intérrêt public. Il n'est dégagé d'aucune des responsabilités qui lui incombent par la responsabilité propre de ses subordonnés ». Si l'obligation d'obéissance est ainsi formulée, c'est parce que son non-respect expose à des conséquences pas agréables.

B-Les conséquences de la désobéissance aux ordres.

Le statut général de la fonction publique prévoit des sanctions à l'encontre des fonctionnaires qui ne remplissent pas leurs obligations. C'est ainsi que son article 92 dispose que «le fonctionnaire est soumis à un ensemble de règles et d'obligation dont la violation constitue une faute et l'expose à une sanction disciplinaire ». L'article 93 poursuit en disposant que « (1) La faute est professionnelle ou extra professionnelle. (2) La faute professionnelle est notamment un manquement par action, inaction ou négligence, aux devoirs et obligations auquel est assujetti le fonctionnaire. (3) La faute extra professionnelle résulte notamment d'un manquement, d'une attitude ou d'un comportement qui met en cause l'éthique et la déontologie professionnelle ou est de nature à apporter atteinte à la moralité ou à l'honorabilité de la fonction publique (4) lorsqu'il y a présomption de faute, l'Administration peut prendre des mesures conservatoires à l'encontre du fonctionnaire en cause. (5) Un décret fixe les règles de la procédure disciplinaire ». On en déduit que la désobéissance à un ordre est une faute professionnelle de par la définition que donne le statut.

En France, la désobéissance est à un ordre hiérarchique expose à deux conséquences précises : la retenue sur traitement (1) et la sanction disciplinaire(2).

1-La retenue sur traitement.

L'article 64 la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 pose la condition de la rémunération du fonctionnaire : " Les fonctionnaires régis par le présent titre ont droit, après service fait, à une rémunération fixée conformément aux dispositions de l'article 20 du titre premier du statut général."Si le service n'est pas fait, le traitement n'est donc pas versé. Du moins en théorie.

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L'obligation horaire de service de chaque corps de professeur est définie par le décret statutaire du corps ou les décrets qui y sont rattachés. Elle est de 27 heures pour les professeurs des écoles, de 18 pour les professeurs certifiés et les P.L.P. et de 15 heures pour les professeurs agrégés. La retenue sur traitement pour service non fait s'effectue selon la règle du trentième, qui fait que toute journée non travaillée, même en partie, est déduite du traitement versé pour la valeur d'un trentième du traitement mensuel. Si l'on considère que l'aide personnalisée aux élèves est due par le professeur des écoles chaque lundi, mardi, jeudi et vendredi pour une durée journalière d'une demi-heure, la retenue sur traitement d'un professeur des écoles qui s'abstient de remplir cette obligation de service peut donc légalement être de 4 trentièmes de son traitement par semaine et de 16 à 18 trentièmes pour un mois entier. Le service est aussi apprécié en termes de contenu, même si l'appréciation de cette dernière condition à remplir pour percevoir son traitement est plus difficile à réaliser. De ce fait, certains pourraient penser que l'exécution du service sous une autre forme ouvre droit au versement intégral du traitement. Mais, ce serait oublier que le contenu du service est défini par le chef de service, par les programmes, les notes de service, les circulaires et les directives et non par le fonctionnaire lui-même. A côté de cette conséquence, il y a également la sanction disciplinaire.

2-La sanction disciplinaire.

Si le non-respect de l'obligation de contenu, et de qualité, du service est rarement sanctionné par la voie de la retenue sur traitement, il aboutit généralement à une sanction disciplinaire. Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : Premier groupe : - l'avertissement ; - le blâme. Deuxième groupe : - la radiation du tableau d'avancement ; - l'abaissement d'échelon ; - l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de quinze jours ; - le déplacement d'office. Troisième groupe : - la rétrogradation ; - l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois mois à deux ans. Quatrième groupe : - la mise à la retraite d'office ; - la révocation224. Il est fort probable que, dans un premier temps, le fonctionnaire qui n'exécute pas son service en totalité ou tel qu'il a été défini, sera convoqué par sa hiérarchie pour recueillir ses explications et lui rappeler ses obligations de service. Mais, il ne faut pas douter que s'il perdure dans ses manquements, il fera très vite l'objet d'une sanction disciplinaire, qui selon les circonstances, ira au-delà de l'avertissement ou du blâme. On constate que ces sanctions figurent toutes et mots pour mots dans l'article 94 du statut général

224 Une jurisprudence assez abondante s'agissant du non respect de l'obligation d'obéissance hiérarchique, illustrée par CAA Nantes, 30 mai 2003, Duchemin, pour une révocation d'un brigadier chef d'une

police municipale refusant d'exécuter des tâches qu'il avait vocation à accomplir.

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de la fonction publique camerounais225. Ces sanctions ont pour rôle de permettre le renforcement de l'obligation d'obéissance hiérarchique mais il convient de dire ici et maintenant qu'elles ne sont pas mises en oeuvres lorsque le supérieur donne un ordre manifestement illégal car à ce moment là, le subordonné a un devoir de désobéissance.

PARAGRAPHE II : LE DEVOIR DE DESOBEISSANCE.

Le devoir d'obéissance cité précédemment, s'accompagne d'un devoir de désobéissance énoncé dans le même article. Face à « un ordre manifestement illégal et de nature à compromettre gravement l'intérêt public », un fonctionnaire a le devoir de désobéir. Il est important de bien peser chacun des mots qui énoncent ce principe et de ne pas le prendre à la légère car tout fonctionnaire est responsable de la tâche qui lui est confiée. Un refus de désobéir dans un cas nécessaire engage sa responsabilité ; un refus d'obéir en l'absence d'ordre manifestement illégal et de nature à compromettre gravement l'intérêt public engage de même sa responsabilité. Pour mieux appréhender le devoir de désobéissance, nous parlerons des motifs du devoir de désobéissance (A) avant de nous intéresser à la cause subjective du devoir de désobéissance (B).

A-Les motifs du devoir de désobéissance.

La désobéissance constitue comme nous l'avons précédemment dit une violation de l'obligation d'obéissance hiérarchique qui s'impose au fonctionnaire et ce dernier encourt des sanctions disciplinaires, ou des retenues sur le traitement, s'il s'agit d'un fonctionnaire français. Ainsi pour ne pas s'exposer à de telles conséquences qui seraient néfastes pour le fonctionnaire, ce dernier doit avoir des motifs de désobéissance qui l'exonèrent de ses responsabilités et qui sont acceptées par le juge. Nous retiendrons deux motifs du devoir de désobéissance : l'ordre manifestement illégal(1) et le droit de retrait des fonctionnaires (2).

1-Le devoir de désobéissance pour ordre manifestement illégal.

La plupart, pour ne pas dire toutes les réglementations francophones en matière de droit de la fonction publique s'accordent là-dessus, le fonctionnaire ne doit pas obéir à un ordre illégal. Le statut général de la fonction publique prévoit cette exception à l'obligation d'obéissance en ces termes : « toutefois, il a le devoir de refuser d'exécuter un ordre manifestement illégal et de nature à compromettre gravement l'intérêt public, sauf réquisition de l'autorité compétente établie dans les formes et procédures légales. Dans

225 Décret n° 94/199 du 07 octobre 1994 portant statut général de la fonction publique de l'Etat modifié et complété par le décret n° 2000/287 du 12octobre 2000.

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ce cas, sa responsabilité se trouve dégagée. Il en est de même lorsqu'il a exécuté des instructions légales et / ou données sous la forme légale »226. Cette obligation est très ancienne car elle a été instituée par le juge administratif français au profit des fonctionnaires et agents publics depuis 1944227.

En lisant les dispositions du statut et la jurisprudence, tout parait simple ; en effet, le fonctionnaire doit être très prudent lorsqu'il désobéit. La question intéressante est celle-ci : pourquoi a t-il fallu édicter une norme de désobéissance dans la fonction publique ? D'autant plus que cette norme est difficile à comprendre donc à mettre en oeuvre : qu'est-ce qu'un ordre illégal et peut-on juger de sa nature à compromettre le service public ? Il faut de plus que les deux conditions soient réunies... Doit-on obéir à un ordre manifestement illégal même s'il ne gêne pas le déroulement du service public? En fait, il semble que la volonté du législateur soit plus de secouer la léthargie du fonctionnaire que de codifier un comportement de désobéissance. Car cet état de soumission de l'agent public existe et peut s'exprimer grâce à des notions juridiques et psychosociologiques.

De plus, l'appréciation de l'illégalité de l'acte est du ressort du juge. Il peut donc arriver que le subordonné désobéisse, considérant que l'ordre est illégal (parce qu'il n'est pas conforme à la loi), mais que le juge ne soit pas du même avis que lui. De plus, si le fonctionnaire fait partie de la fonction publique militaire où l'obligation d'obéissance est très tricte du fait de la discipline, elle-même stricte, tout se complique encore. A côté de ce devoir de désobéissance, figure le droit de retrait qui est également une exception à l'obligation d'obéissance hiérarchique.

2-Le droit de retrait d'une situation de travail dangereuse.

Avant toute chose, il convient de faire remarquer que ce droit ne figure pas le statut général de la fonction publique camerounais et encore moins dans le statut général de la fonction publique français. On pourrait le déduire du droit à la protection que possède le fonctionnaire camerounais (article 25 du statut général)228. Le droit de retrait est justifié par la nécessité pour l'agent pour protéger sa vie d'une situation de travail éminemment. L'instrument

226 Article 39 alinéa 2 du décret n° 94/199 du 07 octobre 1994 portant statut général de la fonction publique de l'Etat modifié et complété par le décret n° 2000/287 du 12octobre 2000.

227 C'est dans un arrêt de 1944 que le Conseil d'État a affirmé que les agents publics ne sont pas tenus d'exécuter les instructions qui leur sont données quand elles sont de toute évidence illégales et compromettent gravement le fonctionnement du service public : CE Section, 10 novembre 1944, Langneur, où un agent est révoqué pour avoir obéi à un ordre du maire visant à permettre à ses agents électoraux de percevoir indûment des allocations chômage.

228 Article 25 : « l'Etat est tenu d'assurer au fonctionnaire protection contre les menaces, outrages, violences, voies du fait, injures ou diffamations dont il peut être victime en raison ou à l'occasion de l'exercice et des fonctions».

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juridique qui le consacre en France est le décret n° 95/680 du 9 mai 1955 dont l'article 5 alinéa 6 dispose qu' «aucune sanction ni retenue de salaire ne peut être prise à l'encontre d'un agent public ou d'un groupe d'agents qui se sont retirés d'une situation de travail dont ils avaient un motif raisonnable de penser qu'elle présentait un danger grave et imminent pour la vie ou la santé de chacun d'eux ». Au regard des conditions exigées, il n'est pas sûr que le droit de retrait exercé par des enseignants à la suite d'une agression d'un collègue, soit légal. Cet « abus de droit de retrait » pose toutefois un problème que le droit ne peut résoudre.

Le droit de retrait est logiquement refusé à certains fonctionnaires assurant des missions de sécurité des biens et des personnes qui mettent précisément leur vie en danger en accomplissant, dans des conditions souvent périlleuses, leur fonction. On imagine mal des fonctionnaires du RAID ou du GIGN exercer le droit de retrait lors d'une prise d'otage ou encore d'un policier d'une brigade anti-criminalité refuser de constater un flagrant délit en arguant du caractère dangereux d'une telle mission. La seule limite à l'exercice du droit de retrait est la création pour autrui d'une nouvelle situation de danger grave et imminent résultant, précisément, d'un retrait intempestif du fonctionnaire au poste de travail. En dehors des raisons objectives de désobéissance à l'ordre du supérieur, il y a une cause subjective incitant à la désobéissance.

B-La cause subjective du devoir de désobéissance : la qualité de fonctionnaire comme circonstance aggravante de la responsabilité.

En effet le fonctionnaire subordonné a une raison subjective de désobéir aux ordres du supérieur. Le verdict de l'article 89 du code pénal est clair : «(1) La qualité de fonctionnaire, d'officier public ou d'agent chargé d'un service public est une circonstance aggravante de la responsabilité pénale contre ceux d'entre eux qui, hors les cas où la loi règle spécialement les peines encourues pour les crimes et les délits par eux commis, se sont rendus coupables d'autres crimes ou délits qu'ils étaient chargés de prévenir ou de réprimer. (2) La peine est alors augmentée dans les conditions prévues à l'article précédent »229. C'est dans ce sens que ce code refuse l'excuse de l'ordre du supérieur (1) et pour mettre en oeuvre cette circonstance aggravante, il faut que l'infraction ait été commise pendant le service (2).

1-Le refus de l'excuse de l'ordre du supérieur.

Lorsque les ordres du supérieur hiérarchique sont illégaux, le fonctionnaire subordonné ne peut évoquer comme excuse qu'il obéissait uniquement aux ordres du supérieur hiérarchique. L'article 132(bis) du code pénal, traitant de la torture, illustre clairement cette

229Loi n° 77/23 du 06 décembre 1977 portant code pénal du Cameroun.

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situation en des termes saisissant : «... b) Le terme « torture » ainsi défini ne s'applique pas à la douleur ou aux souffrances résultant de sanctions légitimes, inhérentes à ces sanctions ou occasionnées par elles ;c) Aucune circonstance exceptionnelle, quelle qu'elle soit, qu'il s'agisse de l'état de guerre ou de menace de guerre, d'instabilité politique intérieure ou de tout autre état d'exception ne peut être invoqué pour justifier la torture ; d) L'ordre d'un supérieur ou d'une autorité publique ne peut être invoqué pour justifier la torture ».

Cela est dû au fait que la non-désobéissance aux ordres illégaux a souvent été à l'origine des évènements malheureux. En France, l' histoire pourrait nous donner de nombreux exemples, que ce soit dans le domaine militaire ou de la recherche, où la désobéissance des hommes a permis de gagner des guerres, de faire progresser les connaissances. Mais l'actualité nous offre un cas douloureux, avec le procès Papon où ce fonctionnaire au comportement cité comme exemplaire a permis par sa non-désobéissance à l'administration de Vichy la déportation et la mort de nombreux juifs. Si ce cas extrême nous montre bien les limites au devoir d'obéissance, il pose aussi un certain nombre de questions est-ce qu'une organisation peut faire d'un homme une machine à obéir aux ordres au point de lui faire oublier les valeurs humaines essentielles ? C'est sans doute pour remédier à pareilles situations que, concernant les militaires, l'article 15 alinéa 2 du statut général français230 précise qu' « il ne peut leur être ordonné et ils ne peuvent accomplir des actes qui sont contraires aux lois, aux coutumes de la guerre et aux conventions internationales ou qui constituent des crimes ou délits notamment contre la sûreté et l'intégrité de l'Etat ». Pour ce qui est des circonstances aggravantes du code pénal camerounais, elles sont applicables lorsque que l'infraction est commise pendant le service.

2-La condition : la commission de l'acte pendant le service.

Le préambule de la constitution231 affirme l'égalité de tous les hommes en droits et en devoirs. Le fonctionnaire, comme tout citoyen, ne peut donc bénéficier d'un traitement de faveur. Au contraire, en tant que représentant de l'Etat, il est censé être un exemple pour les autres citoyens232. C'est peut-être pour cela que le code pénal apparaît plus sévère en faisant de la qualité de fonctionnaire, une circonstance aggravante. Pour autant, dans le but d'équilibrer un peu avec les autres citoyens, le code précise qu'il est applicable pour le fonctionnaire en ce qui concerne les infractions commises pendant le service. En effet, l'article 131 du code pénal

230Loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et devoirs des fonctionnaires.

231 Loi n°96 /06 du 18 janvier 1996 portant révision de la constitution du 02 juin 1972.

232 Arrêt n°263/CCA du 27 novembre 1953, Mikoma Albert c/ Administration du territoire : « ... Qu'en effet, un fonctionnaire se doit de garder en toutes circonstances un comportement digne et honorable et être un exemple pour tous ses concitoyens... ».

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dispose qu' : « est considéré comme fonctionnaire, pour l'application de toute loi pénale, tout magistrat, tout officier public ou ministériel, tout préposé ou commis de l'Etat ou toute autre personne morale de droit public, d'une société d'Etat ou d'économie mixte, d'un officier public ou ministériel, tout militaire des forces armées ou de gendarmerie, tout agent de la sûreté nationale ou de l'administration pénitentiaire et toute personne chargée même occasionnellement d'un service, d'une mission ou d'un mandat public, agissant dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions ». Par conséquent, pour les circonstances aggravantes du code soient applicables, il faut que le fonctionnaire soit dans l'exercice de ses fonctions.

En somme, nous avons analysé dans ce premier volet des obligations de responsabilité du service, l'obligation de servir. Nous avons montré que l'obligation de servir emporte l'obligation de se consacrer personnellement et exclusivement à leur fonction (La règle qui interdit en principe le cumul d'un emploi public et d'une autre activité (publique ou privée) apparait dans la jurisprudence (CE, 1936, Caroillion : il appartient « à l'administration de veiller à ce que les fonctionnaires s'acquittent correctement et intégralement de leurs fonctions et notamment ne se livrent pas à des opérations commerciales »). Elle est confirmée dans le décret-loi du 29 octobre 1936, interdisant le cumul des fonctions, des rémunérations, des pensions, édictée par le gouvernement de Léon Blum, aussi bien pour « prévenir le risque de non-dévouement exclusif au service » selon la formule de Chapus) d'une part, et l'obligation d'obéissance hiérarchique qui comporte des exceptions d'autre part. L'on a pu constater les lacunes du système d'évaluation et les multiples violations de la continuité du service public. L'on espère qu'avec le nouveau système d'évaluation, la situation va s'améliorer. Il ne nous reste qu'à nous intéresser au second volet des obligations de responsabilité du service que constituent les obligations de confidentialité.

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LES OBLIGATIONS DE CONFIDENTIALITE.

CHAPITRE II :

Les obligations de responsabilité du service peuvent être regroupées en deux catégories : l'obligation de servir que nous avons analysée plus haut et les obligations de confidentialité, objet de notre étude. Ce qui fait la caractéristique de ces obligations, c'est qu'elles ont en commun le secret. En effet, le robert définit la confidentialité comme le maintien du secret d'information (dans une administration...)233. La confidentialité est donc le caractère de ce qui doit rester secret, la préservation du caractère secret d'une chose. Sur le plan juridique, le vocabulaire juridique la définit comme le caractère de ce qui est confidentiel (exemple, confidentialité de correspondance entre avocats, obligation de confidentialité. Voir secret)234.Pour mieux comprendre la confidentialité, il faut définir le terme « confidentiel ». Est confidentiel, ce qui est communiqué à quelqu'un sous l'interdiction, pour celui-ci, de le révéler à quiconque ; qui est livré par écrit ou oralement sous le sceau du secret (en confiance et confidence). Exemple, lettre confidentielle, dossier confidentiel, aveu confidentiel. Ce qui est accompli en secret comme une mission confidentielle235. Ceci fait, il revient de se poser la question suivante : quelles sont les obligations de confidentialité ? Cette question revêt son pesant juridique et pratique : sur le plan juridique, elle nous permettra de savoir quelles sont les interdictions que le droit fait au fonctionnaire sur sa liberté d'expression en ce qui concerne son travail ; sur le plan pratique elle apprend aux usagers du service quels sont leurs droits en cas de révélation de leurs secrets par un fonctionnaire qui en a connaissance. C'est dans cette optique que nous traiterons de l'obligation de réserve (section I) et des obligations de discrétion professionnelle et de secret professionnel (section II).

233 Dictionnaire le Robert de poche, 2012.

234 Cornu (G), vocabulaire juridique, PUF, 2011.

235 Cornu (G), ibid.

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SECTION I : L'OBLIGATION DE RESERVE.

L'obligation de réserve est la première obligation de confidentialité. Pour mieux l'appréhender, il convient de commencer par définir le terme « réserve » et donner le sens contextuel du terme. Pour commencer, il convient de préciser que la réserve dont il est question ici n'est pas la même qu'on retrouve en droit international, c'est-à- dire la clause qu'un Etat ajoute pour éviter qu'un traité soit interprété dans un sens qui ne lui convient pas, qu'il n'apprécie pas. Il s'agit en fait de la qualité de se garder de tout excès, de circonspection, retenue236. Le vocabulaire juridique définit l'obligation de réserve comme, le devoir statutaire incombant aux fonctionnaires (notamment aux magistrats) de s'abstenir de manifestations individuelles intempestives, incompatibles avec la dignité, l'impartialité et la sérénité de ses fonctions237. Dans l'exercice de ses fonctions, l'agent de la fonction publique est tenu à une prudence et doit faire abstraction de ses opinions politiques ou religieuses. L'obligation de réserve est la conséquence du principe de la neutralité de l'administration qui a pour corollaire la neutralité et l'impartialité des agents publics. Dans l'exercice de ses fonctions, l'agent doit faire preuve de la plus grande correction. Hors du service, il doit avoir un comportement irréprochable et incarner la dignité de l'Etat, il doit s'exprimer avec modération. Pour appréhender cette obligation, nous analyserons sa consistance (paragraphe I) avant de nous d'apprécier sa nature et ses modalités de mise en oeuvre (paragraphe II).

PARAGRAPHE I : LA CONSISTANCE DE L'OBLIGATION DE RESERVE.

La consistance de l'obligation de réserve que nous allons étudier ici, fait référence à ce qui constitue l'obligation de réserve. Le statut général de la fonction publique permet saisir, même s'il n'est pas très précis, la consistance de l'obligation de réserve. L'article 40 du statut dispose que : « (1) Tout fonctionnaire est tenu à l'obligation de réserve dans l'exercice de ses fonctions. (2) L'obligation de réserve consiste pour le fonctionnaire, à s'abstenir d'exprimer publiquement ses opinions politiques, philosophiques, religieuses, ou de

236 Voir Dictionnaire le Robert de poche, 2012.

237 Cornu (G), vocabulaire juridique, PUF, 2011.

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servir en fonction de celle-ci »238. De cette disposition, il ressort deux volets de cette obligation : l'interdiction d'exprimer publiquement ses opinions (A) et l'interdiction de servir en fonction desdites opinions (B).

A-L'interdiction d'exprimer publiquement ses opinions.

L'interdiction que pose cette disposition du statut général de la fonction publique, concerne bien évidemment, l'expression des opinions politiques, philosophiques et religieuses publiquement. Il convient de préciser ici et maintenant cette interdiction ne se limite pas à la restriction de la liberté d'expression des opinions, elle s'étend aux gestes dans certains corps de la fonction publique mais le statut ne parle pas du type d'opinions politiques, philosophiques et religieuses. C'est dans ce sens que nous verrons l'imprécision de la restriction textuelle de l'expression des opinions (1) avant de parler de la précision jurisprudentielle de la restriction des opinions (2).

1-L'imprécision de la restriction textuelle de l'expression des opinions.

Le statut général oblige le fonctionnaire d'exprimer publiquement ses opinions politiques, philosophiques et religieuses. Cela signifie sans doute par interprétation négative du texte que le fonctionnaire est libre d'exprimer de telles opinions en privé. On peut aussi comprendre par là que le statut interdit l'expression de ces opinions pendant le service, vu que l'administration est un lieu public, tout comme dans tout autre lieu public. Toutefois, comme nous l'avons dit, le statut ne précise pas le type d'opinions politiques, philosophiques et religieuses prohibées. S'agit-il de toutes les opinions politiques, philosophiques et religieuses ?

Dans les législations étrangères, on trouve des éléments de réponses. Au Gabon, tout proche de nous, le statut général de la fonction publique dispose que : «Dans l'exercice de ses fonctions, l'agent public est également soumis à :... l'obligation de réserve en se gardant notamment de donner à l'expression de ses opinions une forme excessive ou insultante à l'égard des collègues, des chefs hiérarchiques ou des pouvoirs publics »239.Ce qui revient à dire que le fonctionnaire ne doit pas tenir des propos mettent du discrédit sur l'administration. Dans la même lancée, le statut général de la fonction publique tchadien apparait plus précis que le statut général camerounais. En effet, son article18 dispose que : «...le fonctionnaire est

238 Article 40 du décret n° 94/199 du 07 octobre 1994 portant statut général de la fonction publique de l'Etat modifié et complété par le décret n° 2000/287 du 12 octobre 2000.

239 Article 43 de Loi n°001/2005 du 4 février 2005, portant statut général de la fonction publique.

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tenu de servir les intérêts de la nation avec efficacité, loyauté, dignité, dévouement et intégrité. Il doit veiller à tout moment à la protection et à la promotion des intérêts de la collectivité et éviter tout ce qui est de nature à ternir l'image de l'administration publique... »240.

Cette imprécision des textes est telle que même les statuts spéciaux parlant de l'obligation de réserve ne disent pas qu'il s'agit de celle-ci. C'est après interprétation qu'on se rend compte qu'il s'agit de cette obligation. A titre d'exemple, l'article 53 du statut spécial des fonctionnaires de l'administration pénitentiaire241 dispose en son article 26 alinéa 6 que : « les fonctionnaires de l'Administration Pénitentiaire doivent en tout temps qu'ils soient en service ou non, s'abstenir en public de tout acte, geste, parole ou manifestation quelconque de nature à porter le discrédit sur les institutions nationales, sur le corps auquel ils appartiennent ou à troubler l'ordre public ». C'est peut-être parce que le juge administratif avait déjà apporté des précisions que la réglementation possède des lacunes.

2-La précision jurisprudentielle de la restriction des opinions.

Fort heureusement, le juge administratif a remédié à cette lacune des textes dans la retentissante jurisprudence Ateba Victor242. En effet, ce n'est que dans cette jurisprudence que le sens exact des attitudes et déclarations prohibées se déclinera. On peut en effet y lire que : « l'obligation de réserve qui ne se confond pas avec l'obligation de discrétion professionnelle, se confond avec l'exigence d'un comportement qui ne soit pas à même de jeter le discrédit sur la fonction publique ; que de façon plus exigeante, l'obligation de réserve vient sanctionner des attitudes ou des déclarations du fonctionnaire excessivement critiques à l'égard de lui-même ou du service ». Etendons par discrédit ici, la perte d'une estime acquise.

Autre exemple d'explication de la jurisprudence, l'affaire Mama Eloundou243. En effet, le Sieur Mama Eloundou a, dans le n° 32 en date du 26 novembre 1956 du quotidien KAMERUN MON PAYS, organe progressiste d'information paraissant à Douala, publié l'article suivant : « Il faut nous entendre de façon solennelle. On a trop hésité. On a trop travaillé dans l'obscurité. Ce n'est pas là le remède du mal. Que ne serviraient or, argent,

240 Loi 01-017 2001-12-31 PR portant statut général de la fonction publique.

241 Décret n°2020/365 du 29 novembre 2010 portant statut spécial du corps des fonctionnaires de l'Administration Pénitentiaire.

242 Jugement n° 99/82-83 du 29 septembre 1983, ATEBA Victor c/ Etat du Cameroun.

243 Arrêt n°674/CCA. , du 13 décembre 1957 Mama Eloundou Engelbert c/ Etat du Cameroun.

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canon, bombe atomique et ces policiers au garde-à-vous chaque matin si au milieu de ces forêts denses qui m'ont vu naître, personne ne peut dire exactement ce à quoi il pense. Et bien, j'en suis à bout. Que les français comprennent que leurs comportements vis-à-vis de ceux qui sont fiers d'être ce qu'ils sont, mènent chaque jour à des conflits. Je me prononce, bien que policier pour mon pays. Car, pour ma part, mon pays reculant toujours derrière ses libertés, les manoeuvres françaises s'épuiseront à le poursuivre, l'organe international fera le reste. En terminant, je lance un vibrant appel à tous les compatriotes, à quelques professions qu'ils appartiennent, de se souvenir des nuits d'octobre où les nobles et seigneurs français de 1790 ont été les premiers à supprimer leurs privilèges, pour se joindre au peuple qui souffrait ». Le juge estima ainsi que le Sieur Mama Eloundou, inspecteur de police, a manqué au devoir de réserve en publiant cet article, au motif qu'en sa qualité de policier, il doit s'interdire, même en dehors du service et à l'occasion d'une campagne électorale de tenir publiquement des propos excessifs pouvant être interprétés comme un appel à la rébellion ou comme une critique de l'action de leur service, propos de nature à jeter le trouble dans les esprits et le discrédit sur le corps auquel il appartient244. L'autre volet de la consistance de cette obligation réside dans l'interdiction de servir en fonction de ses opinions.

B-L'interdiction de servir en fonction de ses opinions.

L'interdiction de servir en fonction de ses opinions politiques, philosophiques et religieuses est une conséquence de l'obligation de neutralité et d'impartialité. L'obligation de neutralité impose de ne pas utiliser les moyens du service pour véhiculer des convictions personnelles, sauf à commettre une faute disciplinaire245. La neutralité peut également se décliner sous la forme de l'obligation d'impartialité qui peut être mise en doute lorsqu'un agent a un intérêt personnel dans un dossier, en cas d'animosité personnelle contre un usager ou un subordonné246 ou de prise de position publique antérieure. C'est dans cette optique que nous parlerons de l'interdiction de la discrimination des usagers prenant en compte l'opinion (1) et de l'interdiction de la discrimination des fonctionnaires en raison de leurs opinions (2).

244 Voir également Arrêt n°269/ CCA, du 27 Nov. 1953 Nama Gallus/A.T

245 CE, 15 octobre 2003, M. Odent, manquement à l'obligation de neutralité du fait de l'usage du mail professionnel pour communiquer et apparaître sur le site internet de l'Église du révérend Moon.

246 CE, 31 octobre 1973, Dame Gilles, pour une mutation d'office illégale consécutive à l'animosité personnelle du chef de service envers l'époux d'une subordonnée.

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1-L'interdiction de la discrimination des usagers prenant en compte l'opinion.

Toute discrimination faite par un agent public dans son service vis-à-vis des usagers est légalement interdite. En effet, l'agent public ne doit pas servir en fonction de ses opinions politiques, philosophiques ou religieuses. De manière précise, l'agent public ne doit pas prendre en considération ses opinions, ni celles des usagers pour en tirer à leur égard des conséquences favorables ou défavorables. Le principe d'égalité devant la loi qui exclut en principe toute discrimination, interdit plus strictement encore celles qui sont fondées sur les idéologies. C'est ce que rappelle le préambule de la Constitution de 1996 en excluant toute distinction entre les citoyens247. Ceci suppose deux choses ; d'une part, que les services soient aménagés par la loi de telle sorte que leur accès n'entraîne aucune contrainte pour aucune famille d'esprit ; d'autre part, que les agents publics s'interdisent toute discrimination à base politique, religieuse ou philosophique. Est considérée comme une faute disciplinaire, le comportement de l'agent public qui ne procède pas de cet esprit de non-discrimination. L'obligation de neutralité qui est une conséquence du devoir de réserve interdit également la discrimination des fonctionnaires en raison de leurs opinions.

2- L'interdiction de la discrimination des fonctionnaires en raison de leurs opinions.

Le supérieur hiérarchique ne devrait établir de discrimination entre les agents publics en raison de leurs appartenances politiques, philosophiques, religieuses ou syndicales. Sont en effet illégales, les discriminations de tous ordres fondées sur l'appartenance idéologique. Ce principe reste un des principes de base de la gestion de la fonction publique248. D'ailleurs sur le plan du droit positif, le statut de la fonction publique relativement aux opinions, dispose que : « ne peut figurer dans ce dossier, aucune mention, ni document relatif à ses opinions ou convictions politiques, syndicales, philosophiques ou religieuses, à son appartenance ou à sa non appartenance à une organisation syndicale ou à un parti politique»249. Ceci signifie implicitement, mais clairement qu'il ne saurait en aucun cas être fait grief au fonctionnaire de ses opinions personnelles à ce quadruple point de vue. Il s'agit en fait d'une application particulière du préambule de la loi constitutionnelle du 18 janvier1996. En somme, est prohibé le fait pour le chef hiérarchique de se fonder sur les opinions d'un agent pour prendre

247 Préambule de la loi n° 96/06 du 18 janvier 1996 portant révision de la Constitution du 02 juin 1972. « Nul ne peut être inquiété en raison de ses origines, de ses opinions ou croyances en matière religieuse, philosophique ou politique sous réserve du respect de l'ordre public et des bonnes moeurs ».

248 Voir mémoire, Koumou Patrice Arthur, l'obligation de réserve dans la fonction publique camerounaise.

249 Article 23, alinéa 2 du décret n° 2000/287 du 12 octobre 2000 portant statut général de la fonction publique.

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une décision à l'encontre de celui-ci, c'est-à-dire le fait pour l'Administration de faire une distinction entre les agents en raison de leurs opinions politiques, syndicales, philosophiques ou religieuses. Après l'étude de la consistance de l'obligation de réserve, il convient de s'intéresser à sa nature et ses modalités de mises en oeuvre.

PARAGRAPHE II : LA NATURE ET LES MODALITES DE MISE EN OEUVRE DE L'OBLIGATION DE RESERVE.

La nature de l'obligation de réserve fait référence ici à ce qui la caractérise. Au regard général, cette obligation a ses effets quelques peu indésirables pour le fonctionnaire. L'obligation de réserve, consistant donc en une retenue dans l'extériorisation des opinions s'appréhende donc classiquement comme une limite plutôt sévère de la liberté de pensée (A), bien que ses modalités de mise en oeuvre concourent au bon fonctionnement de l'administration (B).

A-La nature de l'obligation de réserve : une limite à la liberté de pensée.

L'obligation de réserve a des aspects plutôt aliénants vis-à-vis du fonctionnaire car elle apparait souvent comme une privation de la liberté de pensée du fonctionnaire car, ne pouvant pas exprimer ses opinions, elle le pousse à se taire, à refouler son envie de s'exprimer. Cela n'est qu'une facette de la nature de cette obligation. Selon l'article 10 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 qui vaut pour les fonctionnaires comme pour tout citoyen : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre établi par la loi. » . La liberté de pensée dont bénéficie le fonctionnaire comprend la liberté d'opinion et la liberté d'expression. Si la première est absolu, la seconde reste conditionnée (1). Il convient de dire également concernant la nature de l'obligation de réserve que c'est une obligation d'origine jurisprudentielle (2).

1-L'obligation de réserve comme limite à la liberté d'expression.

L'obligation de réserve est donc une sévère limite à la liberté d'expression. Ce d'autant plus que le préambule de la constitution garanti ladite liberté250. En France, dans les années 1950, Michel Debré donnait sa définition : « le fonctionnaire est un homme de silence, il sert,

250 Préambule de la loi n° 96/06 du 18 janvier 1996 portant révision de la Constitution du 02 juin 1972. « la liberté de culte et le libre exercice des pratiques sont garantis ; la liberté de communication ; la liberté d'expression ; la liberté de presse...».

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il travaille et il se tait «, c'était la conception du fonctionnaire-sujet. Nous avons choisi en 1983 la conception du fonctionnaire-citoyen en lui reconnaissant, en raison même de sa vocation à servir l'intérêt général et de la responsabilité qui lui incombe à ce titre, la plénitude des droits du citoyen. » Pour terminer ainsi « C'est cette conception qui est en cause dans les mesures d'intimidation précédemment évoquées prises au plus haut niveau de l'Etat, préliminaires d'une vaste entreprise de démolition du statut général des fonctionnaires ». C'est sans doute pourquoi elle ne figure pas explicitement dans la loi le Pors de 1983, car elle va à contre-pied de son article 6 qui dispose que : «la liberté d'opinion est garantie aux fonctionnaires».

En effet, l'obligation de réserve a été supprimée en France par la loi du 13 juillet 1983. Elle ne s'applique plus que pour les magistrats (auxquels s'adresse toujours l'article 10 de l'ordonnance n°58-1270 du 22 décembre 1958) ou certains fonctionnaires à l'occasion de circonstances exceptionnelles (le contexte diplomatique par exemple) qui ne concernent pas l'exercice ordinaire des agents de l'Éducation nationale. La loi du 13 juillet 1983 leur reconnaît une totale liberté d'opinion (article 6), l'activité politique (article 7) et syndicale (article 8) et le droit de grève (article 10) que certains ministres autoritaires voudraient bien voir disparaître selon les dires de certains français. Tribune libre du journal Le Monde daté du 31 janvier 2008, rappelle notamment son rejet à l'Assemblée nationale le 3 mai 1983 d'un amendement tendant à l'inscription de l'obligation de réserve dans la loi. Il souligne que l'obligation de réserve ne figure pas dans le statut général ni dans aucun statut particulier de fonctionnaire, sinon celui des membres du Conseil d'État. C'est pour cette raison que l'on dit que c'est une obligation jurisprudentielle.

2-Une obligation d'origine jurisprudentielle.

Il faut avouer que le statut général de la fonction publique camerounais fait preuve d'originalité vis-à-vis du droit français en consacrant l'obligation de réserve dans son article 40 ; car comme nous l'avons dit précédemment, elle a été supprimée dans la loi le Pors. En fait, à partir des jurisprudences examinées plus haut, l'on peut conclure que l'obligation de réserve est d'origine jurisprudentielle au Cameroun. En effet, dans une approche historique, si l'on voit l'antériorité de la jurisprudence Mama Eloundou (1957) par exemple au statut général en vigueur, et surtout le fait qu'elle ne figure pas dans la loi portant statut général des

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fonctionnaires du Cameroun (1958)251 et le décret portant statut général de la fonction publique fédérale (1966)252, il devient un truisme qu'elle est d'origine jurisprudentielle au Cameroun.

En France par contre, elle n'est pas seulement d'origine jurisprudentielle, elle reste jurisprudentielle de par sa suppression du statut général. On pourra d'ailleurs citer Anicet Le Pors, qui en tant que Ministre de la fonction publique, a conduit l'élaboration et l'esprit de cette loi, et qui explique que le devoir de réserve été volontairement exclu du statut des fonctionnaires en 1983, et qu'à contrario il leur accorde la liberté d'opinion. Le statut des fonctionnaires impose la discrétion professionnelle, ce qui n'est absolument pas la même chose. Néanmoins, ce qui existe depuis en matière de devoir de réserve, c'est « une construction jurisprudentielle extrêmement complexe qui fait dépendre la nature et l'étendue de l'obligation de réserve de divers critères dont le plus important est la place du fonctionnaire dans la hiérarchie » (Anicet Le Pors) qu'on peut résumer ainsi : « plus on a de responsabilités hiérarchiques, plus le devoir de réserve est grand. Moins on en a, moins on a de devoir de réserve ». Que dire des modalités de mise en oeuvre de cette obligation ?

B-Les modalités de mise en oeuvre de l'obligation de réserve.

La mise en oeuvre de l'obligation de réserve peut être effectuée de façon différente. Conçue dans le but de favoriser le bon fonctionnement des services publics, la mise en oeuvre de l'obligation de réserve diffère souvent selon les milieux et selon les postes de responsabilité. Ce qu'il faut retenir, c'est que cette obligation peut être mise en oeuvre dans sa stricte et étendue (1), c'est-à-dire dans sa forme permanente, tout comme elle peut être mise en oeuvre de façon atténuée (2).

1-La mise en oeuvre dans sa stricte et étendue de l'obligation de réserve.

La mise en oeuvre dans sa substance de l'obligation de réserve fait référence à une mise en oeuvre dans sa forme permanente, stricte et essentielle. En effet, outre l'obligation de loyalisme à l'égard de l'Etat et de la nation s'imposant au fonctionnaire qui consiste essentiellement à ne pas adopter une attitude antisociale, l'agent public est soumis à l'obligation de réserve, consistant en une retenue dans l'extériorisation de ses opinions sur le fonctionnement du service auquel il appartient. Celui-ci, même dans le cadre sa vie privée ne

251 Loi n°58-84 du 22 juillet 1958 fixant le statut général des fonctionnaires du Cameroun.

252 Décret n°66/DF/53 du 03 février 1966 portant statut général de la fonction publique fédérale.

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doit pas donner l'expression de ses opinions de manière grossière et insultante à l'égard de son service et de ses supérieurs hiérarchiques253 . D'origine jurisprudentielle, le dispositif s'applique non seulement aux fonctionnaires en titre mais également aux agents qui non pas la qualité de fonctionnaire. De même, elle ne vaut pas seulement pour les agents en service mais aussi aux candidats à la fonction publique ainsi que les agents ayant cessé leurs fonctions.

La méconnaissance ou non de l'obligation de réserve est tout appréciée par le juge qui apprécie in concreto les devoirs des agents en dehors du service « à mesure des responsabilités qu'ils assument dans la vie sociale, en raison de leur rang dans la hiérarchie et de la nature de leurs fonctions »254. Ainsi, l'obligation est elle étendue lorsque le fonctionnaire est haut placé dans la hiérarchie255. En plus, la nature des fonctions exercées implique une obligation de réserve particulièrement importante (pour un fonctionnaire de police256 ; pour un magistrat257 ). Il convient néanmoins que les propos du fonctionnaire concernent directement le service auquel il appartient. Les propos tenus ou le comportement adopté deviennent fautifs, lorsqu'ils sont de « nature à entraver le fonctionnement normal du service public »258. A côté de cette mise en oeuvre stricte, il existe des atténuations notamment en France.

2-La mise en oeuvre atténuée en France.

La mise en oeuvre atténuée de l'obligation de réserve est une particularité française. Cette atténuation est inexistante au Cameroun, d'abord du fait de l'imprécision de des textes en matière d'obligation de réserve. En effet, le droit français prévoit des atténuations ; il y a aussi des circonstances atténuantes : la détention d'un mandat politique, la détention d'un mandat syndical. A vrai dire, les fonctionnaires investis d'un mandat politique ou de responsabilités syndicales disposent d'une plus grande liberté d'expression. En fait, les responsables syndicaux par exemple peuvent émettre des avis et opinions sur les services de la fonction publique. Selon le juge, ces derniers sont libérés de leur devoir de réserve, à condition de respecter la finalité de la mission syndicale dévolue, en l'occurrence défendre les intérêts professionnels259.

253 CE. 11 juillet 1939, ville d'Armentières.

254 CE. 1er octobre 1954, Guille. « à la mesure des responsabilités qu'ils assurent dans la vie sociale, en raison de leur rang dans la hiérarchie et de la nature de leurs fonctions » (conclusions du commissaire du Gouvernement LAURENT dans l'arrêt du Conseil d'Etat GUILLE, 1er oct. 1954).

255 CE 13 mars 1953 « Teissier » à propos du directeur du CNRS. 256256 CE. 20 février 1952, Magnin.

257 CE. 5 mai 1952, Bidalou.

258 CE. 8juin 1962, Frishmann.

259 CE.18 mai 1956, Boddaert ; CE. 8juin 1962, Frishmann.

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Si cette finalité n'est pas respectée, ils s'exposeront à des sanctions260. Cette liberté n'est pas étendue aux simples adhérents syndicaux261. Les personnels des armées, de police, les magistrats, le corps préfectoral sont pour leur part dépourvus de cette liberté d'expression. Enfin, la liberté syndicale ne saurait ni conduire à remettre en cause le devoir d'obéissance à l'autorité hiérarchique auquel sont soumis les fonctionnaires, ni permettre d'entreprendre ou de soutenir des mouvements à caractère politique, mettant ainsi en cause, l'obligation de neutralité262. L'obligation de réserve n'est pas la seule obligation de confidentialité ; elle a à côté d'elle, les obligations de discrétion et de secret professionnels.

SECTION II : LES OBLIGATIONS DE DISCRETION PROFESSIONNELLE ET DE SECRET PROFESSIONNEL.

Les obligations de discrétion professionnelle et de secret professionnel tout comme l'obligation de réserve sont des obligations de confidentialité. Ces deux obligation se ressemblent mais ne sont pas identiques. Sans y être vraiment défini, le secret professionnel est imposé par l'article 310 du code pénal. L'obligation de discrétion professionnelle ne repose pas sur un article du code pénal mais constitue plutôt une notion générique (c'est-à-dire dont la formulation est dans le domaine public). L'obligation de discrétion professionnelle n'est pas aussi absolue que l'obligation de secret professionnelle car elle n'expose qu'aux sanctions disciplinaires tandis que l'autre, de par sa consécration pénale, expose également à des sanctions pénales.

En revanche, l'obligation de discrétion professionnelle est plus étendue que celle du secret professionnel car elle concerne l'ensemble des informations que le fonctionnaire reçoit du fait de l'exerce de la fonction. Le secret professionnel ne couvre que les faits appris, qui sont liés à la fonction exercée. C'est pourquoi, pour mieux appréhender ces deux obligations, il convient de traiter séparément l'obligation de discrétion professionnelle (paragraphe I) et l'obligation de secret professionnel (paragraphe II).

PARAGRAPHE I : L'OBLIGATION DE DISCRETION PROFESSIONNELLE.

Pour saisir l'obligation de discrétion professionnelle, il faut d'abord définir le terme « discrétion ». Sur le plan littéraire, la discrétion est la qualité d'une personne qui sait garder

260 CE. 25 novembre 1987, District de Comtat Venessin.

261 CE. Section 1er décembre 1972, Duue Obrégo.

262 CE. 14 mars 1958, Etienne.

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un secret263. Le dictionnaire le Robert de poche va dans le même sens. Sur le plan juridique, le vocabulaire juridique la définit comme le fait de taire ou qualité de celui qui tait des informations confidentielles, réserve qui fait parfois l'objet d'une obligation professionnelle. Ex. l'obligation qui pèse sur les fonctionnaires pour tout ce qui concerne les faits et informations dont ils ont connaissance dans l'exercice de leurs fonctions ou sur les membres du comité d'entreprise dans le domaine de l'information économique264. De cette définition, seule la partie concernant le fonctionnaire, nous intéresse. Cette définition va dans le même sens que le statut général de la fonction publique qui dispose en son article 41 que : «(1) Tout fonctionnaire doit faire preuve de discrétion professionnelle pour tout ce qui concerne les faits, informations ou documents dont il a eu connaissance dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions. En dehors des cas expressément prévus par les textes en vigueur, le fonctionnaire ne peut être délié de cette obligation que par une décision expresse de l'autorité dont il relève. (2) Tout détournement, toute soustraction de pièces ou de documents de service sont formellement interdits. Il en est de même de leur communication ou de leur production, à moins qu'elles ne soient exécutées pour raison de service et dans les formes prescrites par les textes en vigueur »265. Pour étudier de cette obligation, nous parlerons de sa consistance (A), avant de nous intéresser à sa portée (B).

A-La consistance de l'obligation de discrétion professionnelle.

L'obligation de discrétion signifie que le fonctionnaire doit garder secrets les faits ou renseignements dont il prend connaissance dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions et qui revêtent un caractère confidentiel. Cette obligation signifie également que le fonctionnaire adopte une attitude de retenue à l'égard de tous les faits ou renseignements qui, s'il les dévoilait, pourraient nuire à l'intérêt public, à l'autorité constituée, au bon fonctionnement de l'administration publique ou porter atteinte à la vie privée de citoyens. Au Cameroun, cette obligation consiste à faire preuve de discrétion (1) et à ne pas détourner des documents (2).

263 Dictionnaire universel, 4e éd. Hachette-EDICEF, Août 2007.

264 Cornu (G), vocabulaire juridique, PUF, 2011.

265Décret n° 94/199 du 07 octobre 1994 portant statut général de la fonction publique de l'Etat modifié et complété par le décret n° 2000/287 du 12octobre 2000.

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1-La recommandation de faire preuve de discrétion.

Les fonctionnaires sont tenus à une obligation de discrétion professionnelle pour tous les faits (informations, documents) dont ils ont connaissance dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions. L'obligation de discrétion professionnelle protège les secrets de l'administration/du service. C'est cette obligation qui interdit la communication de certains documents à des personnes privées mais aussi à des fonctionnaires qui n'ont pas la qualité à recevoir de tels documents. L'obligation de discrétion professionnelle exclut donc toute divulgation de faits, informations, documents confidentiels ou non, réservés à l'usage de l'administration.

En ce qui concerne les enseignants, Ils ne peuvent pas faire état publiquement de documents internes concernant l'école dans laquelle il exerce. Un enseignant peut se prêter à une interview sur une question d'ordre général, mais pas sur le fonctionnement administratif de l'école où il enseigne. Cette obligation impose aux personnels de l'enseignement d'éviter des prises de position publiques mettant en cause le fonctionnement de l'administration. Elle vise à éviter que le comportement public de ces personnels ne porte atteinte à l'intérêt du service et ne crée des difficultés relationnelles préjudiciables à l'accomplissement de leurs missions. Il s'agit également de ne pas divulguer des faits dont ils ont connaissance dans l'exercice de notre métier. En voici quelques exemples : parler de résultats scolaires à des tiers non concernés hors du cadre institutionnel ; établir des attestations et témoignages concernant un divorce (sauf à la demande d'un juge) ; divulguer une situation familiale douloureuse, ou délicate, à un tiers hors du cadre institutionnel ; citer un rapport médical confidentiel (enfant porteur du virus HIV, tares familiales, etc.). Cette liste n'est pas exhaustive, loin de là, aussi, il est conseillé la plus grande prudence lorsque vous devez faire une déclaration sur l'école à un tiers non enseignant (Parent, journaliste, professionnel de santé, avocat...). A côté de cette recommandation de faire preuve de discrétion, il y a l'interdiction de détournement.

2-L'interdiction de détourner les documents.

Avant de parler de l'interdiction proprement dite, il convient de définir d'abord le terme «détournement ». Le détournement est l'action de détourner, la soustraction à son profit ; en terme plus clair, c'est du « vol » qui est une infraction pénale. En fait, concernant l'interdiction

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de détournement, l'article 41 alinéa 2 du statut général de la fonction publique dispose que : « tout détournement, toute soustraction de pièces ou de documents de service sont formellement interdits. Il en est de même de leur communication ou de leur production, à moins qu'elles ne soient exécutées pour raison de service et dans les formes prescrites par les textes en vigueur ».

Ce versant de l'obligation de discrétion professionnelle, s'impose avec acuité, d'une part aux fonctionnaires chargés de photocopier par exemple des documents qu'ils ne doivent divulguer compte tenu du contenu de la note photocopiée266 et d'autre part, aux syndicats de fonctionnaires267. Le comptable d'un lycée manque, par exemple à son obligation de discrétion en photocopiant, pour permettre à son épouse d'en faire usage, un courrier adressé au proviseur de l'établissement dont il a eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions268. Ces faits ont été qualifiés, par l'administration de « reprographie frauduleuse » et ont motivé la sanction du blâme. Une fois la consistance de l'obligation de discrétion professionnelle étudiée, il convient de s'intéresser à sa portée.

B-Portée de l'obligation de discrétion professionnelle.

Parler de la portée de l'obligation de discrétion professionnelle, revient à s'intéresser à son étendue. Pour effectuer cette opération d'étude de la portée de l'obligation de discrétion professionnelle, il convient de dire d'abord que contrairement à l'obligation de réserve qui limite la liberté d'opinions sur l'activité administrative dans les lieux publics, l'obligation de discrétion professionnelle suit le fonctionnaire même dans sa vie privée car, les informations dont il a connaissance sont confidentielles et ne peuvent faire l'objet de confidence à un tiers y compris le conjoint du fonctionnaire. La portée de cette obligation est grande car elle concerne l'ensemble des informations que le fonctionnaire reçoit du fait de l'exerce de la fonction (1) et le fonctionnaire ne peut en être délié que par les textes en vigueur (2).

1-L'étendue large de l'obligation de discrétion professionnelle.

Dans tout les pays où l'obligation de discrétion professionnelle est imposée aux fonctionnaires, elle a un effet relativement étendu. Elle concerne tous les faits et documents confidentiels. En d'autres termes, elle touche tous les documents qui ne sont pas libre d'accès

266 CE. 4 mai 1983, Ministère de l'économie et des finances c/ Skorski.

267 CE. 6 mars 1953, Delle Faucheux. En l'espèce, un agent syndical a diffusé un projet d'instruction relatif aux horaires services.

268TA. Lyon, 16 février 2006, M. , LIJ, mai 2006.

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au public. En droit canadien (québécois) par exemple, L'obligation de discrétion a été étudiée sous l'angle de la confidentialité par l'auteur Patrice Garant dans son article « La liberté politique des fonctionnaires à l'heure de la Charte canadienne »269. Dans ce texte, il soutient que le devoir de confidentialité commande au fonctionnaire de ne pas divulguer une information confidentielle obtenue dans le cadre de ses fonctions. En effet, pour lui, il existe trois critères pour déterminer qu'une atteinte au devoir de confidentialité a été commise :a) l'information dévoilée devait être confidentielle, c'est-à-dire que l'information doit être inaccessible pour le public; b) les informations divulguées l'ont été contrairement au devoir de confidentialité; c) l'usage fait de l'information a été contraire aux raisons qui ont d'abord motivé sa transmission à l'origine.

Ainsi, le devoir de discrétion du fonctionnaire implique de ne pas divulguer des informations confidentielles auxquelles il a accès par le biais de ses fonctions. La jurisprudence en cette matière semble étendre la portée de ce devoir. En effet, dans une décision de l'arbitre Bernard Bastien270, une employée du ministère du Revenu a été congédiée, car elle a consulté les dossiers fiscaux de gens qu'elle connaît. L'employée a agi par curiosité et, bien qu'elle n'ait dévoilé à personne les informations auxquelles elle avait eu accès, le tribunal a tout de même jugé qu'elle avait manqué à son devoir de discrétion. Cette décision n'est pas isolée et elle précise que l'obligation de discrétion consiste bien sûr à ne pas dévoiler les informations confidentielles obtenues dans le cadre de l'emploi, mais également qu'il est contraire à la discrétion d'utiliser à des fins personnelles des renseignements auxquels le fonctionnaire a accès de par ses fonctions. L'étendue de cette obligation compte toutefois des limites.

2-Les limites à l'obligation de discrétion professionnelle.

Le statut général de la fonction publique relève des limites à l'obligation de discrétion professionnelle. En effet, l'article 41271 prévoit trois exceptions : le fonctionnaire peut être délié de l'obligation de discrétion professionnelle, dans les cas expressément prévus par les textes en vigueur, par une décision de l'autorité dont il relève et pour raison de service à condition de le faire dans les formes prescrites par les textes en vigueur. En ce qui concerne la dernière exception, c'est-à-dire la communication de document pour des raisons de service, elle est

269 GARANT (P), «La liberté politique des fonctionnaires à l'heure de la Charte canadienne», (1983) 31 C.de.D. 409, 430

270 Ministère du Revenu du Québec et Syndicat de la fonction publique du Québec, D.T.E. 2001T-1061

271 Décret n° 94/199 du 07 octobre 1994 portant statut général de la fonction publique de l'Etat modifié et complété par le décret n° 2000/287 du 12octobre 2000.

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Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

réaffirmée par le statut spécial des greffiers. En effet, ce statut dispose en son article 85 que : « il est formellement interdit au fonctionnaire des Greffes de détourner, soustraire, ou détruire des documents de service, des dossiers de procédure, des scellés, et valeurs mobilières en dépôt. Il lui est interdit de les reproduire ou de les communiquer sauf pour nécessité de service»272.

De même, en France, en dehors des cas expressément prévus par la réglementation en vigueur, notamment en matière de liberté d'accès aux documents administratifs, le fonctionnaire ne peut être délié de cette obligation de discrétion professionnelle que par décision expresse de l'autorité dont il dépend. Contrairement à l'obligation de secret, tout manquement à l'obligation de discrétion n'est pas pénalement sanctionné. Cependant, encas de non-respect de cette obligation, l'agent est passible de sanctions disciplinaires. C'est dans ce sens que l'article 26 alinéa 2 du statut général de la fonction publique273 dispose que « les fonctionnaires doivent faire preuve de discrétion professionnelle pour tous les faits, les informations ou documents dont ils ont connaissance dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions. En dehors des cas expressément prévus par la réglementation en vigueur, notamment en matière de liberté d'accès aux documents administratifs, les fonctionnaires ne peuvent être déliés de cette obligation de discrétion professionnelle que par décision expresse de l'autorité dont ils dépendent ».En somme, il existe deux véritables limites ou exceptions à l'obligation de discrétion professionnelle : les cas prévus par la réglementation en vigueur et autorisation de l'autorisation de l'autorité dont dépend le fonctionnaire. Qu'en est-il de l'obligation de secret professionnel ?

PARAGRAPHE II : L'OBLIGATION DE SECRET PROFESSIONNEL.

L'obligation de secret vise à garantir les secrets des administrés, tandis que l'obligation de discrétion s'oppose à la divulgation de secrets de l'administration. Ainsi, comme nous l'avons précédemment dit, bien que ces deux obligations se ressemblent et sont souvent liées, elles sont différentes, d'où la nécessité de commencer par une définition de l'expression « secret professionnel ».

Le secret professionnel est l'obligation, pour les personnes qui ont eu connaissance de faits confidentiels dans l'exercice ou à l'occasion de leurs fonctions, de ne pas divulguer hors

272 Décret n°2011/020 du 4 février 2011 portant statut spécial des fonctionnaires de greffes.

273 Article 26 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

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Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

les cas où la loi l'impose ou autorise la révélation du secret ; obligation sanctionnée par la loi pénale, qui pèse sur les médecins, chirurgiens, sages-femmes, mais également sur toutes les autres personnes, dépositaires par état, profession ou fonctions (temporaires ou permanentes), des informations à caractère secret qu'on leur confie (avocats, notaires, ministres de culte, etc.) et qui dispense de celle de déposer sur les faits appris dans ces conditions274. On comprend mieux à partir de cette définition, ces propos d'Emile Garçon : «Ni le médecin, ni l'avocat, ni le prêtre ne peuvent accomplir leur mission si les confidences qui leur sont faites n'étaient assurées d'un secret inviolable ». Il convient, dans le cadre de notre étude de remarquer que l'obligation de secret professionnel ne figure pas dans le statut général de la fonction publique camerounais (A) avant d'étudier la portéLe de cette obligation (B)

A-L'obligation de secret professionnel, une obligation absente dans le statut général.

L'obligation de secret professionnel ne figure pas dans le statut général de la fonction publique275. En effet, lorsque le statut général énumère les obligations du fonctionnaire, il ne mentionne pas l'obligation de secret professionnel. En fait, l'article 35 dudit statut dispose que : « le fonctionnaire est astreint aux obligations : de servir et de se consacrer au service ; de désintéressement ; d'obéissance ; de réserve ; de discrétion professionnelle ». L'absence de cette obligation dans le statut général, ne signifie pas pour autant qu'elle ne s'impose pas aux fonctionnaires camerounais. En réalité, d'autres textes font mention de cette obligation. L'obligation de secret professionnel est consacrée dans les statuts particuliers (1) et comme partout ailleurs, elle est consacrée par le code pénal (2).

1-La consécration de l'obligation de secret professionnel dans les statuts particuliers.

En France, l'obligation de secret professionnel figure, contrairement au Cameroun, dans le statut général de la fonction publique. En effet, la loi Le Pors276 consacre cette obligation en son article 26 alinéa1 en ces termes : « les fonctionnaires sont tenus au secret professionnel dans le cadre des règles instituées dans le code pénal ». C'est sans doute pour combler cette absence de l'obligation de secret professionnel du statut général que des statuts particuliers. Le

274 Cornu (G), vocabulaire juridique, PUF, 2011.

275 Décret n° 94/199 du 07 octobre 1994 portant statut général de la fonction publique de l'Etat modifié et complété par le décret n° 2000/287 du 12octobre 2000.

276 Loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

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statut spécial des fonctionnaires de greffes277, citant les obligations du fonctionnaire, dispose en son article 83, alinéa 3 qu' « il est soumis au strict respect du devoir de réserve et astreint au secret professionnel. Le secret professionnel concerne tous les faits, actes et informations parvenus à sa connaissance dans m'exercice de ses fonctions. Il ne peut en être délié que sur autorisation spéciale du Ministre chargé de la Justice ».

De même, le statut spécial des fonctionnaires de l'administration pénitentiaire278 dispose en son article 26 alinéa 2 qu' « il est soumis au devoir de reserve et astreint au secret professionnel. Le secret professionnel concerne tous les faits et informations parvenus à la connaissance du fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions ». Le code de déontologie des fonctionnaires de la sûreté nationale est encore plus précis sur l'obligation de secret professionnel qui s'impose aux policiers en ces termes : « le fonctionnaire de la sûreté nationale est soumis à l'obligation de réserve et au strict respect du secret professionnel »279. Malgré sa présence dans les statuts particuliers, l'obligation de secret professionnel est explicitement dans le code pénal.

2-La consécration pénale de l'obligation de secret professionnel.

Avant de nous intéresser à la consécration pénale proprement dite, il convient de dire que les statuts de la fonction publique qui consacrent l'obligation de secret professionnel renvoient toujours au code pénal qui apparait comme l'instrument juridique par excellence en matière de secret professionnel. La plupart de ces statuts utilisent la formule : «Indépendamment des règles instituées dans le code pénal en matière de secret professionnel ». Ceci montre la primauté du code pénal en matière de secret professionnel.

En effet, le code pénal280 dispose en son article 310 que : « (1) Est puni d'un emprisonnement de trois mois à trois ans et d'une amende de 20.000 à 100.000 francs celui qui révèle sans l'autorisation de celui à qui il appartient un fait confidentiel qu'il n'a connu ou qui ne lui a été confié qu'en raison de sa profession ou de sa fonction. (2) L'alinéa précédent ne s'applique ni aux déclarations faites aux autorités judiciaires ou de police judiciaire portant sur des faits susceptibles de constituer un crime ou un délit, ni aux réponses

277 Décret n°2011/020 du 4 février 2011 portant statut spécial des fonctionnaires de greffes.

278 Décret n°2010/365 du 29 novembre 2010 portant statut spécial des fonctionnaires de l'administration pénitentiaire.

279 Article 7 du décret n°2012/546 du 19 novembre 2012 portant code de déontologie des fonctionnaires de la sûreté nationale.

280 Loi n° 77/23 du 06 décembre 1977 portant code pénal du Cameroun.

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en justice à quelque demande que ce soit. (3) L'alinéa 2 ne s'applique pas : a) Au médecin et au chirurgien qui sont toujours tenus au secret professionnel, sauf dans la limite d'une réquisition légale ou d'une commission d'expertise ; b) Au fonctionnaire sur l'ordre écrit du Gouvernement ; c) Au ministre du culte et à l'avocat. (4) La juridiction peut prononcer les déchéances de l'article 30 du présent code ». Le petit « b » de l'alinéa 3 est une illustration que le fonctionnaire est soumis au secret professionnel par le droit pénal.

Dans le même sillage, L'article 226-13 du code pénal français prévoit que « la révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire, soit par état, soit par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire, est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende ». La sanction ne se limite pas à celui qui transgresse le secret lié à sa profession : elle peut également s'appliquer à ceux qui incitent à cette transgression, car le fait d'obtenir ou de tenter d'obtenir la communication de ces informations est également puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. Ces exemples montrent par l'évidence que la protection du secret professionnel est d'abord une affaire pénale. Dans le même schéma que celui adopté dans le cas de l'obligation de discrétion professionnelle, il convient de mesurer la portée de l'obligation de secret professionnel.

B-La portée de l'obligation de secret professionnel.

La notion de secret professionnel est plus complexe. En ce qui concerne les fonctionnaires, les avis divergent sur le fait qu'ils soient concernés ou non. Toutefois, la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 mentionne en son article 26 que « les fonctionnaires sont tenus au secret professionnel dans le cadre des règles instituées dans le code pénal». Ainsi, il y a bien secret professionnel, mais c'est sa portée qui varie de celui concernant les médecins ou les avocats. C'est cette variation de la portée qui fait en sorte qu'il y ait des domaines où l'obligation de secret professionnel ait un caractère absolu (1). Toutefois, cette obligation comporte aussi des limites (2).

1-Les domaines du secret absolu.

Des domaines exigent le secret absolu de la part des fonctionnaires : la défense, les informations financières et le domaine médical. Dans le domaine de la défense, on parle souvent de secret-défense. L'article 18 du statut général des militaires281 dispose en effet

281 Loi n°80/10 du 14 juillet 1980 portant statut général des militaires.

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qu' : « indépendamment des dispositions du code pénal relatives au secret de la défense nationale ou du secret professionnel, les militaires sont liés par l'obligation de discrétion pour tout ce qui concerne les faits et informations dont ils ont connaissance dans l'exercice de leurs fonctions ou à l'occasion du service ».

En outre, dans le domaine médical, le code pénal282 est clair lorsqu'il dispose que les exceptions au secret professionnel contenues dans l'alinéa 2 de l'article 310, ne s'applique pas aux médecins et chirurgiens. Les termes exacts sont les suivants : « ...(3) L'alinéa 2 ne s'applique pas : a) Au médecin et au chirurgien qui sont toujours tenus au secret professionnel, sauf dans la limite d'une réquisition légale ou d'une commission d'expertise ...».Toujours dans le domaine médical, en France cette fois, Dès 1885, dans l'arrêt WATTELET, la Cour de Cassation a affirmé le caractère général et absolu de l'obligation de secret professionnel s'imposant aux médecins comme un devoir de leur état et dont il n'appartient à personne de les affranchir. On peut mieux comprendre ce caractère général et absolu dans le serment d'Hippocrate : "Quoi que je voie ou entende dans la société pendant l'exercice ou même hors de l'exercice de ma profession, je tairai ce qui n'a jamais besoin d'être divulgué, regardant la discrétion comme un devoir en pareil cas". Le délit existe dès que la révélation est faite avec connaissance même sans intention de nuire. Ce sont les mesures d'action sanitaire et sociale qui amèneront au début du XXe siècle à remettre en cause le caractère absolu pour créer un état de secret controversé. On s'orientera vers l'adjonction au texte du Code pénal de dérogations définies par des lois, et vers une interprétation assouplie des textes.

2-Les dérogations à l'obligation de secret professionnel.

Le code pénal camerounais prévoit trois dérogations à l'obligation de secret professionnel : l'autorisation du titulaire du secret, les faits susceptibles de constituer des crimes ou délits et la réquisition légale faite aux médecins et chirurgiens. Les termes du code sont les suivants : « (1) Est puni ...celui qui révèle sans l'autorisation de celui à qui il appartient un fait confidentiel qu'il n'a connu ou qui ne lui a été confié qu'en raison de sa profession ou de sa fonction. (2) L'alinéa précédent ne s'applique ni aux déclarations faites aux autorités judiciaires ou de police judiciaire portant sur des faits susceptibles de constituer un crime ou un délit, ni aux réponses en justice à quelque demande que ce soit. (3) L'alinéa 2 ne s'applique pas : a) Au médecin et au chirurgien qui sont toujours tenus au secret

282 Loi n° 77/23 du 06 décembre 1977 portant code pénal du Cameroun.

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professionnel, sauf dans la limite d'une réquisition légale ou d'une commission d'expertise ...».

La législation française est plus étendue en la matière. La révélation des secrets acquis y est parfois permise, voire même obligatoire. Elle est permise notamment : pour prouver son innocence ; lorsque la personne intéressée a donné son autorisation. Elle est obligatoire notamment dans les cas où le législateur, pour des motifs de sécurité ou de cohésion de la vie sociale, a placé les fonctionnaires dans une situation de secret professionnel mais aussi de signalement de faits délictueux ou criminels auxquels ils seraient confrontés. Exemple : les articles 226-14 et 434 du code pénal imposent la révélation du secret en cas de sévices à l'encontre d'un mineur de moins de quinze ans ou d'un incapable majeur ou pour prévenir ou limiter les effets d'un crime. C'est en fait une obligation de dénonciation. Exemple : l'article 40-2 du code de procédure pénale impose aux fonctionnaires d'avertir sans délai le procureur de la république lorsqu'ils ont acquis la connaissance d'un délit ou d'un crime. Ces textes ne prévoient pas de sanction pénale pour les fonctionnaires en cas de méconnaissance mais d'autres textes peuvent être invoqués pour les sanctionner. De plus, la méconnaissance de ces dispositions peut servir de fondement à des poursuites disciplinaires. Exemple : deux policiers participent à un congrès au cours duquel les personnes apprennent à fabriquer des bombes. Le ministre de l'intérieur révoque ces deux fonctionnaires car ils n'ont pas révélé les faits. Pour le Conseil d'Etat, la révocation est justifiée car il y a bien une faute disciplinaire.

En somme, il était question pour nous de traiter des obligations de confidentialité. En effet, nous avons recensé trois obligations de confidentialité que sont l'obligation de réserve qui consiste en une retenue dans l'expression des opinions en public du fonctionnaire, vis-à-vis de l'administration ; l'obligation de discrétion professionnelle qui consiste à ne pas divulguer les secrets de l'administration (faits et documents dont il a connaissance dans l'exercice de ses fonctions ou à l'occasion du service) ; enfin, l'obligation de secret professionnel qui consiste à ne pas divulguer les secrets des administrés. Nous avons par exemple constaté que l'obligation de réserve qui est d'origine jurisprudentielle au Cameroun, est restée complètement jurisprudentielle en France, depuis sa consécration par le conseil d'Etat en 1935283. Le fonctionnaire doit donc adopter une attitude responsable dans le service et en dehors du service.

283 CE. 11 janvier 1935, Bouzanquet (le juge renforce, dans cet arrêt, l'obligation de réserve pour les fonctionnaires en poste à l'étranger dans la mesure où ils représentent la France.

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CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE

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En somme, il était question pour nous d'énumérer et d'analyser les obligations de responsabilité du service qui sont contrairement aux obligations de solidarité aux corps, toutes présentes dans le statut général de la fonction publique284 à l'exception de celle du secret médical qui est premièrement pénale, et ne font pas l'objet de statuts particuliers. Nous les avons regroupées en deux catégories : l'obligation de servir d'une part et les obligations de confidentialité d'autre part. Concernant la première catégorie, c'est-à-dire l'obligation de servir, elle regroupe l'obligation de se consacrer à ses fonctions et l'obligation d'obéissance hiérarchique qui rendent le fonctionnaire responsable des tâches qui sont les siennes. Concernant la dernière catégorie, contituée des obligations de confidentialité que sont l'obligation de réserve, de discrétion professionnelle et de secret professionnel.

Il est à noter que l'obligation d'obéissance hiérarchique et l'obligation de secret professionnel sonrt particulières parmi les obligations de responsabilité du service car elles exposent à des poursuites et le cas échéant à des sanctions pénales en dépit des sanctions disciplinaires. Pour ce qui est de l'obligation d'obéissance hiérarchique pour ne parler que de celle-ci, elle est limitée par le devoir de désobéissance en cas d'ordre manifestement illégal. Le code pénal précise pour ce qui est de l'infraction de la torture285 par exemple qu'il ne retient pas l'ordre du supérieur hiérarchique comme excuse. Ce qui rend cette obligation complexe, d'autant plus qu'en France, dans l'affaire Papon, des historiens ont parlé de vassalisation des fonctionnaires par le régime de Vichy et la transformation des citoyens en objets. En outre, la corrélation entre l'esprit carriériste de M. Papon et la soumission à l'autorité a été sérieusement évoquée. On comprend mieux ainsi l'intention du législateur car, on encadrant le devoir d'obéissance du fonctionnaire, il remet on avant sa responsabilité au sein de l'organisation. De plus, en admettant que l'on puisse obéir à un ordre illégal si celui ci ne perturbe pas le service public, on comprend parfaitement la priorité qui est donnée au fonctionnement des institutions

284 Décret n° 94/199 du 07 octobre 1994 portant statut général de la fonction publique de l'Etat modifié et complété par le décret n° 2000/287 du 12octobre 2000.

285 Article 132 (bis) de la loi n° 77/23 du 06 décembre 1977 portant code pénal du Cameroun.

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Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

dans le souci de l'intérêt général. En bref, les obligations de responsabilité du service réglementent les relations intra-adminstratives et les relations administration/usagers du service publique. Elles concernent tout ce qui a trait au service.

CONCLUSION

GENERALE

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Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

En définitive, il était question pour nous d'étudier les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais. Cette étude avait pour but, tout au long de notre analyse de répondre à la question : quelles sont les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais ? La réponse à cette question nous a permis de constater un certains nombre de faits qui mérite un rapport.

Tout d'abord, il convient de dire que notre question donnait lieu à une énumération à laquelle nous avons ajouté l'analyse afin d'aboutir à un resultat relativement satisfaisant. La première réponse que nous avons apportée à cette question a été de dire que l'on peut regrouper les obligations du fonctionnaire en deux catégories : les obligations de solidarité au corps et les obligations de responsabilité du service. Cette division peut être justifiée par le fait que le statut général de la fonction publique définit le corps comme l' « ensemble des fonctionnaires exerçant une fonction spécifique dans un secteur d'activité déterminé et régi par les mêmes dispositions réglementaires »286. Cela subodore de par l'existence de dispositions réglementaires propres à certains corps qu'il y a également une différence de degré dans la déontologie. Le corps a donc une influence sur les obligations du fonctionnaire. Les obligations de responsabilité du service sont celles qu'on retrouve aussi bien dans le statut général que dans les statuts particuliers. Un rapport au cas par cas s'impose.

Pour ce qui est des obligations de solidarité au corps, ce sont des obligations qui sont exigibles au fonctionnaire en fonction du corps auquel il appartient. En d'autres termes, les obligations varient d'un corps à l'autre ; le fonctionnaire est soumis à ces obligations du fait de son appartenance au corps. C'est pourquoi certains fonctionnaires sont astreint dans le cadre de l'exercice de leurs fonctions à revêtir un uniforme287, à porter un costume288 ou même à porter une arme tandis que d'autre ne sont pas soumis à ces obligations. Tout comme certains fonctionnaires jouissent du droit syndical, du droit d'adhésion à un groupement ou formation politique et même du droit de grève qui est constitutionnellement consacré tandis que d'autre en sont privés et ont une obligation de ne pas exercer ce droit. Si on s'en tient au droit en vigueur, l'incident de septembre 2015 où les militaires de retour de la MINUSCA, bien qu'ayant le droit de reclamer leur droit à la rémuneration, devaient privilégier la voie hiérarchique au lieu de se mettre en grève. Nous avons pu regrouper les obligations de solidarité au corps en

286 Article 5 du décret n°94/199 du 07 octobre 1994 portant statut général de la fonction publique de l'Etat modifié et complété par le décret n° 2000/287 du 12octobre 2000.

287 Article 11 du décret n°2012/546 du 19 novembre 2012 portant code de déontologie des fonctionnaires de la sûreté nationale

288 Décret n°2011/020 du 4 février 2011 portant statut spécial des fonctionnaires de greffes.

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Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

deux catégories : les obligations de solidarité dans l'éthique du corps et les obligations de solidarité dans la discipline du corps.

Pour ce qui est des obligations de responsabilité du service, ce sont des obligations que l'on peut qualifier de générales car elles sont exigibles par l'administration à tous les fonctionnaires, quel que soit le corps auquel ils appartiennent. Tout fonctionnaire a par exemple l'obligation de servir ; c'est juste l'intensité de l'obligation qui peut varier d'un corps à l'autre, comme nous l'avons vu par exemple en France où certains fonctionnaires avait un droit de retrait d'une situation dangereuse289 comme motif de désobéir aux ordres du supérieur, tandis que d'autres ne pouvaient pas s'en prévaloir. C'est derniers ne pouvaient s'en prévaloir car faire face à ce genre de situation fait partie de leur obligation de servir et sont par conséquent tenus à obéir aux ordres du supérieur.

Deux obligations parmi tant d'autres ont attiré particulièrement notre attention à cause de leurs violations qui apparaissent déjà comme le quotidien de l'administration camerounaise : il s'agit de l'obligation de désintéressement et de l'obligation de service continu, elle-même, issue du principe de continuité du service public. L'obligation de désintéressement a, en dehors du fait de ne pas avoir des intérêts dans une entreprise sous son contrôle ou en relation avec le fonctionnaire, deux implications : l'interdiction d'obtenir des gains privés et l'interdiction d'utiliser l'argent public à des fins personnelles, des pratiques que l'on peut qualifier de corruption et de détournement de deniers publics. Or, comme le signale le Pr Bernard Raymond Guimdo, le fonctionnaire est tenu à une obligation de moralité et de bonnes moeurs290. Pour ce qui concerne le principe de, continuité du service public, il est sujet de violations de par les actes de bon nombre de fonctionnaire à travers les retards et les absences injustifiées qui causent des périodes de vacuité dans le service public, exception illégime et même illégal au principe de continuité du service public. Compte tenu de l'existence de la CONAC (commission nationale anti-corruption) pour lutter contre la corruption291, nous avons, comme solution à la violation du principe de continuité du service public, suggéré la mise sur pied d'une commission de contrôle dont la mission serait de la présence du fonctionnaire à son poste conformément à la réglementation en vigueur, et ceci en faisant des contrôles inopinés comme le fait l'administration fiscale dans ces contrôles des marchés. Si cette mésure est mise sur pied,

289 Voir article 5 du décret n°95-680 du 9 mai 1995, op. cit.

290 Voir Guimdo Dongmo (B.R), « la corruption dans le droit de la fonction publique : le cas du Cameroun, juridis périodique n°75, P61.

291 Voir décret n°2006/088 du 11 mars 2006 portant création, organisation et fonctionnement de la CONAC.

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Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

l'administration camerounaise travaillera avec une célérité exemplaire et une efficacité admirable. Un dernier aspect du droit de la spécificité du droit de la fonction publique camerounais a été le fait que tout au long de notre étude comparative, les statuts de la fonction publique des autres pays de notre champ géographique étaient des lois, le Cameroun a été le seul pays où le statut des fonctionnaires est du domaine réglementaire.

ANNNEXES

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Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

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20- KOUBI (G), le for intérieur du fonctionnaire, P. 239

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27- OWONA (J), droit de la fonction publique camerounaise, éd l'Harmattan 2013. 256p

28- SEROUSSI(R), introduction au droit comparé, DUNOD, PARIS 2000. 2011p

29- TCHAKOUA(J.M), introduction générale au droit camerounais, presses UCAC, 2008. 335p

30- TERRE (F), introduction générale au droit, 9e éd, Dalloz, Paris 2012. 652 P

31- VIGOUROUX (Ch.), déontologie des fonctions publiques, Dalloz, "Connaissance du droit", 1995.

II : THESES ET MEMOIRES.

1- ABANE ENGOLO (Patrick Edgard), L'application de la légalité par l'Administration au Cameroun, Thèse de Doctorat/PHD en droit public interne, Université de Yaoundé II-Soa, FSJP, 2009, 515 pages.

2- GUESSELE ISSEME(L.P), l'apport de la cour suprême en droit administratif camerounais. SEPT 2010. Thèse de droit public. U.YII.FSJP 2010. 590 P

3- KOUMOU (Patrice Arthur), l'obligation de réserve dans la fonction publique, UY2, 20052006. 114P

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4- MBEBI ENOME (Walter Fredly), les statuts spéciaux en droit de la fonction publique camerounaise, UY2, 2009.

5- MVOGO (Gabriel Magloire), statuts particuliers et statut général de la fonction publique, UY2, Soa, 2011-2012.

6- SAKR HAITHAM, les droits et libertés du fonctionnaire dans les jurisprudences du Conseil d'Etat Libanais et du conseil d'Etat français. Thèse de droit public. Université de Poitiers, Nov. 2008. 524P

III : COURS POLICOPIES ET MANUSCRITS

1- ABA'A OYONO (Jean Calvin), droit administratif général II, Licence 2, UY2, 2011-2012.

2- ABANDA ATANGANA (Anicet), droit, politique et réglementation économique, Licence 3, UY2, 2012-2013.

3- GUESSELE ISSEME (Lionel Pierre), droit de la fonction publique, Licence 3, UY2, 20152016.

4- GUIMDO DONGMO (Bernard-Raymond), droit administratif général I & II, Licence 2, UY2, 2014-2015.

5- MBAGA NYATTE (D), droit administratif approfondi, Master I, UY2, 2013-2014.

6- OWONA (J), droit de la fonction publique camerounaise, Licence 3, UY2, 2012-2013.

IV ; ARTICLES.

1- BLAYS (P), « Les obligations du fonctionnaire en dehors de son service », Dalloz, 1954, Chron.- XVIII, p. 105

2- CHAPMAN (R.A.) "L'Ethique dans la Fonction Publique", Edimbourg, Presse de l'Université d'Edimbourg éd. 1993

3- Dr. R.A. AYEE(J), Professeur en Administration Publique « La Fonction publique en Afrique : Ethique » Rabat ,1998.

4- GARANT (P), «La liberté politique des fonctionnaires à l'heure de la Charte canadienne», (1983) 31 C.de.D. 409, 430.

5- GUIMDO DONGMO (B.R), « la corruption dans le droit de la fonction publique : le cas du Cameroun », juridis périodique n°75, P61.

6- Kouassigan (R.G), « quelle est ma loi ? », RDP.

7- LOCHAK (D.), "Le sens hiérarchique "in Psychologie et science administrative,

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Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

C.U.R.A.P.P., P.U.F. 1985.

8- VIRALLY (M), « Phénomène juridique », RDP et SP, 1982.

V : TEXTES ET LOI CITES A-Textes nationaux.

1- Contitution du 02 juin 1972

2- Décret n°66/DF/53 du 03 février 1966 portant statut général de la fonction publique fédérale.

3- Décret n°94/199 du 07 octobre 1994 portant statut général de la fonction publique de l'Etat modifié et complété par le décret n° 2000/287 du 12octobre 2000.

4- Décret n°95/048 DU 8 mars 1995, portant statut de la magistrature.

5- Décret n°2006/088 du 11 mars 2006 portant création, organisation et fonctionnement de la

CONAC.

6- Décret n°2010/365 du 29 novembre 2010 portant statut spécial du corps des fonctionnaires de l'Administration Pénitentiaire.

7- Décret n°2011/020 du 4 février 2011 portant statut spécial des fonctionnaires de greffes.

8- Décret n°2012/539 du 19 novembre 2012 portant statut spécial du corps des fonctionnaires de la sûreté nationale.

9- Décret n°2012/546 du 19 novembre 2012 portant code de déontologie des fonctionnaires de la sûreté nationale.

10- Loi n°58-84 du 22 juillet 1958 fixant le statut général des fonctionnaires du Cameroun. 10- Loi n° 77/23 du 06 décembre 1977 portant code pénal du Cameroun.

11- Loi n°80/10 du 14 juillet 1980 portant statut général des militaires.

12- Loi du 18 janvier 1996 portant révision de la constitution du 02 juin 1972 modifiée par la loi n°2008/OO1 du 14 AVRIL 2008

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Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

B : Textes étrangers. 1-Textes français.

a- Arrêté du 22 juillet 1996 portant règlement général d'emploi de la police nationale.

b- Code pénal français.

c- Décret n° 95/680 du 9 mai 1955

d- Décret-loi du 29 octobre 1936.

e- Loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

f- Loi n°2005-270 du 24 mars 2005 portant statut général des militaires.

g- Loi du 2 février 2007 portant modernisation de la fonction publique.

h- Loi n° 2007-1224 du 21 août 2007 sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs.

2-Lois africaines.

a- Loi n°2015-20 portant statut spécial des personnels des forces de sécurité publique et assimilées au Benin.

b- Loi n° 92-570 du 11 septembre 1992 portant statut général de la Fonction Publique en Côte d'ivoire

c- Loi n°001/2005 du 4 février 2005, portant Statut général de la Fonction publique du Gabon

d- Loi L 2001 028 du 31 décembre 2001 portant statut général des fonctionnaires en Guinée

e- Loi n°02-053 DU 16 décembre 2002 portant statut général des fonctionnaires au Mali

f- Loi n°61-33 du 15 juin 1961 relative au statut général des fonctionnaires au Sénégal.

g- Loi 01-017 2001-12-31 PR portant statut général de la fonction publique.

VI : JURISPRUDENCE.

A-Jurisprudence camerounaise.

a- Arrêt n°263/ CCA du 27 novembre 1953, Mikoma Albert c/ Administration du territoire

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Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

b- Arrêt n°269/ CCA, du 27 Nov. 1953 NAMA Gallus/A.T.

c- Arrêt n°674/CCA, du 13 décembre 1957 Mama Eloundou Engelbert c/ Etat du Cameroun.

d- Arrêt n°266/ T.E. 14.04.1963BABA YOUSSOUFA.

e- CS/CA, jugement n° 99/82-83 du 29 septembre 1983, ATEBA Victor c/ Etat du Cameroun

f- CS/CA, jugement n° 64 du 30 Août 1984, KEBE PAUL C/ Etat du Cameroun

2-Jurisprudence françaises.

a- C.E. ass. 6 décembre 1996, société Lambda

b- Conseil Etat, 3 juin 1994, centre de cure médicale de pignelin

c- CE. 11 juillet 1939, ville d'Armentières

d- C.E. 28 septembre 1988, «Lemennicier», R. 31

e- C.E. 4 mars 1994, Coutellier.

f- 1 C.E. 22 mai 1992, Giacona.

g- CAA Nantes, 30 mai 2003.

h- CE, 31 octobre 1973, Dame Gilles.

i- CE. 1er octobre 1954, Guille.

j- CE 13 mars 1953 « Teissier » à propos du directeur du CNRS.

k- CE. 20 février 1952, Magnin.

l- CE. 5 mai 1952, Bidalou.

m- CE. 8juin 1962, Frishmann ?

n- CE.18 mai 1956, Boddaert ; CE. 8juin 1962, Frishmann.

o- CE. 25 novembre 1987, District de Comtat Venessin.

p- CE. Section 1er décembre 1972, Dlle Obrégo.

q- CE. 4 mai 1983, Ministère de l'économie et des finances c/ Skorski.

r- CE. 6 mars 1953, Delle Faucheux.

s- TA. Lyon, 16 février 2006, M, 9e éd, aout 2011, 1095 P, LIJ, mai 2006.

t- CE. 14 mars 1958, Etienne.

u- CE. 11 janvier 1935, Bouzanquet.

v- C.E 8 octobre 1990, Ville de Toulouse c/ Mirguet et TC 2 décembre 1991, «Mme Paolucci», Req. n° 2682.

w- CAA Lyon 3 octobre 1997, «Mme Yana», Req. n°94LY01823.

x- C.E. 20 juin 1997, De Larminat.

y- C.E. 4 juillet 1997, Urvoy ; C.E. 28 décembre 1992, Sarraute

VII : DICTIONNAIRES & LEXIQUES.

1- Cornu (G), vocabulaire juridique, 9e éd, aout 2011, 1095 P

2- Dictionnaire universel, 4e éd. EDICEF, Août, 2007.

3- Dictionnaire le Robert de poche, 2012.

4- Gatsi (J), nouveau dictionnaire juridique, 2e éd. PUL, 2010.

5- Vang Lang (A) et Gondouin (G), dictionnaire de droit administratif, 6

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Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

TABLE DES MATIERES

AVERTISSEMENT i

DEDICACES ii

REMERCIEMENTS iii

LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS iv

SOMMAIRE vi

RESUME viii

ABTRACT ix

INTRODUCTION 1

PREMIERE PARTIE : LES OBLIGATIONS DE SOLIDARITE AU CORPS 22

CHAPITRE1 : LES OBLIGATIONS DE SOLIDARITE DANS L'ETHIQUE DU

CORPS 24

SECTION I : L'INTERDICTION DE RECOURIR AUX PERSONNES EXTERIEURES ET

D'ABUSER DE SA QUALITE 26

PARAGRAPHE I : L'INTERDICTION DE RECOURIR AUX PERSONNES

EXTERIEURES 27

A -Délimitation de l'interdiction 28

1 -Le but prohibé : solliciter des avantages 28

2-Le lieu de la prohibition 29

B-La prescription de la voie hiérarchique 29

1-Une démarche complémentaire à l'obligation d'obéissance hiérarchique 30

2-Une démarche entrainant le traitement interne des doléances 30

PARAGRAPHE II : L'INTERDICTION D'ABUSER DE SA QUALITE 30

A-La période de l'interdiction 30

1-L'interdiction pendant le service 31

2-L'interdiction après et en dehors du service 31

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Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

B-Les actes constitutifs d'abus 32

1-Les actes en vue d'obtenir des avantages 32

2- L'exercice de pressions et de contraintes sur les tiers 33

SECTION II : L'OBLIGATION DE DESINTERESSEMENT DU FONCTIONNAIRE 34

PARAGRAPHE I : LA CONSISTANCE DE L'OBLIGATION : L'INTERDICTION

D'AVOIR DES INTERETS 35

A-Le secteur concerné par l'interdiction 35

1-les entreprises sous le contrôle ou en relation avec le fonctionnaire. 35

2-L'obligation de désintéressement et la position statutaire du fonctionnaire 37

B-Les personnes visées par l'interdiction 40

PARAGRAPHE II : LE BUT ET LES IMPLICATIONS DE L'OBLIGATION DE

DESINTERESSEMENT. 41

A-Le but de l'obligation de désintéressement : préserver l'indépendance du

fonctionnaire. 41

1-L'indépendance dans la prise des décisions 42

2-L'indépendance dans l'exécution des décisions 42

B-Les implications de l'obligation de désintéressement. 43

1-L'interdiction d'obtenir des gains privés 44

2-L'interdiction d'utiliser l'argent public à des fins personnelles 45

CHAPITRE 2 : LES OBLIGATIONS DE SOLIDARITE DANS LA DISCIPLINE DU CORPS

48

SECTION I : L'OBLIGATION DE PORT DE L'UNIFORME 49

PARAGRAPHE I : L'OBLIGATION DE PORT DES COSTUMES DANS LES CORPS DE

LA JUSTICE. 50

A-L' obligation de port des costumes dans le corps de la magistrature. 50

1-Le port du costume exclusivement réservé aux magistrats. 51

2-L'interdiction du port du costume faite aux auditeurs de justice. 52

B-L' obligation de port de costume du corps des greffes. 53

1-Présentation des attributions du corps de greffes. 53

2-L'obligation de port de costume proprement dite. 54

PARAGRAPHE II : L'ASTREINTE DE PORT DE L'UNIFORME DANS LES CORPS DE

FORCES DE L'ORDRE. 55

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Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

A-La période de port de l'uniforme. 55

1-Le port de l'uniforme pendant le service. 55

2-L'obligation de port de l'uniforme pendant les cérémonies officielles. 56

B-LA FIN DE L'ATREINTE DE PORT DE L'UNIFORME DANS LES CORPS DES

FORCES DE L'ORDRE. 57

1-La fin de l'astreinte en dehors de la période de service. 57

2-La fin de l'astreinte du port de l'uniforme par autorisation spéciale et détachement. .. 59 SECTION II : LES INTERDICTIONS D'EXERCICE DE CERTAINS DROITS

POLITIQUES ET COLLECTIFS. 60

PARAGRAPHE I : L'INTERDICTION DES DROITS POLITIQUE ET SYNDICAL 60

A-L' interdiction d'adhésion aux partis politiques 61

1-Explication des concepts de droits politiques. 61

2-L'interdiction d'exercice des droits politiques proprement dite. 62

B-L' interdiction d'adhésion aux associations syndicales. 63

1-Explication des concepts de droit syndical. 63

2-L'interdiction d'adhésion des fonctionnaires des forces de l'ordre aux associations

syndicales. 64

PARAGRAPHE II : L'INTERDICTION DU DROIT DE GREVE 66

A-La consistance de l'interdiction du droit de grève. 66

1-L'interdiction du droit de grève proprement dit. 66

2-L'interdiction des corollaires de la grève. 68

B-Les motifs des interdictions. 68

1-La nécessité de continuité du service public. 69

2-Les motifs d'ordre public. 69

CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE 71

DEUXIEME PARTIE : LES OBLIGATIONS DE RESPONSABILITE DU SERVICE. 71

CHAPITRE I : L'OBLIGATION DE SERVIR. 76

SECTION I : L'OBLIGATION DE SE CONSACRER A SES FONCTIONS. 75

PARAGRAPHE I : L'EXERCICE PERSONNEL ET CONTINU DES FONCTIONS. 75

A-L'exercice personnel de son emploi par le fonctionnaire. 75

1-La règle : l'exercice personnel des fonctions. 76

2-L'exception : la délégation de compétence. 77

Mémoire présenté et soutenu par AMBI PHILIPPE ROMEO Page 132

Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

B-L'exercice continu des fonctions. 78

1-La consistance du principe de continuité. 78

2-Le principe de continuité au Cameroun face aux retards et absentéisme. 79

PARAGRAPHE II : L'EXERCICE EXCLUSIF DES FONCTIONS. 80

A-Le principe d'interdiction des cumuls. 80

1-L'interdiction du cumul d'une fonction publique et d'une activité privée lucrative. 80

2-L'interdiction du cumul des pensions. 82

B-Les dérogations au principe de l'interdiction des cumuls. 83

1-Les dérogations au principe de non-cumul au Cameroun. 83

2-Les dérogations au principe en droit français. 83

SECTION II: L'OBLIGATION D'OBEISSANCE HIERARCHIQUE. 85

PARAGRAPHE I: L'OBLIGATION D'OBEISSANCE HIERARCHIQUE PROPREMENT

DITE. 85

A-La consistance de l'obligation d'obéissance hiérarchique. 86

1-Les responsabilités du subordonné issues l'obéissance hiérarchique. 86

2-Les responsabilités du supérieur hiérarchique issues de l'obligation d'obéissance. 87

B-Les conséquences de la désobéissance aux ordres. 88

1-La retenue sur traitement. 88

2-La sanction disciplinaire. 89

PARAGRAPHE II : LE DEVOIR DE DESOBEISSANCE. 90

A-Les motifs du devoir de désobéissance. 90

1-Le devoir de désobéissance pour ordre manifestement illégal. 90

2-Le droit de retrait d'une situation de travail dangereuse. 91

B-La cause subjective du devoir de désobéissance : la qualité de fonctionnaire comme

circonstance aggravante de la responsabilité. 92

1-Le refus de l'excuse de l'ordre du supérieur. 92

2-La condition : la commission de l'acte pendant le service. 93

CHAPITRE II : LES OBLIGATIONS DE CONFIDENTIALITE. 95

SECTION I : L'OBLIGATION DE RESERVE. 96

PARAGRAPHE I : LA CONSISTANCE DE L'OBLIGATION DE RESERVE. 96

A-L'interdiction d'exprimer publiquement ses opinions. 97

1-L'imprécision de la restriction textuelle de l'expression des opinions. 97

Mémoire présenté et soutenu par AMBI PHILIPPE ROMEO Page 133

Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

2-La précision jurisprudentielle de la restriction des opinions. 98

B-L'interdiction de servir en fonction de ses opinions. 99

1-L'interdiction de la discrimination des usagers prenant en compte l'opinion. 100

2- L'interdiction de la discrimination des fonctionnaires en raison de leurs opinions. .. 100 PARAGRAPHE II : LA NATURE ET LES MODALITES DE MISE EN OEUVRE DE

L'OBLIGATION DE RESERVE. 101

A-La nature de l'obligation de réserve : une limite à la liberté de pensée. 101

1-L'obligation de réserve comme limite à la liberté d'expression 101

2-Une obligation d'origine jurisprudentielle. 102

B-Les modalités de mise en oeuvre de l'obligation de réserve. 103

1-La mise en oeuvre dans sa stricte et étendue de l'obligation de réserve. 103

2-La mise en oeuvre atténuée en France. 104

SECTION II : LES OBLIGATIONS DE DISCRETION PROFESSIONNELLE ET DE

SECRET PROFESSIONNEL. 105

PARAGRAPHE I : L'OBLIGATION DE DISCRETION PROFESSIONNELLE. 105

A-La consistance de l'obligation de discrétion professionnelle. 106

1-La recommandation de faire preuve de discrétion. 107

2-L'interdiction de détourner les documents. 107

B-Portée de l'obligation de discrétion professionnelle. 108

1-L'étendue large de l'obligation de discrétion professionnelle. 108

2-Les limites à l'obligation de discrétion professionnelle. 109

PARAGRAPHE II : L'OBLIGATION DE SECRET PROFESSIONNEL. 110

A-L'obligation de secret professionnel, une obligation absente dans le statut général. . 111 1-La consécration de l'obligation de secret professionnel dans les statuts particuliers. . 111

2-La consécration pénale de l'obligation de secret professionnel. 112

B-La portée de l'obligation de secret professionnel. 113

1-Les domaines du secret absolu. 113

2-Les dérogations à l'obligation de secret professionnel. 114

CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE. 116

CONCLUSION GENERALE. 118

ANNNEXES 122

BIBLIOGRAPHIE 123

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TABLE DES MATIERES 129






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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote